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Robert est le dernier survivant du massacre d’Oradour-sur-Glane, commune française attaquée lors de la Seconde Guerre mondiale. Pour Brut, il raconte.

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Transcription
00:00 Mon père, Marie-Andy, il a pris sa bicyclette, il est venu au village,
00:05 il s'est approché de l'église et il a vu le drame dans l'église.
00:09 Et quand il est revenu, il m'a dit "tu ne reverras pas ta mère et tes soeurs
00:16 parce qu'ils les ont brûlés dans l'église".
00:19 Ça a été pour moi un choc violent.
00:23 Je m'appelle Robert Hébras, je suis une des victimes du massacre de Radov-sur-Glane le 10 juin 1944.
00:34 Aujourd'hui j'ai 97 ans et je suis le dernier témoin du drame.
00:40 Le matin c'était calme, les mamans avaient fait leur course, il n'y avait rien de particulier.
00:50 Si ce n'est qu'à 14h, j'ai vu passer la trompe,
00:54 les soldats qui ont donné l'ordre à la population de se rassembler sur la place publique.
01:01 Et là on est restés à peu près trois quarts d'heure.
01:06 Et puis il y a eu des soldats qui sont passés au milieu du groupe,
01:11 qui ont fait mettre les femmes et les enfants à droite
01:15 et les hommes, nous, on nous a fait mettre sur le santoir de gauche.
01:20 On nous a donné l'ordre de nous mettre face au mur.
01:23 J'avais 19 ans.
01:24 Il y a eu une détonation dans le village et c'est l'ordre d'exécution des hommes.
01:30 Ce n'est que par la suite que j'ai réalisé vraiment qu'on nous exécutait.
01:37 Parce qu'après la fusillade ça a été le coup de grâce,
01:40 tous ceux qui voyaient avec une bonne vie étaient achevés.
01:45 Et là j'étais tout à fait sous les autres, j'aurais pu être tué.
01:51 - Comment dites-vous que vous êtes sous les autres ?
01:54 - Sous les cadavres et sous les blessés.
02:00 Et là ils ont mis le feu et puis quand le feu m'a atteint,
02:04 je n'avais pas le choix.
02:07 Je savais que j'allais mourir parce que je savais qu'ils étaient,
02:12 enfin pour moi ils étaient encore devant la porte.
02:15 Et là je me suis sorti de sous les autres parce que je préférais mourir d'une balle
02:23 que de mourir au Bolivif.
02:27 - Et finalement vous êtes sortis et ils étaient partis ?
02:30 - Oui, quand je suis sorti, ils étaient partis.
02:33 Et à ce moment-là je me trouve seul.
02:35 Mon père était absent du village ce jour-là.
02:38 Donc j'ai retrouvé mon père le lendemain.
02:41 J'ai perdu ma maman, mes deux sœurs, une de 22 ans, l'autre de 9 ans.
02:47 - Vous voulez oublier ?
02:49 - Non, je ne peux pas oublier.
02:52 Je ne peux pas oublier mais si je suis seul, je revis un petit peu ce drame.
02:59 Pas toujours mais enfin ça m'arrive.
03:01 Je me suis toujours posé la question pourquoi je suis là.
03:04 Mon camarade proche qui était à mes côtés est mort.
03:10 Et pourquoi pas moi ?
03:11 Je me la pose toujours.
03:13 Pourquoi moi ?
03:15 - Aujourd'hui, Robert Hébras transmet ses souvenirs à sa petite-fille Agathe
03:19 avec qui il témoigne dans un livre, le dernier témoin d'Auradour-sur-Glane.
03:23 - L'idée était déjà là et présente depuis longtemps.
03:27 J'ai grandi à Auradour, donc vraiment enfant, à moins de 3 ans.
03:32 Je voyais les ruines quotidiennement et donc j'ai posé des questions très très tôt.
03:38 Je me demandais ce qu'étaient ces maisons cassées et j'avais besoin de comprendre.
03:43 Et donc on m'a rapidement dit que c'était le village de Papy
03:47 sans me dévoiler toute l'histoire parce que j'étais trop petite.
03:51 Et puis ensuite à chaque âge, son apprentissage.
03:53 Et quand j'ai pu en entendre plus, on m'en a raconté plus.
03:57 - Ça me fait plaisir, ça.
03:59 Mais c'est venu petit à petit.
04:00 Ce n'est pas venu, ce n'est pas sur un coup de tête que ça s'est fait.
04:04 Il y a quelques années, j'ai...
04:06 À partir de là, j'ai décrété que ça serait elle qui serait...
04:11 qui me représenterait lorsque je ne serais plus là.
04:15 [Musique]
04:18 [SILENCE]

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