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00:00 Il a pu, j'allais dire, retravailler ses bases.
00:03 Alors la peur, je reviens à ça dessus, parce que pour lui c'était quand même courageux de dire qu'il avait peur.
00:08 D'ailleurs certains grands champions, David Douillet en premier, ont dit "tiens, il devrait pas dire ça, ses adversaires vont prendre le pouvoir".
00:15 Mentalement c'est quand même une marque de faiblesse de dire qu'on a peur.
00:18 Et lui il assume, parce qu'il dit "voilà, quand on a une blessure comme il a eu au niveau de la cheville, très très longue à soigner".
00:24 Il s'est posé plein de questions, parce que quand on est un colosse comme lui, un Godzilla, les chevilles c'est quand même la base.
00:30 C'est-à-dire que si tu peux pas t'appuyer sur tes chevilles au judo, t'es quand même très handicapé.
00:33 Donc il a retrouvé les sensations, moi j'ai trouvé qu'il était plutôt très alerte sur ses appuis,
00:39 mais on voit, il a encore du mal à enclencher ses attaques et il nous raconte tout ça évidemment.
00:42 - On va prolonger effectivement l'analyse avec Teddy Riner lui-même, à votre micro.
00:47 Céline Géraud, c'était hier, il revient sur cette journée, sur son état de forme.
00:51 Et notamment, vous allez le voir au tout début sur peut-être un chiffre, 7.
00:55 - Alors Teddy, ça y est, 7 victoires, tu l'attendais.
01:03 - Mais tu dis 7 le numéro ou 7 les victoires ?
01:05 - 7, 7, 7 et 7.
01:07 - D'accord.
01:08 Oui et non, quand on est dans la préparation pour les Jeux, on pense pas trop le chiffre, combien de fois je l'ai gagné.
01:16 C'est la conférence de presse une semaine avant le tournoi qui m'ont fait remarquer qu'il y avait possibilité de...
01:23 Moi quand je vais sur ce tournoi, surtout après ma blessure, ma tête elle était pas au record.
01:29 Elle était, comment je vais me situer par rapport à la concurrence ?
01:32 Est-ce que je vais continuer à remonter crescendo en termes de sensations ?
01:37 Là aujourd'hui je suis super content.
01:39 J'ai réussi avec le peu que j'avais à monter sur cette marche à la plus haute du podium.
01:45 Mais je sais qu'il y a encore beaucoup de travail au vu des Jeux, j'en suis conscient.
01:49 Mais voilà, je suis content parce que la blessure est derrière moi, on va continuer à progresser et à travailler.
01:54 - 4 combats, montée en puissance travaillée avec des adversaires qui sont montés en puissance aussi.
01:59 Un japonais plutôt costaud en finale, un kazakh.
02:02 Pour toi c'était la journée idéale finalement parce qu'en face aussi il y a des adversaires qui sont tombés d'eux-mêmes.
02:07 Finalement tout s'est bien goupillé, il y avait un alignement des planètes.
02:09 - C'est ça, je ne dirais jamais non quand ça se passe de mon côté de la sorte.
02:15 Et puis c'est bien parce que j'ai eu des adversaires qui sont très costauds,
02:20 qui gagnent beaucoup de compétitions sur les circuits.
02:23 Donc voilà, c'était bien de les prendre en prise d'informations au vu des prochaines compétitions, c'est bien.
02:27 - Justement les prochaines compétitions, il y a Doha bien sûr, c'est la prochaine échéance.
02:31 Et tu as fait des choix, assumé, d'aller t'entraîner à l'étranger, d'aller chercher des nouvelles énergies,
02:36 de nouvelles inspirations, de nouveaux partenaires ?
02:38 - C'est un peu compliqué quand je vois l'Olympiade que j'ai passée à Tokyo, malgré le Covid.
02:42 Je dis bien malgré le Covid, j'avais très peu de partenaires sur le tapis à l'INSEP.
02:46 Donc du coup, réflexion faite, on a dit non, on va partir à l'étranger,
02:50 on va aller chercher la concurrence là où elle est.
02:53 Et ça se passe super bien quand je vois que dans certains pays,
02:55 on met 20 adversaires, 20 lourds de toute taille, costauds, prêts à bastonner.
03:02 Que demander de plus ? C'est ce que je recherche, c'est ce que j'ai besoin pour pouvoir progresser,
03:06 pour pouvoir prétendre à une médaille d'or au jeu.
03:09 - Ton entraîneur dit que t'es à 60% de tes capacités.
03:11 Il a raison ou tu penses que t'en as encore plus sous le pied, sous la chaussette ?
03:14 - Non, c'est ça. Non, il voit juste.
03:16 Moi j'aurais dit 70% parce que bon, on sait jamais trop, mais bon c'est la même jauge.
03:21 Ouais, on revient de loin.
03:23 Quand je dis on revient de loin, on revient de loin.
03:24 Il y a eu des prises de tête.
03:26 - T'as hésité à un moment donné à remonter sur le tapis comme certains,
03:29 en se disant est-ce que le jeu en vaut vraiment la chandelle ?
03:30 Est-ce que j'ai les moyens physiques d'y aller, ou tu savais qu'au fond de toi il y avait la flamme ?
03:34 - Clairement quand j'ai commencé à reprendre, quand on m'a donné le feu vert pour reprendre,
03:40 clairement je me suis dit mais qu'est-ce que je fais là ?
03:42 Quand je vois que tu veux, mais ton corps ne peut pas,
03:45 parce qu'il y a cette jambe qui gêne, reprise des sensations.
03:49 Mes sensations ont mis énormément de temps à revenir,
03:52 et aujourd'hui j'ai pas encore repris mon meilleur judo.
03:54 - T'as eu peur de jamais les retrouver ces sensations ?
03:56 - Bien sûr, prise de tête.
03:57 - Qu'est-ce qui se passe à ce moment-là dans ta tête ?
03:58 - Là, travail psychologique avec ma psy,
04:01 discussion avec Franck et tout le staff pour savoir qu'est-ce qui manque.
04:05 Alors à chaque fois Franck a les bons mots, il me dit non non, c'est bien,
04:08 cet entraînement c'est très bien, laisse-toi le temps,
04:11 ça fait à peine une semaine, dix jours, quinze jours, laisse-toi le temps,
04:14 t'as été en dehors de ta famille pendant plus de trois mois,
04:18 donc forcément oui, mais moi, le monsieur que je suis, le bonhomme que je suis,
04:21 qui veut aller plus vite que la lumière,
04:23 et retrouver son judo le plus rapidement possible pour préparer les Jeux,
04:25 forcément que ça travaille là-haut.
04:27 Aujourd'hui, ces derniers temps, je suis content,
04:30 parce que j'arrive à faire tomber, m'exprimer comme je le souhaite,
04:32 retrouver les sensations, et je vois aujourd'hui que ça marche.
04:36 - T'es vite sur les appuis, mais ça manque encore de judo, d'attaque, un peu plus vite qu'avant ?
04:41 - Ça manque, ça manque encore, sur tous les points, parce que je suis exigeant.
04:45 Je suis content, ça gagne, mais c'est pas assez, on va continuer.
04:49 - Et tu gères, quand tu... En finale, finalement t'as pas attaqué énormément,
04:53 t'as vu que t'avais pas besoin en fait, c'est ça,
04:55 c'est une autre façon de voir le judo, pour toi ?
04:57 - C'est pas... Parfois y'a des combats qu'il faut arrêter de faire du spectacle.
05:02 Le japonais, lui, à chaque fois que je posais les mains,
05:05 il met les deux jambes en arrière, son bras gauche pour me bloquer,
05:09 à quoi ça sert de s'épuiser ? Tu veux pas faire combat ? Tu veux pas t'ouvrir ?
05:12 Eh ben alors on va travailler les chinos, point.
05:14 Ça me fait travailler aussi, et quand y'aura des combats difficiles au jeu,
05:17 il faut savoir gagner aussi par chino.
05:18 - La dernière question, c'est... Voilà, on est un an et demi des Jeux,
05:21 dans ta tête, tu le vois quoi, comme un petit point à l'horizon, comme quelque chose ?
05:24 - Non, non, non. Un an et demi, on sait que ça passe très vite.
05:27 On le voit qu'il se rapproche très rapidement.
05:29 On n'est plus qu'à un été, cet été, puis l'autre, et ça y est, c'est les Jeux.
05:33 Donc ça va arriver très vite.
05:36 - Et Teddy est dans le game ?
05:37 - Bien sûr. On est là, le vieux est là.
05:40 - Merci beaucoup Teddy.
05:41 - C'est vrai, je me posais la question en écoutant Teddy Riner, Céline Giraud...
05:46 - Le vieux est là !
05:47 - Oui, le vieux est là, mais les Jeux Olympiques 2024, c'est dans combien de dodo ?
05:51 - Ah, ça fait beaucoup de dodo, je les ai pas comptés, bonne question.
05:53 - Je pense qu'il a compté Teddy Riner.
05:55 - Oui, il a mis les croix là, comme les...
05:56 - Très intéressant l'entretien, parce qu'on apprend, peut-être pour les non-initiés,
06:00 que ce colosse, ce très grand champion, travaille depuis longtemps avec une psychologue.
06:05 - Absolument. Depuis qu'il est tout jeune, je dirais, entre 18 et 20 ans,
06:08 quand il a commencé à performer,
06:10 c'est pas que le costard était trop grand pour lui,
06:12 mais il lui est arrivé plein de choses, et il s'est dit "il faut que je me fasse aider".
06:16 Il a trouvé une psy, pas très loin de chez lui, avec qui il a collaboré,
06:19 et ils ont commencé à former un tandem qui, aujourd'hui, tient toujours,
06:22 ce qui est quand même assez rare.
06:23 D'ailleurs, Teddy a cette capacité à être très fidèle aussi,
06:26 en amitié et aussi avec les gens avec qui il travaille,
06:28 ce qui fait qu'il s'est entouré de personnes, depuis le début, ce sont les mêmes.
06:32 Et elle, elle a fait tout un travail de préparation, de la sophrologie,
06:35 ça c'est pas une surprise de visualiser les combats, d'arriver à descendre,
06:40 de se dire "une fois qu'il est champion olympique, qu'est-ce que je peux faire de plus ?"
06:42 d'arriver à passer des étapes,
06:44 et elle l'accompagne, elle l'aide, et c'est vraiment un de ses piliers,
06:47 dans son cercle, dans sa garde rapprochée, qu'il aide à progresser.
06:50 Et ça c'est vrai que c'est une force, et il continue à l'avoir aujourd'hui,
06:53 alors qu'il pourrait se dire "voilà, je suis double champion olympique,
06:55 dix fois champion du monde, tout va bien quoi !"
06:57 - Il en a peut-être plus besoin que par le passé,
06:59 car il sent que c'est la fin de carrière, qu'il y a l'enjeu de Paris 2024,
07:04 et qu'il y a une forme de fragilité aussi.