Dans Historiquement Vôtre, Clémentine Portier-Kaltenbach revient sur le destin tragique d’Alexis Petrovitch Romanov (1690-1718), fils aîné du tsar Pierre 1er (1672-1725). Symbole du retour à la tradition, le tsarévitch s’illustre par son opposition marquée aux réformes entreprises par son père. En 1718, après avoir fuit la Russie, il revient à Moscou et se fait immédiatement arrêter. Affreusement torturé, Alexis meurt dans la pénombre d'un cachot. Le grand tsar aurait-il tué son fils ?
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00:00 Dans l'intimité de l'histoire
00:02 Aujourd'hui Clémentine plus qu'une chronique, une enquête de fond puisque vous allez nous révéler
00:06 si Pierre Le Grand, le grand tsar de Russie, fondateur de Saint-Pétersbourg, a tué son propre fils.
00:12 Je peux vous dire que ça va faire grand bruit vos révélations.
00:15 - Ah ah ah ah ah !
00:17 - Mais ne riez pas !
00:18 - Oh vous moquez pas de moi là, non non, j'ai aucune révélation, je le crains.
00:22 Mais enfin quand même, réfléchissez à ça, le fait d'avoir un aussi grand roi comme Pierre Le Grand,
00:29 le grand tsar de Russie, c'est quand même l'un des plus admirables et des plus nobles personnages de l'histoire de la Russie.
00:37 C'était un immense roi, à tous les sens du terme d'ailleurs, puisqu'il mesurait 2 mètres 40.
00:42 Vous avez vu ses bottes là, au musée de l'histoire de Moscou ?
00:46 On voit ses bottes, on dirait les bottes de cette lieu.
00:48 C'était un homme extrêmement curieux qui manifesta une insatiable curiosité pour le monde.
00:54 Souvenez-vous qu'il voyagea 18 mois dans l'Europe entière, en Prusse, aux Pays-Bas, en Angleterre, en Italie, en France naturellement.
01:02 Il a travaillé sous un nom d'emprunt comme simple ouvrier sur des chantiers navals, vous en connaissez beaucoup des rois comme ça ?
01:09 Il a consacré son règne à réformer son pays pour le moderniser, et surtout, vous le disiez Stéphane bien sûr, il fit construire la sublime Saint-Pétersbourg.
01:17 Alors qui contesterait que Pierre le Grand fut un esprit ouvert et raffiné ?
01:23 Lui qui, lors de son passage à Paris en 1717, demanda en priorité à visiter la bibliothèque mazarine, notre académie française et la Sorbonne.
01:35 Ah voilà un homme polissé !
01:37 Et bien précisément, Pierre le Grand fut ainsi grand roi que la postérité s'est empressée de jeter un voile pudique sur les tragiques démêlés qui l'opposèrent à son fils aîné.
01:49 Bon, pourtant, Alexi Petrovitch, né en 1690 de son premier mariage avec Oedixie, mérite une brève mention.
01:59 Car il fut, je le disais en présentant cette chronique tout à l'heure, le seul prince européen révolté contre son père à réussir sa fugue.
02:08 C'est pas rien !
02:09 Bon, il avait quand même des goûts communs avec son père, notamment le goût des beuveries et des amours ancillaires.
02:17 Il aimait bien coucher avec des petites servantes, c'était non seulement un fêtard mais un paresseux, sans ambition, n'aimant ni l'étude, ni la marine, ni la guerre.
02:26 Bref, son père, qui attendait beaucoup de lui parce que c'était son aîné, était constamment déçu.
02:32 Et en plus, son fils était soutenu par les popes, les prêtres donc, et les boyards.
02:36 Et il va devenir bien vite l'influençable Alexi, le symbole du retour à la tradition et le champion de l'opposition aux réformes que son père imposait à son pays, il faut bien le dire, avec une certaine brutalité.
02:49 Vous vous rappelez quand même qu'il avait imposé l'habit à l'européenne ?
02:53 L'habit à l'européenne, l'interdiction de la barbe, c'était quand même un petit peu violent.
02:58 Donc c'est vrai qu'Alexi, il a été en gros récupéré, instrumentalisé par les opposants à son père.
03:04 Bon, alors Alexi lui, qui tient plutôt du bon à rien, il s'enflamme contre son papa, il s'engage auprès de ses partisans à supprimer toutes les réformes de son père lorsqu'il lui succèdera.
03:16 Son père le rappelle à l'ordre quand même.
03:18 "Tu ne veux rien faire, ni rien apprendre. Une fois au pouvoir, tu seras obligé de te faire donner la béquille comme un petit oiseau.
03:25 Tu t'amenderas et tu feras en sorte d'être utile à l'État, sinon tu seras déshérité."
03:29 Et finalement, en 1716, Pierre donne le choix à son fils entre régner ou se faire moine.
03:36 Alors Alexi choisit la deuxième solution, mais moine, un bambochard dans son genre, c'est pas possible.
03:45 Et son père aurait dû se méfier à ce moment-là, parce qu'Alexi va fuir la Russie.
03:50 Il gagne Vienne en Autriche, puis le Tyrol et Naples.
03:54 Et il pense avoir réussi son coup.
03:56 Mais les limiers de Pierre sont sur ses traces et l'enjoignent de regagner sa terre natale, où son père, lui assure-t-on, est tout disposé à le pardonner.
04:04 Alexi cède et il revient presque confiant à Moscou en janvier 1718.
04:10 Le prince Gagarine écrit alors à un ami "ce fou revient ici pour se faire enterrer".
04:16 Parole prophétique, car aussitôt rentré à Moscou, Alexi est arrêté, affreusement torturé.
04:21 On a même dit que son père donna le premier coup de knout, donc comprenez de fouet,
04:26 et qu'il assista jusqu'au bout aux supplices de son fils, qui avoua tout et n'importe quoi,
04:31 dénonçant au passage une cinquantaine de personnes, dont sa propre mère.
04:35 La cour condamne à mort le fils du tsar, mais le 26 juin 1718, il est opportunément retrouvé mort dans son cachot,
04:43 avant que la sentence ne soit exécutée.
04:45 Les rumeurs bien sûr iront bon train.
04:47 A-t-il été décapité, empoisonné, étouffé ?
04:51 Est-il mort sous les coups de son propre père ?
04:55 Il aurait reçu une quarantaine de coups de fouet et son père, impassible, aurait dit au bourreau "continue".
05:02 Quoi qu'il en soit, la mort...
05:04 - Il est mort de quoi ?
05:05 - Il est mort sous les coups, il est mort sous les coups.
05:09 En tout cas, sa mort a procuré à Pierre Ier un grand sentiment de soulagement.
05:14 Le fait est qu'il ne voyait pas en ce malheureux fils...
05:16 Bon, il ne voyait pas vraiment un adversaire politique, il n'avait pas la taille,
05:21 mais il avait bien compris que si ce fils survivait,
05:23 c'en était fini de tout ce que lui avait consacré sa vie à imposer en Russie.
05:27 Fin 1718, quelques mois après la mort d'Alexis, il fait graver une médaille,
05:32 où la couronne impériale émerge d'un nuage, est illuminée par les rayons du soleil,
05:38 et cette médaille porte une inscription qui en dit assez long sur son état d'esprit du moment.
05:43 "L'horizon s'est éclairci."
05:45 Merci papa.
05:47 - Eh ben dis donc.
05:49 - Bah oui, mais vous, vous avez été un fils aimé, qu'est-ce que vous voulez, vous pouvez pas comprendre,
05:53 toute cette violence familiale !
05:55 - Parce que vous, vous l'avez vécu, Clémentine ?
05:57 - Non, on en a déjà parlé avec Stéphane, moi j'ai reçu quelques, c'était des coups de ceinture chez lui,
06:03 on avait un martinet qui servait pas à grand chose,
06:06 mais la pédoplégie était autorisée quand on était petit.
06:08 - Ce que je ne comprends pas, c'est comment le tsar Pierre le Grand
06:11 se plaint que son fils ne l'aime pas, s'il ne lui a pas donné d'amour ?
06:15 Forcément on est toujours déçu par des enfants si on ne les élève pas.
06:19 - C'est vrai, et il aurait dû aller voir un bon médiateur familial.
06:23 - En fait, son zolto est passé par là.
06:25 - Merci Clémentine, là vous avez été excellente,
06:27 maintenant on va voir les résultats.
06:29 Je ne contrôle plus rien, je passe la main à Jean-Luc Lemoyne pour le quiz Burn to be Alive.