• l’année dernière
Laura s’est vu prescrire un traitement de PMA (Procréation Médicalement Assistée) par sa gynécologue, sans son consentement. Un abus qui l’a mené à l’hôpital. Elle revient pour nous sur cette épreuve.
Transcription
00:00 Le médecin me fait l'échographie et me dit "Mais madame, vous avez un traitement de PMA".
00:05 Je ne comprends rien de ce qui se passe.
00:07 A aucun moment on m'a indiqué que je rentrais dans un cas de procréation médicalement assistée.
00:13 Tout a commencé en 2016.
00:16 À l'époque j'étais avec le père de mes enfants, ça faisait un moment qu'on était ensemble.
00:20 On souhaitait avoir des enfants.
00:21 Moi ça faisait très longtemps que je prenais la pilule, plus de 10 ans.
00:24 On sait qu'après avoir pris la pilule, on peut avoir un petit peu de mal à avoir des enfants.
00:30 Et j'ai décidé après quelques mois d'arrêt de pilule, d'aller voir une gynécologue,
00:37 on m'avait conseillé pour lui parler de ce désir de grossesse.
00:41 Elle m'a pris en consultation et sans aucun bilan sanguin,
00:45 et sans même la présence de mon ex-compagnon, m'a directement donné un traitement.
00:50 Donc j'ai commencé ce traitement.
00:51 Un mois, ça n'a pas fonctionné.
00:53 Deux mois, ça n'a pas fonctionné.
00:55 Trois mois, ça n'a pas fonctionné.
00:56 Et elle m'a augmenté la dose.
00:58 C'était des consultations très très rapides à chaque fois, même pas cinq minutes.
01:01 De base, la seule chose qu'elle m'a dit à ce moment-là, c'était
01:04 "On va stimuler vos ovaires qui sont fatiguées."
01:06 J'avais uniquement ça en information.
01:08 Donc moi je ne me pose pas de questions puisque je lui fais confiance.
01:11 Je vais dans un centre d'imagerie pour faire une échographie
01:14 et le monsieur me demande pour quand est l'insémination.
01:17 Donc je suis un petit peu étonnée, je ne comprends pas trop.
01:20 Il me dit "Ça serait bien que vous appelez votre gynécologue
01:21 parce que je pense qu'il y a un petit souci."
01:24 Je me suis retrouvée, au lieu d'avoir 2-3 follicules par ovaire,
01:27 je me suis retrouvée avec 40 follicules par ovaire.
01:29 J'avais des ovaires qui étaient énormes.
01:31 Je commence à voir mon ventre qui gonflait avec des douleurs
01:34 dont j'appelle ma gynécologue en urgence, en catastrophe.
01:38 Surtout, n'allez pas à l'hôpital sinon ils vont vous retirer vos ovaires.
01:42 Prenez du Doliprane et ne vous inquiétez pas, ça va passer.
01:45 Mon ventre gonflait de plus en plus
01:46 et j'avais des douleurs qui étaient de plus en plus fortes
01:48 puisque j'en suis même tombée dans les pommes.
01:50 On part en catastrophe à l'hôpital et là, pareil, on me fait l'échographie
01:54 et on me dit "Pour quand est prévue l'insémination ?"
01:57 Et je lui dis "Il n'y a pas d'insémination."
01:58 Il me dit "Mais madame, vous avez un traitement de PMA."
02:03 Et je lui dis "Mais qu'est-ce que c'est PMA ?"
02:05 Il me dit "C'est procréation médicalement assistée."
02:08 "Vous avez un traitement de PMA, madame."
02:11 Donc je ne comprends rien de ce qui se passe.
02:14 Ce n'est pas du tout moi ce qui m'a été dit.
02:16 À aucun moment, on ne m'a indiqué que je rentrais
02:19 dans un cas de procréation médicalement assistée.
02:21 Ce qui est une toute autre démarche.
02:24 On se rend compte que j'ai un épanchement qui part du foie jusqu'au rein.
02:28 Donc en gros, l'épanchement, c'est une espèce de liquide assez épais
02:32 qui commence à se former dans mon corps.
02:34 Et donc, on me dit qu'on va me garder en hospitalisation.
02:37 Donc je suis restée un mois à l'hôpital avec un état physique qui s'est dégradé.
02:42 C'est-à-dire que plus les jours avançaient, plus mon ventre gonflait
02:46 parce que plus ce liquide se répandait dans mon corps
02:50 avec des très grosses douleurs où je ne pouvais même plus me redresser
02:53 tellement j'avais mal au ventre.
02:54 J'avais des prises de sang tous les jours.
02:56 Et en fait, ce qui se passait, c'est que le traitement continuait à faire effet,
02:58 même s'ils l'avaient arrêté.
03:00 Et en fait, ça commençait à rendre tous mes vaisseaux qui étaient poreux.
03:03 Donc tout le liquide passait au travers.
03:05 Au trois quarts de mon hospitalisation,
03:07 je commençais à avoir des grosses difficultés respiratoires.
03:09 Et on se rend compte que ce liquide commence à remonter dans mes poumons.
03:12 Ils m'ont transféré en réanimation pendant trois jours.
03:15 Si j'avais vraiment attendu d'aller à l'hôpital
03:19 ou si je n'y avais pas été comme la gynécologue me l'avait demandé,
03:22 très clairement, oui, j'aurais pu y passer.
03:24 Ça aurait pu très, très mal se finir.
03:26 Niveau psychologique, ça a été hyper difficile
03:29 parce qu'il faut savoir que du coup, ça a créé beaucoup de tensions
03:33 avec le père de mes enfants,
03:36 qui était allé se renseigner justement sur ce terme PMA.
03:39 Ça disait par exemple qu'il devait être présent pour cette démarche.
03:42 Et il a pensé que j'avais fait quelque chose dans son dos.
03:45 Pendant toute mon hospitalisation,
03:47 alors oui, il est venu me voir presque tous les jours,
03:50 mais c'était aucun soutien moral.
03:54 Pas de bisous, pas d'affection.
03:58 Enfin, c'était...
03:59 Voilà, je suis là pour être là, mais...
04:02 il n'y a pas de plus.
04:03 Donc ça a été hyper difficile.
04:05 Il m'a dit, ben voilà, je ne veux plus d'enfants avec toi.
04:09 C'est compliqué d'entendre ça quand ça fait un mois qu'on est à l'hôpital,
04:12 vu qu'on est en réa, on a quand même failli y passer.
04:15 Sur mon dernier jour de réa, comme j'allais mieux, on m'a sortie.
04:18 On m'a fait une échographie.
04:20 Et la sage-femme a commencé à faire l'échographie
04:23 et j'ai vu qu'elle avait une tête un petit peu étrange.
04:28 Donc je lui demande ce qui se passe.
04:30 Et là, elle me regarde et elle me dit,
04:32 "Vous avez quatre poches."
04:33 Donc je ne comprends pas ce que ça veut dire.
04:36 Je lui demande, mais quatre poches, ça veut dire quoi quatre poches ?
04:39 Elle me dit, "Vous avez quatre futurs embryons, quatre futurs bébés."
04:43 C'était un choc d'apprendre que j'étais enceinte
04:45 après tout ce que j'avais passé pendant tout ce mois d'hospitalisation.
04:50 Et j'avais toujours en tête cette phrase de mon ex-compagnon
04:54 qui me disait, "Je ne veux plus d'enfants avec toi."
04:57 Pour lui annoncer que je suis enceinte, je décide de lui écrire une lettre.
05:00 Et quand il rentre le soir, je lui donne, il la lit.
05:03 Il ne réagit pas très bien puisqu'il me dit qu'il ne veut plus d'enfants avec moi,
05:07 que potentiellement ce que j'ai subi, ça pourrait avoir un impact sur les futurs enfants.
05:13 Je lui demande s'il souhaite que j'avorte.
05:15 Et il me dit, "Je ne veux plus d'enfants avec toi,
05:17 mais par contre, ce n'est pas moi qui te demande d'avorter."
05:21 Donc je me retrouve un petit peu coincée face à mes six responsabilités.
05:27 Et on se sépare, du coup.
05:29 Donc je me retrouve toute seule.
05:30 Je retourne chez mes parents.
05:32 Et entre-temps, il faut savoir que j'ai perdu un des bébés
05:36 et qu'il y a un fœtus qui ne s'est pas développé.
05:40 Donc il m'en restait deux.
05:41 Au final, on se remet ensemble.
05:43 La naissance de mes enfants se passe super bien.
05:46 L'accouchement se passe bien après un petit peu plus difficile
05:48 puisqu'ils sont nés à sept mois.
05:49 À la suite de ça, j'ai saisi la justice et j'ai attaqué cette gynécologue.
05:53 Ça a duré plus d'un an et demi.
05:55 Mais au final, j'ai eu gain de cause.
05:56 J'ai pu prouver que je n'étais pas informée, que je rentrais dans le cadre d'une PMA,
06:01 que je n'avais eu aucune information.
06:03 Elle, de son côté, elle n'avait fait aucun suivi sur les rendez-vous qu'on avait pu avoir,
06:08 sur les traitements qu'elle avait pu me donner.
06:11 C'est-à-dire que moi, j'avais des ordonnances,
06:13 mais elle, elle ne les avait pas en double.
06:14 Donc ça montrait bien qu'elle n'était pas du tout professionnelle,
06:18 qu'elle m'avait donné des ordonnances à la volée
06:21 sans même garder un double dans son dossier médical.
06:24 C'est hyper grave.
06:25 Dans un premier temps, on se dit que d'attaquer un médecin, ce n'est pas évident
06:30 parce que souvent, on les voit toujours au-dessus de tout le monde.
06:33 C'était tellement injuste que c'était normal de porter plainte contre cette gynécologue.
06:39 Après, je trouve ça pas normal qu'elle exerce toujours,
06:42 d'autant plus que je sais que je ne suis pas la seule à qui c'est arrivé.
06:45 Et c'est vrai que c'est un peu incompréhensible, mais on ne peut rien faire.
06:50 Forcément, je vérifie deux à trois fois quand j'ai un diagnostic.
06:54 Je fais plus confiance comme je faisais confiance avant au médecin.
06:58 Je suis beaucoup plus vigilante.
06:59 Si j'ai un conseil à donner à des personnes qui se retrouvent dans un abus médical,
07:04 ce serait dans un premier temps de ne pas avoir peur d'aller voir un autre médecin
07:08 pour avoir un autre avis, de ne pas avoir peur d'en parler.
07:10 Et surtout que s'ils ont vraiment été victimes d'abus médicals,
07:16 d'engager une procédure pour que la personne qui a abusé d'eux soit punie.
07:22 [SILENCE]

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