Tunisie
Pour l'amour de l'école
Par
Flore Olive
photos
pierre
Terdjman
A travers Le prix nobel de la paix, l’engagement de la société civile depuis le printemps arabe est salué
Ces enfants des montagnes peuvent enfin étudier. Grâce au travail d’une des associations qui se sont créées en 2011. Leur mission : lutter pour la démocratie et contre l’islamisme par l’éducation, et tout particulièrement celle des filles. Mais la route est encore longue…
Perchée sur la plus grosse pierre, juste au bord de
l’à-pic, Amal, 11 ans, nous montre la pente abrupte qu’elle avait l’habitude de dévaler pour arriver plus vite jusqu’à la route, se raccrochant aux branches des buissons de plantes sèches pour freiner sa descente. Sur la droite, on distingue le chemin de terre qui permet d’accéder aux maisons isolées d’Ouled Salah, sur les hauts plateaux de la région de Jouf Seydin, dans le Nord-Ouest tunisien, où les parents d’Amal survivent grâce à l’élevage de quelques chèvres, moutons et brebis, associé à la culture d’un peu de blé. La famille occupe une demeure spartiate, dont les pièces de plain-pied sont organisées autour d’un patio. Amal, ses deux petits frères, Saïf, 9 ans, Youssouf, 6 ans, Emna, la petite dernière de 9 mois et ses parents dorment dans la même pièce. Les adultes sur le lit double et les enfants par terre, sur des matelas qu’on empile contre le mur dans la journée. Dans un angle, près de la porte, un espace occupé par une table de bois recouverte de papiers et de livres est réservé aux devoirs. Myriam, 40 ans, la mère d’Amal n’est jamais allée à l’école. Seuls ses frères l’ont fréquentée, « juste histoire d’apprendre à lire et à écrire », dit-elle. Myriam l’a toujours regretté. Alors, elle y a inscrit Amal, dès l’âge de 5 ans. Pour la petite fille, c’est à la fois une chance et un sacerdoce : l’établissement le plus proche, l’école de Jouf Seydin, se trouve dans le lieu-dit du même nom, Seydin, à presque 7 kilomètres. Alors, pour être en cours à 8 heures du matin, dès la maternelle Amal quittait la maison à 5 h 30.
Il faut imaginer son réveil, alors que le jour n’est pas encore levé et que le vent froid souffle en rafales au dehors. Les efforts d’une petite fille de 5 ans pour quitter la douceur de l’épaisse couverture, se laver le visage à l’eau glacée, puis s’habiller en grelottant, à la lueur d’une bougie, avant de s’emmitoufler pour affronter le froid cinglant de cette région où le climat est particulièrement rude. Puis le trajet... Interminable. De nuit. La petite fille connaît chaque pierre, chaque dénivelé de ce chemin parcouru chaque jour, dans les deux sens, depuis près de cinq ans. Soit, au quotidien, quatre heures de marche. Son visage marqué de cicatrices et sa peau gercée témoignent des rigueurs de sa vie au grand air. « Quand il y avait de la neige et qu’elle ne pouvait pas y aller, elle pleurait », raconte sa mère. Comme Amal, beaucoup d’autres doivent effectuer ce qui s’apparente à un parcours du combattant pour pouvoir se rendre à l’école.
Pour l'amour de l'école
Par
Flore Olive
photos
pierre
Terdjman
A travers Le prix nobel de la paix, l’engagement de la société civile depuis le printemps arabe est salué
Ces enfants des montagnes peuvent enfin étudier. Grâce au travail d’une des associations qui se sont créées en 2011. Leur mission : lutter pour la démocratie et contre l’islamisme par l’éducation, et tout particulièrement celle des filles. Mais la route est encore longue…
Perchée sur la plus grosse pierre, juste au bord de
l’à-pic, Amal, 11 ans, nous montre la pente abrupte qu’elle avait l’habitude de dévaler pour arriver plus vite jusqu’à la route, se raccrochant aux branches des buissons de plantes sèches pour freiner sa descente. Sur la droite, on distingue le chemin de terre qui permet d’accéder aux maisons isolées d’Ouled Salah, sur les hauts plateaux de la région de Jouf Seydin, dans le Nord-Ouest tunisien, où les parents d’Amal survivent grâce à l’élevage de quelques chèvres, moutons et brebis, associé à la culture d’un peu de blé. La famille occupe une demeure spartiate, dont les pièces de plain-pied sont organisées autour d’un patio. Amal, ses deux petits frères, Saïf, 9 ans, Youssouf, 6 ans, Emna, la petite dernière de 9 mois et ses parents dorment dans la même pièce. Les adultes sur le lit double et les enfants par terre, sur des matelas qu’on empile contre le mur dans la journée. Dans un angle, près de la porte, un espace occupé par une table de bois recouverte de papiers et de livres est réservé aux devoirs. Myriam, 40 ans, la mère d’Amal n’est jamais allée à l’école. Seuls ses frères l’ont fréquentée, « juste histoire d’apprendre à lire et à écrire », dit-elle. Myriam l’a toujours regretté. Alors, elle y a inscrit Amal, dès l’âge de 5 ans. Pour la petite fille, c’est à la fois une chance et un sacerdoce : l’établissement le plus proche, l’école de Jouf Seydin, se trouve dans le lieu-dit du même nom, Seydin, à presque 7 kilomètres. Alors, pour être en cours à 8 heures du matin, dès la maternelle Amal quittait la maison à 5 h 30.
Il faut imaginer son réveil, alors que le jour n’est pas encore levé et que le vent froid souffle en rafales au dehors. Les efforts d’une petite fille de 5 ans pour quitter la douceur de l’épaisse couverture, se laver le visage à l’eau glacée, puis s’habiller en grelottant, à la lueur d’une bougie, avant de s’emmitoufler pour affronter le froid cinglant de cette région où le climat est particulièrement rude. Puis le trajet... Interminable. De nuit. La petite fille connaît chaque pierre, chaque dénivelé de ce chemin parcouru chaque jour, dans les deux sens, depuis près de cinq ans. Soit, au quotidien, quatre heures de marche. Son visage marqué de cicatrices et sa peau gercée témoignent des rigueurs de sa vie au grand air. « Quand il y avait de la neige et qu’elle ne pouvait pas y aller, elle pleurait », raconte sa mère. Comme Amal, beaucoup d’autres doivent effectuer ce qui s’apparente à un parcours du combattant pour pouvoir se rendre à l’école.
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