Question fondamentale de la philosophie

  • il y a 9 ans
Vous voulez savoir pourquoi nous sommes tous des indécrottables théoriciens optimistes ? Pourquoi, dans tout ce que nous vivons, dans tout ce que nous faisons, dans tout ce que nous pensons, nous sommes toujours rivés sur nos idées ? Toujours en train de faire des projets ? Toujours en train de réduire la foisonnante complexité de la vie, des phénomènes, des sensations à des idées et concepts fixes ? Et pourquoi nous risquons toujours de tomber dans le contraire de l’optimisme, à savoir dans le pessimisme, tant la réalité s’avère ne pas correspondre à nos idées ?
Vous voulez savoir ? Eh bien je vais vous le dire, c’est somme toute à cause de… Platon, le premier philosophe proprement dit de notre tradition. Premier philosophe qui a eu un rôle formidable sur le cours de l’histoire, jusqu’à nos jours, où son influence continue à travailler, et même de plus belle, de manière larvé, et même si on ne veut pas le dire…
Voici comment les choses se sont passées. C’était y a quelque 2500 ans, au IVe siècle avant Jésus-Christ, à Athènes. Dans une Athènes en crise, plongée dans la guerre du Péloponnèse et chahutée par quantité de troubles sociaux et politiques. C’est là, dans ce terreau, qu’est né et qu’a vécu Platon : jeune homme très sensible, très artiste, toujours enclin à partager en mots ce qui gronde et travaille en lui. Dans la lignée de ses illustres prédécesseurs et maîtres que sont les aèdes et poètes – Homère, Hésiode et tous les autres –, il composait des poèmes, des mythes, des pièces de théâtre.
Mais voilà qu’il rencontre Socrate, vieux penseur bien connu à Athènes parce qu’il dialoguait, dans la rue, avec les gens, et en particulier avec les jeunes gens, en particulier avec les jeunes hommes, pour défendre des propos allant complètement à l’encontre de la vision artistique traditionnelle des choses et du monde. Et ce tellement qu’il a fini par être condamné à mort, d’une part pour non croyance aux dieux de la Cité, et d’autre part pour… corruption de la jeunesse.
Loin de croire aux arts, aux mystérieuses puissances artistiques, Socrate croyait à la seule intelligence et claire raison humaine pour découvrir la vérité et organiser les choses de la vie. Dans l’Athènes en crise, son souci – d’ailleurs garant de tout son succès – était de trouver une tenue ferme, une stabilité au sein du va-et-vient tragique des phénomènes. Aussi son intérêt était-il moral : il voulait savoir « ce qui se fait de bien et ce qui se fait de mal dans les maisons » (DP, p. 6). Il distinguait partout le bien du mal. Et, rebondissant sur la pensée de Parménide, il cherchait à fixer toute chose, à tout mettre en lumière, à définir tout ce qui est (tout on, en grec) en ce qu’il est (en son ti estin), autrement dit en son être idéal (einai).
L’hypersensible Platon est évidemment impressionné par le personnage. Dès qu’il le rencontre, il se voue corps et âme, dans ses écrits, à la connaissance de la vérité idéale, gage de sécurité. Il devient par là le premier optimiste...