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00:00Europe 1, 9h31, Culture Média, Thomas Hill.
00:04Merci beaucoup d'être avec nous pour la suite de Culture Média.
00:07Sacha Nocovitch est resté avec nous pour parler sport.
00:10Dans un instant, ça va Sacha ?
00:12La grande forme !
00:12Julien Pichnet aussi va nous présenter une petite pépite
00:15issue tout à l'heure des archives d'Europe 1.
00:18Et alors j'ai la chance de recevoir ce matin
00:19une comédienne de théâtre.
00:21Elle a joué dans plus de 25 pièces.
00:23Une actrice avec plus de 120 films au compteur.
00:26Mais aussi auteur d'une quinzaine d'ouvrages
00:29vendus à 2 millions d'exemplaires.
00:30Et quand il lui reste un petit peu de temps,
00:32elle m'a fait aussi de la peinture.
00:33Bonjour !
00:34Et mes robes, petite fille de couturier.
00:36Et ma collection d'été.
00:40Exceptionnel !
00:40Et jardinière aussi, j'ai vu ça.
00:42On en parlera tout à l'heure.
00:43Parce que vous avez un jardin absolument magnifique.
00:45Et alors c'est une nouvelle Annie Dupéret
00:47que l'on découvre ce matin à ce micro
00:48par rapport à celle qui est venue il y a un an.
00:51Vous avez totalement changé de look là.
00:52C'est-à-dire que je chantais hier soir, voyez-vous.
00:54Oui, entre autres.
00:55J'ai un spectacle de café-concert.
00:58Et hier soir, je chantais à la Michaudière
01:00avec mon appartenaire Charlène Duval.
01:03Viens Poupoule !
01:04Viens Poupoule !
01:05Viens Poupoule que nous allons donner
01:07au Festival de Ramatuel d'ailleurs.
01:09C'était le 6 août.
01:10Et 1h20 sur le café-concert
01:12et 17 chansons de l'époque.
01:15C'est-à-dire 1860, 1920, 25.
01:18Parce que vous avez une très belle voix aussi, Annie.
01:21Vous chantez beaucoup.
01:22Et j'adore ça.
01:23Et ça rend tout le monde heureux.
01:24C'est super.
01:25Qu'est-ce que ça donne,
01:26Viens Poupoule, par Annie Dupéret ?
01:28Viens Poupoule !
01:29Viens Poupoule, viens Poupoule, viens !
01:31Quand j'entends des chansons,
01:33ça me rend tout polisson.
01:35Oh !
01:36Ça a l'air sympa.
01:37Mais ça veut dire que ce nouveau look
01:39que vous avez,
01:40qui est très coloré,
01:41qui est très joyeux...
01:42Quand je chante, je frise.
01:43C'est votre look de scène, c'est ça ?
01:45C'est parce que vous êtes sur scène.
01:45Voilà, c'est parce que
01:46pour passer les micros dans les cheveux,
01:47les cheveux frisés, c'est très bien
01:48parce qu'on peut les mettre sur le front.
01:51Je déteste les micros qui arrivent sur la joue,
01:53je tape dedans, ça frotte.
01:55Je déteste ça.
01:56Donc on démonte les trucs
01:57et on le passe à travers les cheveux.
01:59Et dans les cheveux frisés, ça se voit.
02:00On adore ce look.
02:01Ça correspond beaucoup plus
02:02à votre petit grain de folie, comme ça.
02:04Un petit grain,
02:04qui ne veut pas me quitter.
02:06Et alors, vous venez, Annie Dupéret,
02:08de publier vos mémoires intitulées...
02:10Oh non !
02:10Non, on ne dit pas mémoire.
02:12Oh non, surtout pas.
02:13Justement, j'ai refusé d'écrire mes mémoires.
02:15Alors, un récit autobiographique.
02:16Ah oui.
02:17Il faut le dire comme ça.
02:17Oui, oui.
02:18Des souvenirs.
02:19Des souvenirs.
02:20Oui, des autobiographiques,
02:21dans le sens où ce sont des petites phrases
02:23que j'ai entendues
02:24et qui me sont restées en mémoire,
02:26mais qui parlent souvent d'autres personnes,
02:28d'anecdotes du métier ou personnelles
02:30ou 32 petites histoires.
02:32Moi, j'appelle ça un livre à sieste.
02:34Ah oui ?
02:34Oui, oui.
02:35Parce qu'on peut...
02:36Il y a entre 10 pages et 2 pages,
02:38on peut lire un petit texte
02:40où je parle de mes vieux copains,
02:42de Rochefort, de Marielle,
02:44d'Agnès Varda,
02:45de gens que j'ai rencontrés...
02:46Mais ça ne veut pas dire
02:46qu'on va s'endormir du tout.
02:48Voilà, c'est ça.
02:49Mais on sait où on en est
02:50quand on se réveille.
02:51Voilà, c'est ça.
02:52Et alors, vous parliez de ces petites phrases.
02:54Il y en a une qui donne le titre de ce livre,
02:56c'est Respire, c'est de l'iode.
02:57C'est une phrase de votre grand-mère paternelle,
03:00c'est ça ?
03:00Oui.
03:00La première qui vous est venue
03:02quand vous avez commencé à écrire...
03:03Oui, parce que c'est la première
03:04dont je me souviens.
03:05Après, puisque j'ai établi les choses tout de suite,
03:07c'est vrai que j'ai trouvé mes parents morts
03:09moi à 8 ans et demi.
03:10Je n'étais pas bienvaillante après.
03:13Et la mer, l'air de la mer
03:15était censée me requinquer,
03:17me donner des couleurs et tout.
03:19Seulement, à Dieppe,
03:21qui était le plus proche de Rouen
03:22où nous habitions,
03:24la plage d'Angalée en pente,
03:26ma grand-mère ne pouvait pas y marcher.
03:27L'eau était glacée,
03:28on n'avait peur que j'attrape froid.
03:29Donc, il restait le porc
03:31qui puait le gasoil,
03:32le poisson pourri,
03:34la frite de la gargote voisine.
03:37Mais plus ça sentait fort,
03:38plus c'était censé être bon pour ma santé.
03:40Tous les dimanches,
03:41ma grand-mère me disait
03:41« Respire, c'est de l'iode. »
03:43Mais sinon, Dieppe,
03:44c'est très joli quand même.
03:45On voudrait être très joli.
03:46On voudrait quand même visiter Dieppe.
03:48Il n'y a pas que le porc.
03:49C'est très joli.
03:50Vous avez commencé à en parler.
03:51Effectivement, il faut expliquer
03:52qu'en 92,
03:54vous avez publié votre livre autobiographique
03:56qui s'appelait
03:56« Le voile noir »
03:57dans lequel vous racontiez
03:59ce drame de votre vie,
04:00la mort de vos parents
04:01quand vous aviez seulement
04:028 ans et demi.
04:03Vos parents qui ont succombé
04:04à une intoxication
04:05au monoxyde de carbone.
04:07Et vous dites dans votre livre
04:08« Je suis peut-être le seul écrivain
04:09dont les lecteurs ont changé la vie. »
04:11C'est vrai.
04:12Parce que beaucoup de lecteurs
04:14vous ont écrit après
04:15et notamment des médecins.
04:16Ah oui, oui, oui.
04:17Je ne sais plus,
04:19j'ai reçu 8000 lettres,
04:20quelque chose comme ça.
04:21Je prenais mon paquet
04:22au sens propre
04:22qui m'arrivait du seuil
04:24toutes les semaines
04:25et je lisais ces lettres
04:27qui étaient...
04:28Jusqu'à présent,
04:29vous savez,
04:29quand on a vécu
04:30un truc comme ça,
04:30un traumatisme comme ça,
04:32on est seul
04:32avec sa douleur unique.
04:35On est enfermé
04:36dans cette chose,
04:38comment on s'en tirait.
04:40Le voile noir,
04:40c'était « Je soulevais le pansement,
04:42comment on peut
04:43pendant 30 ans
04:43ne pas faire un pas
04:44vers le deuil ? »
04:45Et en fait,
04:46après le voile noir,
04:46rien n'était vraiment avancé.
04:48J'avais poussé un cri.
04:50Et puis, hop,
04:51les lettres sont arrivées,
04:52m'ont fait...
04:53d'abord m'ont amené
04:54dans le sort commun
04:55en me faisant partager
04:57d'autres douleurs,
04:58d'autres expériences.
04:59Et puis,
05:00et puis sont arrivées
05:01effectivement
05:01cinq lettres de médecins
05:03qui m'ont appris
05:05ce qui s'était passé
05:06le matin
05:07à la mort de mes parents.
05:08Et c'est tout à fait extraordinaire.
05:10Je gardais une vague culpabilité
05:12de ne mettre pas réveillé.
05:15Je m'étais dit
05:15si je m'étais réveillée plus tôt,
05:17j'aurais pu ouvrir la porte,
05:18peut-être les sauver,
05:19tout ça,
05:20c'était...
05:21et puis voilà,
05:22ils m'ont appris
05:23que j'étais touchée moi-même
05:24par le monoxyde de carbone
05:25et donc je ne pouvais pas me lever.
05:27Et c'est pour ça
05:27que vous ne pouviez pas vous lever
05:28parce que vous étiez certainement
05:29vous-même intoxiquée.
05:29Et le jour où j'ai reçu
05:30cette lettre-là,
05:32je ne sais pas comment...
05:34J'ai fait,
05:34j'étais dans un fauteuil
05:35avec des accoudoirs en plus.
05:37J'ai pris un tel choc
05:38que je me suis retrouvée par terre.
05:40C'est quand même extraordinaire,
05:42comme une nouvelle comme ça.
05:43Donc,
05:44et puis sont arrivées après
05:45quatre lettres
05:46qui semblaient avoir lu
05:47la lettre précédente,
05:47qu'elle est un peu plus loin.
05:49C'est tout à fait incroyable.
05:50Et c'est une thérapie
05:51pour vous d'écrire,
05:52encore aujourd'hui ?
05:53Non,
05:53pas vraiment.
05:54Pas vraiment.
05:55Non,
05:55non,
05:55celui-là,
05:56c'était...
05:57Oui,
05:58c'était une thérapie.
06:00Alors,
06:00tout le monde me disait
06:01mais comment tu vas écrire
06:02une chose aussi intime,
06:04aussi...
06:06Je disais oui,
06:06mais enfin,
06:07je...
06:07Tout le monde a des problèmes
06:09avec la mort.
06:10Tout le monde a des problèmes
06:11avec le deuil.
06:12Alors,
06:13moi,
06:13c'est une histoire particulière,
06:14effectivement,
06:14mais je ne vois pas
06:15en quoi ce serait
06:16si impudique
06:18de pouvoir parler aux gens,
06:20ça,
06:21si on est complètement sincère
06:22et complètement direct,
06:24comme ça.
06:25Et au contraire,
06:25beaucoup de gens
06:26s'y sont retrouvés
06:27à la preuve
06:27avec toutes ces lettres
06:28que vous avez reçues.
06:28J'ai l'immense fierté
06:29que ce livre soit souvent
06:30étudié en classe.
06:32Et alors,
06:32vous racontez aussi
06:33qu'après la mort
06:34de vos parents,
06:34vous êtes accueillie
06:35chez votre grand-mère
06:36et votre tante,
06:38toutes deux veuves,
06:39et donc vous allez devenir
06:39comme ça une famille
06:40de femmes fortes,
06:41en fait,
06:42c'est ça ?
06:42Oui,
06:42oui,
06:42j'ai un texte là-dessus
06:47sur la petite phrase
06:48que m'a dit un ami un jour,
06:50sachant que j'étais,
06:51justement,
06:52vous voyez,
06:52je fais un café-concert
06:53avec un gars déguisé en fille,
06:56j'étais,
06:56quand je jouais Shakespeare
06:58et Giraudoux
06:58au Théâtre de la Ville
07:00à 23 ans,
07:02grâce à un copain danseur,
07:03j'ai découvert
07:04l'Alcazar
07:04de Jean-Marie Rivière,
07:06je faisais l'after
07:07avec les gars,
07:08après j'ai été
07:09à la Grande Eugène,
07:09j'ai découvert
07:10les débuts
07:10de Jean-Claude Dreyfus,
07:11et puis Michou
07:13et puis les copains
07:14et il m'a dit
07:15c'est quand même extraordinaire
07:17cette complicité
07:18de toujours
07:19que tu as
07:19avec les gars déguisés
07:20en fille
07:21et il a dit cette phrase
07:21extraordinaire,
07:23on dirait que c'est
07:24ton autre sexe
07:25et là,
07:28toute ma jeunesse
07:29s'est éclairée,
07:31élevée que par des femmes
07:32comme un garçon,
07:34sans être prévenu
07:35de rien
07:35comme fille,
07:37laissée dans une liberté
07:38absolument incroyable,
07:40sans aucun exemple
07:41de couple,
07:42aucun homme à la maison,
07:44j'ai été,
07:45j'étais un être hybride,
07:47en fait,
07:47moralement,
07:48alors à l'époque,
07:49dans les années 70,
07:50je draguais,
07:50je vous raconte pas,
07:51comme un garçon
07:52et je regardais les filles
07:54et j'y comprenais rien,
07:56je disais
07:56mais pourquoi
07:57elle fait deux pas en arrière
07:58alors qu'elle a envie
07:58de faire un pas en avant
07:59ce conne ?
08:00Je comprenais pas
08:02et puis bon,
08:03petit à petit,
08:03je suis devenue
08:04une vraie femme
08:04mais au départ,
08:06c'était,
08:06alors j'avais commencé
08:07à faire mes vêtements,
08:08je me maquillais beaucoup
08:09parce que j'avais été
08:11aux beaux-arts
08:11donc quitte à avoir
08:12abandonné les beaux-arts,
08:13je me peignais moi
08:14et en fait,
08:15je me suis dit
08:15mais t'as raison,
08:16je faisais comme eux,
08:17je me déguisais en fille.
08:19Et on va continuer
08:21que vous racontez aussi
08:22votre première relation sexuelle
08:23à 17 ans
08:24en arrivant à Paris
08:25et visiblement ça vous a fait...
08:26Non, je n'ai pas dit ça moi.
08:27Ah si ?
08:27Je n'ai pas raconté ça
08:28si j'ai raconté ça en plus.
08:29Oui, oui.
08:30Visiblement ça vous a fait
08:31ni chaud ni froid d'ailleurs.
08:32Ça a beaucoup plus marqué Thomas Hille.
08:33À la fin,
08:34vous dites
08:34voilà une bonne chose de faite.
08:36Oui, c'est vrai.
08:36C'est la conclusion.
08:38Allez,
08:38on se retrouve dans un instant
08:39sur Europe.
08:40On va tout de suite.
08:409h30, 11h sur Europe 1.
08:42Culture Média, Europe 1.
08:44Et vous écoutez Culture Média
08:45sur Europe 1,
08:469h30, 11h avec Thomas Hille.
08:48Et ce matin,
08:48Thomas,
08:49vous recevez
08:49la comédienne,
08:50écrivain Annie Dupéré
08:52pour son livre
08:53Respire,
08:53c'est de l'iode
08:54que Thomas est en train
08:55de montrer sur Europe 1.fr
08:56si vous nous suivez en vidéo.
08:58Le livre est publié
08:59aux éditions du Seuil.
09:00Et on va continuer
09:00à l'explorer ce livre.
09:01On va évoquer des souvenirs
09:02à l'aide de petits sons.
09:04Voici le premier.
09:04Cézanne Pint
09:06Cézanne Pint
09:21de France Galles.
09:22Alors au départ,
09:22Annie Dupéré,
09:23ce n'est pas la comédie
09:24vraiment qui vous attire
09:25mais les beaux-arts.
09:26Votre tante,
09:27elle a très vite compris
09:29que vous aviez besoin
09:30des arts,
09:31de dessins,
09:32de peinture,
09:33de danse,
09:33d'écriture.
09:34C'était tout ça
09:35pour supporter aussi
09:36l'affaire de l'opin.
09:37Oui, elle a compris.
09:38Ma tante était
09:39une femme bienveilleuse
09:40qui a été une enfant sacrifiée.
09:42C'est-à-dire qu'à l'époque,
09:44bon, moi j'ai une famille
09:45très gai quand même.
09:46Ma grand-mère avait eu
09:47trois deuils.
09:48Ma tante a été veuve
09:49à 29-30 ans.
09:51Puis elle avait dit
09:52on n'aime qu'une fois.
09:53Donc après,
09:55d'où la manière
09:57dont j'ai été élevée
09:57par des femmes battantes
09:59qui se sont battues
09:59dans la vie comme ça.
10:01Et puis c'est vrai
10:01qu'elle a compris
10:04j'étais sa revanche.
10:06Elle, elle a été sortie
10:07de l'école à 11 ans
10:08alors que très intelligente,
10:09première en classe,
10:10elle voulait devenir professeure.
10:13C'est un peu
10:14à Yves Thau.
10:16On a parlé de ça
10:18avec, comment dire,
10:20avec Annie Ernaud.
10:21On a eu un interview croisé
10:23un jour avec Annie
10:24où je lui ai dit
10:24tu vois,
10:25ta chance à toi
10:26ça a été d'être fille unique.
10:28parce que ma tante
10:30voulait faire des études
10:31comme toi.
10:32Et malheureusement
10:32elle avait deux frères.
10:34Donc sortie de l'école
10:35à 11 ans
10:35pour servir au bistrot
10:36de ma grand-mère,
10:38servir les sous-lots
10:39à 11 ans
10:39au lieu d'aller en classe
10:40et ma tante
10:41avait ça dans la gorge.
10:44Et quand elle a hérité
10:46de moi à 9-10 ans
10:47qu'elle a vu
10:47que j'étais très douée
10:48pour le dessin
10:49pour ceci,
10:50j'étais au Beaux-Arts
10:52à 10 ans et demi,
10:5311 ans
10:53au cours du soir
10:54déjà
10:55et au cours de danse
10:56et là
10:57et j'avais tous les livres
10:58que je voulais
10:59parce que je dévorais les livres
11:00j'écrivais beaucoup
11:00elle m'a mis
11:02toutes les cartes en main.
11:03C'est ça.
11:03Toutes les cartes en main.
11:04D'ailleurs vous avez
11:05une anecdote assez amusante
11:06d'ailleurs parce que
11:06jeune comédienne
11:07vous racontez
11:08que vous aviez la main
11:08assez lourde
11:09sur le maquillage
11:10et que c'était peut-être
11:11votre vocation
11:12finalement
11:12contrariée de peintre
11:13qui s'exprimait.
11:14Contrariée de peintre
11:15voilà.
11:16Effectivement
11:16j'ai fait un texte
11:17sur mon admirable
11:18professeur de peinture
11:19j'étais à 14 ans et demi
11:21au Beaux-Arts
11:21je suis très encore fier
11:23les Beaux-Arts de Rouen
11:24qui étaient une école magnifique
11:25je suis rentré deuxième
11:26sur concours quand même.
11:27A 14 ?
11:2814 ans et demi
11:29donc à 15 ans pile
11:31j'étais au Beaux-Arts
11:32et il y avait un prof
11:33de peinture
11:34Robert Savary
11:34qui a été mon complice
11:37tout de suite
11:38parce qu'il me disait
11:39en douce
11:40on a la même palette
11:41du peint clair
11:43c'est rare
11:43pour une débutante.
11:45Et puis un jour
11:46effectivement
11:46c'est le prétexte
11:49de cette phrase
11:50comme ça
11:50dont je me suis servi
11:51j'ai fait une copie
11:53assez vite
11:54d'un truc assez difficile
11:55quand même
11:55à reproduire
11:56et il me dit
11:58il me glisse
11:58c'est normal
11:59t'es coloriste
12:00j'ai un bon
12:01je le regarde avec surprise
12:02et j'ai dit
12:04pourquoi ça ?
12:05Il me dit
12:05coloriste
12:06c'est tout simplement
12:06que tu sais
12:08d'instinct
12:08c'est un
12:09quelle couleur
12:11il faut mélanger
12:11pour obtenir
12:12une teinte précise
12:13oh j'ai dû avoir
12:14un sourire
12:15un petit peu
12:16satisfait
12:16et il m'a lancé
12:17cette phrase
12:17merveilleuse
12:18t'as pas à être fier
12:19c'est un don
12:20c'est magnifique
12:22c'est une très belle phrase
12:23donc il y a un texte
12:24qui s'appelle
12:24pas de quoi être fier
12:25c'est un don
12:25et sur ce
12:26effectivement
12:27j'ai retenu cette phrase
12:28parce que
12:29ça m'a appris
12:30qu'on ne peut être fier
12:31que ce qu'on a acquis
12:32avec l'effort
12:33avec un vouloir
12:35et que si on a un don
12:36bon bah c'est
12:36un
12:37on va pas se glorifier
12:38c'est tout
12:39un don parmi d'autres
12:40parce que vous êtes aussi
12:41chanteuse
12:42Annie Dupéret
12:42comment on va l'entendre
12:43Annie Dupéret
13:00et Bernard Giraudot
13:01dans la comédie musicale
13:02Attention Fragile
13:03montée en 1980
13:04alors que la France
13:06n'était pas du tout
13:06habituée aux comédies musicales
13:08vous avez été
13:09plutôt précurseur
13:10j'avais des beaux textes
13:11des chansons
13:12qui étaient un prétexte
13:13à la comédie musicale
13:14à deux
13:14trente personnages
13:16quinze numéros de danse
13:17quinze chansons
13:18et de Claude Lombard
13:21magnifique compositeur
13:23qui est morte
13:24il y a un an
13:25malheureusement
13:25et effectivement
13:27j'avais ça dans les mains
13:29on faisait tous les deux
13:30de la danse
13:30on faisait tous les deux
13:31des cours de chant
13:32on se dit
13:32personne jamais
13:33va nous proposer
13:34de nous en servir
13:35donc on a monté ça
13:37pendant un an
13:38sans avoir de théâtre
13:40encore
13:40on a tout refusé
13:41pour monter ça
13:41c'était vraiment
13:42notre histoire de couple
13:44on s'est découvert
13:45de la même veine
13:46à ce moment là
13:47et puis miraculeusement
13:48on a eu un théâtre
13:49et on a joué ça
13:50pendant deux ans
13:51c'est vrai que vous parlez
13:53même de gémélité
13:54avec Bernard Giraudot
13:54c'est assez joli
13:55vous avez vécu
13:56quinze ans d'amour
13:56intense avec lui
13:57vous avez construit
13:58votre maison
14:00vie
14:00dans la Creuse
14:01où vous habitez
14:02toujours aujourd'hui
14:02mais vous dites que
14:04Bernard avait du mal
14:05avec l'idée du bonheur
14:06oui c'est vrai
14:06c'est vrai
14:07il avait eu
14:08bon je peux le dire
14:09maintenant parce qu'ils ont
14:10ils ont disparu
14:11il avait eu une enfance
14:12extrêmement ennuyeuse
14:13et la terreur
14:16de l'ennui
14:16faisait qu'il fallait
14:18toujours un mur
14:20pour taper dedans
14:21pour
14:21c'est vrai que
14:23quand on était bien
14:24on était heureux
14:25il disait ça y'a
14:25on devient con
14:26oui c'est ça
14:27et donc c'était
14:29pour moi
14:29qui avait connu
14:30des vrais malheurs
14:31il s'acharnait
14:33toujours
14:33il y avait toujours
14:35un problème
14:35il fallait casser
14:36il fallait des épreuves
14:38il fallait des trucs comme ça
14:38moi je me disais
14:39mais comment
14:39comment il peut pas
14:40se rendre compte
14:41de la chance
14:42qu'on a quoi
14:43pourquoi toujours
14:44ce besoin
14:45de casser
14:46d'épreuves
14:48et vraiment
14:49bon au bout de
14:50c'est vrai qu'au bout
14:51de 15 ans
14:52j'ai dit j'y arriverai pas
14:53j'y arriverai pas
14:54et en fait c'est moi
14:55qui ai décidé
14:56vous êtes tout l'inverse
14:57vous
14:57voilà
14:57d'arrêter
14:59d'ailleurs on est resté amis
15:00mais j'ai dit
15:01là ça va
15:01moi j'y arriverai pas
15:02et malheureusement
15:03c'est pas moi
15:04qui suis parvenu
15:06à le changer
15:07à lui faire comprendre
15:08c'est le cancer
15:09j'aurais préféré
15:11que ce soit moi
15:12voilà
15:12parce qu'avec la maladie
15:13il a réalisé
15:14ce que c'est avec le bonheur
15:15c'est un homme
15:16qui s'est retourné
15:16comme un gant
15:17d'un coup
15:18il a compris
15:19tout ce qu'il
15:21il en pleurait
15:22il en pleurait
15:23c'était incroyable
15:24allez encore un extrait sonore
15:25vous reconnaissez
15:41la musique de Germinal
15:42effectivement
15:43Germinal
15:43à l'époque
15:44le film le plus cher
15:45du cinéma français
15:46en 93
15:47réalisé par Claude Berry
15:48et vous racontez
15:49d'ailleurs
15:49votre rendez-vous
15:50avec le réalisateur
15:51qui a pris le temps
15:52de vous parler
15:53de votre livre
15:54le voile noir
15:55alors c'est un texte
15:57qui s'appelle
15:58Sus la bon dieu
15:59Sus
15:59on
16:00on
16:00à propos des écrevisses
16:04on comprend pourquoi
16:05à la fin
16:05on comprend pourquoi
16:06à la fin
16:06je vais pas trop en parler
16:07parce que je vais
16:08je vais faire des lectures
16:10c'est un livre
16:11qui se prête bien
16:12aux lectures
16:12entre Agnès Varda
16:13tout ça et tout
16:14et à la fin
16:15je donnerai aux gens
16:17je demanderai aux gens
16:17à choisir
16:18entre deux textes
16:19voilà
16:20main levée
16:20vous voulez que je vous lise
16:21Annie je ne peux pas jouer ça
16:23ou Sus la bon dieu
16:25le choix sera vite fait
16:27par le public
16:28ça c'est clair
16:28vous voulez nous raconter
16:30cette anecdote ou pas
16:31en version courte
16:33en version courte
16:34en version courte
16:35oui oui
16:36et bien c'était
16:37nous avions
16:38la grande scène
16:39des bourgeois
16:40à la fin
16:41les patrons de la mine
16:42je faisais un personnage
16:43la femme de la
16:44épouvantable
16:45qui mariait
16:46son neveu
16:48dont elle était la maîtresse
16:49à une jeune femme
16:50dont on sentait très bien
16:51qu'elle allait la fourrer
16:52dans son lit aussi très vite
16:53une chatte persane
16:55voilà
16:56et puis alors
16:57ce déjeuner
16:58nous avons mangé
16:59à six acteurs
17:00autour d'une table
17:01en trois jours
17:01650 écrevisses
17:03wow
17:03et c'est vrai que
17:05plusieurs fois
17:06ce qu'il disait
17:07en mondanité
17:08n'était pas extrêmement important
17:09et la chose la plus importante
17:11pour Claude
17:12était qu'on voit
17:13les bourgeois
17:13manger
17:14et manger un mais raffiné
17:16alors que les mineurs
17:18crevaient de faim
17:18et bon
17:20il tenait absolument
17:20à ce qu'on nous voit
17:21manger
17:22et est arrivé
17:23le jour des gros plans
17:24et une charmante
17:26adorable comédienne
17:27Annie Callan
17:28la mère de Bernard Allan
17:30et jouait la bourgeoise
17:32qui mariait sa fille
17:33on pourrait dire
17:34qui vendait sa fille
17:35au patron de la mine
17:36et elle était là
17:38elle avait beaucoup de textes
17:39parce qu'elle était très contente
17:40de faire un bon mariage
17:41à sa fille
17:41elle avait beaucoup de textes
17:42et quand sont arrivés
17:44les gros plans
17:45il y a eu
17:45de la pièce voisine
17:47derrière ses écrans
17:48de contrôle
17:48avec un micro
17:50Claude a dit
17:51c'est bien ton texte
17:52Annick
17:52c'est bien
17:53c'est bien
17:53c'est bien
17:54mais écoute
17:54excuse-moi
17:54je ne t'ai pas vue manger
17:55et oui
17:56tu comprends Claude
17:58ce n'est pas facile
17:59tout en parlant
18:00oui mais s'il te plaît
18:01il faut un effort
18:02parce qu'il faut que je te vois manger
18:03vois-tu
18:03bon alors
18:05cinq prises
18:06six prises
18:07à la septième
18:08Annick
18:09elle avait cette petite écrevisse
18:10qui tremblait au bout de ses mains
18:12parce qu'elle commençait
18:12vraiment à être très nerveuse
18:13elle recommence son texte
18:16vaillamment
18:17en cherchant désespérément
18:18entre quels mots
18:19elle pourrait gober le truc
18:21et là tout à coup
18:22on a entendu un hurlement
18:23de la pièce voisine
18:24mais suce là
18:25bon dieu
18:26suce
18:27c'était une écromise
18:30alors on est tous tombés
18:32autour de la table
18:33évidemment
18:33magnifique
18:35magnifique
18:35Annie Dupéret
18:36dans ses oeuvres
18:37on a envie de le voir
18:37ce texte sur scène
18:39Respire
18:39c'est de l'Iod
18:40c'est votre nouveau livre
18:41disponible aux éditions
18:43du Seuil
18:44dans un instant
18:44on va parler sport
18:45avec Sacha Dukovic
18:46on revient tout de suite
18:47sur Europe
18:47Culture Média
18:489h30
18:5011h
18:50sur Europe