• il y a 11 heures
Les États-Unis et l'Ukraine ont réussi à s'entendre sur un accord pour un cessez-le-feu ce mardi en Arabie saoudite. Le projet doit encore être validé du côté de la Russie, mais les Américains ont d'ores et déjà annoncé la levée "immédiate" de la suspension de leur aide militaire. Du côté de l'Europe, le ministre français des Armées Sébastien Lecornu reçoit ce mercredi ses homologues européens pour coordonner le soutien à Kiev.

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00:00Avec nous Claude Blanchemaison, ancien ambassadeur de France en Russie entre 2000 et 2004.
00:09Merci d'être avec nous ce matin. On rappelle que vous êtes aussi l'auteur du livre « Vivre avec Poutine » paru aux éditions Temporis.
00:14Face à vous Olivier Ravanello pour parler de cet accord intervenu cette nuit entre l'Ukraine et les Etats-Unis en Arabie Saoudite lors de ces pourparlers que l'on disait cruciaux
00:25et qui ont donc débouché sur un accord, c'est-à-dire que l'Ukraine est d'accord pour une trêve immédiate de 30 jours.
00:32Les Etats-Unis ont immédiatement rétabli l'aide militaire qu'ils avaient suspendue après le clash à la Maison Blanche.
00:40Et désormais, on attend la réponse de Vladimir Poutine. Jean-Didier Revoy, vous êtes à Moscou. On dit ce matin que la balle est dans le camp de la Russie. Que va-t-elle en faire ?
00:50C'est bien malin celui qui est dans la tête de Vladimir Poutine aujourd'hui. Mais ce qu'on peut dire, c'est que cet accord intervenu hier entre Ukrainiens et Américains
00:59ne prend pas en compte les derniers propos de Vladimir Poutine qui a toujours exclu une trêve temporaire qui, à ses yeux, ne doit servir qu'à permettre aux forces ukrainiennes de se regrouper et de se réarmer.
01:12Il préfère, lui, une paix globale à long terme qui respecte les intérêts légitimes des habitants et de tous les peuples qui vivent dans la région où les combats se déroulent.
01:22On est donc, comme je le disais, loin de ce qui a été conclu hier à Jeddah. Mais un signe d'espoir apparaît tout de même à l'horizon dans la mesure où la diplomatie russe a confirmé
01:31qu'il y aurait très rapidement, très prochainement, des jours qui viennent même, un entretien à haut niveau entre Moscou et Washington pour discuter de ce qui a été convenu hier à Jeddah.
01:41Peut-être que, dans ces conditions, Donald Trump ou la délégation américaine permettra aux Russes d'infléchir leur position et de trouver une solution qui satisfasse ces deux partis.
01:52Parce que, Claude Blanchemaison, c'est important ce que vient de dire Jean-Didier Revoy, le cessez-le-feu, ce n'est pas l'option retenue par Vladimir Poutine.
02:00— Oui, enfin, je dirais globalement que ça, c'est de la bonne diplomatie. Parce qu'en effet, les Ukrainiens avaient un objectif qui était de rétablir l'aide américaine et surtout le renseignement américain,
02:10pour ne plus être aveugles. Ils l'ont obtenu. Et pour l'obtenir, ils ont dû consentir à un cessez-le-feu pour 30 jours, éventuellement renouvelable, sans aucune condition.
02:18— Là, là où l'on parle, c'est effectif, le rétablissement de l'aide militaire. Il est rétabli. — Tout de suite. Donc ils ont obtenu ce qu'ils voulaient.
02:23Donc c'est une victoire pour l'Ukraine, en réalité. C'est une victoire pour l'Ukraine. Ils ont très bien négocié. Et en plus, maintenant, l'allumette, elle est dans la main de Poutine,
02:31puisque c'est lui qui est considéré comme le faiseur de paix ou le faiseur de guerre. Effectivement, Trump avait dit le fauteur de guerre, c'est Zelensky.
02:39C'est plus Zelensky. Maintenant, ça va être Poutine qui va avoir la responsabilité de dire j'accepte un cessez-le-feu ou je ne l'accepte pas.
02:46Donc c'est bien joué. C'est bien joué pour les Ukrainiens. Alors qu'est-ce qui va se passer ? On va voir. D'ailleurs, la réaction, à mon avis, du Kremlin,
02:53elle va prendre un petit peu de temps, parce qu'il faut qu'il se concerte avec le ministère des Affaires étrangères, qui lui a une position dure.
02:58C'est Lavrov, le vieux cheval, enfin le meilleur diplomate naturellement formé à l'époque soviétique, qui, lui, à toutes les conditions que la Russie a mises,
03:08en effet, un cessez-le-feu et qui va essayer de les réintroduire. Est-ce que Poutine va balayer partiellement les conditions que Lavrov va lui souffler ?
03:19Ça dépend un peu de l'intérêt qu'il a à avoir très rapidement un tête-à-tête avec Trump, parce qu'il a envie d'avoir ce tête-à-tête pour montrer qu'il est à parité
03:28avec Trump, avec le président de la plus grande puissance du monde. En fait, le catalyseur et le facteur de réussite, c'est Trump, peut-être, dans cette histoire.
03:37C'est Trump s'il met un petit peu de pression sur Poutine, mais c'est surtout, comme le disait M. l'ambassadeur, la stratégie immédiate que va prendre Poutine.
03:48Je ne le vois pas, au mal en tout cas, dire non. Évidemment qu'il va dire « mais oui, on est pour que les combats s'arrêtent », puisqu'il l'a déjà répété plein de fois.
03:58En revanche, il risque de jouer ça à la Russe, c'est-à-dire de dire « sur le principe, on est d'accord, mais alors on va mettre plein de petits détails d'application sur le cessez-le-feu,
04:08il va être respecté comment, il va être contrôlé par qui, la nationalité des gens qui vont être là pour contrôler les sanctions éventuelles qui peuvent se mettre en place pour gagner du temps. »
04:20Et au fond, continuer de mettre sur la table ce qui sont les germes de cette crise du point de vue de Poutine, c'est-à-dire faire en sorte et s'assurer que l'Ukraine ne bascule pas dans le camp d'en face,
04:32et que l'Ukraine reste sa zone d'influence.
04:34Et si Poutine met dans la balance un départ de Volodymyr Zelensky comme préalable à toute discussion ?
04:40Il peut le mettre dans la balance.
04:42Et Zelensky, à un moment donné, a même ouvert la porte en disant « si c'est la condition pour obtenir un accord juste pour mon pays, je suis prêt à partir ».
04:50Sous-entendu, je peux aussi me représenter après.
04:53Donc on est vraiment dans un jeu où chacun avance ses pions, mais il ne faut pas perdre de vue que l'objectif fondamental des Russes est quelque chose qui,
05:03du point de vue des Européens et du point de vue des Ukrainiens, est inacceptable, c'est-à-dire de maintenir ce pays sous tutelle russe, qu'il n'ait plus d'armée,
05:12que le pouvoir soit plutôt proche de lui, qu'il ne rentre pas dans l'OTAN.
05:19En gros, que l'Ukraine ne puisse pas décider de son destin.
05:23Au fond, c'est ça que veulent les Russes, et c'est ça qui, évidemment, du point de vue des Ukrainiens, n'est pas acceptable, et même du point de vue des Européens.
05:30Donc c'est aussi là-dessus que, s'il y a des concessions faites, elles vont devoir être assez importantes.
05:37Et pendant ce temps, la guerre continue, on est bien d'accord ?
05:40La guerre continue. Le cessez-le-feu qui est envisagé, c'est un cessez-le-feu global.
05:45Évidemment, comme il n'y a pas de conditions ni de précautions, il n'y a personne pour le surveiller.
05:50Et effectivement, j'imagine que dans les prochains jours, il va sans doute y avoir un contact entre les Américains et les Russes,
05:57probablement au niveau du ministère des Affaires étrangères.
06:00Et les Russes vont dire, tout ça, c'est bien gentil, mais pendant que vous signez SIA à Jeddah,
06:05les Français étaient en train de battre les tambours de guerre avec tous les États-majors européens,
06:10plus quelques autres, le Canadien, le Turc, et même des Asiatiques.
06:17Donc ça ne marche pas.
06:19Il faut au moins que nous ayons la certitude qu'il n'y aura pas de troupes occidentales sur le sol, en effet,
06:25de ce qui restera de l'Ukraine, une fois qu'on aura engrangé nos gains territoriaux.
06:30La deuxième chose, c'est que les Russes voulaient arrondir leur conquête,
06:36puisqu'ils n'arrivent pas à contrôler l'ensemble des oblastes qu'ils ont annexés.
06:41Et ça, je pense qu'ils vont être obligés d'y renoncer.
06:44C'est sur la ligne de cessez-le-feu, le jour où on déclare le cessez-le-feu.
06:47On ne s'occupe pas des précisions administratives locales.
06:52Alors effectivement, ce qui rentre aussi en ligne de compte,
06:56c'est le fait qu'il y ait encore des troupes ukrainiennes sur une partie de la Russie,
07:00dans la province de Kursk, et que les Russes ne peuvent pas supporter ça.
07:04Mais c'est un peu une piqûre d'épingle pour eux.
07:07Ce n'est pas si important que ça.
07:09Sinon, ils auraient mis le paquet pour les faire partir par des moyens militaires.
07:14Ils ne l'ont pas fait.
07:15Donc, on va voir si Poutine est malin.
07:18Il va répondre oui, comme vous venez de le dire tout à l'heure,
07:21oui pour un cessez-le-feu, mais à condition qu'il n'y ait jamais de troupes occidentales
07:26sur le territoire ukrainien.
07:27Et ce n'est pas la moindre déconcession.
07:29Et pendant ce temps, les frappes continuent.
07:31Igor Saïri à Kiev nous le disait tout à l'heure.
07:33Il y a eu plusieurs frappes russes dans la nuit.
07:35Et un premier bilan parle d'au moins quatre morts dans le port d'Odessa à l'instant.
07:40Merci d'avoir été avec nous.

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