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Samedi 8 mars, c'est la journée internationale des droits des femmes. On en parle avec Aurore Bergé , ministre déléguée chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes et de la Lutte contre les discriminations. Elle publie "Nos combats pour la République" aux éditions Robert Laffont.
Regardez L'invité de Céline Landreau du 07 mars 2025.

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Transcription
00:00RTL Matin
00:03Céline Landreau et Thomas Soto
00:05Il est 8h15, l'interview de Céline Landreau au coeur de l'actualité
00:08et au coeur des problématiques de notre société
00:10puisqu'on va parler de la place des femmes.
00:12Les mauvaises langues diront qu'il y a une journée pour les femmes le 8 mars
00:14et 364 autres pour les hommes.
00:16Parce que ça suffit, vous avez choisi d'inviter
00:18Aurore Berger, ministre de l'égalité entre les femmes et les hommes
00:20et de la lutte contre les discriminations.
00:22Elle publie chez Robert Laffont
00:24nos combats pour la République. Bonjour et bienvenue à vous.
00:26Bonjour Aurore Berger.
00:28Vos combats dans ce livre se confondent
00:30avec l'intitulé de votre ministère
00:32Égalité entre les femmes et les hommes, lutte contre les discriminations.
00:34Mais à la lecture,
00:36deux choix que vous partagez,
00:38deux choix personnels et respectables
00:40interrogent, je trouve, au regard de
00:42votre combat et de vos fonctions.
00:44Le premier, il concerne Victoire, votre fille
00:46à qui vous dédiez d'ailleurs ce livre.
00:48Vous expliquez avoir caché votre grossesse lors des législatives de 2022
00:50parce que, dites-vous,
00:52j'en craignais les conséquences politiques.
00:54En cette veille de
00:56journée internationale des droits des femmes,
00:58on en est encore là, Aurore Berger. C'est un problème
01:00d'être enceinte dans notre pays ?
01:02Ce n'est pas un problème et heureusement,
01:04mais ça a des conséquences.
01:06Ça a des conséquences sur votre vie
01:08ensuite professionnelle.
01:10Dans les dix années qui suivent
01:12la première naissance de votre enfant,
01:14les femmes perdent 38% de niveau de revenu par rapport aux hommes.
01:1638% de niveau de revenu
01:18qu'elles ne rattrapent ensuite jamais.
01:20Donc la question de la parentalité,
01:22c'est ce qu'on appelle en fait la pénalité parentale.
01:24Vous êtes une femme et que vous devenez mère,
01:26ça vous pénalise dans votre vie économique,
01:28ce qui n'est pas le cas pour les hommes et pour les pères.
01:30Mais sauf erreur, quand vous faites campagne pour être députée,
01:32l'indemnité est la même, que vous soyez maman ou pas.
01:34Elle n'était pas celle-ci.
01:36C'était de perdre la campagne.
01:38Parce que je pense qu'il y a encore des qualificatifs
01:40qui sont attachés au fait d'être une femme en politique
01:42et au fait en plus d'être une mère.
01:44Et je l'ai beaucoup ressenti justement
01:46à partir du moment où j'ai dit que j'étais enceinte,
01:48y compris d'ailleurs dans certaines interviews
01:50où j'avais l'impression que je ne faisais jamais la bonne réponse.
01:52C'est-à-dire que si j'expliquais
01:54que je prenais un long congé maternité,
01:56ça veut dire que je n'étais pas vraiment une femme politique,
01:58que je n'étais pas un animal politique,
02:00que je n'avais pas envie de continuer d'avoir une carrière.
02:02Et si je prenais un congé court,
02:04c'est que j'étais forcément une mauvaise mère.
02:06Et donc du coup, j'ai préféré
02:08garder ce moment d'abord pour moi, intime,
02:10le dire quand j'estimais que
02:12je pouvais vraiment le dire.
02:14Et je l'ai dit, c'est vrai, une fois que j'ai été élue
02:16présidente de groupe, parce que je ne voulais pas
02:18que ça rentre en ligne de compte
02:20de la part de mes collègues, de la part de l'environnement
02:22politique et médiatique, sur le fait que
02:24j'étais enceinte et que je faisais campagne
02:26pour les législatives, que j'étais enceinte
02:28et que je faisais campagne pour être présidente de groupe,
02:30parce que je sais que dans un sens ou dans un autre,
02:32à un moment, ça serait rentré en ligne de compte
02:34et je ne voulais pas que ça rentre en ligne de compte
02:36parce que je pense que le fait d'être enceinte
02:38pour le coup ne changeait rien,
02:40heureusement, à mes compétences.
02:42Après, le fait d'être maire, je pense, a changé
02:44un certain nombre de choses sur ma relation
02:46et mon rapport à la politique,
02:48autant aussi, parce que je pense que pour chacun
02:50d'entre nous en tant que parent, ça change
02:52évidemment beaucoup de choses.
02:53Autre choix sur lequel vous revenez,
02:55et là encore, il est personnel, respectable,
02:57en mars 2023, alors qu'il est
02:59question de violences conjugales à l'Assemblée nationale,
03:01vous avez ces mots,
03:02je n'instrumentalise pas ce combat
03:04car je sais de quoi je parle.
03:06Vous revenez dans ce livre sur cet épisode
03:08douloureux, vous glissez, qu'aujourd'hui
03:10encore, vous vous demandez chaque jour
03:12si vous ne devriez pas porter plainte.
03:14Sont jugés ce questionnement,
03:16politiquement, que même la ministre
03:18chargée de l'égalité entre les femmes
03:20et les hommes ait autant de difficultés
03:22à se dire enceinte, à porter plainte
03:24pour violences conjugales, est-ce que ça ne dit pas
03:26quelque chose de notre société aujourd'hui ?
03:28Déjà qu'il ne faut jamais juger les femmes,
03:30et que quand on a subi des violences,
03:32c'est à la personne qui les a subies
03:34de savoir le moment où elle le révèle ou pas,
03:36et le moment où elle décide
03:38ou non de porter plainte. Et je trouve qu'il y a
03:40encore trop de jugements dans la société,
03:42et à partir du moment où une femme porte plainte,
03:44on interroge toujours les raisons pour lesquelles elle le fait.
03:46Là encore, soit elle le fait trop tôt,
03:48soit elle le fait trop tard, elle le fait toujours pour intérêt.
03:50Alors que quand on porte plainte,
03:52c'est d'abord parce qu'on a une nécessité
03:54de réparation. Quand on
03:56s'exprime publiquement, c'est qu'il y a aussi
03:58la nécessité que ça puisse être utile.
04:00Et le moment dont vous parlez,
04:02et dont je fais référence au sein du livre,
04:04c'était une séance à l'Assemblée nationale
04:06où j'avais porté une proposition de loi
04:08pour dire que j'estimais qu'un homme qui avait été
04:10condamné pour violences conjugales,
04:12ne devait pas et ne pouvait
04:14pas normalement se représenter à une élection.
04:16Parce que j'estimais que quand on
04:18avait levé la main sur sa compagne
04:20ou sur son enfant, il y avait
04:22un tel interdit qui avait été franchi que ça
04:24légitimait qu'on ne puisse pas être
04:26candidat à une fonction élective.
04:28Et ce moment à l'Assemblée nationale a été
04:30absolument insupportable.
04:32L'Assemblée nationale, l'hémicycle, c'est une arène.
04:34Ça dépend si vous êtes
04:36le taureau ou si vous êtes le tauréador.
04:38Et là j'avais quand même sacrément l'impression d'être le taureau.
04:40Et vraiment l'impression que de l'extrême gauche
04:42à l'extrême droite, il y avait cette volonté
04:44de m'abattre presque physique.
04:46Mais sur la plainte, Robert,
04:48j'ai sur l'action en justice. Je pense aux femmes qui nous écoutent
04:50qui pensent que c'est très personnel.
04:52Est-ce qu'il n'y a pas une notion
04:54peut-être que le mot est trop fort, mais d'exemplarité
04:56je pense aux femmes qui vous écoutent qui se disent
04:58peut-être si même elles
05:00à ces responsabilités n'y arrivent pas, comment je peux faire ?
05:02Est-ce que c'est un cheminement qui est très intime
05:04et qui est très personnel ? Et que la question
05:06que je me suis posée c'est est-ce que moi j'avais besoin
05:08ou pas de porter plainte ?
05:10Est-ce que c'était important pour moi ou pas
05:12de le faire ? Et après en effet, étant ministre
05:14je me dis est-ce que ce serait utile à d'autres
05:16que je le fasse ? Mais en fait le raisonnement il est d'abord
05:18intime. Et c'est pour ça que je pense qu'il ne faut
05:20jamais juger les femmes sur la manière
05:22avec laquelle elles révèlent ou elles ne révèlent pas
05:24comment on le fait. Parce que
05:26le moment où vous dites que vous avez été victime
05:28parce que évidemment quand vous êtes
05:30victime il y a un tel niveau de
05:32honte, de culpabilité, de secret
05:34qui entoure tout ça pour des raisons évidentes
05:36que le moment où vous le révélez vous venez
05:38heurter la fragilité d'un environnement
05:40familial, la fragilité d'un environnement
05:42amical et la question du dépôt de
05:44plainte évidemment est une étape supplémentaire.
05:46Donc mon inquiétude n'est pas du tout d'être cru
05:48ou pas. Mon inquiétude n'est pas qu'on
05:50accueille bien ma plainte parce que je n'ai aucun doute là-dessus
05:52mon inquiétude est plutôt sur
05:54est-ce que moi j'en ai besoin ou pas ?
05:56Est-ce que ma famille en a besoin ou pas ? Et ça c'est
05:58une question qui est extrêmement
06:00intime. Moi mon travail en tant que
06:02ministre c'est de garantir déjà
06:04la possibilité pour chaque femme de le faire
06:06mais surtout le fait que ça concerne
06:08toute la société et que enfin
06:10on arrive à lutter contre une forme d'indifférence
06:12où on se dit qu'après tout ça reste une affaire
06:14de famille, ça reste une affaire de couple,
06:16ça reste une affaire privée. Non, une femme qui est victime de
06:18violence c'est pas une affaire de couple.
06:20Un divorce c'est une affaire de couple.
06:22Une victime de violence c'est l'affaire de toute
06:24la société. Autre sujet très rapidement
06:26Aurore Berger, c'était un chantier lancé
06:28par Emmanuel Macron au printemps dernier
06:30le congé de naissance qui doit remplacer
06:32le congé parental. 4 mois seulement
06:34ça peut être jusqu'à 3 ans aujourd'hui
06:36mais mieux indemnisé pour chacun des parents.
06:38Vous l'avez ressorti des cartons il y a
06:40quelques jours, c'est pour quand ?
06:42J'espère que c'est pour bientôt. Moi mon rôle c'est aussi
06:44d'alerter et de mobiliser
06:46à la fois l'ensemble du gouvernement mais
06:48mobiliser aussi la société sur cette question-là.
06:50Ce chiffre que je vous donnais, de dire quand même
06:52qu'après la première naissance de notre
06:54enfant en tant que mère, il y a une perte de
06:56niveau de revenu de 38% pour les femmes
06:58versus les hommes et plus vous avez d'enfants
07:00et plus ça s'aggrave. Donc ça veut dire qu'on a
07:02aujourd'hui des jeunes femmes qui renoncent
07:04au fait d'être mère parce qu'elles ont peur des conséquences
07:06professionnelles, qui diffèrent ce choix
07:08au risque de ne jamais pouvoir l'être ou des
07:10femmes qui en subissent des conséquences dans leur
07:12mobilité professionnelle, dans leur carrière. Je pense
07:14que le fait qu'enfin il y ait
07:16un vrai congé qui puisse être repris
07:18parce que bien mieux indemnisé que celui
07:20actuel qui est environ à 427 euros
07:22permettrait aux hommes et aux
07:24femmes, aux pères et aux mères de pouvoir
07:26enfin s'ils le souhaitent avoir du temps
07:28auprès de leur enfant et que la présomption
07:30de parentalité ne pèse pas que sur les femmes
07:32comme c'est le cas aujourd'hui. Mais on n'a pas le montant d'indemnisation
07:34et on ne sait pas si ce sera
07:36sacrifié sur l'autel du
07:38financement de la guerre. Ah ben j'espère pas
07:40parce que je pense que c'est un enjeu d'avenir, c'est un enjeu d'avenir
07:42sur l'égalité entre les femmes et les hommes, c'est un enjeu d'avenir
07:44sur la natalité, c'est un enjeu d'avenir aussi
07:46sur la conception qu'on a de la société, sur le fait
07:48que la parentalité c'est pas que la
07:50maternité et on a progressé, on a fait
07:52progresser les droits de ce point de vue là, on a créé
07:54un congé paternité par exemple, au moment où il a été
07:56créé, souvenez-vous des critiques, aujourd'hui
07:58je crois que c'est rentré et heureusement quand même dans la culture
08:00de notre société. Ce livre, Aurore Berger,
08:02Nos combats pour la République, c'est une profession de foi pour 2027
08:04ça pourrait en avoir le parfum.
08:06En tout cas il y a des combats que je pense
08:08essentiels à mener pour 2027 et oui
08:10je serai dans ce débat national
08:12en 2027 parce que je pense déjà que les ambitions
08:14elles sont heureusement pas que masculines pour en revenir
08:16aux enjeux d'égalité entre les femmes et les hommes
08:18mais au-delà de ça, parce que je pense que
08:20ça appartient à une génération où la République
08:22ou la laïcité sont plus des évidences
08:24et à une génération qui aimerait que certains combats
08:26soient derrière nous, notamment les combats
08:28de l'égalité, de la lutte contre les violences faites aux
08:30femmes et aux enfants, de la lutte contre l'antisémitisme
08:32et malheureusement aujourd'hui ces combats, ils sont
08:34pleinement dans l'actualité donc ça suppose qu'on s'engage.

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