• il y a 21 heures
Il y a 10 ans jour pour jour, le 8 janvier 2015, Jonathan Berdal a échappé de peu à la mort. Ce policier municipal de Montrouge s'est retrouvé face au terroriste Amedy Coulibaly. Si l'arme de ce dernier ne s'était pas enrayée, il ne serait plus là. Sa collègue, Clarissa Jean-Philippe, n'a pas eu cette chance. Elle a été tué par le terroriste. Après 10 ans de mutisme, Jonathan Berdal souhaite aujourd'hui prendre la parole pour que sa collègue et amie ne soit pas oubliée.

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Transcription
00:00Et là, ils me disent « non, elle est partie ».
00:05Et là, je dis « non, c'est pas possible, c'est pas possible ».
00:07Et moi, je suis ailleurs, je suis perdu.
00:10J'ai perdu une collègue, mais une amie.
00:13Jonathan Berda, les policiers municipales à Montrouge.
00:16Le 8 janvier 2015, au lendemain des attentats de Charlie Hebdo,
00:20il s'est retrouvé face aux terroristes à Medi-Coulibaly.
00:23Sa collègue, Clarissa Jean-Philippe, a été tuée ce jour-là.
00:26Moi, je prends mon service dès 7h30
00:29et on est appelés vers 7h45 à peu près, 7h45 du matin.
00:34Et on nous appelle pour un accident matériel de la circulation.
00:39Il fait sombre et j'entends un bruit.
00:44Un bruit, un claquement, un « kr kr ».
00:47Et j'ai à Clarissa, j'ai dit « bizarre, il y a un bruit d'armes ».
00:50Je lui ai dit « arrête tes conneries ».
00:51Et je me retourne et je vois une masse noire derrière moi.
00:56Elle mâche, tranquillement, mais tranquillement.
00:59Bon, grosse doudoune, genre de capuche.
01:02Un petit sac à dos, mais il fait noir, il est 8h du matin,
01:05on ne voit pas trop bien, il y a de la brouillade,
01:07il y a la brume du matin.
01:09Et là, on entend « bah », un tir.
01:14Je m'accroupis au yesus.
01:17On dirait qu'une pierre, une brique a tombé sur moi.
01:22Je fonce, je cours derrière la voiture d'intervention.
01:26Je pense que Clarissa est partie, s'éloigner, se réfugier.
01:29Et j'entends encore un « bam », encore un claquement.
01:32Un bruit d'armes.
01:34Mais qu'est-ce qui se passe ?
01:36Et je vois mon autre collègue des services de la propreté
01:40se battre avec ce terroriste.
01:43Alors moi, autour du ceinturon, j'ai juste mon tonfa.
01:49Je sors mon tonfa, j'arrive vers lui,
01:52et il voit que j'ai mon tonfa, il se débat et il court.
01:55Je fais demi-tour.
01:57Je veux voir où allait Clarissa.
02:00Ça, c'était primordial.
02:02Où était Clarissa ?
02:04Je marche et je vois Clarissa au sol.
02:09Et là, je dis « ma belle, ma belle, ça va aller, ça va aller,
02:12je suis à tes côtés ».
02:14On appelait les pompiers, donc il y avait beaucoup de personnes aux alentours.
02:17J'appelle les pompiers, j'appelle aussi mon poste,
02:20la radio passe mal.
02:22Ma réarchie arrive, ma chef arrive,
02:24et elle me dit « Jonathan, reste pas ici ».
02:26Mais j'étais un zombie, vous savez, on est ailleurs.
02:29Ces bruits, voir ma collègue allongée au sol.
02:34Là, il y a un entrepôt, on m'assoit,
02:37on me met une sorte de collier avec mon nom, mon prénom,
02:41et on m'emmène à l'hôpital.
02:45Je suis pris en charge à l'hôpital, dans une chambre.
02:48Les services de police me conditionnent.
02:50Et moi, ma première question, c'était « ma belle,
02:54savoir si elle était vivante, si elle était encore là ».
02:58Et là, ils me disent « non, elle est partie ».
03:03Et là, je dis « non, c'est pas possible, c'est pas possible ».
03:06Moi, je suis ailleurs, je suis perdu.
03:09J'ai perdu une collègue, mais une amie.
03:12J'étais aussi jeune, 26 ans.
03:15Après, mes parents arrivent, 2-3 heures après,
03:18je suis reçu par un docteur qui me dit « surtout, ne revenez pas sur les lieux ».
03:21Je suis reparti, voilà, directement, pendant 6 mois, dans le Nord.
03:25En juillet 2015, et malgré le traumatisme,
03:28Jonathan Berdal reprend ses fonctions de policier municipal à Montrouge,
03:32en mi-temps thérapeutique.
03:34Quand j'ai repris mes fonctions, elle était avec moi.
03:37Quand je ferme mon casier, elle est avec moi, je pars avec elle,
03:41dans ma salle de travail, avec mes collègues,
03:44on a mis une petite place, une photo avec des fleurs.
03:47Donc, elle est là, elle est présente avec nous.
03:5010 ans plus tard, on n'est pas guéris.
03:53On est là, on se reconstruit, c'est vrai.
03:56Alors, il y a certaines personnes qui n'ont pas eu besoin de soins,
03:59qui n'ont pas eu besoin de tout ça.
04:02Je suis toujours suivi par un psychologue et par un psychiatre.
04:05C'est un besoin pour moi.
04:08Moi, j'ai un peu le blues, quelquefois,
04:11mais je me dis qu'elle est toujours avec moi, elle est à mes côtés.
04:14Quelquefois, quand je rêve, j'entends des bruits d'armes.
04:20Et quelquefois, dans mes rêves, il y a Clarissa, vous voyez ?
04:24Mais c'est toujours ce côté positif, souriant, qui est avec moi.
04:29Dans ma vie, aujourd'hui, je fais attention quand il y a de la foule.
04:33Par exemple, dans des concerts ou des pièces de théâtre,
04:36je me mets tout de suite à la sortie, vous voyez ? Prêt à partir.
04:39Dans le métro, par exemple, je regarde un peu les gens qui sont dans le métro.
04:43On parle toujours du 7 janvier et après, on saute tout de suite au 9 janvier
04:48et on oublie au milieu Jean-Philippe Clarissa, policière.
04:53Je pense que vous avez peut-être aperçu que dix ans, je n'ai jamais voulu un interview.
04:57Et je me dis, il faut avoir la force, le courage.
05:00Et oui, on est là, nous.
05:04Je suis victime du terrorisme.
05:07Je suis là pour la représenter et pour ne pas l'oublier.

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