Aujourd'hui à 8h20, grand entretien avec Didier Fusillier, président de la Réunion des musées nationaux et du Grand Palais. Avant la réouverture de l’ensemble de ses galeries en juin, le Grand Palais présente une exposition consacrée à l’artiste japonaise Chiharu Shiota jusqu’au 19 mars 2025.
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00:00Et dans le grand entretien ce matin, j'ai le bonheur de recevoir un homme de culture,
00:04metteur en scène, innovateur, il a toujours eu le souci de rendre la culture accessible
00:10au plus grand nombre, de faire également de la culture une fête, il est à la tête
00:15du Grand Palais, il préside également la réunion des musées nationaux.
00:19Vos questions, chers auditeurs, au 01 45 24 7000 ou sur l'application France Inter.
00:26Bonjour Didier Fusier.
00:27Bonjour.
00:28Et bienvenue, vous êtes à la tête d'un chantier gigantesque, on a beaucoup parlé
00:32ces derniers temps de la rénovation de Notre-Dame, il y a une autre cathédrale à Paris qui
00:37avait l'ambition d'accueillir les Beaux-Arts, c'est le Grand Palais, 4 ans de chantier
00:43absolument pharaonique en plein cœur de Paris, c'est un lieu emblématique que tout
00:48le monde connaît maintenant depuis les JO, puisque vous avez accueilli l'escrime, le
00:52judo sous cette nef immense, où est-ce qu'on en est dans le chantier aujourd'hui ?
01:00Effectivement, c'est 4 ans, sans doute 5, mais d'un chantier énorme puisqu'il faut
01:06quand même avoir l'idée que le Grand Palais est plus grand que Versailles, vous faites
01:09rentrer tout le château de Versailles dans le Grand Palais.
01:12C'est le plus grand bâtiment de Paris, c'est incroyable.
01:14Oui, parce qu'on ne le voit pas comme ça, mais il est très horizontal, le poids de
01:18l'acier à l'intérieur du Grand Palais est supérieur à celui de la Tour Eiffel,
01:21c'est un bâtiment créé en 1900, seulement en 3 ans à l'époque, on se demande d'ailleurs
01:27comment ils ont pu faire un truc pareil en 3 ans, parce qu'il n'y avait pas les
01:30grues, il n'y avait pas tout ce qu'on connaît aujourd'hui, il y avait un train
01:33carrément qui partait de la Seine pour ramener les pierres de taille pour construire le Grand
01:38Palais.
01:39Le Grand Palais en fait, ce sont 3 palais collés l'un à l'autre, il y a le Palais
01:44de la Découverte, le Palais d'Antin, il y a un bâtiment intermédiaire, puis la Grande
01:47Nef que tout le monde connaît.
01:49La Grande Nef, tiens, c'est un mot qu'on emploie aussi pour les cathédrales d'Idier
01:53Fusilier, on vous a connu, metteur en scène, on vous a vu créer 400 mini-musées sur le
01:58territoire national, les Microfolies, vous êtes passé du micro au maximal au macro.
02:05Oui, alors, en sachant que dans le micro, des fois on voit le macro, puisque effectivement
02:09nous avons dans les Microfolies, lancé avec le parc de la Villette, un peu partout en
02:14France mais aussi à l'étranger, la possibilité de voir des chefs-d'œuvre, donc vous en
02:18avez beaucoup en France aujourd'hui, il y en a même plus de 650, et donc on peut
02:22y voir des chefs-d'œuvre mais on y voit aussi des curiosités, on y écoute des concerts
02:26en direct.
02:27Je crois qu'on utilise aussi la forme numérique pour l'art, pour la portée, avec des définitions
02:32d'images qui sont quand même sublimes et je pense que c'est un grand bonheur un peu
02:37partout d'avoir aussi cette volonté, vous voyez, d'être raccordé, qu'on ne dise
02:41pas tout est à Paris, parce que oui, forcément à Paris il y a beaucoup de choses mais il
02:47y a des trésors partout, nous avons aussi à l'ARMN, vous en parliez tout à l'heure,
02:51à une réunion des musées nationaux, qui sont incroyables, c'est 20 châteaux et musées
02:56quand même, le château de Pau, très à l'actualité aujourd'hui, mais aussi Écouen,
03:01Saint-Germain-en-Laye, les Aisies, le musée national de l'après-histoire, des pépites
03:06comme ça qui sont sur tout le territoire.
03:07Cluny sur le Moyen-Âge, mais revenons au Grand Palais un instant, il a été construit
03:12donc à l'occasion de l'Expo Universelle en 1900, il n'avait pas connu de grands travaux
03:16depuis très longtemps et racontez-nous son histoire, il a résisté à un incendie,
03:21deux tentatives de démolition, comment est-ce que vous le qualifiez ce bâtiment ?
03:25Il faut savoir qu'avant le Palais de la Découverte, en 1875, il y avait un palais
03:30encore plus grand, sauf qu'il était mal disposé, donc à l'époque on l'a démonté,
03:35on a reconstruit celui-là pour l'Exposition Universelle de 1900 et il a connu tout d'abord
03:42un incendie en 1944, on a mis 20 ans à reprendre toute cette aile qui était côté Champs-Elysées,
03:51c'était à la libération de Paris, et puis un affaissement parce qu'il est construit
03:54sur du sable et donc il a eu un affaissement vers la Seine, donc une reprise aussi des
04:01verrières a été faite en l'an 2000, donc voilà, il a connu, mais c'était des petites
04:04restructurations, aujourd'hui il a été désaussé, tous les escaliers ont sauté,
04:10il faut imaginer qu'il y avait deux ascenseurs avant, maintenant il y en a 43 dans un bâtiment
04:13de 1900, donc ce sont vraiment des gros travaux de restructuration.
04:16Avant d'entrer dans le Grand Palais, encore un mot, la particularité de cet espace gigantesque
04:23c'est qu'il est vide, vous avez le Louvre, Versailles, Orsay, ça s'est ancré dans
04:27le passé, il y a des collections invraisemblables, on n'imagine pas de déplacer la Joconde,
04:34c'est une chance d'avoir un lieu vide ?
04:36En tout cas pour moi c'est une chance, parce que les artistes arrivent et nous on le voit
04:43à chaque fois, c'est vide, donc on peut y projeter son imaginaire, on peut accueillir
04:48bientôt avec le Centre Pompidou qui s'installera en grande partie pendant sa fermeture au Grand
04:53Palais, il y aura Niquy de Saint-Falt, Guélie, il y aura Baptiste, après avec Orsay il y
04:57aura Cézanne, et puis le Louvre seront les grands tableaux du romantisme, les Grands
05:02de la Croix qui sont en train d'être restaurés aujourd'hui, qu'on va voir après au Grand
05:06Palais, sur le Grand Palais c'est 20 galeries de 1000m² à peu près, de 8m d'eau, donc
05:11vous mettez ce que vous voulez au Grand Palais, voyez-vous, et comme il est vide, on peut
05:16se mettre en quinconce, à l'envers, enfin un peu comme on veut en fait.
05:19On peut organiser des défilés de mode, on peut aussi organiser des concours hippiques,
05:24on va maintenant visiter cette exposition, visite guidée, Didier Fusilier, consacrée
05:30à l'artiste japonaise Shirao Shiota, elle a investi le Grand Palais en tissant avec
05:36de la laine dans des installations qui vont du sol au plafond, c'est extrêmement spectaculaire,
05:42est-ce que vous pouvez nous décrire son travail et nous guider dans l'expo ?
05:46Oui alors elle a cette particularité de tisser des fils de laine, donc les œuvres sont recréées
05:51à chaque fois, même moi qui la connais depuis près de 20 ans, nous l'avions invitée à
05:55la capitale européenne de Lille en 2004.
05:58Alors Lille était capitale européenne de la culture ?
06:01Voilà, c'était une des premières fois où on la voyait et déjà on était baigné
06:05dans son univers de fils noirs à l'époque, là aujourd'hui c'est rouge, c'est très
06:11impressionnant parce que ce sont des œuvres monumentales qui vous saisissent dès le grand
06:15escalier d'honneur, donc quand on monte on est pris dans une sorte de myriade de barques
06:20qui sont comme des oiseaux autour de ces fils de laine et on rentre dans les tréfonds
06:24de l'âme, on rentre dans des choses qui nous préoccupent.
06:26Moi je vois le public parce qu'on a la chance d'avoir beaucoup beaucoup de monde, puis
06:30des enfants, des jeunes, des gens plus âgés et à chaque fois effectivement ça nous renvoie
06:34à notre vie à nous, ces barques qui sont noyées dans cet océan de fils de laine qui
06:41sont assez doux évidemment puisqu'on sent que c'est de la laine, mais d'un autre
06:45côté c'est quelque chose que l'on reçoit de façon très personnelle à chaque fois.
06:52Il y a d'ailleurs des mâles, des valises qui flottent dans l'air, c'est très spectaculaire,
06:58elles dansent, elles sont suspendues à des fils, c'est une exposition qui est en partenariat
07:03avec France Inter.
07:05Vous quand vous voyez le Grand Palais aujourd'hui, qu'est-ce que vous avez envie d'en faire
07:11quand on rentre, quand on voit la façade du Grand Palais ? Il y a un immense panneau
07:16qui dit « la culture est une fête », « le Grand Palais est une fête ». Expliquez-nous
07:20ce que ça veut dire.
07:21Oui, parce qu'en fait le Grand Palais a toujours été fait pour la fête, il faut
07:25imaginer que vous aviez là les salons des montgolfières à l'époque, c'est complètement
07:31dingue.
07:32Il y avait quand même six énormes dirigeables, les premiers salons de la voiture et puis
07:35après il y a eu le grand défilé de Karl Lagerfeld avec Chanel, qui est toujours là,
07:38et puis il y a des grands concerts, Prince est venu faire un concert quasiment d'anthologie.
07:44Donc tout est possible dans ce Grand Palais et d'ailleurs quand on voit le public entrer
07:48et même tout le monde quand on rentre sous la nef, il n'y a plus de bâtiment.
07:52Avant il y avait le Crystal Palace à Londres qui était à peu près pareil et qui a brûlé.
07:56Donc il reste dans le monde sept endroits effectivement magnifiés pendant les Jeux
07:59Olympiques parce qu'il faut imaginer que pendant les Jeux on a monté deux gradins
08:03de 6000 places.
08:04Donc en haut, quand on était au dernier rang, on touchait les verrières.
08:07Vous voyez, tout est hors normes dans ce bâtiment.
08:10Un studio à télé immense où on accueillait les artistes, c'était l'émission de Léa
08:14Salamé.
08:15Quand on dit que le Palais des Fêtes, c'est comme ça qu'il faut désigner le Grand Palais,
08:21est-ce que vous faites référence à Jack Lang, à une idée de la culture qui fait
08:28que l'art doit être non seulement accessible au plus grand nombre mais que ça doit véritablement
08:34être une fête parce que ça c'est une vision qui fait débat ?
08:36Oui, écoutez, moi je suis un enfant de cette époque bénie des années 80 avec cette envie
08:45sous Jack Lang de prendre aussi la gastronomie, de prendre la mode, de tout mixer et puis
08:50après c'est au public de se débrouiller.
08:52Pour moi, la culture c'est vraiment ça, c'est-à-dire vous présenter à la fois
08:57des grands chefs-d'oeuvre, vous présentez la littérature, on en a parlé dans l'émission
09:00juste avant.
09:01Avec Julia Marx que vous avez croisée dans le Loire.
09:03Et puis le Salon du Livre est là, vous avez Art Basel, vous avez Paris Photos, donc si
09:08vous voulez vous vous baladez et c'est à vous finalement et ce n'est pas à nous d'imposer
09:12une vision de la culture.
09:13C'est à chacun de prendre ce qu'il aime, d'être surpris aussi, de découvrir surtout
09:17ce qu'il ne connaît pas.
09:18C'est comme ça que nous voyons le Grand Palais, il y aura 7000 mètres carrés gratuits.
09:22Avant, on n'a jamais pu rentrer au Grand Palais sans avoir un ticket.
09:25Là, en été aussi, nous allons créer le Grand Palais d'été avec Ernesto Neto qui
09:30va faire une oeuvre complètement délirante dans le cadre de l'année du Brésil, il y
09:33aura Rio Grande qui va arriver avec les écoles de samba et à côté de ça on aura Nikhil
09:38Sanphal et Jean Tinguely.
09:39C'est ça qui nous importe comme Dolce & Gabbana va arriver en tout début d'année avec une
09:45exposition sublime, on sera en Italie, on sera dans les églises, dans le baroque, dans
09:48leurs créations.
09:49Et moi j'aime beaucoup cette idée qu'on puisse se donner rendez-vous au Grand Palais
09:54en sachant qu'on ne sait justement pas ce qu'on va y trouver, c'est ça notre force.
09:58Mais l'idée que la culture est une fête, je disais qu'elle fait débat, il y a l'essayiste
10:03Philippe Muret par exemple qui avait dénoncé l'un des drames de notre époque qui avait
10:08transformé chacun d'entre nous en homo festivus, en personne obsédée par la culture qui devient
10:15un divertissement, c'est une vision qui est largement partagée par des gens aussi différents
10:18que Fabrice Luchini, Alain Finkielkraut, le critique d'art Jean Clerc, qu'est-ce que
10:23vous répondez à cette critique-là ?
10:26Non mais moi je comprends qu'on puisse ne pas aimer la fête, d'ailleurs moi il m'arrive
10:29souvent d'être dans des fêtes où je m'ennuie terriblement, c'est même souvent des catastrophes.
10:36Vous savez moi c'est surtout l'opposition entre la culture dite vulgaire, des fanfares,
10:48et puis la haute culture.
10:49Mais au fin de compte il y a des choses qui sont très très belles dans la culture dite
10:53populaire et des choses ridicules dans la culture dite haute.
10:56Et moi c'est ce mix-là qui m'importe.
11:00Richard Schusterman en parle très bien, le philosophe américain, en disant que c'est
11:06à chacun de prendre sa part et tant mieux si on peut faire la fête dans ce monde qui
11:09est tellement lourd aujourd'hui.
11:11On va tout de suite retrouver les auditeurs, ils sont très nombreux à vous remercier
11:15d'ailleurs pour la manière dont vous parlez de la culture.
11:19Mais vous n'avez pas hésité à dire qu'il fallait aussi des expositions instagrammables.
11:24Ça c'est un mot que vous avez employé à côté de Matisse ou de Jean Tinguely par
11:28exemple.
11:29La formule elle va faire hurler une expo instagrammable.
11:33Oui ben pourquoi pas ? Non mais ça fait hurler.
11:37Moi-même je ne suis pas sur les réseaux, je ne suis sur aucun réseau, mais je pense
11:43qu'effectivement aujourd'hui on ne peut pas faire l'impasse sur toutes les personnes
11:49qui aujourd'hui se photographient, mais elles se photographient au musée d'Orsay,
11:52elles se photographient, écoutez, même la Joconde, les gens sont de dos à la Joconde
11:57et se photographient avant la Joconde.
11:59Donc effectivement nous sommes dans ce monde et moi ça m'importe de créer des oeuvres
12:05dont on sait dès le départ, c'est faux de dire que la Joconde n'est pas instagrammable.
12:08On le sait qu'elle l'est la nuit étoilée de Van Gogh, quand vous allez à l'Orangerie,
12:13quand vous allez à Montpellier, à Lyon, j'étais au musée des beaux-arts de Lyon,
12:17il y a des oeuvres mais tellement sublimes, les gens se photographient devant.
12:19Donc l'idée c'est plutôt de s'emparer de ces mouvements, de partage aussi, parce
12:26que quand on se met sur Instagram ce n'est pas être partagé avec d'autres, et puis
12:29de montrer des univers qu'on ne connaît pas.
12:32Moi j'aime beaucoup ça, c'est-à-dire que des amis m'envoient des trucs des fois
12:35complètement cinglés de Chine ou je ne sais pas où, je n'irai jamais, et ça me
12:40fait voyager, ça me donne envie de lire, ça me donne envie de découvrir peut-être
12:44quelque chose.
12:45Souvent d'ailleurs on va sur Instagram pour découvrir une oeuvre un peu plus complète
12:50de ce qu'on vient de voir en quelques secondes, donc c'est notre monde.
12:54Après je veux bien qu'on estime que tout ça est stupide, que c'était mieux avant,
12:58mais ce n'est pas notre volonté à nous en tout cas.
13:01Au fil au standard inter, bonjour Valéry.
13:04Oui bonjour, quel grand plaisir d'entendre le président de la réunion des musées nationaux
13:10parler si généreusement de culture.
13:11Alors François Deroux, comme Georges Pompidou et Laurence Avus, j'ai écrit des lettres,
13:18je me souviens qu'en 2007, en arrivant très tôt à France Inter, François Deroux, s'adressant
13:25aux journalistes et aux techniciens lefto, leur avait cité les verbes bien connus de
13:30Victor Hugo, « Demain de l'aube, à l'heure où blanchit la campagne ».
13:32Et François Deroux ce vendredi, en dépit de son emploi du temps très chargé, a tenu
13:38à rendre hommage par une prise de parole à l'église Saint-Jean-de-Montmartre, à
13:43Jean-Pierre Rioux, le grand historien des politiques culturelles, avec Jean-François
13:48Cyrinelli.
13:49Et je me souviens que Jean-François Cyrinelli, dans ses cours à Sciences Po Paris, aimait
13:55et aime à citer René Char, « La culture est un lègue, un héritage qui n'est précédé
14:00d'aucun testament ».
14:01Et en 1959, André Malraux, en créant le ministère des Affaires culturelles, avait
14:07arraché au ministère de l'Éducation nationale la Direction Générale des Arts et des Lettres.
14:13Alors aujourd'hui, pour réussir ce pari de la démocratisation culturelle, comment
14:18remettre l'éducation au centre de la culture et quels conseils pourrait-on donner à François
14:25Deroux dans cette ambition culturelle qu'il anime ?
14:30Merci Valéry pour votre question, belle question.
14:33Didier Fusilier, qu'est-ce que vous lui répondez ?
14:35Je crois que le Premier ministre a été aussi ministre de l'Éducation nationale et que
14:40je me souviens un peu de cette époque où on parlait beaucoup de conventions avec la
14:45culture, de faire venir la culture à la fois dans les établissements scolaires mais
14:50de permettre surtout aux enfants d'aller dans les musées, d'aller au théâtre.
14:53Et le pass culture qui a été lancé par le Président de la République, qui permet
14:56aux profs, parce que ça on l'oublie, mais les profs ont des enveloppes maintenant.
15:00Avant c'était un délire de partir avec ses enfants, enfin ses élèves, à voir un
15:06musée.
15:07Maintenant vous pouvez, vous avez cette cagnotte qui vous permet d'emmener les enfants.
15:13On vient de signer d'ailleurs avec les trois recteurs de Versailles, Créteil, il y a deux
15:18jours et de Paris, une convention formidable qui va permettre vraiment aux enfants de
15:21venir gratuitement, d'être accompagnés par des médiateurs.
15:24Je rappelle ce besoin absolu de comprendre les œuvres que l'on voit.
15:29Nous c'est un gros travail que nous faisons au Grand Palais et à Amènes, c'est vraiment
15:33d'accompagner les visiteurs pour qu'ils aient le sel des œuvres qu'ils ont devant eux.
15:38Mais justement, question de Nadia, la culture pour tous, d'accord, mais comment y accéder
15:42quand on n'a pas de moyens financiers ? Quand on habite en province, la culture est tellement
15:48chère aujourd'hui qu'elle devient sélective.
15:50Cela dépend, il y a beaucoup de moyens aussi d'avoir des tarifs réduits, d'avoir aussi
15:57des moments où les choses sont moins chères.
16:01Pour les enfants, en tout cas, aujourd'hui, on rend dans les musées jusqu'à 22, 23,
16:04parfois 25 ans gratuitement.
16:06Nous allons faire des prix très bas, chez Oshiota, c'est 11 euros, 14 euros.
16:12Donc, c'est effectivement la question du prix, de la gratuité.
16:16C'est une chose extrêmement importante.
16:18Mais d'abord, vous savez, c'est Bourdieu qui disait le problème d'un musée, ce n'est
16:21pas le musée, c'est la porte.
16:22Comment fait-on pour passer la porte d'un musée quand on n'y est jamais allé ?
16:26Mais même moi, le premier, je suis peut-être allé au Louvre, j'avais 23 ans.
16:29La première fois que je suis allé au théâtre, j'avais 17, 18 ans.
16:32Après, j'ai dirigé des théâtres parce qu'il faut le choc.
16:35Moi, je suis pour le choc qu'on se retrouve.
16:39Oui, on se retrouve devant quelque chose qu'on ne connaît pas.
16:41Donc, on n'a pas les règles parce que c'est compliqué d'aller au théâtre.
16:44Moi, j'ai vu des enfants quand j'étais à Maubeuge qui n'étaient jamais...
16:47Alors, ils ne savaient pas qu'on applaudissait des artistes à la fin du spectacle.
16:51Ils se levaient, ils partaient parce que c'était comme au cinéma.
16:53Donc, c'est tous ces petits codes qu'il faut apprendre.
16:56Et beaucoup d'exemples sont donnés par tous mes collègues de tous les musées
17:01où maintenant, on démocratise énormément cela.
17:04C'est ce qu'on voit aussi en Hollande avec des médiateurs qui sont dans les salles,
17:08qui donnent des petits éclairs sur La Ronde de Nuit de Rembrandt, par exemple.
17:14Et on comprend mieux.
17:15Et de là, on aime ou on n'aime pas.
17:17Et c'est ça la culture pour moi aussi, c'est de savoir d'abord d'être surpris
17:21parce qu'on ne connaît pas.
17:22Il y a d'ailleurs David qui vous dit que vous avez toujours incité les jeunes
17:26à aller au théâtre malgré vos grandes et chronophages responsabilités.
17:30Il vous en remercie et il écrit de maux beuges.
17:34Qu'est-ce que vous pensez, Didier Fusilier, des problèmes de budget,
17:38notamment dans les régions ?
17:39On a vu une coupe de 73% qui est prévue par la région Pays de Loire
17:45dans le budget culturel.
17:47Les lieux, les compagnies, les festivals, les associations sont concernés.
17:51C'est une question de Noemi, mais de beaucoup de nos auditeurs ce matin.
17:55Mais vous savez, le budget national de la culture n'est même pas de 1%.
17:59Enfin, il tourne toujours à moins, moins 0,80.
18:03Ça a été un objectif.
18:04Mais c'est dingue.
18:05Enfin, franchement, 1% du budget.
18:07Enfin, moi, je veux bien qu'on trouve que tout ça est trop cher,
18:09mais ça l'est presque risible de se dire ça.
18:14Et les régions ont une responsabilité.
18:17Non, parce que les régions, ce sont les transports.
18:19Aujourd'hui, j'en parlais à Valérie Pécresse, qui va faire un grand effort,
18:23par exemple, pour offrir des bus, parce que ce n'est pas si simple
18:27quand on est dans la région.
18:28Alors, à Paris, pourquoi pas, il y a le métro, mais il faut venir en bus.
18:31Il faut que des professeurs, des parents accompagnent.
18:34C'est un grand effort.
18:35Donc, vraiment, je connais bien le président des Pays de Loire.
18:40Faites très attention, parce que quand on commence à détricoter, à baisser,
18:44déjà, ça remonte quasiment plus après.
18:47Et puis, vous avez beaucoup de passions qui sont derrière, beaucoup d'emplois,
18:50beaucoup de jeunes qui commencent leur vie professionnelle dans la culture.
18:53On oublie ça, mais c'est un pourvoyeur de beaucoup plus d'emplois
18:58que même le sport, c'est très impressionnant, le nombre.
19:01Et donc, on va toucher à ça aussi, ce qui est très, très dommageable.
19:05Malraux ou Jack Lang ?
19:07Oh, moi, les deux, parce que ce sont deux porte-flingues, quand même.
19:12Vous avez dirigé, d'ailleurs, une maison des arts à Créteil,
19:16les maisons inventées par Malraux, justement, pour amener la culture
19:21vers ces publics qui n'auraient pas forcément ni les moyens,
19:25ni la possibilité ou la volonté d'aller vers les arts et la culture.
19:32Oui, c'était aussi des palais à l'époque, que ce soit Créteil, Bobigny,
19:35mais la première qui était à Bourges, qui sera capitale européenne de la culture en 1928.
19:40Vous voyez, tout ça, ça sème des graines.
19:42Il faut des bâtiments pour la culture.
19:44C'est très important, je le dis aussi, je vois trop de théâtres
19:47qui sont un peu laissés à l'abandon.
19:48Il faut des lieux. Sans lieux, on n'incarne pas la culture.
19:53On est dans le domaine des idées, ce qui est fantastique,
19:55mais je crois qu'il faut voir aussi des choses.
19:57Et merci infiniment, Didier Fusilier, d'avoir été l'invité d'Inter ce matin.
20:02Je rappelle que vous êtes le président du Grand Palais.
20:05Bon courage et bonne suite pour le chantier colossal.
20:08500 millions d'euros pour redonner vie et redonner forme à cet endroit extraordinaire.
20:14Et puis, cette exposition.
20:15Oui, pardon.
20:16Et je salue François Châtillon, qui est l'architecte en chef des monuments historiques,
20:19qui pilote tous ces travaux, parce qu'avec ses équipes, ils sont vraiment sensationnels.
20:24Et puis, Shi Haru, Shi Ota, c'est donc l'artiste japonaise
20:28à qui vous avez consacré une grande exposition au Grand Palais jusqu'au 19 mars.
20:33Merci infiniment et bonne journée.