Salhia Brakhlia
Journaliste à franceinfo
La journaliste de franceinfo a filmé la campagne expresse des législatives anticipées au sein de la rédaction de la 2e radio de France. Un documentaire disponible à partir du 8 décembre sur la plateforme Explore.
Journaliste à franceinfo
La journaliste de franceinfo a filmé la campagne expresse des législatives anticipées au sein de la rédaction de la 2e radio de France. Un documentaire disponible à partir du 8 décembre sur la plateforme Explore.
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00:00Une fois, une fois n'est pas coutume, c'est moi qui vais lancer cette séquence et vous
00:04Salia qui allez répondre à mes questions.
00:06Alors ça peut surprendre nos auditeurs d'entendre que vous êtes mon invité média, on s'est
00:10d'ailleurs posé la question, mais finalement votre actualité est un événement média
00:14donc il n'y a pas de raison que je passe sous silence ce documentaire que vous co-signez
00:17avec Mouloud Achour, d'autant qu'il parle de France Info, de la manière dont on relaie,
00:22dont on traite, dont on couvre l'actu et notamment la dernière campagne des législatives,
00:27une campagne express de trois semaines suite à la dissolution de l'Assemblée, le premier
00:30volet de votre film se passait pendant la campagne présidentielle 2022, événement
00:34prévu de longue date, donc vous avez eu le temps de réfléchir au tournage, là, pour
00:38ce service public 2, il a fallu aller très vite, dès le soir de la dissolution, vous
00:43vous êtes dit, il faut filmer cette campagne ?
00:45Tout s'est passé effectivement dans la précipitation parce que la dissolution on l'apprend en direct
00:51avec la prise de parole du Président de la République, je me rappelle, c'était sur
00:54ce plateau, on avait un ministre qui était présent proche du Président de la République,
00:58Roland Lescure, qui lui-même l'apprend en direct et sa mâchoire se décolle totalement
01:02et donc là on se dit, ok, il se passe un truc, dans les heures qui suivent avec Jean-Philippe
01:08Baye, directeur de France Info, on en discute et il dit, bah oui, évidemment, il faut remettre
01:13une caméra dans les locaux de France Info parce que ce qu'on va vivre va être inédit
01:15et va être historique.
01:16Et vous commencez à tourner dès le lendemain matin, dès le lundi ?
01:18Non, on n'est pas aussi rapide que ça parce qu'il faut retrouver, il va falloir retrouver
01:22une camera woman qui est Charlotte Vautier qui a fait le premier film avec nous, une
01:26monteuse, voilà, on a dégainé assez vite et finalement on a pu retracer cette campagne
01:31folle à laquelle on a incité.
01:33Quelle est l'idée, Saliha, montrer l'hyper réactivité d'une rédaction face à une
01:37actu que personne n'a vu venir ?
01:39L'idée, elle est double en fait.
01:41L'idée c'est de montrer les coulisses d'un moment historique, d'un moment politique
01:46historique qu'on a tous vécu, qu'on a tous pas forcément compris encore aujourd'hui
01:50et donc de montrer comment les politiques se comportaient, quelles étaient les stratégies
01:53en coulisses, comment ils se comportaient même entre eux et puis il y avait aussi le
01:57travail journalistique, comment une rédaction telle que France Info parvient à vous informer,
02:04vous, auditeurs, pendant ce moment tendu, il faut le dire, qui a été stressant pour
02:08tous les français, pour nous aussi, journalistes dans la rédaction.
02:11C'est ça pour les journalistes, c'est quoi, c'est excitant, enthousiasmant de couvrir
02:14une campagne aussi intense et aussi courte ?
02:16Franchement, je vous le dis, on était fatigués parce qu'on s'était mangés d'abord
02:20il faut se rappeler le contexte, on avait eu une campagne des européennes qui avait
02:23été elle aussi très violente, très longue et par sa décision, Emmanuel Macron décide
02:29de prolonger cette ambiance tendue dans le pays et donc nous, journalistes, on est à
02:33la fois fatigués mais on doit être au rendez-vous pour vous informer au plus près, d'une manière
02:37le plus fiable, précise et avec beaucoup de rigueur, donc oui, c'est tendu.
02:42Autre particularité de ce scrutin, c'est que pour la première fois, le Rassemblement
02:45national était favori des sondages avec une possibilité de majorité absolue, ça a engendré
02:49des débats dans toutes les rédactions sur le thème « doit-on s'engager ou pas ? »
02:53et vous-même, Salia, posez cette question à celui que vous avez cité qui était encore
02:58directeur de France Info à l'époque, Jean-Philippe Baille.
02:59On peut se dire, t'es journaliste mais t'es aussi citoyen, donc à quel moment t'es plus
03:04citoyen que journaliste ?
03:05Si tu t'affiches en forgeant une opinion, quelle responsabilité tu peux avoir ?
03:12Tout ce que tu vas dire, tout ce que tu vas écrire sera lu et entendu à l'aune de cette
03:18position-là.
03:19C'est ça la difficulté.
03:20Les gens sont assez grands, à nous de les éclairer, certes, et de leur donner les clés
03:24pour voter, mais on ne va pas leur dire ce qu'il faut faire.
03:27Je pense que les gens en ont aussi ras-le-bol qu'on leur donne des leçons en permanence.
03:30Êtes-vous d'accord avec votre ancien patron, Salia Braklia, on sent que vous avez été
03:35tentée de prendre position ?
03:36Évidemment, on est des citoyens, on est journaliste, mais on est aussi citoyen, donc
03:40on a des avis.
03:41Surtout que nous, on les bosse, tous les programmes, on les connaît, les positions de chacun.
03:45Donc oui, on a des avis, et là où je suis totalement en accord avec ce qu'il a dit,
03:49c'est que le journaliste, il n'a pas à donner son avis.
03:51On n'est pas là pour ça.
03:52Je pense que les Français, ils s'en moquent de savoir pour qui j'ai des préférences,
03:58ils s'en moquent de mon avis sur tel ou tel sujet d'actualité.
04:00Ils veulent des faits.
04:01D'ailleurs, chez nous, le slogan, c'est « les faits, rien que les faits ». On expose
04:05les faits, on raconte ce qui se passe avec précision, on interroge les politiques, tous
04:10de la même manière, en amenant des contre-arguments pour faire avancer le débat, mais on n'est
04:15pas là pour donner notre avis.
04:16C'est ça la limite.
04:17– Certains, et beaucoup même, pensent que le service public penche à gauche.
04:21C'est une vue de l'esprit ?
04:22– C'est un cliché, c'est le cliché, pardon, on va se le dire directement, ce n'est
04:26pas le cliché sur France Info, c'est le cliché sur France Inter, donc c'est tout
04:29le service public.
04:30Bon, à moi, je ne me sens pas concernée, voilà, moi je fais mon travail de manière
04:34la plus neutre possible.
04:35– Alors vous montrez dans ce documentaire une ambiance d'une tristesse absolue du
04:39côté des politiques.
04:40On voit l'abattement de Gabriel Attal, de Bruno Le Maire, de Jean-François Copé,
04:43et ces images, finalement, elles sont plus fortes que l'interview que vous menez après
04:48avec eux.
04:49Là, on sent qu'ils ne trichent pas.
04:50Est-ce que leurs propos en off ne sont finalement pas plus intéressants que ceux qu'ils
04:54tiennent après quand les micros sont ouverts ?
04:56– Ce qui est sûr, c'est qu'on est plus dans l'humain, dans ce qu'ils disent
05:00en off, évidemment.
05:01Nous, on a la séquence maquillage avant l'interview, c'est un peu le confessionnel.
05:05Moi, j'adore aller les voir juste avant, ça dure 3-4 minutes, pour les sentir, pour
05:10avoir le mood du moment, s'ils sont agacés, s'ils sont fatigués.
05:12Et là, vous avez donné l'exemple de Gabriel Attal, quand il arrive chez nous ce matin-là,
05:17il est abattu, il est en train de défendre une décision qu'il n'a pas prise, pour
05:22laquelle il n'a pas été concerté, il subit la situation.
05:26– Et ça, quand vous voyez ça, vous changez votre interview, vos questions, vous modifiez
05:29les choses ?
05:30– Je sais comment l'aborder après, en direct.
05:31C'est-à-dire que je sais que ce qu'il va me dire ne sera pas totalement sincère
05:36parce qu'il sera là pour défendre quelque chose qu'il n'assume pas, et donc c'est
05:39à moi de râmer pour essayer de lui faire dire le plus de sincérité possible.
05:45– Il y a eu aussi François Hollande dans la loge de maquillage, et donc sur ce plateau
05:48pour être interviewé par vous, Salia, et par Jérôme Chapuis, François Hollande lui-même
05:53était candidat à ces législatives, et voilà ce qu'il confie juste avant l'interview.
05:58– Je pense que Macron va essayer de jouer, en refusant la démission d'Attal, à moins
06:03de vie au lendemain du scrutin, en disant, écoutez, il n'y a pas de majorité, si
06:11on était dans ce cas de figure, il n'y a pas de majorité RN, donc je n'ai pas à
06:15nommer Bardella, il n'y a pas de majorité qui se dégage, mais je demande au premier
06:23ministre de faire les consultations nécessaires.
06:26– Et on se revoit à la rentrée.
06:27– Oui, je pense qu'il va essayer ça, je ne dis pas que ça va marcher, mais il va
06:30essayer ça, ne serait-ce que pour avoir un gouvernement en place pour les journalistes,
06:35c'est ce que je ferai à sa place.
06:36– C'est bien ce qu'a fait Emmanuel Macron, est-ce que tous vos invités ont joué au
06:40jeu des pronotiques comme François Hollande ?
06:41– Oui, tous, ils ont tous essayé d'anticiper ce qui allait se passer, ce qui est intéressant
06:45dans le documentaire, c'est qu'on comprend que tout ce qu'ils se disent en coulisses
06:50pendant la campagne pose les jalons de ce qui se passe aujourd'hui, ils avaient tout
06:53prévu, tous, dans tous les partis, là on a entendu François Hollande, il est visionnaire,
06:58il sait ce qui va se passer, parce que lui-même, il a détenu le pouvoir, c'est le cas pour
07:03tous les autres, ils ont tout envisagé.
07:04– Voilà, le film disponible à partir de samedi sur la plateforme Explore, qui est
07:08un service de Media One dédié aux documentaires qu'on trouve sur Apple TV, Prime Vidéo,
07:12les Box Orange et Free, ça s'appelle « Service public 2, front contre front ».
07:16Merci, Salia Braquilla.
07:17– Merci Céline.