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Emma Oliveira est Psychocriminologue et elle décrypte avec nous les tueurs en série dans le cinéma et les séries, que ce soit de la fiction ou non !

00:00 Experte en tueurs en série
00:09 Hannibal Lecter / Le Silence des agneaux
03:02 Patrick Bateman / American Psycho
05:33 Aileen Wuornos / Monster
07:01 John Doe / Seven
09:40 Mindhunter
14:12 Dexter

#Alien #TrueCrime #ExpertReact

CRÉDITS
Journaliste : Émilie Semiramoth
Images : Nina Lasauca
Montage : Baptiste Bertheuil
Vignette : Pablo Auguste
Production : AlloCiné
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Transcription
00:00Bonjour, je suis Emma Oliveira, psychocriminologue et auteure du livre « Psychologue du crime » chez Fayard.
00:10Beaucoup disent que sa personnalité ne pourrait pas exister dans la vraie vie,
00:15justement par toute la complexité de ce personnage.
00:18Il a un côté très esthète, il aime la belle nourriture, il est attiré par l'art, il a des grandes connaissances,
00:25il est psychiatre, donc il est très intelligent et en même temps il cède à ses pulsions sexuelles et meurtrières.
00:33Pour autant, moi j'ai toujours tendance à dire que la réalité dépasse la fiction, de très très loin.
00:39Donc ce personnage, moi, ne me paraît pas totalement impossible à exister.
00:43C'est en reprend-tête Bundy, par exemple, c'est quelqu'un qui avait fait des études d'avocat,
00:46c'est quelqu'un qui avait fait des études en psychologie, qui s'est défendu lui-même,
00:50qui a réussi à s'échapper et qui est réputé pour avoir un QI supérieur à la normale.
00:54Pour autant, il a violé et tué des dizaines de jeunes filles en simulant un bras cassé avec des pulsions extrêmement meurtrières,
01:01puisqu'il en venait aussi à les mordre, donc il y avait quelque chose qui le débordait.
01:05Pour autant, c'était quelqu'un qui était extrêmement posé en société et qui s'est très bien défendu à son procès,
01:10mais trop mégalo, donc ça l'a desservi et il s'est quand même fait exécuter.
01:14Donc Hannibal Dexter, il existe quelque part.
01:17C'est tout à fait plausible, moi je trouve, à la fois dans son côté esthète et très intelligent,
01:22et à la fois dans ce côté complètement fou qu'il y a dans la série.
01:27Le cannibalisme, le cannibalisme existe.
01:29Alors c'est souvent l'oeuvre de psychotique, c'est-à-dire qu'il y a un rapport au corps de l'autre qui est complètement déformé.
01:33Moi ce que j'aime dans Hannibal Dexter, c'est cette perversion que l'acteur Anthony Hopkins joue tellement bien.
01:41Celle-ci, elle est très très rare.
01:42Très rares sont les pervers comme ça, mais il en existe.
01:45Et il en existe et c'est ceux qui vous mettent extrêmement mal à l'aise et ils jouissent de ça.
01:49J'ai dégusté son foie avec des fèves au beurre et un excellent Chianti.
01:57Pour le psychopathe, vous êtes un objet pour arriver à vos fins.
02:00Pour le pervers, vous êtes l'objet de la fin.
02:03C'est grâce à lui, enfin c'est grâce à vous qu'il arrive à jouir.
02:06Alors que pour le psychopathe, vous n'êtes qu'un objet pour atteindre sa jouissance.
02:10Donc là, Anthony Hopkins, il nous montre ce côté extrêmement pervers que peut avoir un tueur en série, mais qui reste très rare.
02:18J'ai parlé de Ted Bundy, mais il n'avait pas cette perversion avec ses victimes.
02:22Il n'en jouait pas.
02:23La plupart, il les a attaquées pendant qu'elles dormaient ou de manière relativement rapide et violente.
02:28Mais derrière, il y avait quand même de la nécrophilie.
02:31Il y avait des choses comme ça qui montrent qu'il était quand même très instable psychiquement et dans ses fantasmes surtout.
02:36Pour autant, moi, je ne trouve pas Hannibal Lecter complètement déconnecté de ce que j'ai pu voir chez les tueurs en série.
02:42Ted Bundy n'était pas psychologue, mais il avait, je ne sais pas si c'est une licence ou un master en psychologie.
02:47Et en droit, donc c'est tout à fait possible.
02:50Et ce qui nourrit sa perversion et qui fait qu'il est un très bon pervers, justement, c'est ses capacités empathiques,
02:56sa connaissance de l'humain qui sait comment faire défaillir Judy Foster ou les autres victimes qu'il a pu faire.
03:02Alors, il est d'autant plus crédible qu'à la fin, toute la question se pose de savoir s'il commet vraiment ses actes ou s'il ne fait que les fantasmer.
03:10J'ai toujours dit qu'on avait tous en nous des fantasmes meurtriers, pas aussi élaborés que lui.
03:16Mais cette nuance, elle est intéressante.
03:18Après, ce dont on parlait tout à l'heure, c'est les psychopathes fonctionnels.
03:22Et c'est exactement ce qu'il nous a montré.
03:24C'est un psychopathe fonctionnel qui s'est intégré dans la société, mais voire même qui a réussi, qui accède aux rêves américains,
03:30qui gagne énormément d'argent et qui dysfonctionne, soit en fantasme, soit dans le réel.
03:35Ça, on ne sait pas. C'est au spectateur de faire son choix.
03:37C'est intéressant parce qu'il est relativement crédible.
03:39Ce qu'il est peut-être moins, c'est le type de passage à l'acte auquel il se livre.
03:44Les psychopathes fonctionnels, comme ça, ils vont déraper.
03:46C'est ce qu'on a pu voir, d'ailleurs, en politique ou ce genre de choses, avec les occasions qui se présentent.
03:51C'est beaucoup d'agressions sexuelles et tout ça.
03:52C'est l'abus de pouvoir, en fait.
03:54À un moment donné, le psychopathe est tellement en recherche de pouvoir qu'il abuse de l'autre.
03:59Et qu'il se pense dans son droit, en plus.
04:01Là, on est dans quelque chose d'extrêmement violent.
04:04Ce qui ressemble moins au psychopathe fonctionnel.
04:06Après, ce qui est intéressant, c'est aussi, là encore, tout le côté esthète, tout le côté maniaque.
04:11Et il n'est pas rare que le psychopathe soit très maniaque.
04:14Il recherche la perfection, il veut être parfait.
04:17Il veut être beau, il veut être riche, il veut avoir le pouvoir.
04:19Donc, American Psycho, moi, me fait beaucoup penser au Loup de Wall Street.
04:23Mais DiCaprio ne passe pas à l'acte.
04:25Il dérape de temps en temps, il a de l'abus de pouvoir.
04:27Mais il ne dérape pas autant que lui.
04:29Et dans ce cas-là, le Loup de Wall Street ressemblerait plus que même à la réalité.
04:33Mais peut-être que dans American Psycho, on reste dans le fantasme.
04:36Le psychopathe fonctionnel, il ne base pas sa psychopatie sur le sadisme.
04:41Il ne cherche pas à faire souffrir l'autre.
04:42Il ne cherche pas à prendre le contrôle à travers la destruction de l'autre.
04:46Un psychopathe fonctionnel, il a réussi, grâce très certainement à l'éducation qu'il a eue,
04:51à activer ce qu'on appelle, nous, le surmoi.
04:53C'est-à-dire à avoir des règles, quand même, à ne pas dépasser.
04:56Et pas forcément à avoir du pouvoir en écrasant les autres de manière réelle.
05:01En les tuant, en les découpant, en les poignardant.
05:04Par contre, ils vont chercher à réussir, coûte que coûte, dans leur vie.
05:08Ça va faire d'eux les meilleurs médecins, ça va faire d'eux les meilleurs avocats,
05:12ça va faire d'eux les meilleurs policiers.
05:13Déjà parce qu'ils ont un sang-froid que l'on n'a pas, nous, dans la normalité.
05:17Et parce qu'ils ont extrêmement confiance en eux.
05:21Et on avance bien quand on a confiance en soi.
05:23Mais c'est ce qui fait que, des fois, ça dérape.
05:26Plus ils ont le pouvoir, plus ils en recherchent, et plus il y a des risques de déraper.
05:33La science, en tout cas, les études qui ont été faites,
05:36ont tendance à nous dire que les femmes sont moins nombreuses.
05:39Puis avec des échelles de psychopathie moins élevées.
05:41Donc il y a moins de tueuses en série.
05:43Ce qui est intéressant, surtout, c'est la différence de motivation dans le crime
05:46chez les femmes et chez les hommes.
05:48Les deux, il y a un besoin de reprendre le contrôle.
05:50Le passage avec meurtrier, c'est toujours un besoin de reprendre le contrôle.
05:53Chez les femmes, il va être plus souvent motivé, soit par la colère, la rancœur, la vengeance,
05:57soit par l'argent.
05:58On ne connaît pas de tueuses en série, en tout cas, on n'en a pas repéré,
06:02qui passaient à l'acte pour des raisons sexuelles.
06:04Alors, certains diront, c'est parce que c'est facile,
06:06et qu'une femme qui a envie d'avoir une relation sexuelle, elle peut trouver facilement.
06:10Mais j'ai envie de dire qu'un homme aussi, il suffit par exemple d'aller voir une prostituée.
06:13C'est à la portée de tous.
06:15Il y a quand même chez l'homme ce besoin d'aller prendre quelqu'un d'autre sexuellement,
06:20et c'est aussi ça qui fait jouir le violeur ou le tueur en série.
06:24Enfin, une partie d'entre eux.
06:25Chez la femme, on n'a pas ça.
06:27Chez la femme, on va avoir une recherche de vengeance.
06:29On parle notamment des veuves noires.
06:31Donc, ces femmes qui tuent les hommes, soit pour leur voler leur argent,
06:34mais aussi très motivées par la haine de l'autre masculin,
06:38parce qu'effectivement, quand on reprend leurs histoires familiales, personnelles,
06:42elles ont souvent été abusées et maltraitées par des hommes,
06:46et des fois par leur propre père.
06:47Et ce film, il est intéressant parce qu'il met en lumière, effectivement,
06:50un des rares cas connus de tueuses en série,
06:53qui a défié un peu la chronique, mais elle en a pas fait beaucoup.
06:55Elle s'est fait arrêter avant.
06:56Elle en a fait trois, je crois.
06:57Je n'ai rien fait du tout.
06:59Lynn, tu sais très bien te coucher.
07:02Il y a des tueurs en série qui ont fait des mises en scène théâtrales.
07:05Très souvent, c'est plus le passage à l'acte qui peut l'être.
07:08Après, les mises en scène qu'on peut voir dans les fictions, c'est rarement le cas.
07:11On retrouve certes des cadavres de femmes dénudées,
07:15à qui il manque des membres, des fois.
07:17On a retiré l'utérus, on a retiré la poitrine,
07:19mais il n'y a pas un côté esthétique que peuvent nous mettre souvent les films ou les séries.
07:23Ou alors, c'est extrêmement rare.
07:25Le plus intéressant, je trouve, dans Seven,
07:27c'est ce jeu entre le tueur en série et la police.
07:31Et ça, c'est des choses qui ont existé très peu en France,
07:33beaucoup plus aux États-Unis, parce que la presse communique aussi là-dessus.
07:36En France, normalement, pareil, on ne communique pas.
07:39Donc, il y a ce jeu entre le tueur et la police
07:42qu'on a retrouvé aussi avec le tueur du Zodiac et d'autres.
07:44BTK, le premier qui envoyait des preuves de son existence,
07:48c'est que c'était lui qui avait commis des meurtres
07:50avec des pièces d'identité, des permis de conduire, des choses comme ça,
07:53à travers les médias, et donc la police.
07:55Et ce jeu-là est très bien mis, je trouve, avec Seven.
08:00Vous devriez me remercier.
08:02Ah oui ? Pourquoi ?
08:03Parce que c'est grâce à moi qu'on se souviendra de vous plus tard.
08:06Il y a cette relation qui se joue entre le policier et le tueur en série,
08:11du chat et de la souris,
08:13avec souvent d'ailleurs des policiers qui ne sont pas blancs comme neige.
08:16Notamment Brad Pitt, je ne sais plus trop ce qu'il fait,
08:18mais il a toujours des choses très bien.
08:20Il y a un délire mégalomaniaque de dire
08:23et en tant que psychopathe il en est persuadé.
08:25Et c'est bien pour ça qu'ils font de plus en plus d'erreurs,
08:28parce qu'ils prennent de plus en plus confiance.
08:30Et je pense encore une fois à BTK,
08:32qui s'est fait arrêter parce qu'il a envoyé une disquette
08:34en leur demandant de ne pas faire de recherche dessus.
08:37Évidemment, c'est la première chose que les services de police ont fait.
08:41Et quand ils l'ont arrêté, ils ont dit
08:42« Mais je vous avais dit de ne pas le faire ! »
08:43Oui, bah oui, mais non. On l'a fait, désolé.
08:46Donc il y a ce jeu du chat et la souris
08:48où le psychopathe est persuadé d'être plus fort que la police.
08:51Et il y a aussi derrière, parce que souvent les médias s'ajoutent,
08:54une recherche de célébrité.
08:56Et c'est là où aux Etats-Unis ça marche beaucoup mieux qu'en France.
08:59En France, encore une fois, les tueurs en série sont peu célèbres.
09:03On n'en parle pas trop, on oublie leur nom.
09:05Le Zodiac en est la parfaite représentation,
09:07avec ses codes qu'il envoyait,
09:09où il était censé donner son identité.
09:12Identité finalement qu'on n'a jamais vraiment retrouvée.
09:14Il y a plusieurs hypothèses, mais rien n'a été prouvé.
09:16Donc c'est des tueurs en série qui finalement
09:18ont vraiment été plus forts que la police.
09:20Je ne l'ai pas vécu quand j'ai travaillé dans la police.
09:23Tous les tueurs en série qu'on a recherchés se sont fait arrêter.
09:26Mais entre deux meurtres, il y a quand même cette tension latente qui est là.
09:31J'imagine que si derrière se rajouteraient
09:33des petits mots dans la presse du tueur en série qui communique,
09:37ça pourrait en énerver plus d'un, oui.
09:40Cette série, elle est très importante à mettre
09:43parce que c'est la naissance même du profilage.
09:45Elle est très réaliste.
09:46Elle reprend comment Ressler et Doublas ont fondé
09:50le profilage aux Etats-Unis dans les années 80.
09:53Avec les premières grilles, c'est-à-dire avec tous les interviews
09:56qu'ils ont pu faire biographiques des tueurs en série,
09:58c'est essayer de déterminer les différentes typologies
10:02qui existent chez les tueurs en série.
10:04Typologies qui sont quand même très bien faites à l'époque
10:07et dont on se sert toujours, même en France.
10:09Vous avez commencé par qui ?
10:10Sarkozy, Whitman, Manson bien sûr,
10:13mais le fils de Sam illustre parfaitement mon propos.
10:15Aujourd'hui, c'est différent.
10:17On ne sait plus ce qui pousse les gens à commettre des crimes.
10:19Alors oui, il s'est passé 40 ans.
10:21Dès le départ, il y avait un problème aussi culturel
10:23entre les Etats-Unis et la France,
10:25donc il y a des nuances qu'on essaye d'apporter quand on s'en sert,
10:28mais c'est un travail extraordinaire qu'ils ont fait
10:31et qui nous a permis de mieux cerner,
10:33de mieux comprendre la personnalité des tueurs en série.
10:36Pour mon cas, je ne vais pas me prononcer
10:38au nom de tous les psychocriminologues,
10:40il est plus facile pour moi de prendre de la distance
10:42avec un criminel qu'avec une victime.
10:44On est souvent très empathique,
10:46on a un jeu d'identification qui se fait, de projection,
10:49et c'est souvent très lourd quand on repart,
10:51quand on est face à cette souffrance.
10:53Un tueur en série, c'est une curiosité
10:55qui se veut avant tout intellectuelle,
10:57et donc c'est un intérêt qui est intellectualisé.
10:59Et à mon sens, c'est assez facile de mettre de la distance.
11:02Je ne m'identifie pas du tout à eux.
11:04Ça reste des êtres humains,
11:06souvent avec des troubles psychologiques plus ou moins forts.
11:09Quand on a affaire à un psychopathe,
11:11on ressent que la relation est biaisée.
11:13Et que c'est quelqu'un de relativement mégalo, égocentrique,
11:16et qu'on va surtout parler de lui.
11:18Il y a un côté manipulatoire, mais c'est comme un jeu.
11:21Ceux qui m'aident très mal à l'aise,
11:23et je pense qu'on est assez tous d'accord
11:25dans le monde de la psychologie pour le dire,
11:27c'est les pervers.
11:28Les pervers, à l'image d'Annabelle Lecter, par exemple.
11:30Parce que ceux-là, ils jouissent du mal qu'ils vous font,
11:33ils jouissent du fait de vous déstabiliser,
11:35et donc ils vont chercher une faille en vous
11:37et vous mettre à mal avec.
11:39Donc les pervers, ça peut être extrêmement dérangeant
11:41d'être à leur contact.
11:42Mais bien heureusement, ils sont très peu nombreux,
11:44beaucoup moins que les psychopathes.
11:45Je pense qu'il y a certaines choses qui m'aident mal à l'aise,
11:48mais c'est de façon très singulière, selon les gens.
11:50J'ai travaillé pas mal sur la cyberpédophilie.
11:52Il y a des jours, c'était extrêmement lourd,
11:54et ça l'était d'autant plus que j'avais des enfants.
11:56Donc, encore une fois, il y a un jeu d'identification.
11:58Et dès qu'on tombe dans l'identification ou la projection,
12:01forcément, ça nous met à mal personnellement.
12:03Il y a des policiers qui ont du mal
12:05de travailler par exemple avec des pédophiles
12:07ou de les auditionner,
12:08parce que c'est trop violent pour eux.
12:10Et il y en a d'autres, ça va être avec des victimes de viol.
12:12Peu importe.
12:13On a chacun nos faiblesses, quelque part.
12:15Et c'est important, en amont, pour chaque policier
12:18ou chaque psychocriminologue,
12:19de savoir et de se comprendre
12:21et de savoir ce qui nous met à mal, en fait.
12:22Donc oui, je pense que ça nous est tous arrivé
12:24de rentrer à la maison avec plein de choses dans la tête,
12:27assez noires.
12:29Mais je pense que ce qui est finalement plus difficile,
12:31c'est quand on travaille sur une affaire d'actualité,
12:34qu'on sait qu'à n'importe quel moment,
12:36une victime peut être à nouveau être faite.
12:38Et c'est cette impuissance qu'on a.
12:39Et l'impression, quand on dîne en famille ou avec des amis,
12:42de passer à côté de quelque chose de très grave
12:45qui est peut-être en train de se jouer.
12:47Moi, j'ai aimé le côté réaliste.
12:48Pour une fois, on s'intéresse aux profilers.
12:51Pas en exclusivité aux tueurs en série.
12:53Et il y a un livre, d'ailleurs, qui est très bien.
12:55Et c'est l'histoire de ces profilers.
12:57C'est la naissance du profilage.
12:59C'est la difficulté d'un profiler
13:00de travailler dans des services de police.
13:02Parce que, comme dans la vraie vie,
13:04il y a des gens qui sont très intéressés
13:06par le monde de la psychologie
13:07et d'autres qui sont totalement hermétiques
13:09et qui pensent que c'est des choses
13:11qui n'ont aucun intérêt
13:12et qui sont des fabulations de l'esprit.
13:14Il y a beaucoup de séries
13:15qui ont monté des profilers
13:16qui avaient des flashs,
13:17qui avaient des intuitions.
13:18Et ça dessert beaucoup, finalement,
13:19parce qu'il y a cette sorte de préjugé
13:21qui plane sur nous.
13:22Ou on nous compare à des médiums et autres.
13:24Or, je ne vais pas dire que c'est une science exacte,
13:26mais ça repose sur les ressources humaines, oui,
13:28mais aussi sur la psychologie
13:30et la compréhension qu'on a des mécanismes humains.
13:33Donc, je pense qu'à partir du moment
13:34où on traite de l'humain,
13:35ce qui est le cas dans le crime,
13:37c'est important
13:38d'y mettre des connaissances en psychologie.
13:40Un profiler,
13:42sa fonction,
13:43c'est de faire de l'aide à l'enquête.
13:45L'enquête, elle se passe
13:46psychocriminologue ou pas.
13:47On est là pour avoir
13:48une compréhension plus humaine.
13:50Quand le policier va essayer
13:51de comprendre
13:52comment ça s'est passé,
13:54nous, on essaye de comprendre
13:55pourquoi ça s'est passé.
13:56Et une fois qu'on sait pourquoi,
13:58ou qu'on a une idée, plutôt, du pourquoi,
14:00et bien, généralement,
14:01on va prioriser
14:02les axes d'enquête.
14:03Et c'est cette compréhension-là
14:05que le psy a de manière plus fine
14:07parce que c'est ses études
14:08et sa formation.
14:09Il peut aider l'enquêteur
14:11à prioriser ses axes.
14:13Je me souviens de Trinity Killer,
14:14mais en fait,
14:15il m'a tout de suite fait penser
14:16au personnage de BTK,
14:18de Nice Raider.
14:19Parce que déjà,
14:20au niveau de la moyenne d'âge,
14:21on est à peu près ça,
14:22au moment où il s'est fait arrêter.
14:23Et quelqu'un qui a été
14:25très bien intégré
14:26dans sa communauté,
14:27qui travaillait même...
14:29Alors, il n'était pas pasteur,
14:30mais il travaillait dans l'église
14:31qui était à côté.
14:32Il avait sa femme,
14:33ses enfants,
14:34et il œuvrait pour la communauté.
14:36Et à côté de ça,
14:37il avait des fantasmes
14:38extrêmement violents.
14:39Et il a fait
14:409 ou 10 victimes, je crois.
14:42Dont ses premières victimes,
14:43c'était une famille
14:44où il a étouffé
14:46le petit frère
14:47qui avait 4 ou 5 ans
14:48avec un sac plastique
14:49sur la tête.
14:50La mère et le père
14:51ont été tués.
14:52Et la jeune fille de 12 ans,
14:54celle qui l'intéressait d'ailleurs
14:55à la toute base,
14:56il l'a pendue dans la cave
14:57et s'est masturbée sur elle.
14:59Et ce qui lui plaisait aussi,
15:00c'était de voir la lenteur
15:01de la souffrance
15:02de ces victimes.
15:03Donc ça a été une famille,
15:04après ça a été une voisine.
15:05Alors au niveau
15:06du choix des victimes,
15:07c'était assez disparate.
15:08Ce n'était pas que
15:09les jeunes filles
15:10qui l'intéressaient.
15:11Donc il a été quand même
15:12capable de choses
15:13extrêmement violentes
15:14parce que c'est des morts violentes.
15:15Mais à côté de ça,
15:16il avait sa vie de famille
15:17et sa femme
15:18qui avait été interviewée
15:19disait qu'elle imagine
15:20pas une seconde
15:21que son mari ait pu faire ça.
15:22On a du mal à y croire.
15:23Dexter, c'est le tueur en série,
15:25à mon sens,
15:26par excellence,
15:27qu'on a tous aimé.
15:28Et c'est quand même pas facile
15:29d'écrire une série
15:30où on fait aimer les gens
15:31sur un tueur en série.
15:32D'ailleurs, je me suis toujours dit
15:33qu'un jour,
15:34j'écrirai un livre
15:35sur un tueur en série
15:36que tout le monde aime.
15:37Mais on m'a volé l'idée.
15:38Il faudrait que je trouve
15:39autre chose qu'un Dexter.
15:40Dexter, il a un côté sympathique,
15:42il a un côté humain.
15:43C'est très fictionné.
15:44Autant Hannibal Dexter,
15:45je l'imagine bien
15:46dans notre vie réelle,
15:47autant Dexter,
15:48j'y crois moins.
15:49Mais il y a un côté romancé
15:50qui nous plaît.
15:51On lui pardonne
15:52le fait de tuer
15:53parce qu'il tue
15:54des gens qu'il mérite.
15:55Il y a qu'il a vécu
15:56dans l'enfance
16:02même à cet âge-là,
16:03quand on assiste
16:04au meurtre violent
16:05d'un de ses parents,
16:06je ne suis pas sûre
16:07que ça fasse de nous
16:08un tueur en série
16:09qui a ce besoin
16:10aussi prégnant
16:11de détruire.
16:12Parce que la façon
16:13dont il tue,
16:14Dexter,
16:15c'est quand même
16:16avoir le cœur bien accroché,
16:17découper des gens.
16:18Il y en a qui arrivent
16:19et qui le font.
16:20C'est la meilleure façon
16:21de se débarrasser d'un corps,
16:22de le découper.
16:23Ce qui, moi,
16:24ne me paraît pas très crédible
16:25chez Dexter,
16:26c'est toutes ces relations
16:27affectives qu'il va avoir.
16:28Celle qui tient
16:29avec sa sœur déjà
16:30et qui va tenir
16:31avec d'autres femmes,
16:32notamment, à un moment donné,
16:33il a une petite amie
16:34qui est une tueuse en série,
16:35je ne sais plus comment elle s'appelle.
16:36Là, pour le coup,
16:37c'est plus compliqué.
16:38Parce que c'est des gens
16:39qui ont du mal,
16:40justement,
16:41à entretenir
16:42des relations affectives,
16:43à aimer véritablement
16:44par pur altruisme
16:45de l'autre.
16:46Dexter,
16:47au début,
16:48dans les premières saisons,
16:49moi, je trouve qu'il est
16:50très bien décrit,
16:51justement,
16:52dans sa froideur
16:53et cette maladresse sociale.
16:54Il manque d'agilité sociale.
16:55Et finalement,
16:56plus la série va avancer
16:57et moins on va le voir.
16:58Ça, il y a un problème
16:59du profil.
17:00Vu le tueur en série
17:01qu'il a à côté,
17:02on pourrait penser
17:03que cette maladresse
17:04l'accompagne tout le temps.
17:05Et ils ont fini
17:06par gommer ce trait-là.
17:07Après,
17:08ce qui est aussi
17:09très grandiloquent,
17:10c'est qu'à chaque épisode,
17:11il y a des meurtres
17:12à la Hollywood.
17:13Heureusement,
17:14nous, dans les services
17:15de police,
17:16on n'a pas ça
17:17tous les quatre matins.
17:18Bien que,
17:19des fois,
17:20ils ont pris des cas
17:21en s'inspirant
17:22de faits réels,
17:23ce type de meurtre
17:24arrive quand même
17:25très rarement.
17:26Oui, je veux jouer.
17:27J'ai très,
17:28très envie de jouer.
17:29Un côté aussi théâtral,
17:30peut-être pas,
17:31mais il y a
17:32un mode opératoire
17:33qui prend naissance
17:34dans le fantasme
17:35sous-jacent
17:36à l'envie de tuer.
17:37Le problème,
17:38c'est que les tueurs
17:39en série,
17:40voire même
17:41les violeurs en série aussi,
17:42n'ont pas toujours
17:43possibilité de mettre
17:44en route
17:45leur mode opératoire
17:46parce qu'en fait,
17:47c'est une victime.
17:48Une victime qui résiste
17:49et il y a un environnement
17:50qui fait que,
17:51des fois,
17:52il peut y avoir
17:53des passants,
17:54des témoins,
17:55des choses
17:56qui ne sont pas
17:57toujours
17:58en sécurité,
17:59mais il y a
18:00cette recherche aussi
18:01de faire avouer l'autre
18:02qui mérite sa mort.
18:03Donc, c'est comme
18:04une sorte de jugement
18:05dans la mise en scène
18:06de Dexter.
18:07Ce qui est aussi intéressant,
18:08c'est le fait qu'il garde
18:09une goutte de sang.
18:10Tous les tueurs en série
18:11ne gardent pas
18:12des trophées
18:13de leurs victimes.
18:14Certains, oui,
18:15c'est un besoin
18:16de revivre leur meurtre.
18:17Certains se sont contentés
18:18de prendre des photos.
18:19Peut-être Bundy
18:20allait déterrer les cadavres
18:21pour les revioler,
18:22par exemple.
18:23On n'est pas obligé
18:24de garder un souvenir.
18:25C'est souvent
18:26pendant qu'on les recherche
18:27que c'est bien eux
18:28qui ont commis ce crime-là.
18:29C'est très américain.
18:30Si on reprend
18:31l'exemple de Fourniret,
18:32lui, il n'avait pas
18:33de trophée,
18:34mais il a quand même
18:35tout consigné
18:36dans des carnets.
18:37Donc, il y a quand même
18:38ce besoin
18:39de garder un souvenir
18:40de ce qu'ils ont accompli.
18:41Le psychopathe,
18:42il est très à cheval
18:43sur ses valeurs.
18:44Il y a des choses,
18:45pour lui,
18:46qui sont inadmissibles.
18:47Par exemple,
18:48doubler dans une queue
18:49devant le cinéma,
18:50pour lui,
18:51serait inadmissible.
18:52C'est des choses
18:53comme ça dans lesquelles
18:54il faut se focaliser.
18:55C'est leur loi,
18:56c'est leur code,
18:57c'est leur valeur
18:58qui sont concomitantes
18:59avec celles de la société
19:00ou pas.
19:01Par contre,
19:02tuer quelqu'un
19:03qui vous énerve
19:04ou qui vous empêche
19:05d'accéder au poste de souhaiter,
19:06c'est tout à fait envisageable.
19:07Mais parce qu'eux aussi,
19:08ils ont une vision
19:09très mégalomaniaque
19:10d'eux-mêmes.
19:11Donc, ils sont au-dessus
19:12des lois.
19:13Par contre,
19:14les autres doivent respecter
19:15la loi.
19:16Ils sont très intolérants
19:17avec les autres personnes.
19:18Ça, c'est le principe
19:19du psychopathe.
19:20Au niveau de Dexter,
19:21le fait qu'un policier
19:25C'est vrai que
19:26moi, j'ai rencontré
19:27une fois un psychopathe
19:28âgé de 13 ou 14 ans.
19:29C'est terrible de dire ça
19:30parce que
19:31c'est très rare
19:32et c'est quelqu'un
19:33qui avait jeté son petit frère
19:34du haut du septième étage.
19:35Et quand je m'étais entretenue
19:36avec la juge d'instruction,
19:37c'est « qu'est-ce qu'on fait
19:38de ce jeune homme ? »
19:39Et quand j'étais allée
19:40le voir en prison
19:41pour faire son expertise,
19:42c'était extrêmement compliqué
19:43parce qu'il n'y avait
19:44absolument aucun regret
19:45si ce n'est de l'avoir dit
19:46pour faire du mal à son père
19:47mais qu'à cause de ça,
19:48il se retrouvait en prison.
19:49Maintenant que son petit frère
19:50de 4 ans soit mort,
19:51en plus pas sur le coup,
19:52il a mis quelques heures
19:53à mourir,
19:54ne le touchait absolument pas.
19:55Et il n'était guidé
19:56que par l'envie
19:57de faire du mal à son père
19:58et de se venger
19:59du divorce de ses parents.
20:00Quand on traite
20:01avec les psychopathes,
20:02et c'est ce que je retrouve
20:03aussi en entreprise,
20:04c'est de leur montrer
20:05l'intérêt qu'ils ont
20:06de suivre ce code-là.
20:07Il n'y a que comme ça
20:08que ça marche un psychopathe.
20:09Quel intérêt j'ai
20:10de faire ça ?
20:11Si c'est peut-être
20:12de ne pas aller en prison,
20:13ça peut peut-être aider.
20:14Mais ce n'est pas évident,
20:15donc il y a d'air.

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