• le mois dernier
"C'est ce qu'on appelle un exode."
En quelques jours, c'est presque toute la population de cette enclave séparatiste en Azerbaïdjan qui a fui pour l'Arménie. On a voulu comprendre quel avenir se dessine pour ces plus de 100 000 personnes issues du Haut-Karabagh.

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Transcription
00:00J'aimerais vous montrer une vidéo
00:02et vous demander de commenter ce qu'on y voit
00:04et surtout ce qu'on n'y voit pas.
00:08Eh bien, c'est la capitale, Stéphanie-Aguerte,
00:10vidée de sa population.
00:12On voit quelques voitures,
00:15quelques chaises, un vélo.
00:18C'est quelques jours après la dernière
00:22offensive azerbaïdjanaise.
00:25Je connais, j'y ai été.
00:27Donc, d'habitude, il y a du monde.
00:31C'est une ville morte, quoi.
00:35Ce sont les effets de la guerre, comme on dit.
00:43Qu'est-ce qui s'est passé quelques heures,
00:45probablement, avant cette vidéo ?
00:47Il s'est passé quelque chose de simple
00:49et dans le prolongement de la victoire militaire
00:52de l'Azerbaïdjan en 2020,
00:54c'est-à-dire par achever ce succès
00:59et faire en sorte que le Haut-Karabakh,
01:03la République du Haut-Karabakh,
01:05disparaisse des discussions,
01:08des documents, de toute forme de compromis,
01:11parce que Bakou veut retrouver le contrôle
01:15sur ce qu'il considère comme la totalité
01:19de son territoire.
01:21Or, il y aurait dû avoir des négociations
01:24telles que c'était prévu
01:26d'après l'accord de cesser le feu de 2020.
01:48C'est la fin d'une région ?
01:49C'est la fin d'une guerre,
01:52mais ce n'est pas la fin d'une conflictualité.
01:54Il faut comprendre que cette région,
01:56au-delà du Karabakh,
01:57donc le Caucase du Sud,
01:59Arménie, Georgie, Azerbaïdjan,
02:01est une région de haute conflictualité.
02:05Parce que, il y a plusieurs raisons.
02:09L'une des principales,
02:10c'est que vous vous trouvez
02:12exactement au point d'intersection
02:14de la périphérie de trois anciens empires,
02:16c'est-à-dire la Russie, la Turquie,
02:18l'Empire ottoman, et l'Iran, la Perse.
02:21Et quand on sait que le principe d'un empire,
02:23c'est d'avoir une capitale pacifiée,
02:25un centre pacifié,
02:27et une périphérie violente,
02:28parce que dans les empires,
02:29il n'y a jamais de frontières,
02:30il n'y a que des fronts.
02:31Donc, imaginez le caractère mouvant
02:34de ces fronts dans l'histoire,
02:37qui traduisent finalement
02:39un haut degré de conflictualité
02:42pour les populations qui y sont établies
02:45depuis des siècles et des siècles.
02:46Si je reprends cette vidéo,
02:48les gens, ils sont où ?
02:52Ils sont partis.
02:53Ils ont quitté la ville,
02:54ils ont quitté leur village,
02:56et ils ont pris le chemin de l'exil
02:57en direction de l'Arménie.
03:08Vous avez des images,
03:09des vidéos qui circulent,
03:11où l'on voit des colonnes de voitures
03:13partir en direction de l'Arménie
03:15par la seule route qui existe
03:17et qui relie le Karabakh
03:19au sud de l'Arménie.
03:21Et on a comptabilisé
03:23environ un peu plus de 100 000 personnes.
03:26Je pense qu'il en reste un tout petit peu
03:28encore dans ce qu'on appelle
03:31la République du Haut-Karabakh.
03:34Il doit rester quelques centaines
03:36de personnes peut-être,
03:37d'après ce que l'on sait.
03:39Et qu'est-ce que racontent
03:39ceux qui ont fui ?
03:40Ceux qui ont fui racontent
03:42qu'ils ont eu très peur.
03:44Ils étaient sidérés par la violence
03:46de l'attaque fin septembre.
03:50Ils racontent qu'ils sortent
03:52de neuf mois de blocus,
03:54mis en place depuis le 12 décembre 2022.
03:58Je dirais que c'est le traitement
04:01classique d'un exode.
04:20C'est quoi le futur de ces gens ?
04:39Alors, il y en a deux, je dirais.
04:43Soit les négociations
04:47entre l'Azerbaïdjan
04:49et ce qui reste des autorités du Karabakh
04:52débouchent sur un compromis
04:54où les gens pourraient revenir
04:56en toute sécurité.
04:58Mais je n'y crois pas.
05:01Mais vraiment pas.
05:02Parce qu'il y a trop de peur,
05:03il y a trop de haine,
05:04il y a trop de rejet, etc.
05:05Soit c'est l'installation
05:09dans le sud de l'Arménie,
05:11voire à Yerevan,
05:13voire quitter l'Arménie
05:14parce que ces gens-là ont des familles
05:16en Russie, en Georgie,
05:18enfin, je ne sais pas.
05:20Et s'installer définitivement
05:23dans ces nouvelles villes
05:27parce qu'il faut éviter la guerre.
05:29Aussi, on peut les comprendre.
05:31L'Azerbaïdjan dit quoi aujourd'hui
05:32à propos du Karabakh ?
05:34L'Azerbaïdjan dit
05:36moi, j'ai retrouvé le contrôle
05:39de mon territoire
05:40qui était reconnu souverainement.
05:43L'Azerbaïdjan dit
05:44on a mis fin à une injustice
05:48depuis 30 ans.
05:50L'Azerbaïdjan dit
05:51qu'il veut donner
05:54toutes les garanties
05:55de protection des minorités
05:58et donc de sécurité des Arméniens.
06:01Mais le problème, c'est que
06:03personne ne croit ce discours.
06:14L'inconvénient, enfin, c'est fini.
06:44Je lisais aujourd'hui que Catherine Colonna
06:53avait annoncé la livraison
06:54de matériel militaire à l'Arménie.
06:56Et en lisant ça, je me demandais
06:57qu'est-ce que ça racontait de la suite ?
06:59En fait, il y a un déséquilibre
07:01stratégique et militaire
07:03largement en faveur de l'Azerbaïdjan.
07:05Et la Russie n'a pas assumé
07:09sa responsabilité d'allié de l'Arménie
07:12parce qu'il y a la guerre en Ukraine,
07:13parce que tout ceci se fait
07:14sur fond de guerre en Ukraine,
07:15c'est fondamental de le dire.
07:17Donc la France veut démontrer aussi
07:20que si on arrive à rééquilibrer
07:22un peu le rapport de force militaire
07:24entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan,
07:26on pourrait arriver à une forme
07:28de stabilisation et non pas
07:30de normalisation, mais de réduction
07:35de l'évaluation de la menace.
07:39Donc voilà, on est dans ce contexte-là.
07:41En fait, l'après, puisque c'est
07:43ce qui nous intéresse ici,
07:45l'après, soit on va vers
07:49une logique de paix entre deux États,
07:53l'Arménie et l'Azerbaïdjan,
07:55avec un accord signé.
07:56Le deuxième scénario,
07:58une paix négative avec une zone grise
08:01et une guerre.

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