Les syndicats agricoles se mobilise partout en France pour protester contre l'accord qui pourrait être signé entre l'Europe et les pays du Mercosur. La France et l'Italie ont fait savoir qu'ils ne signeraient pas ce traité de libre échange en l'état. Mais c'est encore insuffisant pour le bloquer. Écoutez la position de Manon Aubry, eurodéputée LFI, membre de la délégation pour les relations avec le Mercosur au parlement européen.
Regardez L'invité pour tout comprendre avec Yves Calvi du 18 novembre 2024.
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00:00Il est 18h42, bonsoir Manon Aubry, vous êtes Eurodéputée France Insoumise, merci de nous rejoindre sur RTL
00:08puisque vous interpellez la présidente de la Commission Européenne sur l'accord qui pourrait lier l'Union avec le Mercosur.
00:14A 18h15, nous recevions un maire rural qui s'inquiétait lui aussi, vous évoquez vous un possible désastre, un possible désastre ?
00:22Oui, un désastre pour notre agriculture, pour notre santé, pour la planète.
00:27Un désastre pour l'agriculture d'abord parce qu'on va inonder le marché européen de centaines de milliers de tonnes de bœuf, de volaille, de miel, de soja,
00:36comme si on n'était pas capable de le produire en France, en plus posant une concurrence déloyale pour nos agriculteurs
00:43parce que ce bœuf, cette volaille, etc. seront produites avec des hormones de croissance, des OGM, des pesticides qui sont interdits dans l'Union Européenne.
00:52Rendez-vous bien compte, 30% des pesticides qui sont autorisés au Brésil sont interdits dans l'Union Européenne.
00:59Donc moi je ne suis pas prête à manger des choses qu'on interdit dans l'UE mais qui viennent de l'autre bout du monde.
01:04Et c'est le dernier désastre, c'est le désastre pour la planète.
01:07Pourquoi importer de l'autre bout du monde ce qu'on sait produire ici, en plus avec des agriculteurs qui font leur travail de manière formidable en France et en Europe ?
01:14Vous nous parlez de concurrence déloyale sur le plan sanitaire, donc pas simplement économique ?
01:20Non, pas simplement économique. D'abord, la France, l'Union Européenne a largement les moyens agricoles de produire, de répondre à nos besoins.
01:28Donc moi, ça me semble toujours aberrant d'aller chercher à l'autre bout du monde ce qu'on peut produire ici.
01:33Mais en plus, évidemment, ce ne sont pas les mêmes règles.
01:35Et aujourd'hui, ni la France ni l'Union Européenne ne sont capables de garantir ces mêmes règles.
01:40Je vais vous donner juste un seul exemple de ça, c'est la Commission Européenne elle-même.
01:44J'aime bien citer la Commission Européenne pour démonter leurs arguments.
01:47La Direction Générale de la Santé, qui a pondu un rapport qui est sorti il y a quinze jours,
01:52qui a dit qu'elle était incapable de garantir que le boeuf importé du Brésil ne comportait pas de l'oestradiol, qui est une hormone de croissance, interdite dans l'Union Européenne.
02:01Si on est incapable de le garantir, ils sont incapables de garantir des mesures miroirs comme nous fait espérer Emmanuel Macron.
02:09La réalité, c'est qu'Emmanuel Macron, il a une responsabilité majeure dans ce désastre-là.
02:15Depuis des années, il n'a rien fait pour mettre un terme au mandat de négociation.
02:19Ce qui fait qu'aujourd'hui, on est dos au mur avec cet accord qui, en plus, est en train d'être imposé par un coup de force antidémocratique.
02:27Il faut bien mesurer ce qui est en train de se passer.
02:29Un coup de force antidémocratique ?
02:30Oui, je pèse mes mots.
02:31Vous savez, je suis la première vice-présidente de la Commission des Affaires Commerciales au Parlement Européen qui traite les accords commerciaux.
02:37Je suis la rapportrice pour mon groupe spécifiquement sur l'accord avec le maire Caussour.
02:41Cet accord va être signé d'ici quelques semaines. Je n'ai toujours pas accès au texte.
02:45Est-ce que vous trouvez ça normal qu'on ne puisse pas avoir un débat démocratique sur la base des derniers éléments de négociation ?
02:51Pire encore, la seule chose qu'ils ont bien voulu nous proposer, c'est une réunion à huis clos.
02:57Qui dit huis clos ? En théorie, vous n'êtes pas censé raconter ce qui s'y passe.
03:01Oui, avec vous, je pense qu'il n'y aura pas de problème.
03:02C'était mal me connaître en effet.
03:04Mais s'ils veulent cacher ce texte, ils sont même allés jusqu'à me menacer de sanctions pour raconter ce qui se passe dans ces réunions à huis clos.
03:11S'ils veulent cacher ce texte, c'est qu'ils ne veulent pas qu'un débat démocratique s'engage dans notre pays et en France,
03:17mais aussi partout ailleurs dans l'Union Européenne.
03:20Parce que ça aura des conséquences sur les agriculteurs belges, sur les agriculteurs polonais, irlandais, etc.
03:25Et que ce sera un accord qui sera perdant pour l'Union Européenne, comme pour le maire Caussour d'ailleurs.
03:30Vous dites que dans quelques semaines, cet accord sera signé.
03:33Pour vous, c'est plié ? Il n'y a aucune chance que la France puisse peser ?
03:37Ou ne serait-ce que le ministre italien aujourd'hui de l'Agriculture qui a dit qu'en l'état, cet accord n'est pas acceptable ?
03:43On est sur les derniers moments de négociations.
03:46Le G20 qui se déroule actuellement au Brésil est l'occasion pour les dirigeants européens d'avoir des derniers échanges sur l'accord.
03:54Il y a un sommet du maire Caussour qui aura lieu début décembre.
03:57Il est possible que l'accord soit signé à ce moment-là, d'où l'alerte, d'où la nécessité de se mobiliser.
04:02Et on voit que petit à petit, le débat grandit en Europe, et c'est bienvenu, et notamment la position du ministre italien.
04:08Mais je veux quand même vous alerter sur le « en l'état ».
04:11Parce que qu'est-ce qui va se passer ?
04:12La stratégie d'Emmanuel Macron, comme des quelques rares alliés qu'il a au niveau européen,
04:17c'est d'ajouter quelques annexes pour faire joli, en disant « regardez, on s'est battu jusqu'au bout »,
04:24mais quand même de nous imposer de force cet accord de libre-échange.
04:28Et nous nous disons clairement, et nous sommes d'ailleurs le seul groupe à le dire,
04:31qu'en tout état de cause, nous ne pouvons pas accepter un accord de libre-échange
04:35dont le but est d'importer massivement des denrées agricoles que nous produisons déjà en France et en Europe.
04:41Point barre. Point barre.
04:43Et c'est la raison pour laquelle j'ai écrit à la présidente de la Commission européenne une lettre ouverte
04:48qui a été signée par plus de 130 députés dans 13 pays différents,
04:51ce qui montre aussi que ce n'est pas qu'un sujet franco-français,
04:54ce qu'on le présente beaucoup comme ça depuis ce matin.
04:56La mobilisation, c'est peut-être le pays où elle est la plus forte,
04:59mais on doit mener la bataille à tous les niveaux,
05:02et notamment pour faire en sorte que la Commission européenne
05:06ne contourne pas la validation des parlements nationaux et l'unanimité des États membres.
05:11Là aussi elle essaie de passer en force, et c'est la première étape de la bataille à mener.
05:15Il y a des questions à caractère climatique.
05:17Je rappelle que selon le GIEC, l'agriculture est responsable de 22% des émissions de gaz à effet de serre.
05:22Oui, vous avez tout à fait raison de le noter.
05:24L'impact de l'accord de libre-échange avec le Mercosur, il est multiple sur le climat.
05:29D'abord, le fait de produire massivement, notamment au Brésil, va participer à la déforestation.
05:35Et alors même que la semaine dernière au Parlement européen a été voté le report d'un texte sur la déforestation,
05:40précisément pour que l'accord avec le Mercosur soit signé le plus rapidement possible.
05:45Je le mentionne parce que je vois tous ces hypocrites qui viennent sur les barrages, j'ai vu François-Xavier Bellamy et d'autres,
05:51dire qu'on soutient les agriculteurs, etc.
05:53Ils sont les premiers à avoir voté le report de ce texte sur la déforestation,
05:56qui est fait précisément pour que l'accord de libre-échange soit adopté le plus rapidement possible.
06:01Donc oui, cet accord de libre-échange aura un impact sur le climat, sur la déforestation,
06:06mais aussi, tout le monde peut le comprendre, si vous produisez n'importe quel denrée alimentaire
06:11et que vous la mettez sur un bateau cargo pour traverser l'Atlantique depuis le Brésil à la France,
06:15ça a évidemment un impact climatique.
06:17Moi, je ne sais pas vous, mais je préfère avoir du bœuf ou du miel qui est produit dans le champ d'à côté.
06:22Quand on entend tous ces arguments, comment expliquer que cet accord de libre-échange soit signé,
06:28comme vous le dites, dans quelques semaines ?
06:30Parce qu'il y a en Europe des ayatollahs du libre-échange qui n'ont toujours pas compris que ce modèle économique est dépassé,
06:37qu'il consiste à abaisser les barrières douanières à l'infini et à s'échanger aux quatre coins du monde des marchandises.
06:42Je pense qu'aucune leçon n'a été tirée des erreurs des années précédentes,
06:46et je me souviens même d'Emmanuel Macron, vous voyez, je cite beaucoup mes adversaires,
06:49qui avait dit, délégué à d'autres, notre capacité à produire notre alimentation est une folie.
06:54Et c'est le rare moment de lucidité peut-être d'Emmanuel Macron.
06:57Il avait raison, sauf qu'il n'en a pas tiré toutes les conséquences.
07:00Et moi, je pense qu'il est temps de reconstruire notre économie au service de nos besoins,
07:04pour produire en France et en Europe ce dont nous avons besoin.
07:07C'est vrai pour l'agriculture, mais c'est aussi vrai pour l'industrie.
07:10En ce moment, il y a énormément de plans sociaux dans l'industrie,
07:12et pour moi, ces deux questions sont extrêmement liées,
07:14mais on a des dirigeants européens qui vivent à un autre siècle, à un autre temps,
07:18et ce modèle économique, c'est le modèle du passé.
07:20Au vu des impératifs sociaux et écologiques, il est temps de produire ici ce dont nous avons besoin.
07:25Merci beaucoup Manon.
07:26Merci à vous.
07:27La députée européenne France Insoumise, vous venez d'adresser une lettre à Ursula von der Leyen
07:30pour dénoncer un éventuel accord entre le Mercosur et l'Europe.
07:33Dans un instinct, un homme qui lui ne représente aucun danger,
07:36au contraire, il est même sans risque.
07:38Marc-Antoine Lebray, c'est le Breaking News.