Le journaliste, animateur et producteur de télévision Michel Denisot est ce lundi l'invité de Léa Salamé, à l'occasion des 40 ans de Canal +, des 20 ans du Grand Journal. Il publie un livre qui rassemble des témoignages de personnalités passées par Canal+, berceau de liberté et de créativité. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-interview-de-9h20/l-itw-de-9h20-du-lundi-04-novembre-2024-5909868
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00:00France Inter, le 7-10.
00:07Léa, ce matin vous recevez un journaliste et animateur.
00:10Et bonjour Michel Deniso.
00:12Bonjour Léa Salamé, Nicolas Demorand.
00:14Merci d'être avec nous ce matin.
00:16On vous a mis Prince pour vous accueillir, ça vous rappelle des souvenirs ?
00:18Oui, que de bons souvenirs.
00:20Je l'ai reçu plusieurs fois.
00:22Il a chanté ce titre je pense controversé.
00:24Oui, il chantait après le générique de fin et il continuait pendant 20 minutes.
00:28On va en parler de Prince et d'autres choses.
00:30Mais d'abord mes questions rituelles.
00:32Si vous étiez un acteur, un personnage historique, un vice et un vêtement, vous seriez qui ?
00:37Vous seriez quoi un acteur d'abord ?
00:39Un acteur, je dirais Raphaël Kenard.
00:41C'est un acteur d'aujourd'hui que j'aime beaucoup.
00:43Je crois qu'il a 33 ans.
00:45Qui a beaucoup d'énergie.
00:47J'ai pas l'impression qu'il joue mais qu'il est le rôle.
00:49Ce qui est une différence et qu'on ressent quand on voit ses films.
00:52Comme Chien de la Casse ou Yannick par exemple.
00:56Il est lui-même quand il est dans les interviews.
01:00Je suis très impressionné par ce qu'il est aujourd'hui.
01:02Je pense que c'est un des plus grands acteurs français.
01:04Un personnage historique ?
01:06Je dirais le Chevalier Bayard pour le sans peur et sans reproche.
01:10C'est un personnage du XVème siècle qui a fait beaucoup de batailles.
01:14Qui était l'aîné d'une famille à la fois aristome et fauchée.
01:18Qui était démarré en faisant une carrière militaire.
01:21Et qui a fait la bataille de Marignan dont tout le monde connaît la date.
01:24Mais qui s'est terminé au mois de septembre.
01:26C'est une précision qu'on connaît moins.
01:28Et il a adoubé François 1er qui lui a demandé de le faire chevalier ce soir-là.
01:33Un vice ?
01:34Un vice à gourmandise pour tout ce qui est à la vanille.
01:36Light, light comme vice.
01:38Un vêtement ?
01:39La chemise blanche, c'est un vêtement qui va à tout le monde.
01:43Et dont on prend soin.
01:45Aux hommes comme aux femmes.
01:47« Jamais je ne voudrais faire partie d'un club qui m'accepterait pour membre »
01:50disait Groucho Marx.
01:52Un spécialiste de bonnes blagues lui aussi comme vous.
01:54Ça vous évoque quoi ?
01:56L'indépendance.
01:59Vouloir être indépendant.
02:01Je ne fais partie de rien.
02:03J'en tire pas du tout.
02:05C'est pas une qualité particulière.
02:07Mais je comprends ça d'être indépendant.
02:10Et je pense que dans le métier de journaliste, que j'ai essayé d'exercer tout le temps,
02:13c'est fondamental.
02:15Vous n'appartenez à rien.
02:16Mais vous avez quand même appartenu au club le plus chic et le plus cool de la télé.
02:20Le canal des débuts.
02:22Vous avez sans doute été la figure la plus centrale et la plus durable.
02:25L'homme qui a le plus marqué cette chaîne.
02:28Qui fête aujourd'hui, tout pile, ses 40 ans.
02:31Le 4 novembre 1984 à 8h du matin.
02:33Entouré du patron André Rousselet et de Gérard Depardieu.
02:36Vous disiez bonjour au tout premier téléspectateur.
02:50Bonjour à toutes et à tous.
02:51Donc pour la première télévision du matin.
02:53Sur la première chaîne privée en France.
02:55Monsieur le Président, merci de venir auprès de nous.
02:58Je crois qu'on félicite les parents quand il y a une naissance.
03:01Oui, oui.
03:02Les parents, il y en a quelques-uns là.
03:04Mais il y a bien d'autres parents qui sont là.
03:09Vous flippiez ?
03:10C'était assez jubilatoire, on savait.
03:12On démarrait quelque chose de nouveau.
03:14Ça date, il y a 40 ans, il n'y avait que 3 chaînes en France à l'époque.
03:173 chaînes de services publics.
03:18Il y avait une chaîne payante qui démarrait.
03:20Tout le monde disait on ne paiera jamais pour voir la télévision, etc.
03:23Mais on était heureux, on s'était tous choisis les uns les autres.
03:25C'est Pierre Lescure qui m'a fait venir assez rapidement dans ce projet
03:28pour faire une télé du matin.
03:30Et qui n'existait pas, il n'y en avait pas encore.
03:32Donc je suis allé à ABC rejoindre l'équipe de Good Morning America
03:36pour apprendre un peu le découpage qui ressemble beaucoup
03:38au découpage des radios du matin d'ailleurs.
03:40Et donc pour démarrer la télé du matin à Canal à ce moment-là.
03:43Et on était heureux, il n'y avait pas assez d'abonnés.
03:46Il y en avait que 180 000.
03:48Ça ne marchait pas très bien.
03:50Mais vous étiez heureux.
03:51Mais qu'importe.
03:52C'est vrai que vous avez gardé la critique de François Roland
03:54le lendemain du lancement, le 5 novembre 1984,
03:56qui titrait « Canal Plus, c'est déjà l'échec ».
03:59Oui, j'ai découpé cet article à ce moment-là.
04:01Parce que je trouvais que c'était un peu rapide comme jugement quand vous démarrez.
04:05Et donc j'ai découpé l'article.
04:07C'est encourageant en tout cas.
04:09J'ai découpé l'article et je l'ai mis dans le premier tiroir de mon bureau.
04:11Et je l'ouvrais souvent le matin.
04:13Et puis quand on a passé un million d'abonnés, je l'ai déchiré.
04:16Et les premiers invités, il y avait une toute jeune chanteuse,
04:18pas très connue, qui chantait ça.
04:20Deux premières fois, tout tout.
04:22Première fois, tout tout.
04:24Première fois, tout tout.
04:26Première fois, tout tout.
04:28Eh oui, Jeanne Mas.
04:30Jeanne Mas.
04:31C'est la première invitée, oui.
04:32Filmée dans un kajibi.
04:33On a l'impression que c'était...
04:34Oui, on avait des petits moyens.
04:36C'était un des anciens garages aménagés en studio.
04:38Et du coup, vous lui avez emprunté son titre.
04:41Avec son accord.
04:42Avec son accord.
04:43Vous lui avez posé la question.
04:44Oui, j'ai demandé son accord.
04:45Et vous sortez ce livre.
04:46Toute première fois, chez Flammarion.
04:48Un recueil d'interviews de 70 personnalités
04:50qui ont toutes commencé sur Canal.
04:52A chacun, vous leur avez posé, vous les avez interviewés,
04:54vous leur avez posé trois questions.
04:55T'étais où avant ?
04:56Comment t'en es arrivé là ?
04:57Qu'est-ce que Canal a changé dans ta vie ?
04:59Et vous avez interrogé Palmel, Omar Sy, Antoine Decaune,
05:02Laure Adler, Alain Chabat, Marc-Olivier Fogiel,
05:04Djamel Debouze, Marina Feuille, Sian Bartès,
05:06Ali Baddou, mais aussi des gens de l'ombre,
05:08comme le producteur Renaud Levanquim
05:10ou la chasseuse de talent Christelle Graillot.
05:13Et ce que montrent leurs récits dans ce livre-là,
05:15chacun, c'est des interviews courtes,
05:17mais chacun en montre combien Canal
05:19a été un vivier de liberté et de créativité.
05:21Comment cette chaîne a réuni des gens
05:23qui n'étaient absolument pas destinés
05:25à faire de la télévision,
05:26qui avaient des vies improbables
05:28et qui ne devaient pas faire de la télé.
05:31Il n'y avait pas de critères, ni de couleur,
05:33ni d'âge, ni de milieu social,
05:35ni de religion, ni de rien.
05:38Il fallait juste avoir un style,
05:40de l'éloquence, du bas goût
05:42et une singularité.
05:43De l'envie aussi.
05:44Beaucoup d'envie de faire ça.
05:46Envie de travailler.
05:48On a travaillé avec beaucoup de liberté
05:49pendant toute cette période de création
05:51et pendant des années.
05:53C'était très agréable.
05:54Et les portes étaient ouvertes.
05:56L'exemple d'Omar Sy,
05:57évidemment l'un des plus symboliques.
05:59Omar, au début, était de Trappes
06:01avec Djamel qui travaillait à Radio Nova.
06:03Djamel, pour se déplacer,
06:06avait des problèmes.
06:07Et Omar Sy avait le permis.
06:08Djamel dit dans le bouquin,
06:09pour rire évidemment,
06:10c'est son permis qui existe, sa carrière.
06:12Qui justifie sa carrière.
06:14Il emmenait Djamel à Radio Nova un jour.
06:16Il a fait une fausse interview d'un joueur africain
06:18qui avait gagné la Coupe d'Afrique.
06:20Et c'était Omar Sy qui faisait ça.
06:22Et puis, il était engagé le lendemain, etc.
06:25Et Omar Sy qui vous dit cette phrase-là,
06:27certains disent « j'ai fait Sciences Po »,
06:30d'autres ont dit « j'ai fait le cours Florent »,
06:32moi je dis « j'ai fait Canal »,
06:33j'y ai tout appris.
06:35Oui, il a appris beaucoup en tout cas.
06:37Je pense qu'il a continué d'apprendre,
06:38dans le cinéma bien sûr, à se perfectionner.
06:40Mais il a appris à travailler,
06:43à improviser, à être curieux.
06:46Omar Sy, il a une particularité
06:48qui est très intéressante.
06:49Quand il entre quelque part,
06:50il scanne l'endroit.
06:51Et il voit, il observe.
06:53Il a beaucoup observé tout le temps.
06:54Il était à Canal+.
06:55Je l'ai vu pendant longtemps,
06:56avant qu'il devienne quelqu'un
06:58comme il est aujourd'hui,
07:00et une très grande vedette.
07:01Il arrivait quelque part,
07:02il se mettait dans un coin,
07:03il regardait tout le monde.
07:04Et puis, il observait.
07:06Et ensuite, il entrait dans le jeu.
07:07Il fonctionne à l'instinct.
07:09Oui, c'était un peu la particularité
07:12de Canal+, c'est que tout s'est fait
07:13à l'instinct quasiment.
07:14Il n'y avait pas d'études,
07:15il n'y avait pas de marketing,
07:16les DRH n'avaient pas leur mot à dire
07:18sauf pour signer les contrats.
07:19Et donc, c'était Alain Degreff,
07:21c'était Pierre Lescure,
07:22c'était Ariel Sarrako,
07:24c'est tous ces gens-là
07:26qui avaient le flair.
07:27Il y a plein d'anecdotes
07:28et de souvenirs amusants dans ce livre.
07:30Ken Kojandi, de Bref,
07:32qui raconte ce moment
07:33où il essaye de vous vendre
07:35le concept de Bref,
07:37qui va cartonner,
07:38il est dans une brasserie luxe
07:40de Paris avec vous
07:42et il voit le prix du jus d'orange,
07:4418 euros.
07:45Et alors qu'il doit réussir
07:46à vous convaincre d'acheter son idée,
07:48il ne pense qu'à une seule chose,
07:50c'est comment je vais payer 18 balles
07:51à un jus d'orange ?
07:52Oui, il ne peut pas.
07:53À ce moment-là, il ne peut pas,
07:54il est au RSA,
07:55il est dans une phase de création
07:57mais il n'a pas de travail.
07:58Et donc, je l'invite effectivement
08:00dans le quartier latin,
08:01un endroit où c'est un peu cher
08:03et il louche sur le ticket
08:05pendant qu'on discute de Bref.
08:07Mais ce qui compte, c'est la suite.
08:09Et ça a été pris,
08:10ça a été un des gros succès de Canal.
08:12En même temps, c'était un club
08:13un peu branché,
08:14très branché,
08:15chic,
08:16progressiste aussi,
08:18Canal,
08:19qui pouvait peut-être aussi
08:20être un peu excluant.
08:21Si tu ne faisais pas partie de Canal,
08:22tu étais un peu comme si tu étais,
08:24si tu ne pouvais pas rentrer
08:25au bain-douche ou au palace.
08:27Oui, c'est peut-être ce qu'explique
08:28Michel Zanavicius
08:29qui a aussi démarré à Canal,
08:30qui a fait des tournements
08:32d'image
08:33avant d'avoir 5 Oscars à Hollywood.
08:35Et donc, il explique ça,
08:36qu'à un moment donné, il est parti
08:37parce que ça devenait un peu consanguin.
08:39Donc, il fallait savoir partir aussi
08:41pour certains.
08:42Grandir, aujourd'hui,
08:43la moitié du cinéma français
08:44vient de Canal+.
08:45Donc, ce sont des gens
08:46qui ont démarré.
08:47Alain Chabat a commencé
08:48à faire La Météo
08:49dans la matinale avec moi.
08:50Faroujia aussi, etc.
08:52Et donc, il fallait aussi
08:54savoir partir à un moment donné.
08:56Il fallait partir.
08:57Même vous.
08:58Oui, oui, oui.
09:00À un moment donné, on lasse.
09:02Ou on se lasse.
09:04Christophe Dechavanne raconte
09:05ses débuts dans la matinale
09:07de Canal que vous animiez.
09:08Il parle d'ailleurs des tensions
09:09que vous avez pu avoir, lui et vous.
09:11Il a cette phrase,
09:12c'est un métier où il faut être aimable
09:14avec tout le monde,
09:15ce que je ne sais pas forcément faire.
09:17Ce qui est vrai.
09:18Vous le savez mieux que moi.
09:19Oui, mais c'est ce qui fait partie
09:20de son charme,
09:21c'est qu'il est authentique.
09:22Tout à fait.
09:23Mais il faut ça.
09:24Et vous, vous avez su
09:25être aimable avec tout le monde, non ?
09:27Oui, quand on reçoit les gens
09:30dans des émissions,
09:32effectivement, c'est qu'on a envie
09:33de les recevoir.
09:34Donc, ce n'est pas pour leur dire
09:35qu'on n'a pas envie de les voir.
09:37Canal fête ce soir
09:38les 40 ans de sa chaîne
09:39avec une émission spéciale
09:40présentée par Antoine Decaune
09:41à laquelle vous participez.
09:42Dans le public.
09:43Oui.
09:44Vous êtes là.
09:45Aujourd'hui, qu'est-ce qui reste
09:46du Canal historique
09:47quand vous allumez la chaîne,
09:48quand vous allumez Canal
09:49version Bolloré ?
09:50Est-ce qu'il reste quelque chose ?
09:51Il reste la qualité
09:52des programmes en clair.
09:54Des programmes cryptés, pardon.
09:56La psuisse, Michel.
09:57La psuisse révélateur, oui.
09:58La qualité des programmes cryptés.
10:00Donc, du sport, du cinéma, etc.
10:02Mais aujourd'hui,
10:03Canal, je serais tenté de dire,
10:04n'est plus une chaîne,
10:05mais une plateforme de diffusion.
10:07C'est une grande surface
10:08qui diffuse, évidemment,
10:09la chaîne Canal,
10:10mais des tas d'autres chaînes.
10:11Alors que nous, on a créé
10:12une chaîne et aujourd'hui,
10:13c'est une plateforme.
10:14Donc, c'est un autre business.
10:15Dans ce livre, il y a tous ceux
10:16qui ont commencé à Canal,
10:18que Canal a fait,
10:19que Canal a mis en valeur.
10:21Il en manque un, c'est vous.
10:23Qu'est-ce que Canal...
10:25Je vous pose la question directement.
10:26Qu'est-ce que Canal a changé
10:27dans votre vie, Michel Denisot ?
10:28Beaucoup de choses.
10:29J'ai pas débuté à Canal.
10:31Quand je suis arrivé à Canal,
10:32je faisais le dimanche après-midi à TF1.
10:34Et quand j'ai quitté TF1
10:35pour aller à Canal,
10:36le patron de TF1, Hervé Bourges,
10:38m'a dit que je faisais l'erreur de ma vie.
10:39Donc, il aurait pu avoir raison,
10:41mais c'est trouvé autrement.
10:42Donc, ce que ça m'a apporté,
10:44c'est de la liberté d'entreprendre,
10:45de la liberté de créer des émissions.
10:47On créait des émissions
10:48quasiment en 24 heures.
10:49Il suffisait d'aller voir Alain Degreff
10:51et lui dire, écoute,
10:52à la mi-journée,
10:53j'ai fait une émission
10:55qui s'appelait « Demain »,
10:56parce que c'est un de mes mots favoris dans la vie.
10:58Alors qu'on parle d'hier, là, un peu.
11:00Mais c'est « Demain » que je préfère,
11:01de toute façon.
11:02Et donc, après, j'ai dit,
11:03on va faire « La Famille ».
11:04Et puis, il me dit,
11:05ah, c'est pas assez.
11:06Et je dis « La Grande Famille ».
11:07Il me dit, ah oui, c'est mieux.
11:08Et donc, j'ai mis « Grand » dans tout.
11:09Après, j'ai fait « Le Grand Journal »,
11:10« La Grande Famille ».
11:11Voilà.
11:12Et j'ai pu faire ça, mais facilement.
11:14Très facilement.
11:15Engager des gens très facilement.
11:17Faire venir des gens très facilement.
11:19Et puis, le succès de la chaîne a fait
11:20qu'on a eu des moyens, après,
11:21assez appréciables.
11:22« Demain », c'est votre mot préféré,
11:23Michel Deniso.
11:24Vous n'êtes pas un homme nostalgique.
11:26Vous n'êtes pas un homme
11:27qui aime regarder en arrière,
11:28du tout, même.
11:29Vous êtes toujours dans l'avant.
11:30Et c'est vrai que...
11:31Et tous les gens qui sont dans le livre,
11:32ils sont en pleine action aujourd'hui.
11:34C'est pas des gens qui sont du passé.
11:36C'est des gens d'aujourd'hui.
11:37C'est vrai, mais je me suis dit,
11:38ça doit être étonnant,
11:39cette période d'anniversaire pour vous.
11:40Ça doit être étrange à vivre.
11:41Vous fêtez en même temps
11:42les 40 ans de Canal
11:43et les 20 ans du Grand Journal,
11:45émission emblématique de la chaîne,
11:47il y a 20 ans, le 30 août 2004,
11:49résonnait ce générique
11:51pour la première fois.
12:04Pour l'occasion, la chaîne TMC
12:06vous consacre un prime événement,
12:08diffusé le 13 novembre à 21h,
12:11qui s'appelle
12:12« Michel Denisot n'aime pas les anniversaires ».
12:14Alors, comment on fait
12:15quand on n'aime pas les anniversaires
12:16pour fêter les 20 ans du Grand Journal
12:18et les 40 ans de Canal ?
12:19Oui, c'est une pirouette.
12:21C'est vrai, quand il a été question de ça
12:22avec Laurent Bon, le producteur de l'émission,
12:24quand on est arrivé pour se voir,
12:26j'ai dit, écoute,
12:27je ne sais pas pourquoi je viens,
12:28parce que je n'aime pas les anniversaires.
12:29Et donc, c'est devenu le titre de l'émission.
12:30Mais effectivement,
12:31c'est une façon de retrouver
12:33aussi beaucoup de gens.
12:34Tout le monde participe.
12:35Tous ceux qui ont fait le Grand Journal,
12:37ils participent.
12:38Tous ceux qui y sont venus,
12:39qui ont été dedans.
12:40Même Gad Elmaleh,
12:41qui était le parrain de la première émission,
12:43qui est arrivé le premier jour
12:44en disant « je suis venu parce qu'hier c'était bien ».
12:46Et voilà.
12:47Donc, il y a beaucoup de monde.
12:48C'est très agréable.
12:49Et c'est présenté par Yann Martès.
12:51Par Yann Martès, bien sûr.
12:53Et on voit que le ton a changé aussi
12:55au fil des années.
12:56Il y a des choses qu'on…
12:57On prend plus de précautions
12:58sur certains sujets aujourd'hui.
12:59C'est ça.
13:00Il y a moins de liberté.
13:01C'est la question tarte à la crème.
13:02Mais c'est vrai,
13:03il y a moins de liberté aujourd'hui.
13:04Si la marque d'Ardisson,
13:05c'était de réunir sur une même table,
13:06autour d'une même table,
13:07un politique, un écrivain,
13:08un cardinal et une pute,
13:09il le disait lui-même.
13:10Quelle a été la marque,
13:11à vos yeux,
13:12du grand journal ?
13:13Recevoir les plus grandes stars,
13:14c'était ça ?
13:15Recevoir les gens qu'on a envie
13:16de recevoir le jour même
13:17par rapport à ce qui s'est passé
13:18dans l'actualité.
13:19C'est ça que je me disais tous les soirs
13:20à 19h au moment d'entrer sur le plateau.
13:21L'émission commençait à 19h10.
13:23Et quand je m'asseyais,
13:24pendant neuf ans,
13:25tous les soirs,
13:26je me disais « j'ai de la chance »
13:27parce que ce soir,
13:29c'est vraiment les gens
13:30avec qui j'ai envie de parler aujourd'hui.
13:31Et c'est vrai que vous avez reçu
13:32les politiques,
13:33les acteurs,
13:34les stars internationales,
13:35Will Smith,
13:36Julia Roberts,
13:37Leonardo DiCaprio,
13:38Martin Scorsese,
13:39Mark Zuckerberg
13:40et même Dieu.
13:41Bonsoir.
13:42Merci infiniment d'être là ce soir.
13:44C'est la première fois
13:45qu'on reçoit Dieu dans le grand journal.
13:50Vous avez le génie des premières fois
13:51d'être toujours le premier.
13:52Vous l'avez été au Grand Palais.
13:53D'où vous vient ce talent particulier ?
13:58Tous les dons viennent de Jéhovah,
14:00de Dieu.
14:01Et nous devons leur remercier
14:02de rendre grâce tous les jours.
14:05Et Dieu,
14:06et Dieu c'est le Prince.
14:07Effectivement,
14:08c'est la seule fois
14:09où j'ai oublié mes notes.
14:10Parce que pour moi,
14:11c'est l'icône absolue.
14:12Ça vous est déjà arrivé ?
14:14De perdre ses notes ?
14:16Oui.
14:17Nicolas,
14:18qui ?
14:19Vous avez cinq minutes
14:20pour réfléchir.
14:21Non, c'est Bruno Latour.
14:23C'est une catastrophe.
14:25Je ne comprenais plus rien
14:27à ce qu'il me disait.
14:29Je ne savais plus où j'étais.
14:30Une catastrophe.
14:31Un bon souvenir.
14:33On a fait 15 000 interviews.
14:34Il y en a une à un moment donné
14:35où c'est comme ça.
14:36Dans Paris Match,
14:37il y a quelques années,
14:38vous disiez dans les talk shows
14:39qu'on reçoit des gens
14:40avec un égo surdimensionné
14:41et dès qu'on parle d'autre chose
14:42que de leur tête,
14:43ils regardent leur montre.
14:44Oui.
14:48Ils ne regardent pas forcément leur montre.
14:49C'est une image.
14:50On sent qu'ils s'absentent.
14:52Le Grand Journal a été le porte-avion
14:54de nombreux talents
14:55qu'on continue à voir aujourd'hui
14:56à la télé,
14:57dans la télé ou le cinéma d'ailleurs.
14:59Vous, votre porte-avion,
15:00c'était lui
15:01et son fameux bonjour.
15:23Yves Mourouzi.
15:24C'est coupé cut.
15:26Yves Mourouzi,
15:27avec lequel vous avez présenté
15:28le 13h de TF1 dans les années 70.
15:30Il y avait 15 millions
15:31de téléspectateurs.
15:32Je ne me souviens pas.
15:33Aujourd'hui, c'est beaucoup moins.
15:34Pape de la provoque et des coups.
15:36Il pouvait aller au Kremlin
15:37pour un entretien exclusif
15:38avec Brejnev.
15:39Il s'asseyait sur le bureau
15:40de François Mitterrand
15:41quand il l'interviewait.
15:42Vous racontez qu'il venait
15:44de ses nuits enfiévrées dans Paris.
15:47Il arrivait le matin.
15:48Parfois, il n'avait rien vu,
15:49rien bossé.
15:50C'est vous qui bossiez derrière.
15:51Mais il était là.
15:52J'étais très heureux.
15:53Je l'avais connu ici
15:54dans ce studio
15:55à France Inter
15:56quand j'ai démarré
15:57la troisième chaîne ici.
15:58C'était encore avant TF1.
15:59J'ai fait le TF1 13h avec lui
16:01pendant deux ans,
16:02deux ans et demi.
16:03J'ai appris beaucoup de choses.
16:04J'ai appris d'abord
16:05à ouvrir l'information
16:06à 360 degrés
16:07qui était à l'époque
16:08à la télévision très limitée
16:09sur la politique,
16:10la politique étrangère.
16:11On ne parlait pas de culture
16:12et encore moindre sur le hip-hop.
16:13J'ai appris ça avec lui
16:14et aussi à créer du lien
16:15avec les gens
16:16tout en restant libre.
16:17C'est très fort.
16:18C'est une discipline difficile
16:19dans notre métier.
16:20On a besoin d'avoir
16:22des relations avec les gens.
16:23On a besoin de les voir,
16:24les gens qu'on reçoit.
16:25Pas forcément uniquement
16:26à l'antenne pour certains.
16:27Et en même temps,
16:28quand on est à l'antenne,
16:29on est libre et indépendant.
16:30J'ai appris ça de lui
16:31et j'ai appris beaucoup de lui.
16:32C'est-à-dire de mettre la barque
16:33le plus haut possible
16:34tous les matins.
16:35Écoutez ce qu'il disait de vous
16:36quelques mois avant sa mort
16:37en 1998
16:38à seulement 55 ans.
16:39M. Bernadac nous avait proposé
16:40de présenter une 13h.
16:41Et comme je souhaitais
16:42en faire une nouvelle formule
16:43puisqu'il n'y avait pas de 13h
16:44à l'époque,
16:45je souhaitais qu'on soit deux.
16:47Et il m'avait proposé
16:48un jeune homme
16:49qui débarquait de Châteauroux,
16:50qui était passé par l'FR3
16:51et qui présentait bien
16:52son tour à port
16:53et qui s'appelait
16:54Michel Denisot
16:55qui immédiatement
16:56s'est bien mis dans le moule.
16:57On a établi
16:58dès le départ
16:59une complicité
17:00déjà dans le sourire
17:01puis à se faire rire
17:02entre nous
17:03et en même temps
17:04assurer un travail
17:05très sérieux.
17:06Et Michel était là
17:07pour nous.
17:08C'est-à-dire
17:09qu'il était là
17:10pour nous.
17:11C'est-à-dire qu'il était là
17:12pour nous.
17:13C'est-à-dire qu'il était là
17:14pour nous.
17:15C'est-à-dire qu'il était là
17:16pour nous.
17:17C'est-à-dire qu'il était là
17:18pour nous.
17:19Oui, ça me touche beaucoup
17:20parce que j'ai beaucoup
17:21d'affection pour Yves
17:22effectivement qui m'a apporté
17:23beaucoup.
17:24Mais c'est vrai qu'il avait
17:25un mode de fonctionnement
17:26qui aujourd'hui serait compliqué
17:27c'est-à-dire qu'il arrivait
17:28de plus en plus tard
17:29et il partait...
17:30Le premier jour
17:31quand on est remonté
17:32de la régie
17:33on a fait le premier journal
17:34il a fait dire bonjour
17:35par une marionnette
17:36donc à l'époque
17:37c'était vraiment
17:38une catastrophe
17:39et Christian Bernadac
17:40nous a dit
17:41vous avez présenté
17:42un journal télévisé
17:43rentrer chez vous. Je dis bon bah je vais à Garde de Sterlitz, je rentre à Châteauroux,
17:46j'ai déjeuné avec lui, mais t'inquiète pas on est là pour plus longtemps. Et donc c'est ce
17:48qui est arrivé. Il partait au studio, je lui donnais les dépêches qui le concernaient,
17:55il y en avait deux qui tombaient, il les ramassait pas. Et il l'était, il l'incarnait. Il lisait pas,
18:01il l'incarnait le journal. Il était comme Raphaël Kenard. Exactement. Et puis vous avez un point
18:05commun, vous êtes tous les deux orphelins de père. Maurezine a jamais connu le sien,
18:08vous avez perdu le vôtre à 5 ans. Et c'est vrai que, Michel Denisot, depuis que vous faites plus
18:13la télé, vous avez fait un long métrage, vous avez fait des documentaires, vous avez fait des
18:17livres sur vos blagues préférées. Là vous faites un livre sur Canal, il y aura ce Prime aussi sur
18:22TMC. Mais est-ce qu'il manque pas le livre ? Le livre de ce gamin de Châteauroux qui a perdu son
18:28père à 5 ans, qui a appris à faire sans, à faire le manque, avec ce manque, à se débrouiller,
18:34à forcer le destin. Oui, mais enfin, c'est très intime. J'ai pas envie. J'avais peut-être envie de le
18:40faire, mais pas que vous le lisiez. Je sais pas. Vous dites j'ai envie de le faire, mais j'ai pas
18:44envie de le publier. Oui, j'en suis là aujourd'hui. Vous n'arrivez pas à le faire. Non, non, c'est compliqué.
18:50Les impromptus pour terminer. Vous répondez très rapidement. Roselyne Bachelot vous a-t-elle dit
18:57merci, Michel Denisot ? Non. Alors pourquoi je demande ça ? Parce que vous avez révélé il y a
19:02quelques jours dans la tribune du dimanche que vous aviez décliné le poste de ministre de la
19:06culture proposé par Emmanuel Macron il y a trois ans. C'est vrai ça ? Décliner c'est beaucoup dire.
19:09On m'a sondé pour savoir si ça pouvait m'intéresser. J'ai pas donné suite parce que je me
19:14sentais pas légitime. Puis je veux pas m'engager. Moi j'aime bien être libre et donc j'aurais beaucoup de
19:18mal à être dans un camp. Du coup c'est Roselyne Bachelot qui l'a eu. C'est vrai qu'on vous appelait
19:24moustique enfant ? Oui, parce que j'ai grandi tardivement. C'est vrai que vous avez redoublé
19:29trois premières et deux terminales. Oui. Le PSG gagnera-t-il un jour la Ligue des champions ? Je
19:34lui souhaite. Instagram ou X ? Instagram. BFM ou LCI ? LCI pour l'instant. La vieillesse est un
19:43naufrage disait De Gaulle. Vous êtes d'accord ? C'est possible mais je l'ai pas encore... Enfin je commence à
19:49être vieux. Vous n'êtes pas vieux. J'ai encore les rames. Qu'est-ce qui vous met en colère ?
19:57L'injustice évidemment, le sang gêne aussi souvent. Pierre Lescure ou Alain Degreffe ? C'est indissociable.
20:06De la rue ou de Chavannes ? C'est pareil, c'est des phénomènes. Ardisson ou Drucker ? Là ils sont très
20:13différents aussi. Je leur souhaite d'être heureux. De Niro ou Pacino ? Je sais c'est dur, je vais pas vous faire des
20:21faciles. Non mais j'ai De Niro ou Pacino. Je connais mieux De Niro que Pacino. J'ai interviewé une fois Pacino
20:27mais De Niro plusieurs fois. Martin Scorsese ou Coppola ? Je vais dire Coppola. La dernière fois que vous avez pleuré ?
20:37J'ai pleuré de rire pendant les vacances scolaires avec mes petits-enfants. Et ce matin Nicolas vous
20:44regarde et ce matin presque. Et Dieu dans tout ça ? J'espère que c'est vrai.
20:50J'espère que c'est vrai. Pas mal. Michel Deniseau n'aime pas les anniversaires. C'est en prime à 21h sur TMC le
20:58mercredi 13 novembre prochain avec Anne Barthez et toute la bande et tous ceux qui ont été dans
21:03le Grand Journal. Et toute première fois votre ouvrage qui compile les souvenirs de 70 talents
21:07Made in Canal qui vient de sortir chez Flammarion. Merci à vous et belle journée.
21:12Merci beaucoup. Merci à vous deux. Merci Léa.