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Dans les Côtes d'Armor, Julien Pichourou et sa compagne ont arrêté le maïs au profit du pâturage avec le Cedapa. Un pari gagnant, qui leur a permit d'améliorer le résultat de leur exploitation.

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00:00Bonjour et bienvenue sur La Space TV par WebAgree.
00:10Je suis en compagnie de Maxime Lecaste, animateur technique pour le réseau CEDAPA.
00:14Bonjour Maxime.
00:15Bonjour.
00:16Et Julien Pichourou, paysan dans les Côtes-d'Armor, à la tête d'un troupeau laitier.
00:21Alors aujourd'hui, on va parler transition de système et on est passé du maïs à l'herbe.
00:27Alors, est-ce que vous pouvez nous dire un petit peu comment était votre ferme avant
00:31et puis à quoi elle ressemble aujourd'hui ?
00:33Alors, on a démarré en système classique breton basé principalement sur le maïs avec
00:39un petit peu d'herbe, beaucoup d'intrants et aujourd'hui, on est arrivé à un système
00:45où on a toujours nos 100 vaches.
00:46La totalité de la surface est dédiée à l'herbe et au pâturage toute l'année, voilà.
00:54Donc 100 vaches, à peu près 35 hectares de maïs, plus des cultures céréalières
00:59à toujours 100 vaches laitières, mais cette fois-ci, l'intégralité de la surface en
01:02herbe, c'est ça ?
01:03C'est ça.
01:04On a déduit, on a éliminé toute forme de culture sur l'exploitation et déduit la
01:09totalité de la surface à l'herbe.
01:11Alors, comment est-ce qu'on en vient à une telle transition de système ?
01:15Ça se fait en plusieurs étapes.
01:18La première, souvent, c'est la prise de conscience de la part des éleveurs d'une problématique
01:24ou d'une insatisfaction.
01:25On change rarement de système quand tout va bien.
01:28Il faut prendre conscience de cette problématique qui peut être économique, technique, sanitaire,
01:33de transmission, de valeur environnementale, elle peut être diverses et variées.
01:38Il faut prendre conscience de cette problématique et ensuite essayer d'envisager différentes
01:44solutions en allant, par exemple, à des portes ouvertes.
01:48Alors, quel a été le déclic ?
01:50Nous, on a dû faire face à une problématique de santé, des problèmes de dos qu'a rencontré
01:57ma femme, dû à un rythme de travail qui était conséquent, une traite matin et soir
02:03toute l'année et une tension économique qui, nous, ne nous convenait pas au vu de
02:08l'ampleur du travail qu'on réalisait tous les jours.
02:10Suite à ça, on s'est rendu sur une porte ouverte du CEDAPA où on a pu rencontrer
02:18des éleveurs dans une situation similaire à la nôtre qui, eux, avaient entamé un
02:22changement de système et aujourd'hui abordaient le métier d'une manière totalement différente.
02:28On s'est bien reconnus en eux et on a fait le choix de transposer leur situation à
02:36la ferme chez nous.
02:37Et alors, comment se passe la transition ?
02:43C'est quoi la première étape ?
02:44La première étape, c'est de bien se fixer des objectifs, une vision d'où on veut aller
02:56en étant bien clair sur ce qu'on veut changer sur l'exploitation et puis de se fixer des
03:04étapes intermédiaires, simples et réalisables pour atteindre l'objectif qu'on s'est fixé.
03:10Ça passe par une rencontre en général avec les éleveurs pour bien identifier les objectifs
03:18et puis bien comprendre la ferme, c'est quoi la structure, c'est quoi les atouts, c'est
03:22quoi les contraintes, est-ce qu'il y a du potentiel pour aller vers un système plus
03:27herbagé ou pas, pour ensuite faire des hypothèses de changement de système qu'on va co-construire
03:33avec les éleveurs pour essayer de faire des simulations technico-économiques qui
03:40soient les plus viables possibles pour accompagner les éleveurs dans le changement.
03:45Donc chez Julien, qu'est-ce que vous avez mis en place en premier ?
03:47Chez nous, on a commencé par supprimer l'atelier céréale qui occupait beaucoup de surface
03:54pour peu de rentabilité.
03:55On a fait ensuite le choix de grouper nos vélages.
04:00Donc ça s'est fait sur 2-3 ans, de ramener la totalité des vélages au printemps afin
04:07de simplifier le travail d'hiver par un tarissement général du troupeau.
04:13La mise en place générale des cultures, des surfaces en herbe, la suppression par
04:19étape du maïs, on est passé de 35 à 0 en 3 ans.
04:25Du coup, rendre accessible la totalité de cette surface par ses aménagements,
04:29les clôtures, les réseaux d'eau, les chemins, tout ça.
04:33Et ensuite, on a fini par instaurer la monotraite qui nous a permis aussi d'aller
04:39juste vraiment jusqu'au bout du système et valoriser au maximum ce pâturage.
04:43Le changement de système a quand même un impact comptable, donc il faut faire des
04:46simulations pour l'anticiper et avoir la trésorerie derrière.
04:51C'est ça, c'est l'intérêt des simulations technico-économiques pour sécuriser en
04:57premier lieu le bilan fourragé et puis pour bien être sûr de diminuer les
05:02charges de façon plus importante que ce qu'on va réduire les produits et plus
05:06vite aussi pour bien sécuriser cette transition et qu'elle soit rentable le
05:11plus rapidement possible, y compris dès la première année.
05:13Donc, si on veut être concret, la première année, OK, je n'ai pas de paille
05:17de lait pendant les mois d'hiver parce que les vélages groupés ne font qu'eux,
05:21mais j'ai aussi moins de frais d'ensilage parce qu'on commence à passer à l'herbe
05:26et ce genre de charge diminue sur la structure, c'est ça ?
05:29Oui, mais ça se fait beaucoup plus progressivement que ça, c'est sur 3 à 6
05:33ans selon les fermes, là, en l'occurrence, c'est trois ans la
05:35transition, mais ça se fait vraiment progressivement où on va réduire les
05:40charges petit à petit.
05:42Quand on réduit progressivement le maïs, on réduit d'abord progressivement les
05:44correcteurs, les concentrés, les intrants, les factures d'ensilage et la production
05:49laitière, elle va réduire aussi progressivement.
05:51Donc, l'ensemble se fait progressivement pour que ça ne soit pas complètement
05:55brutal et que la transition se vive bien.
05:58Et puisqu'on parle un peu gestion, ce qui est assez marquant sur la ferme, c'est
06:02qu'on est quand même passé de 650 000 litres au pic de lait sur la structure à
06:07aujourd'hui, à peu près 200 000 litres.
06:09Alors, quand on divise par 3 la production, ça commence à faire un petit peu peur
06:13en termes de revenus.
06:14Donc, comment vous arrivez à amortir ça ?
06:17Le calcul est simple.
06:19Aujourd'hui, on produit trois fois moins de lait, mais on a multiplié par 3 la
06:23marge brute laitière, ce qui fait que la marge brute de l'atelier reste inchangée.
06:28Aujourd'hui, les coûts de production sont réduits au maximum.
06:34De la même façon, les charges de structure, elles aussi, ont réduit
06:37énormément. On a réduit les coûts de mécanisation, les investissements en
06:40matériel, les besoins de main d'oeuvre.
06:43Et tout ça, aujourd'hui, porte ses fruits et nous permet, malgré une division par
06:483 de la production, d'observer une amélioration du revenu et de, en plus,
06:54avoir divisé le temps de travail par 2, ce qui, aujourd'hui, n'est pas négligeable.
06:59C'est vrai que c'est un changement de paradigme assez important.
07:02On n'est plus sur la maximisation de la marge brute, mais sur des systèmes à
07:06forte valeur ajoutée où on va réduire les charges opérationnelles et peut être
07:10avoir un maintien de la marge brute dans certains cas.
07:13Mais le travail qui est fait sur les charges de structure et puis l'idée d'être
07:17autonome et économique, on va aussi essayer de limiter les investissements.
07:21On va avoir, à la fin, un OBE qui augmente et donc des systèmes plus
07:24rémunérateurs. Et donc, ce changement de paradigme, c'est la base de la
07:28transition vers un système herbagé.
07:30Oui, parce qu'on voit qu'en fait, la marge brute sur la ferme entre 2017 et
07:332023, elle s'est maintenue.
07:35On est autour des 130 000 euros dans les deux cas.
07:38Mais alors, cette augmentation de revenu, vous l'expliquez par la baisse des
07:42charges de structure. Concrètement, ça se manifeste comment ?
07:46On baisse les charges de structure, ce qui permet d'augmenter la valeur
07:52ajoutée par rapport au système de 2017.
07:54Concrètement, si on fait le rapport valeur ajoutée sur produits d'activité
07:58entre 2017 et aujourd'hui, il y a 10% d'écart qui sont liés
08:04principalement à la baisse des charges de structure.
08:06Et cette différence, elle est encore un peu plus importante si on va jusqu'à
08:09l'OBE, parce qu'entre temps, on a signé une MAE, mesure agro environnementale
08:14et climatique. Et donc, c'est juste avant l'OBE qu'on va ajouter ces aides
08:19dans les soldes intermédiaires de gestion qui permet d'avoir un OBE
08:22supplémentaire encore et qui permet donc un revenu, un revenu plus important.
08:27Et si on sort des chiffres, c'est quand même sympa la monotraite.
08:30Ça permet une qualité, c'est un changement de vie.
08:33Nous, on a été, comme on le dit, très longtemps exploités agricoles.
08:36Aujourd'hui, on est paysans.
08:38On a une vie de famille. On a une vie sociale.
08:41On a des vacances. On a des week-ends.
08:44Et ça, en fait, c'est une autre approche du métier.
08:47Autant ce métier qui pouvait me faire rêver était arrivé compliqué à gérer
08:51au quotidien. Aujourd'hui, j'ai jamais été plus heureux à faire ce métier.
08:56Et je pense pouvoir aujourd'hui donner l'envie à d'autres jeunes,
08:59notamment qu'on l'a formé, de se lancer par justement une autre
09:03approche et une autre vision au quotidien de ce métier.
09:08Et alors, le dernier élément, c'est que tout ça, c'est aussi
09:10possible grâce au travail collectif et grâce aux autres agriculteurs
09:16que vous avez rencontrés dans les réseaux CEDAPA.
09:19C'est ça, le CEDAPA nous a accompagnés tout du long.
09:22Le CEDAPA était le point de déclic pour nous.
09:26Grâce à cette porte ouverte, il nous a permis de rencontrer
09:29d'autres éleveurs avec d'autres profils, d'autres objectifs,
09:34mais toujours une ouverture d'esprit et un libre échange et une
09:38transparence qui, aujourd'hui, nous a permis d'aller vraiment
09:42jusqu'au bout de ce système et de se former, soit par des formations
09:47du CEDAPA, soit par des rencontres tout simplement qui sont
09:51formatrices au quotidien.
09:54C'est vrai qu'il y a trois gros points à chaque fois quand on parle
09:57d'accompagnement dans un changement de système.
10:00Le premier, c'est le plus important, c'est le groupe, c'est de rencontrer
10:04des gens qui se sont posés les mêmes questions, qui sont passés par
10:07les mêmes étapes, qui ont fait une transition, qui ont eu des
10:10doutes, qui ont eu des réussites et pouvoir les partager et transmettre
10:13ces choses là. C'est hyper rassurant quand nous, on est éleveur et en
10:17cours de transition. Il n'y a rien de mieux que le groupe pour ça.
10:21Et en plus de se rassurer, ça permet de se créer un nouvel entourage
10:24parce que quand on change de système, on sort un peu des schémas
10:28classiques et donc on se reconstruit un nouveau réseau.
10:32On peut échanger aussi sur des sujets techniques, se former.
10:36Il y a bien sûr des formations qui sont proposées, mais l'échange
10:40entre pairs est toujours le plus intéressant et le plus formateur.
10:43Et au besoin, on peut avoir un accompagnement individuel en dernier
10:46lieu si jamais il y a besoin.
10:49Merci beaucoup pour la description de l'exploitation et puis vous pouvez
10:52retrouver d'autres épisodes de l'ASPACE TV sur Web agri.

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