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Transcription
00:00On retrouve David Rigolero, spécialiste du Moyen-Orient, rédacteur en chef de la
00:04Revue Orient Stratégique, auteur de l'ouvrage « La République islamique d'Iran en crise systémique ».
00:09Bonjour. Après la mort de Yahr Yassinouar, rien ne semble avoir changé, c'est toujours la guerre et les victimes civiles.
00:16Ah oui, c'est la poursuite de la guerre. D'aucuns ont considéré que la disparition de Yahr Yassinouar
00:23était susceptible de constituer une fenêtre d'opportunité pour relancer un processus de négociation,
00:28mais on en est bien loin de toute façon, parce que du côté israélien et de manière assumée,
00:33il y a la poursuite du combat et son amplification a fortiori avec l'horizon du calendrier électoral américain.
00:39Donc avant justement la présidentielle, il s'agit de pousser l'avantage. C'est le cas à Gaza,
00:46mais c'est évidemment le cas aussi sur le front nord avec le Liban. Et puis la question se pose,
00:52évidemment, tout le monde est dans l'attente de la réplique annoncée des Israéliens sur l'attaque iranienne du 1er octobre.
01:00Oui, on va y revenir. Netanyahou, après la bande de Gaza, vous pensez qu'il veut occuper le sud du Liban ?
01:07Il n'y a pas l'objectif d'une invasion du Liban, comme ça a pu se produire en 1982,
01:14mais on voit bien quand même qu'il y a un élargissement à partir du sud.
01:18L'objectif de guerre déclaré, c'est de pouvoir sécuriser la Galilée, le nord de l'État hébreu,
01:25pour que les quelques 70 000 habitants qui ne pouvaient plus y aller depuis le 8 octobre,
01:29puisqu'ils étaient soumis aux tirs du Hezbollah, puissent réintégrer leur foyer.
01:33Et donc ça suppose évidemment, le préalable, une bande de sécurité au-delà de la frontière,
01:38ce qui explique les frappes systématiques et le démantèlement des infrastructures,
01:42notamment souterraines du Hezbollah, au niveau de la dite ligne bleue,
01:47qui sert de frontière théorique entre le Liban et Israël.
01:51Mais ça n'exclut pas évidemment des frappes beaucoup plus au nord, dans les fièvres du Hezbollah,
01:56notamment d'Aïya, le banlieue sud de Beyrouth, la Bekaa, voire au-delà,
02:00puisqu'il y a un transfert de population qui est en train de se faire.
02:03Oui, et la finule, elle a été la cible délibérée de tirs de l'armée israélienne.
02:08Netanyahou continue de violer le droit international. Jusqu'où peut-il aller ?
02:13De toute façon, là, il y a un processus guerrier qui est engagé.
02:16Il ne va pas s'arrêter du jour au lendemain, loin de là.
02:19Il a eu une formule un peu elliptique en disant que ce n'était pas le début de la fin,
02:25donc pour paraphraser en partie la fameuse formule de De Gaulle.
02:31Mais clairement, Israël est dans une logique, là, il y a un scénario qui est en train de se dérouler.
02:37Gaza, c'était la première séquence.
02:39Le Hezbollah au Liban, c'est vraisemblablement la deuxième séquence.
02:42La stratégie israélienne, c'est de faire exploser le front de la Boukhaouama,
02:46c'est-à-dire l'addit de résistance à Israël qui regroupe tous les mandataires iraniens.
02:50Aujourd'hui, j'allais dire, les fictions sont levées,
02:54c'est-à-dire le principe entretenu par Téhéran depuis longtemps du plausible deniability,
02:59qu'il a réactivé d'ailleurs pour la frappe du Hezbollah
03:02contre la résidence privée de Benjamin Netanyahou en disant que c'était le Hezbollah et pas l'Iran.
03:08Mais du point de vue israélien, c'est un discours qui ne tient plus
03:10et ça explique évidemment l'amplification de la logique militaire.
03:14Et du coup, en attendant, quoi qu'ils en disent, Netanyahou,
03:16ils sont prêts à abandonner les otages survivants depuis un an dans la bande de Gaza ?
03:22Alors malheureusement, effectivement, c'était pourtant un des deux buts de guerre
03:25à faire déclarer pour le lancement de l'opération sur l'enclave.
03:28Il y avait effectivement le démantèlement,
03:30la destruction de la structure politico-militaire du Hamas qui est en voie d'achèvement.
03:34Il n'y a plus de combat de haute intensité,
03:36même s'il y a la résurgence de combats au nord, comme vous évoquez.
03:40Ce sont des groupes épars.
03:42Il y a une activité combattante, mais qui est résiduelle
03:45et effectivement qui fait l'objet de combats de moyenne intensité.
03:50En revanche, la question des otages, ça hante la société israélienne, évidemment.
03:54Et d'autant plus qu'au bout d'un an, on se demande combien d'otages sont encore en vie.
04:00Et le fait que Yair Yassin Noir ait été éliminé avec ses deux gardes du corps,
04:05vraisemblablement sans otage autour de lui,
04:07amplifie l'inquiétude des familles parce qu'il était censé être entouré
04:11d'un groupe d'otages comme Assurance Vie et manifestement, ce n'était pas le cas.
04:14Le 7 octobre, qui reste un traumatisme majeur pour la société israélienne,
04:19a-t-il été décidé par le Hamas tout seul ou avec le feu vert de l'Iran
04:22comme l'a révélé cette semaine le New York Times ?
04:26Il y a un gros point d'interrogation.
04:28Il faut être très prudent.
04:29Et là, j'évoque le principe du plausible deniability.
04:32Effectivement, il y a eu des révélations,
04:34notamment il y a eu des déclarations de Benny Gantz qui évoquaient le fait
04:40qu'il y avait une stratégie du Hamas pour « enrôler » tout l'arc de la résistance
04:45et son parrain iranien.
04:47Donc la question est de savoir le niveau de connaissance
04:50qui a pu être celui de Téhéran à défaut d'une participation active
04:55puisque le guide de la Révolution a tout de suite dit après le 7 octobre
04:58que ce n'était pas une initiative iranienne.
05:02Donc il n'y a pas ce qu'on appelle le « smoking gun ».
05:05Mais il y a un faisceau d'éléments qui sont troublants.
05:09Et le problème, c'est que ces éléments troublants
05:11peuvent servir évidemment de justificatif au gouvernement israélien
05:15pour aller beaucoup plus loin.
05:17Oui, c'est ça. Le guide suprême iranien, Ali Khamenei, l'a démenti.
05:19Mais il appelle maintenant à poursuivre le combat mené par le Hamas,
05:23c'est-à-dire la destruction de l'État d'Israël.
05:25Est-ce que ces propos ne sont pas utilisés par Netanyahou
05:27pour justifier la poursuite de la guerre ?
05:30Oui, mais le problème, c'est que de part et d'autre,
05:32on alimente la logique guerrière.
05:34C'est ça, j'allais dire, le paradoxe très dangereux de la situation.
05:39Et on n'est plus au moment, au début,
05:41où les acteurs étaient dans une logique quand même prudentielle, calibrée.
05:44Là, on sent qu'il y a un processus qui s'emballe.
05:47Et d'ailleurs, le numéro 2 du Vesbola, Naïm Kassem, ne serait plus à Beyrouth.
05:52Il aurait fui en fait Beyrouth le 5 octobre,
05:54d'après une publication émiratie, avec le ministre Aragchi, iranien,
05:59pour se mettre à la rouille à Téhéran.
06:00C'est dire qu'au niveau régional, toutes les lignes sont en train de sauter,
06:04y compris celle d'une attaque en profondeur de l'Iran,
06:08dont les gardiens de la Révolution développent une politique assez dangereuse.
06:14Et notamment, on peut s'interroger sur la cible, justement,
06:17de la résidence du Premier ministre,
06:19qui peut constituer effectivement un casus belli du point de vue israélien
06:24et d'un élargissement des cibles dans la réplique contre Téhéran.
06:28Eh bien, Netanyahou, vous le disiez,
06:29a promis une riposte sévère contre l'Iran.
06:31Alors du coup, qu'est-ce qui l'attend ?
06:34Là, en tout cas, avec les Américains,
06:36il y avait une coordination sur les cibles, justement, le panel de cibles.
06:40A priori, les Américains ne voulaient pas,
06:42effectivement, des frappes sur les sites nucléaires,
06:45ne voulaient pas sur les sites pétrolières, surtout en période électorale.
06:48On sait combien la question du prix du baril est extrêmement sensible
06:51pour l'électeur américain.
06:53Mais les choses sont en train de bouger, en accélérer.
06:55Et donc, on ne peut pas exclure que ce panel de cibles
06:59soit élargi par Netanyahou en s'appuyant, justement,
07:02sur le franchissement de lignes rouges,
07:04comme le fait de viser sa résidence principale.
07:07Il a dit qu'il y avait une tentative d'assassinat
07:09contre sa personne et son épouse.
07:11Donc, on voit bien qu'au niveau de la rhétorique,
07:13on est de plus en plus dans une inflation.
07:15Oui, une escalade.
07:16On vient de l'apprendre, Netanyahou s'est entretenu avec Donald Trump.
07:20Il lui a dit apparemment que les décisions du gouvernement israélien
07:23se feraient sur ses propres intérêts.
07:26Si Trump est élu, qu'est-ce qui peut changer ?
07:30Alors, là aussi, il faut rester prudent,
07:33parce que le paradoxe, c'est que Trump,
07:35évidemment, la victoire potentielle de Trump serait vue du gouvernement israélien
07:41comme effectivement un point favorable.
07:44Mais en même temps, Trump est aussi quelqu'un de très erratique.
07:49Il n'aime pas les guerres.
07:51D'ailleurs, il l'a signifié à Netanyahou en lui disant
07:53qu'il fallait que ça s'arrête.
07:55Et on voit bien que ça lui pose quand même un problème aussi,
07:58même si par ailleurs, évidemment, il a des positions très dures,
08:01notamment sur le nucléaire iranien.
08:02Donc, pour l'instant, de toute façon,
08:06le résultat des élections n'est pas encore avéré.
08:09Donc, il faut attendre.
08:10Mais on voit bien à quel point, au niveau régional et même international,
08:15les enjeux sont majeurs, d'autant plus majeurs que finalement,
08:18la question du Proche-Orient est en train de se connecter de plus en plus
08:21avec la question ukrainienne.
08:23Et on voit que les positions des uns et des autres
08:24sont évidemment souvent très contradictoires sur ce sujet.
08:28Vous disiez que Ben Netanyahou a les mains libres jusqu'au 5 novembre.
08:31En fait, ça sera jusqu'en janvier,
08:33puisque la prestation de serment se fait en janvier pour le président américain.
08:37On parle même de lame duck entre cette période du résultat de l'élection
08:41jusqu'à début janvier.
08:43Et jusqu'à ce jour, malgré les succès militaires,
08:45Netanyahou, lui, il n'a aucune proposition politique.
08:49Non, c'est le problème.
08:50Alors, vous évoquez le syndrome du lame duck,
08:52c'est-à-dire du canard voiteux du président en fin de mandat,
08:55ce qui est le cas de Joe Biden en l'occurrence.
08:58Mais de toute façon, cette période est très dangereuse,
09:02parce que c'est une période d'inertie institutionnelle.
09:06Évidemment, ça réduit considérablement
09:09la capacité d'influence des Américains sur les situations au niveau global.
09:16Et en l'occurrence, c'est susceptible de constituer une fenêtre d'opportunité
09:21potentielle pour le Premier ministre pour pousser l'avantage
09:25sans tenir compte de certaines désidératats américaines.
09:28Mais pour l'instant, le problème, c'est qu'il y a une accélération des événements.
09:33Et il faut être très prudent parce qu'on se demande justement
09:38comment la mécanique va pouvoir être contrôlée un minimum
09:42pour que ça ne débouche pas sur une conflagration beaucoup plus générale.
09:45Oui, et qu'il y aurait aussi des répercussions énormes sur le plan économique,
09:48comme vous faisiez allusion au site pétrolier au Détroit d'Ormuz.
09:51On voit mal Netanyahou comment il pourrait détruire totalement le Hamas et le Hezbollah,
09:56qui perdent des cadres, certes, mais qui recrutent notamment en ce moment dans la jeunesse.
10:01Est-ce que la perspective pour Israël, c'est la guerre sans fin ?
10:06Oui, c'est le problème, ce que vous évoquez sur la question du jour d'après,
10:09les perspectives politiques.
10:10C'est le problème majeur, qui est d'ailleurs stigmatisé pas seulement à l'extérieur,
10:17mais y compris à l'intérieur d'Israël, par l'establishment militaire,
10:20notamment de Tsahal, par certains ministres comme Benny Gantz et d'autres.
10:25C'est effectivement la vraie question de quoi après ?
10:29Et là, en l'occurrence, il n'y a pas d'horizon.
10:31On le voit évidemment avec la question de Gaza sur la gouvernance après la guerre,
10:37parce que la question évidemment est d'une actualité de Golande.
10:40Mais de manière plus générale, ça vaut pour le Liban exactement,
10:44même s'il y a des calculs de la part des Israéliens,
10:46notamment l'idée, probablement la stratégie israélienne,
10:48c'est de réduire à un niveau de faiblesse tel le Hezbollah,
10:52qui ne sera plus en capacité de peser sur l'échiquier politique
10:54et de faire obstruction justement à une évolution du système libanais,
10:59avec un rééquilibrage des forces.
11:01Mais on voit bien qu'il y a des enjeux régionaux qui sont de plus en plus élargis.
11:06Et il faut avoir en mémoire la phrase de Benjamin Netanyahou,
11:10deux jours après le 7 octobre, en disant « nous allons changer le Moyen-Orient ».
11:13C'est ce qu'il était en train de faire.
11:14Oui, et puis ça lui permet d'éviter d'en dire plus sur ses responsabilités du 7 octobre,
11:19puisque les services secrets israéliens avaient alerté.
11:22Oui, mais de toute façon, il y aura un jour une commission d'enquête.
11:25Les commissions d'enquête en Israël sont assez peu indulgentes avec leurs dirigeants.
11:30Simplement, ils veulent retarder le moment, effectivement,
11:32où la question des responsabilités seront posées,
11:36notamment des responsabilités politiques, parce qu'il y en a, évidemment.
11:38Oui, c'est une grave sous-estimation.
11:40Merci beaucoup à David Rigolet-Rose pour votre analyse.
11:43Merci d'avoir été avec nous sur France 24.

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