Révélation de "l'invention" du jeune Donald Trump - débat de The Apprentice

  • il y a 4 heures
Les chroniqueurs du Cercle débattent autour d'un film sortant en salles ou en diffusion sur CANAL+
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Transcription
00:00« The Apprentice » d'Ali Abbasi, qui est en compétition à Cannes, raconte les années
00:05de formation du jeune Donald Trump, incarné par Sébastien Stan.
00:09Dans les années 80, le jeune homme d'affaires est pris en main par un mentor, l'avocat
00:14conservateur Roy Cohn, joué par Jérémy Strong, la révélation de la série « Succession ».
00:20Le film appartient donc à un sous-genre du biopic, le « Becoming », qui raconte les
00:25débuts d'un personnage célèbre, Marie.
00:27C'est l'invention du jeune Donald Trump, et ce qui est absolument passionnant, c'est
00:35que ce serait un bon film, même si ça ne parlait pas de Donald Trump.
00:39C'est peut-être ça le secret d'un bon biopic, c'est d'être un bon film qui
00:42tient tout seul.
00:43Ali Abbasi a une passion pour les monstres.
00:46Je ne sais pas si vous vous souvenez de « Border » qu'on avait vu en 2018, qui racontait
00:50des trolls dans le réel d'un pays nordique, du Danemark ou de la Suède, je ne sais plus.
00:57Et puis, évidemment, l'ennemi de Machad qui était en compétition à Cannes, c'était
01:00un serial killer, tueur de femmes, tueur de prostituées.
01:03Et donc là, c'est un autre type de monstre qu'on va voir, et avec un diable qui n'est
01:08pas forcément celui qu'on croit.
01:09C'est très classiquement l'histoire de l'élève qui dépasse le maître, assez au vitriol.
01:15Alors, je vous ai apporté un petit extrait où j'ai envie de souligner quoi ? Déjà
01:19la trivialité.
01:20C'est trivial parce que c'est un type qui a des grosses fesses, le jeune Donald Trump.
01:25Il faut changer ça.
01:26Eh bien, on va le réinventer.
01:28Et donc, vous vous retrouvez avec un futur président en caleçon, mes amis.
01:31Et puis, tout à coup, ce que j'ai envie de souligner, c'est la vitalité.
01:34Regardez comment on est dans la pièce avec eux.
01:55Et là, c'est quoi ? C'est à la fois l'association de malfaiteurs et le pacte.
02:09Le mot est dit, évidemment, pacte, on dit diable.
02:12Vous allez voir qui est le diable.
02:13Il se trouve que le diable, le premier en tout cas, il est joué par Jeremy Strong,
02:16qui est un acteur génial, qui est un acteur dont le regard est bouleversant.
02:21Et c'est ça, je pense, une des grandes surprises de ce film, c'est qu'il est
02:26centré sur la relation et la trahison de cette relation entre ces deux hommes.
02:31Oui, la trahison presque inévitable, c'est-à-dire effectivement où il devient plus fort, plus
02:35diabolique que son modèle.
02:37Vous parliez de monstres.
02:39Oui, il y a vraiment une dimension presque de film de genre, on peut dire.
02:42De film fantastique.
02:43Moi, je trouve que leur rencontre, qui se situe dans un club new-yorkais qui ressemble,
02:48on parlait de cabaret tout à l'heure, ça ressemble aussi un peu à un cabaret.
02:50Il y a quelque chose d'un peu étrange, en tout cas de complètement anachronique.
02:53Et ça ressemble en effet à un pacte Faustien dans les règles, avec tout ce qu'il y a
02:57de potentiel vampirique, de potentiel fantastique en tout cas.
03:01En effet, le diable n'est pas celui qu'on croit au départ.
03:04Moi, ce que je trouve passionnant aussi, et on le voyait dans l'extrait que vous avez
03:07montré, Marie, c'est le caractère extrêmement sexuel de leurs relations et qui dure tout
03:11du long.
03:12C'est-à-dire que parmi toutes les représentations qu'on connaît déjà de Trump, il y a son
03:16virilisme qui a toujours été à la base de sa construction.
03:19Qui en prend un petit coup et en même temps qui se re-complexifie, c'est-à-dire qu'on
03:24ressaisit toute la dimension sexuelle du personnage, qui est une dimension très importante
03:27parce que c'est une dimension de pouvoir, sur un mode très différent qui est un mode
03:31intime d'une relation entre deux hommes.
03:33Roy Cohn, on l'apprend assez vite, est un homme homosexuel, dans le New York par ailleurs
03:37qui commence à être secoué par l'épidémie du sida.
03:40Moi, la manière dont est traité le sida à New York dans ces années-là, comme une
03:45espèce de fou, mais qui en fait bouffe tout le film, finit par bouffer tout le film, me
03:49passionne largement davantage que la question du roman d'apprentissage.
03:53Alors, ça reste quand même un biopic.
03:55Est-ce qu'on apprend quelque chose de Donald Trump ? Est-ce qu'on a la sensation d'approcher
03:59de la figure ?
04:00Oui, disons qu'on apprend un petit peu ses débuts.
04:02C'est vraiment un minable, en fait, au début.
04:03C'est une espèce de petit employé de son père qui travaille dans l'immobilier.
04:07Et ce que je trouve très beau, c'est que petit à petit, effectivement, ça passe d'un
04:10minable à une espèce de grand vampire, une espèce d'ogre.
04:13Et moi, c'est vraiment ça que j'ai aimé dans le film, c'est la relation entre les deux.
04:16Et en fait, à mesure que le personnage de Jérémy Strong est touché par le sida et
04:19donc maigri, se raboucrit, exactement ce que Trump grossit, il n'arrête pas de le dire.
04:23« Ah, j'ai grossi, il faut que je me fasse des lipostutions et tout. »
04:25On a l'impression qu'il aspire toute la vie de son ancien mentor et désormais sa proie.
04:30Mais même la photo change, la photographie, entre la première partie.
04:33D'ailleurs, il y a du 16 au début, on est en 70 mm, après on passe en vidéo.
04:37Et c'est un des charmes du film qui attrape, je trouve, quelque chose de l'esthétique
04:42des films des années 80-90.
04:44Moi, c'est quelque chose qui m'a plu.
04:46Quand j'ai découvert le film la première fois, on avait presque un côté retour vers
04:51le futur, dans cette construction formelle.
04:56Avec un cinéaste qui, de film en film, choisit des esthétiques complètement différentes.
05:01C'est-à-dire que tu as raison, Marie, quand tu dis que la figure du monstre court à travers
05:05tout son cinéma, mais ça l'entraîne dans des genres.
05:07Les films sont radicalement différents.
05:08Le fantastique social dans Border, le film de Serial Killer, mais ancré dans la dénonciation
05:14politique des Nuits de Machade, et puis là, une espèce de comédie au vitriol sur le pouvoir.
05:19Passionnant.
05:20Je vous vois bouder.
05:21Frédéric, qu'est-ce qui se passe ?
05:22Je n'arrive pas vraiment à voir le film comme vous.
05:25Moi, je n'arrête pas de me demander si les limites du film sont ses qualités ou le contraire.
05:29Ce que je veux dire par là, c'est qu'on parle de la naissance d'un monstre.
05:33Moi, j'ai l'impression d'un film qui dégonfle totalement la baudruche de Trump.
05:37C'est ce qui me plaît dans le film.
05:38C'est super.
05:39Oui, évidemment.
05:40C'est-à-dire, en fait, je le trouve minable au début et je le trouve minable à la fin.
05:44Différemment.
05:45Oui, mais c'est un minable puissant.
05:46Exactement.
05:47C'est un minable très puissant.
05:48Je trouve que ses trahisons sont minables.
05:50Et pour moi, la qualité du film, c'est qu'à la fin, je veux dire, les figures du mal et
05:57les figures d'un homme comme Trump sont absolument fascinantes.
06:00On est toujours fasciné par ces figures-là.
06:01Là, à la fin, je me dis que c'est vraiment un pauvre type.
06:04Et j'ai l'impression que le film joue sur, je n'aime pas reprendre cet adjectif,
06:07mais joue sur quelque chose d'un peu déceptif sans cesse dans sa narration, dans sa dramaturgie
06:12pour finalement nous dire, depuis le début, ce type n'a été que…
06:16Oui, c'est comme un des raisons.
06:17Il n'a pas eu de flair.
06:19J'ai eu l'impression d'une platitude dans le sens bassesse et à la fin bassesse.
06:22Oui, mais il a des idées sur la construction new-yorkaise qu'on peut trouver dégueulasses
06:26mais qui, d'un point de vue de pognon, marchent.
06:28Il a du flair pour repérer le mec qui va l'aider.
06:31Mais pas que.
06:32Il a aussi de l'humanité.
06:33On montre un personnage qui est humain avec sa famille.
06:35C'est ça que je trouve intéressant.
06:36Ce n'est pas complètement à charge.
06:37Ce n'est pas dès le début, ce type est à bon acheter au chien.
06:41Et peut-être que certains ont été déçus parce qu'ils auraient voulu une espèce
06:44de figure au vitriol, Art Le Clown, si vous voulez.
06:46Ce n'est pas ça du tout.
06:47On peut faire un mash-up pour le prochain.

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