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Il y a un an, le 7 octobre 2023, Israël était attaqué par le mouvement islamiste palestinien du Hamas, une attaque qui a fait 1.200 morts et 250 otages. Depuis, près de 42.000 personnes sont mortes à Gaza suite à l'offensive lancée par l'armée israélienne. L'escalade de la guerre continue au Proche-Orient et le conflit s'est étendu au Liban contre le Hezbollah. Écoutez l'interview de Vincent Lemire, historien et professeur à l'Université Gustave Eiffel.
Regardez L'invité de Yves Calvi avec Yves Calvi du 07 octobre 2024.

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Transcription
00:00RTL Soir
00:02Yves Calvi et Agnès Bonfillon
00:04Bonsoir Vincent Lemire.
00:05Bonsoir.
00:05Vous êtes historien, vous avez dirigé le centre de recherche français de Jérusalem.
00:09Israël comme est mort aujourd'hui, s'est mort lors de l'attaque du Hamas sur son territoire.
00:12C'était il y a un an, le 24 novembre dernier sur RTL.
00:15Vous affirmiez être un indécrottable optimiste.
00:18Vous l'êtes toujours ?
00:20Moins.
00:21Moins.
00:22On s'est beaucoup trompé.
00:24Moi le premier et d'autres.
00:25On a beaucoup dit qu'il allait y avoir un cessez-le-feu,
00:28que Netanyahou allait perdre le pouvoir,
00:30qu'il y avait des voies de sortie.
00:32Ça n'est pas arrivé.
00:34Et depuis quelques mois, c'est l'embrasement que je vois poindre.
00:39Et c'est l'embrasement qu'on voit à l'horizon.
00:42Aujourd'hui, c'est pas tant une journée pour l'analyse,
00:44c'est une journée pour la commémoration.
00:46L'enjeu de cette journée, pour moi, depuis ce matin,
00:48c'est commémorer, ça veut dire communier.
00:50Ça veut dire se souvenir ensemble.
00:52Comment on fait pour rester ensemble dans cette journée,
00:54alors que certains voudraient ne penser qu'aux morts du 7 octobre,
00:57et d'autres qu'aux morts de Gaza ?
01:00J'ai une méthode à proposer à ceux qui nous écoutent.
01:03Je vous écoute, oui.
01:04Pour ceux qui prient ou pour ceux qui prient pas,
01:06mettre tous ces morts dans les mêmes pensées, dans les mêmes prières,
01:09et puis sur le plan plus scientifique, méthodologique,
01:12réapprendre à distinguer les intérêts vitaux des sociétés civiles
01:16des calculs tactiques de leurs dirigeants.
01:18Yaya Sinwar et le Hamas ne défendent pas la société civile de Gaza.
01:23Netanyahou ne défend pas les civils israéliens.
01:26La preuve avec les otages.
01:27Le Hezbollah ne défend pas les intérêts de la société civile libanaise.
01:30Réapprenons à distinguer entre les civils et leurs dirigeants,
01:35qui aujourd'hui font des calculs mortifères.
01:37Le président Macron s'est prononcé pour l'arrêt des livraisons d'armes à Israël,
01:40provoquant un tollé jusque dans son camp.
01:42Quelle est votre réaction, Vincent Lemire ?
01:44Écoutez, l'objectif d'un attentat terroriste,
01:47comme celui qu'on a vécu le 7 octobre,
01:49c'est d'aveugler son adversaire, de le rendre fou de rage.
01:52Ça a réussi au-delà, je pense, des espoirs mortifères les plus fous de Yaya Sinwar.
01:59La responsabilité d'un ami et d'un allié,
02:02c'est de ceinturer celui qui s'apprête à commettre l'irréparable.
02:08Donc moi, je considère qu'en tant qu'ami d'Israël, en tant qu'allié,
02:12la France, les États-Unis, doivent aujourd'hui dire aux dirigeants israéliens
02:17et à la société civile israélienne, ça suffit.
02:20Il faut s'arrêter, y compris dans votre propre intérêt.
02:23Vous êtes en train de courir vers l'abîme
02:26et de perdre toute légitimité internationale.
02:29C'est ma conviction depuis un an.
02:31Et on peut dire ça alors que nous sommes le 7 octobre,
02:33qu'il faut rappeler la violence pour ne pas dire la sauvagerie de cette attaque.
02:361200 morts, 250 otages, 42 000 morts à Gaza depuis.
02:40Comment on sort de cette spirale ?
02:43On sort de cette spirale avec un cessez-le-feu.
02:47Il y a trois semaines, il y avait une voie de sortie.
02:50Il y avait une vraie percée diplomatique à l'ONU,
02:53proposition franco-américaine.
02:56Le cessez-le-feu, il pouvait tout résoudre en même temps.
02:59Libération des otages israéliens encore en vie,
03:01protection des populations civiles de Gaza,
03:03sécurisation de la frontière nord,
03:05puisque le Hezbollah a répété matin, midi et soir
03:08que dès qu'il y avait un cessez-le-feu à Gaza,
03:10il cessait de tirer ses roquettes.
03:13Donc il y avait des voies de sortie.
03:15Benjamin Netanyahou pouvait prendre ses gains d'une certaine manière.
03:18J'ai cru d'ailleurs qu'il allait le faire.
03:20Il n'est pas dans cette logique-là.
03:21Il est dans la logique de la fuite en avant.
03:23Et après Gaza, après le Liban,
03:25ce qu'on peut craindre évidemment, c'est l'Iran.
03:27C'est l'Iran ?
03:28Vraiment, vous pensez que l'Iran peut rentrer dans la partie
03:31en tant que participant à une éventuelle guerre ?
03:35La seule bonne nouvelle du jour, c'est que le Hezbollah et l'Iran
03:38ne veulent pas de l'embrasement parce qu'ils n'y ont pas intérêt.
03:41Par contre, le Hamas et Netanyahou ont intérêt à cet embrasement.
03:44Donc la question des heures qui viennent,
03:46c'est quelle va être la réplique israélienne aux tirs de missiles balistiques iraniens.
03:50Au même moment, dans notre pays, la France,
03:52les actes antisémites n'ont cessé d'augmenter, Vincent Lemire.
03:55Comment l'expliquez-vous ?
03:57L'antisémitisme en France n'est pas résiduel.
03:59Il explose. Il est exponentiel.
04:01Je l'ai écrit en juin dernier.
04:04Jeudi dernier, j'étais à Sciences Po
04:06pour ouvrir un cycle de douze conférences
04:08sur les origines et l'histoire du conflit israélo-palestinien
04:11à la demande de la direction de Sciences Po
04:13qui a souhaité créer cette conférence
04:15qui est hors enseignement pour tous les étudiants
04:17de tous les cycles, de tous les niveaux
04:19et y compris pour le personnel de Sciences Po.
04:21Vient qui veut à partir du moment où il est à Sciences Po.
04:23Exactement. Ça s'est super bien passé.
04:25L'amphi était plein. Il y avait des keffiers.
04:27Il y avait des kippas.
04:29Le matin même, il y avait eu des manifestations
04:31qui ont été relayées d'ailleurs par les médias,
04:33des manifestations dans le hall de Sciences Po.
04:35Mais dans l'amphi, ça s'est bien passé. Pourquoi ?
04:37Parce qu'il y avait un prof, qui était moi en l'occurrence,
04:39mais ensuite ce sera douze autres, onze autres,
04:41un prof qui enseigne
04:43et qui fait de la pédagogie.
04:45Et tout le monde était prêt à écouter.
04:47Je vous promets qu'il y avait des questions ensuite.
04:49Je voyais bien que les étudiants, ils étaient d'un bord
04:51ou d'un autre. La solution,
04:53c'est la pédagogie. Et je dois dire
04:55de ce point de vue-là que
04:57les ministres de l'éducation nationale, je suis obligé de le mettre au pluriel
04:59parce qu'il y en a eu un certain nombre,
05:01les ministres de l'enseignement supérieur ne nous ont pas beaucoup aidé depuis le 7 octobre.
05:03Ils ont préféré mettre
05:05le couvercle sur la marmite
05:07par crainte des débordements. Résultat,
05:09c'est les étudiants, les lycéens qui se sont saisis de la parole.
05:11Vous nous donnez un exemple qui fait du bien
05:13à entendre, mais vous savez très bien que ce n'est pas le cas
05:15dans l'ensemble du pays. Et on a l'impression qu'en France
05:17aujourd'hui, le 7 octobre, j'insiste,
05:19le 7 octobre libère l'antisémitisme.
05:21Notamment en France.
05:23Comment l'expliquez-vous ?
05:25Vous avez entièrement raison.
05:27Le 7 octobre a libéré
05:29non seulement la parole, mais les actes
05:31antisémites. Les chiffres sont absolument
05:33incontestables de ce point de vue-là.
05:35Peut-être qu'il n'y a plus de signalement, mais c'est certain
05:37que la réalité, c'est celle-là.
05:39Evidemment, protection de nos concitoyens
05:41de confession juive ou d'origine juive.
05:43C'est évident.
05:45Il faut mettre les moyens.
05:47Ça, c'est l'urgence.
05:49La prévention,
05:51c'est le prof qui parle. C'est la pédagogie.
05:53Il faut refaire de la pédagogie sur ces sujets-là
05:55dès le plus jeune âge.
05:57L'ambassadeur d'Israël en France déclarait sur RTL
05:59que le peuple palestinien était le peuple plus
06:01instrumentalisé du monde.
06:03Le plus instrumentalisé du monde.
06:05Demain, 8 octobre, Jean-Luc Mélenchon entend
06:07sortir les drapeaux palestiniens dans les universités.
06:09Que pensez-vous de ce propos de l'ambassadeur d'Israël ?
06:11Oui,
06:13pourquoi pas. Ça peut sembler
06:15juste. Je dirais que le peuple israélien
06:17d'ailleurs aussi est instrumentalisé.
06:19C'est d'ailleurs ce qui est terrible dans cette
06:21cause qu'on est en train de vivre. C'est que tout le monde,
06:23tous les acteurs internationaux,
06:25y compris tous les acteurs de la
06:27petite politique politicienne, on le voit au niveau français,
06:29s'emparent de cette guerre gravissime
06:31pour faire de la politique nationale.
06:33Une toute dernière question, si vous le voulez bien,
06:35Vincent Lemire, avant de nous séparer.
06:37Une solution à deux états est-elle toujours possible ?
06:39Elle semble inimaginable
06:41au moment où nous parlons.
06:43Elle est inimaginable, mais le 7 octobre était inimaginable.
06:45L'historien que je suis sait qu'il y a des
06:47bifurcations parfois très inattendues.
06:49Et dans les pires moments, parfois,
06:51les dirigeants, les sociétés civiles peuvent se dire
06:53mais en fait, on va vraiment vers la catastrophe.
06:55Il faut deux états, parce que pour les
06:577 millions de palestiniens qui vivent
06:59de la Méditerranée au Jourdain, que ce soit en Israël, à Gaza
07:01ou en Cisjordanie, il faut un état
07:03qui protège, qui représente,
07:05mais aussi qui contrôle. Et des palestiniens
07:07qui ne seraient pas contrôlés par un état palestinien,
07:09ils seront contrôlés
07:11par une force d'occupation, et ça créera
07:13toujours de la violence. Je suis sûr que
07:15les gens qui nous écoutent,
07:17par simple bon sens, savent
07:19que c'est la seule solution. Pas forcément sur deux
07:21territoires absolument distincts, mais il faudra
07:23deux entités étatiques.
07:25Merci beaucoup Vincent Lemire, historien, professeur à l'université Gustave Eiffel,
07:27de Champs-sur-Marne, et je renvoie à votre
07:29dernier livre, Israël-Palestine,
07:31anatomie d'un conflit, co-écrit avec notre confrère
07:33Thomas Negaroff, et c'est aux éditions des
07:35Arènes. Merci, bonne soirée. Enfin,
07:37sachez qu'Emmanuel Macron a donc assuré aux familles
07:39des deux otages franco-israéliens, encore
07:41retenus à Gaza, que la France mettait
07:43tout en oeuvre pour leur libération, et martelait
07:45qu'elle continuerait à se battre sans relâche
07:47contre l'antisémitisme.
07:49Dans un instant donc, notre journal de 18h30,
07:51une expérience spectaculaire, un chercheur
07:53a créé une pièce chauffée à 50 degrés.
07:55Objectif, nous préparer aux conséquences du
07:57réchauffement climatique, ça ne sera pas, vous l'avez
07:59compris, facile, facile. Enfin,
08:01à 18h45, nous serons avec le sénateur
08:03Jérôme Durin, il est président d'une commission d'enquête
08:05sur le narcotrafic. Ce week-end,
08:07à Marseille, un adolescent de 14 ans
08:09a tué un chauffeur VTC d'une balle dans la tête,
08:11un autre ado a lui été brûlé vif
08:13dans une voiture, tout cela sur fond de
08:15trafic de drogue. A tout de suite sur RTL.

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