Janvier 2012
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00:00Bonjour Biouna, quelle belle invitation dans mon cabaret, c'est le spectacle à Paris donc ça se passe au palais des glaces et c'est tous les soirs un triomphe avec finalement l'invitation au public de venir dans votre univers Biouna.
00:20Oui dans mon univers parce que tu sais le cabaret j'y ai passé la moitié de ma vie on peut dire, le cabaret il y avait de tout.
00:34C'était le cabaret à Alger donc on imagine.
00:37Tu peux l'imaginer partout, je raconte sur Alger aussi et même il y avait le cabaret Le Désir ici à Paris, c'est le même truc mais je te parle des cabarets avant où il y avait des spectacles.
00:55Ca permet de raconter tout, de parler de la vie.
00:58Voilà parce qu'il y a plusieurs histoires dans un cabaret, moi j'y ai vécu dans un cabaret, il y a beaucoup de personnages, chacun sa vie et tu sais quand ils prennent le comptoir ils commencent à se défouler, à raconter leur vie et tout ça.
01:16C'est pour ça qu'il y a beaucoup d'émotions aussi et surtout je parle aussi de la décennie noire quand on s'enfermait avec le couvre-feu.
01:30La décennie terroriste en Algérie.
01:32Oui on avait les mêmes horaires que le couvre-feu, 22h, 6h du matin alors on s'enfermait et puis il y avait tout le monde dedans.
01:42Et en même temps il y avait l'envie de se distraire.
01:45Même s'il y avait la menace.
01:47Oui même s'il y avait la menace qui est formidable c'est que quand on est enfermé dedans on raconte des blagues, peut-être c'est ça qui nous a sauvés.
01:57Et puis il y avait les intellectuels, il y avait les policiers, il y avait les artistes, on était tous ensemble et ça j'ai voulu le faire dans mon spectacle.
02:12Oui il y a de la musique, il y a de la danse du ventre, il y a de l'émotion, ça se passe comme ça, c'est naturel, vous êtes en liberté comme toujours.
02:20Vous êtes une femme libre Biyouna ?
02:22Ah trop libre, trop trop libre, je suis née libre et je finirai libre.
02:29Mais personne ne vous fera jamais peur, on ne vous a jamais fait taire même pendant cette fameuse décennie noire.
02:34Non, ma gueule personne ne me la ferme, parce que je ne peux pas, c'est inné, je ne peux pas être hypocrite, je ne peux pas faire semblant, je suis comme je suis, c'est pour ça que les gens m'aiment et il y a d'autres que je dérange pour m'en faire parler.
02:55Pourquoi parce que vous êtes trop libre aux yeux de certains ?
02:57Oui, trop libre, parce que moi je suis née au milieu de femmes soumises et quand j'ai vu ça, même ma mère une fois, j'étais toute petite, je lui ai dit jamais je serai comme toi.
03:13Et voilà, j'ai tenu parole et ma mère est liée pour quelque chose parce que ce qu'elle n'a pas fait à elle, c'est sur moi, c'est elle qui m'a poussé à faire ce que je veux.
03:29Elle me dit tu veux danser, vas-y danse.
03:32Et quand on m'a appelé pour la comédie, elle m'a dit ben fais-le, si ça va, ça va, sinon...
03:38C'est elle qui m'a toujours aidée, qui m'a protégée aussi.
03:42Et on peut tout dire dans un spectacle, on peut parler aussi d'ailleurs du voile, des femmes.
03:49Oui, oui. Bon, moi je respecte les femmes qui mettent le voile mais avec le cœur, pas avec la peur.
03:57Voilà, parce que je suis née au milieu de femmes qui mettaient le foulard et tout ça, mais normal.
04:04Elles faisaient la prière mais normal, sans se montrer ou sans...
04:09Et voilà, moi je respecte beaucoup le voile parce que ma grand-mère, elle mettait le voile mais elle le mettait pas.
04:17Elle le mettait avec le cœur, pas avec la peur, tu vois.
04:20Oui, et dans le spectacle, on ne nomme pas l'organisation terroriste qui a fait les attentats en France, mais on parle aussi de ça.
04:27Parce que moi, je leur dis, je ne sais pas qui vous êtes, la mafia ou bien...
04:34Parce que vraiment, c'est des gens qui profitent de la situation et voilà, de faire du mal comme ça, à crédit comme on dit.
04:45C'est de tuer des personnes qui sont pour rien comme en Algérie.
04:50En Algérie, bon, je ne vais pas pleurer sur mon sort, il y a beaucoup de gens qui ont été tués pour rien.
04:59Oui, et face à ça, les artistes ont un rôle à jouer, Miuna ?
05:04Ah oui, oui, oui.
05:05La période pendant la décennie noire, il y avait beaucoup d'artistes qui avaient beaucoup de courage et rien ne les arrêtait.
05:16Il y avait des réalisateurs qui sont morts, il y avait des intellectuels aussi, mais rien ne les arrêtait.
05:23La marche arrière était cassée de l'avant.
05:26Oui, il y a une force incroyable dans le peuple algérien.
05:30Oui, surtout les femmes algériennes, les femmes algériennes, vraiment.
05:34Moi, je leur ai dit, si moi je m'appelle Miuna, elles, c'est des baïonnettes.
05:39Ah oui, c'est des femmes courageuses et voilà.
05:43Oui, ça a commencé par un feuilleton à la télévision, l'aventure, Miuna ?
05:47Oui.
05:48Immensément populaire, vous êtes la représentante d'Alger avec son parler.
05:55Dar Sbetar, c'était le feuilleton.
05:58Moi, je suis allée comme visiteuse et puis après, d'un coup, le réalisateur, parce qu'on s'est accroché un petit peu,
06:07j'ai dit, oh, il est facile ce rôle, pourquoi il se casse la tête ?
06:10Et là, il se tourne vers moi parce qu'il était tellement énervé pour trouver le rôle de Omar et de Fatma.
06:17Et là, il se lève et me dit, toi, la grande gueule, montre-nous ce que tu sais faire.
06:22Et moi, je ne me laissais pas faire, j'ai fait ça.
06:25Et là, il leur a dit, c'est elle, c'est moi quoi ? C'est elle qui prendra ce rôle.
06:30Oui, il y a la gouaille algéroise, on pourrait dire ça.
06:34Oui, la sauvage, la disjonctée, l'emmerdeuse, quoi.
06:41Elle emmerdait tout le monde, les voisins et tout.
06:44Mais elle était sympa quand même.
06:46Oui, mais cette gouaille algéroise, vous l'avez toujours eue, vous, Billouna.
06:50Des quartiers où vous êtes née.
06:52À Bellecourt, quartier populaire, Camus.
06:56Oui, c'est quoi, finalement, les quartiers populaires ?
06:58C'est l'Algérie profonde, c'est l'Algérie qu'on aime ?
07:01Oui, tu peux dire Bellecourt, Bebeloued, tout ce qu'il y a en bas, c'est le quartier populaire.
07:08Et ces quartiers-là, ils sont sortis des intellectuels, des artistes, parce qu'ils n'ont pas eu la vie facile.
07:20Mais toujours eu l'envie de rire.
07:22Oui.
07:23Ils ont ça, dans le sang.
07:26En Algérie, je crois que l'humour est sorti de là-bas.
07:30Parce qu'en pleine décennie noire, le lendemain, ils te font sortir des blagues et ça te fait rire.
07:36Des fois, quand il y a des amis à moi, des Français, je leur raconte les blagues sur la décennie noire et tout ça.
07:44Ils me disent, oh mon Dieu, ils dramatisent beaucoup.
07:48Là-bas, non.
07:49Là-bas, peut-être qu'on s'en est sortis grâce à cet humour.
07:55Ils sont drôles.
07:58Et là, sur scène, au Palais des Glaces à Paris, on s'adresse à un public qui vit ici.
08:04Et finalement, on leur parle de l'Algérie, on leur parle du drapeau, on leur parle de tout ça.
08:09C'est vrai, le drapeau ici, en France, il y en a beaucoup.
08:14Il y en a beaucoup dans les téléphones, les sacs d'eau.
08:19Un copain à ma fille, je suis allée chez lui, j'ai trouvé même le rideau de la salle de bain en drapeau.
08:26Un drapeau algérien ?
08:28Alors, même s'il y a un match chinois avec Mexico, tu trouves un drapeau algérien au milieu.
08:36Ça, ça vous fait rigoler, vous, Biouna ?
08:40Oui, alerte, un drapeau algérien !
08:43Et moi, ça me fait rire.
08:45Pourquoi j'aime bien y aller, en Algérie ?
08:47Je m'inspire, je me ressource, je m'oxygène avec ça.
08:52Quand ils commencent à raconter des trucs et tout ça, ça m'aide beaucoup.
08:57Oui, la vie, c'est le théâtre, finalement.
08:59Votre vie, Biouna, chanter Jérôme Savary, des albums, là, ce spectacle, les grands films de Nadir Moknesh.
09:07Vive l'Algérie ! Vous le diriez, ça, vive l'Algérie ?
09:10Oui, vive l'Algérie.
09:12One, two, three, vive l'Algérie.
09:15C'est vrai que vous allez jouer la maman d'Omar Sy dans un film ?
09:19Oui, c'est le film de le réalisateur Rachid Bouchareb.
09:25Voilà, prochainement, ce sera au mois de février, le tournage.
09:31Oui, non mais attendez, la maman d'Omar Sy !
09:34La maman d'Omar Sy.
09:35Non mais attendez, Biouna, vous !
09:38Et puis, en plus, j'aime beaucoup ce comédien.
09:42Et tout le monde l'aime.
09:44Parce que dès que je dis Omar Sy, tout le monde l'aime.
09:48Parce qu'on ne s'est pas encore rencontrés, on ne s'est pas encore vus.
09:52Mais quand tu vois son visage, ça se voit que c'est un être bien.
09:59Il a de bons esprits, tu vois.
10:01Et là, vous allez vous retrouver à Miami avec lui.
10:04Ça y est, une grande aventure !
10:07Une nouvelle aventure !
10:09On va souffrir à Miami !
10:11C'est vrai ?
10:12Que de mal !
10:14Mais là, c'est tous les soirs, la fête.
10:16Vous invitez le public dans votre cabaret au Palais des Glaces.
10:19Et vous ouvrez le cabaret tous les soirs.
10:21Oui.
10:22En quelque sorte, pour le public.
10:23C'est le cabaret du cœur.
10:24C'est quoi, Biouna ?
10:25Oui, c'est le...
10:27Voilà, les gens...
10:31Tu sais, au début, normalement, c'était un one.
10:34Et moi, j'ai dit non.
10:36Un fond noir avec une chaise, c'est pas mon truc à moi.
10:41J'ai voulu un décor, j'ai voulu du vivant.
10:45Et de la musique, et de la danse.
10:47Tu vois, quand les gens, ils rentrent,
10:51quand ils ressortent, ça fait pleurer aussi.
10:56Ça fait danser, ça fait rire.
10:59Et les gens, ils sortent avec le sourire.
11:02Et ça, c'est le plus important.
11:04Voilà.
11:05Parce qu'aussi, il y a la nostalgie.
11:10Voilà, je raconte de la nostalgie.
11:14Un tas de...
11:16Un tas de trucs à raconter.
11:19Merci, Biouna.
11:20On a envie d'y retourner, dans votre cabaret.
11:22Il faut revenir, parce que maintenant, vraiment...
11:27Quand tu es venue, c'était la couturière, en rodage.
11:33Mais maintenant...
11:34La machine est lancée.
11:35Ah oui, elle est lancée, la machine.
11:37Merci.
11:38Merci beaucoup, Biouna.
11:40Merci, Patrick.
11:41Et je peux te dire une chose, que tu es très appréciée en Algérie.
11:45Merci, Biouna.
11:47Merci.
11:48Merci, l'actrice que vous êtes, et la générosité.
11:50Merci, Biouna.
11:51Merci, mon ami.
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