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00:00Madame Jiménez, bonjour, merci d'avoir accepté notre invitation.
00:04Est-ce que le suicide, c'est la réponse ultime d'un être humain qui est confronté à plusieurs difficultés rencontrées à une période de sa vie ?
00:10Oui, tout à fait. On dit généralement, et c'est vrai en réalité clinique, qu'effectivement le suicide est toujours multifactoriel.
00:18C'est-à-dire que c'est en général une accumulation de difficultés qui font que les gens vont se retrouver dans une situation de souffrance telle
00:25qu'ils pensent n'avoir pas d'autre choix que de mettre fin à leur jour.
00:28Est-ce qu'on peut déceler des signes avant-coureurs chez quelqu'un qui serait en difficulté ?
00:32Oui, bien sûr, et c'est tout l'enjeu d'en parler, effectivement, et puis de former aussi la population et le grand public sur cette problématique
00:39que je vous remercie d'ailleurs d'aborder aujourd'hui parce que c'est pas une problématique...
00:42C'est pas simple ?
00:43Non, et c'est pas forcément une problématique dont on parle souvent.
00:46Donc oui, effectivement, il y a des signes évocateurs qu'on peut apprendre à repérer et qui nous permettent ensuite d'alerter
00:51puisque c'est le message aussi qu'on veut faire passer.
00:53Ce sont des changements d'habitude ?
00:55Voilà, changement d'habitude, changement de comportement, trouble du sommeil, trouble de l'appétit,
00:59baisse des résultats scolaires, isolement social, retrait, irritabilité aussi parfois.
01:04Et on a le sentiment que si quelque chose ne va pas chez quelqu'un que l'on côtoie, que l'on connaît,
01:13que forcément c'est pas la bonne solution d'en parler directement avec cette personne.
01:18C'est une vraie fausse idée ça ?
01:19Oui, tout à fait, donc merci de l'aborder, effectivement.
01:22Parler de la question du suicide ou poser la question à quelqu'un sur ses idées suicidaires
01:28est effectivement la meilleure manière de faire de la prévention.
01:32Mais je l'aborde comment ?
01:33Alors, on l'aborde de manière très simple, alors même si ça peut paraître très compliqué.
01:38Je dirais que la phrase type, vraiment, c'est « écoute, je m'inquiète pour toi, j'ai l'impression qu'en ce moment tu vas moins bien,
01:44est-ce que tu as pensé au suicide ou est-ce que tu souffres à tel point que tu as pensé à mettre fin à tes jours ? »
01:50C'est un exemple.
01:51C'est un exemple mais qui peut permettre de libérer la parole et peut-être de décharger la personne concernée ?
01:56Oui, tout à fait.
01:57Effectivement, le suicide, les gens qui ont des idées suicidaires se retrouvent souvent très isolés.
02:02Il y a aussi beaucoup de honte, il y a encore de stigma social face à des gens qui ont des idées suicidaires.
02:07Donc si un jour vous êtes amené à poser cette question, vous serez probablement la première personne à lui poser cette question
02:13et le soulagement sera immédiat.
02:15Et vous la posez si directement la question, « est-ce que tu as pensé au suicide ? »
02:18Oui, il faut très clairement utiliser le terme ou en tout cas mettre fin volontairement à tes jours.
02:23Mais il faut être assez précis puisque l'enjeu, vous l'avez compris, il est énorme.
02:27Il est 8h20 sur France Bleu Pays Basque, nous discutons ce matin avec Marie-Aude Jiménez, médecin psychiatre
02:32au Centre Hospitalier de la Côte Basque et formatrice en prévention du suicide.
02:35Alors Adrien Michaud s'est rendu hier sur le campus de l'ANIVA Bayonne, il a croisé des étudiants, des groupes d'étudiants
02:41et il est allé leur demander s'ils avaient été de près ou de loin concernés par le suicide.
02:46On y a pensé justement parce qu'il y a eu le Covid et que beaucoup de jeunes ont été particulièrement perturbés.
02:52Mais écoutez le témoignage de Maé, elle est étudiante à Bayonne.
02:56J'ai une copine à moi qui a eu des pensées suicidaires après le Covid.
02:59Au début c'était par rapport au fait de revenir en cours avec le social, les personnes,
03:03parce qu'elle n'aimait pas trop tout ce qui était personne et être entourée.
03:06Et après elle a arrêté de manger, elle avait peur quand il y avait trop de monde,
03:09du coup elle n'allait plus à la cantine, elle ne mangeait plus, elle a perdu 15 kilos il me semble.
03:11Elle a essayé avec des médicaments de faire une overdose,
03:13et sa mère l'a découvert dans sa chambre et l'a emmené directement en hôpital psychiatrique.
03:17Ça c'était la période du Covid, c'est terminé les idées suicidaires chez les jeunes.
03:22Alors je schématise, mais est-ce qu'elles sont moins importantes qu'elles n'ont été juste à la sortie du Covid ?
03:28Alors malheureusement pas trop.
03:31Effectivement on sait que les facteurs de santé chez les jeunes se dégradent et restent actuellement dégradés.
03:37C'est aussi pour ça que le gouvernement s'est engagé dans cette grande cause qu'est la santé mentale.
03:43Lors de cette journée de travail aujourd'hui, tout à l'heure à l'espace océan à Anglette,
03:47il sera question de tranches d'âge.
03:49On parlait des jeunes, il sera question des adultes, il sera question des seniors.
03:53Un suicide à 20 ans ce n'est pas un suicide à 75 ans ?
03:56Oui alors tout à fait, effectivement on parle souvent des jeunes et c'est très bien,
03:59puisque l'enjeu pronostique il est énorme,
04:02mais pour l'instant en France actuellement ce sont les personnes âgées qui paient le plus lourd tribut en nombre de décès par suicide.
04:09Qu'est-ce qui amène une personne au suicide ?
04:12Qu'est-ce qui amène une personne âgée au suicide ?
04:14C'est une fin de vie qui s'annonce compliquée le plus souvent ?
04:17Alors là aussi c'est multifactoriel, je dirais que très souvent c'est une conjonction de facteurs,
04:22donc il peut y avoir la maladie, maladie psychique mais aussi maladie physique,
04:26il peut y avoir l'isolement, il peut y avoir la perte de confiance dans l'avenir
04:31et qui peut amener une personne là aussi désespérée à imaginer mettre fin à ses jours.
04:36C'est aussi un médecin, le médecin traitant qui peut être l'alerte sur ce genre de choses, sont formés les médecins à ça ?
04:44Alors ils se forment de plus en plus, il y a les médecins, il y a le médecin traitant,
04:49mais selon moi la question du suicide elle ne concerne pas que le sanitaire,
04:52je crois que chacun de nous est concerné et pour reprendre l'exemple des personnes âgées,
04:56par exemple très souvent l'alerte elle peut venir des auxiliaires de vie,
04:59de l'infirmière qui passe tous les jours, parce qu'on voit des tout petits changements,
05:03parfois ténus mais qui peuvent signifier une dégradation.
05:06Je vous propose d'être pratique en préparant cette interview,
05:09j'ai découvert qu'il y avait un numéro d'appel national le 3114,
05:13je pense que si je l'ai découvert je ne suis pas le seul à l'ignorer,
05:16ce numéro s'adresse à tout le monde, à une personne qui a des envies suicidaires
05:20mais à des personnes qui sont au contact de personnes en difficulté,
05:24il est pour tout le monde ce numéro ?
05:25Tout à fait, donc le 3114 numéro national de prévention du suicide,
05:297 jours sur 7, 24 heures sur 24, tout le monde peut appeler,
05:33les personnes en souffrance, l'entourage des personnes en souffrance,
05:37mais aussi les professionnels, je le dis c'est très important,
05:40et également les endeuillés par suicide,
05:42puisqu'on sait que le deuil par suicide a certaines particularités.
05:45Qui est particulièrement difficile forcément à assumer,
05:49ce numéro permet d'être renvoyé sur des structures d'aide, sur des structures d'accueil ?
05:53Tout à fait, donc ce numéro il est centralisé pour nous ici sur Bordeaux,
05:57mais il est très en lien avec tous les acteurs du territoire,
06:00donc vous serez renvoyé vers les acteurs de proximité,
06:03si vous avez besoin d'être pris en charge.
06:06Merci Mario de Giménez d'avoir accepté l'invitation de France Bleu,
06:10Pays Basque et de France 3 à Chcoalérie ce matin.
06:12Bonne journée à vous.
06:13Merci à vous.