Michel Onfray : «Cette Ve République est en dentelle, en charpie, elle est détruite»

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Michel Onfray, philosophe et essayiste, s’exprime longuement sur la question d’un changement de scrutin : «Cette Ve République est en dentelle, en charpie, elle est détruite».

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Transcript
00:00Non, je pense qu'il faut revenir à la révolution que fut la Vème République.
00:04Elle est détruite, cette Vème République.
00:05Aujourd'hui, les gens disent qu'il faut absolument la préserver,
00:08mais elle est en dentelle, elle est en charpie, elle est détruite.
00:11D'abord, ils parlent du septennat, vous avez vu, donc vous avez entendu.
00:15Donc le septennat, ce n'est pas le quinquennat et ce n'est pas rien.
00:17Ce n'est pas juste deux ans de moins.
00:18C'est la possibilité de faire de telle sorte le septennat
00:21que le président-président et le gouvernement gouvernent
00:24et de faire de telle sorte que ce soit des élections législatives
00:27qui soient l'occasion de reprendre rendez-vous avec le peuple,
00:29du genre, peuple, que pensez-vous de mon projet ?
00:32Et si c'est oui ou si c'est non, si c'est oui, je reste,
00:34si c'est non, je m'en vais, ça servait à ça, les législatives aussi.
00:37Et donc, il ne faut pas toucher à ça au contraire,
00:39il faut revenir à ce qui a déjà été détruit et sali.
00:42Moi, je pense que c'est un grand texte de philosophie politique,
00:45la constitution de 58, à hauteur du contrat social de Jean-Jacques Rousseau.
00:49Sur la proportionnelle, alors, est-ce que c'est plus démocratique,
00:51selon vous, de faire des élections législatives
00:53à la proportionnelle, qu'elles soient intégrales ou pas, Michel Onfray ?
00:56Alors, la proportionnelle a souvent été instrumentalisée.
00:59Y compris par mon héros, le général de Gaulle,
01:02quand il se retrouve à la tête d'une France dont le Parti communiste pèse 25%.
01:06C'est ça. Il y a été favorable au sorti de la Seconde Guerre mondiale.
01:09Parce qu'effectivement, quand les communistes ont réussi,
01:12après leurs deux années de collaboration du pacte germano-soviétique,
01:15à entrer dans la Résistance et à dire qu'ils avaient été le parti
01:18des 75 000 fusillés de la Résistance, etc.,
01:20belle mythologie, fausse, mais mythologie tout de même,
01:23ils sont crédités d'un quart de l'électorat.
01:28C'est le parti le plus structuré de France.
01:30Et c'est un parti qui prend ses ordres à Moscou
01:32et qui demande au Kremlin ce qu'il faut dire, ce qu'il faut faire, etc.
01:37Donc le général de Gaulle se dit, si j'ai un quart de mon gouvernement
01:40qui est soviétique et qui va mener la politique de la défense de l'économie,
01:44des finances, des cultures, des affaires étrangères, etc., ce n'est pas possible.
01:48Donc il y a un moment donné où il instrumentalise la proportionnelle
01:52pour tenir à distance un parti qui est encore armé.
01:55Je rappelle qu'à cette époque-là, les armes de la Résistance
01:57sont encore dans les caves ou les greniers d'un certain nombre de militants communistes
02:01qui n'attendent qu'un claquement de doigts du patron du PC
02:04en leur disant on y va, la révolution se fait avec les armes et c'est parti.
02:07Donc le général de Gaulle travaille sur cette histoire-là.
02:10Mitterrand fait exactement la même chose quand il veut casser la droite en deux
02:13et la droite qu'on dit républicaine, en faisant de telle sorte
02:17que le Rassemblement national puisse entrer à l'Assemblée nationale
02:20en instaurant une dose de proportionnelle.
02:22Donc on voit bien que ces gens-là n'ont pas souci de la France.
02:26Je vais parler du pays légal et du pays réel.
02:28Et si je m'arrête là, déjà immédiatement c'est parti, Libé, France Inter,
02:31on dirait Michel Onfray, Morasse, c'est bien la preuve qu'eux, etc.
02:34Cette distinction entre le pays légal et le pays réel
02:37se trouve dans Les Misérables de Victor Hugo.
02:39Je tiens à disposition la page pour ceux qui en douteraient encore.
02:42C'est 1000 pages, d'abord j'invite les gens à lire Les Misérables,
02:44c'est un chef-d'œuvre et donc l'idée préexiste à Morasse.
02:48Cette idée qu'il y aurait effectivement une classe politique
02:51qui représenterait la France, la nation,
02:54et puis en même temps, le peuple qui lui ne se sentirait pas représenté.
02:57Quand vous regardez une carte de France, vous vous dites
02:59mais pourquoi est-ce que les départements comme ça, c'est de la dentelle ?
03:03Pourquoi ça ne passe pas au-dessus ou en dessous ?
03:05Pourquoi est-ce que... Comment ça a été taillé ?
03:07Sur mesure.
03:08Ça a été taillé sur mesure et à une époque,
03:09c'était Pasqua qui faisait ça chez Chirac,
03:11où il s'agissait de fabriquer des circonscriptions en disant
03:14on coupe en deux pour faire de telle sorte qu'il y ait une espèce de bipolarité.
03:17Évidemment, la proportionnelle ne permet pas ça.
03:20Et là, c'est beaucoup plus démocratique
03:22parce que le pays réel et le pays illégal coïncident absolument.
03:25Si vous regardez à l'Assemblée nationale,
03:28un temps, je l'avais fait en disant
03:29il n'y a pas beaucoup d'ouvriers, de travailleurs, etc.
03:31Je ne peux plus le dire parce que, grâce soit rendu à Mélenchon sur ce sujet-là,
03:35il y a...
03:35On en parlera tout à l'heure.
03:36... ou d'autres, par exemple, oui, dans moins bons termes.
03:39Mais juste pour dire que des gens modestes,
03:41y compris Deloglu, par exemple,
03:42dont on a moqué un peu la difficulté à lire des textes,
03:45moi, je ne m'associe pas à ça.
03:47Moi non plus.
03:47Je trouve que j'ai du respect pour ce garçon, là où il est arrivé.
03:51Voilà, je ne pense pas ce qu'il pense,
03:53mais je pense qu'on n'a pas à se moquer de quelqu'un qui a des difficultés à lire.
03:56Donc, ça veut juste dire qu'il y a un prolétariat qui n'est représenté que là.
04:00Et si le prolétariat ne lit pas correctement
04:02parce qu'il n'a pas fait Sciences Po ou l'École normale supérieure,
04:04ce n'est pas grave.
04:05Vive ces gens-là.
04:06Et donc, il y a un moment donné où on peut faire coïncider
04:09le pays réel et le pays illégal et la proportionnelle intégrale,
04:12pour le coup, et pas pour faire des coups,
04:15c'est-à-dire pour se protéger du PC
04:17ou du Conseil général de Gaulle,
04:18ou pour se protéger, ou pour casser la droite en deux
04:21en mettant Jean-Marie Le Pen et les siens à l'Assemblée nationale.
04:24Évidemment qu'on voit bien que ce n'est pas l'intérêt de la France
04:26qui est en jeu dans cette affaire,
04:27mais l'intérêt de la petite cuisine politique.

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