• il y a 2 mois
14% des enfants en France sont victimes de violences ou de négligences graves et 2/3 des enfants pris en charge par l’Aide Sociale à l’Enfance sont en retard scolaire. Les aider à mieux s’insérer dans la vie active, c’est la mission que s’est donnée Céline Greco, présidente de l’association Im’pactes. L’objectif, tendre la main aux enfants confiés à l’ASE et pallier aux manques qu’ils subissent dans les domaines de la santé, de la scolarité et de la culture.

Cheffe du service de médecine de la douleur et palliative de l’hôpital Necker-enfants malades, elle le dit elle-même, ce combat, elle se le doit. Une force de caractère permise aussi grâce à l’accomplissement d’un rêve, celui de devenir médecin. Rencontre.

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Transcription
00:00Je ne peux pas m'en être sortie, avoir vu les failles du système
00:03et ne rien faire pour essayer de faire changer la donne.
00:13J'ai été une enfant victime de violences petites,
00:14placée à l'aide sociale à l'enfance et ensuite devenue médecin.
00:17Ça m'a permis de voir un petit peu les failles du système
00:19des deux côtés de la barrière, à la fois en tant qu'enfant,
00:22victime et difficilement, j'ai envie de dire tardivement repérée.
00:24Enfant passé à l'aide sociale à l'enfance,
00:26finalement jeune médecin et très peu formé
00:28au repérage des violences faites aux enfants.
00:30C'est une association qui prend en charge les enfants
00:33de la pouponnière jusqu'à 25 ans.
00:34Quand ils sont prêts en charge en protection de l'enfance
00:36et qu'ils les accompagnent sur le plan de la santé et de la scolarité.
00:38On est en train de monter le premier centre d'appui à l'enfance en France.
00:41Et sur la partie scolarité, l'idée est d'accompagner les enfants
00:43avec du parrainage, du mentora, des sorties culturelles,
00:47des séjours linguistiques et puis un accompagnement,
00:49soutien scolaire, expression artistique.
00:51Et puis pour les plus grands, pour les jeunes majeurs,
00:53de les accompagner en fait à l'autonomie.
00:55Donc on a mis en place des séminaires de préparation à l'autonomie.
00:57C'est des centres de santé qui sont intégralement dédiés aux enfants
01:00qui sont prêts en charge d'aides sociales à l'enfance.
01:02Capables de prendre les enfants en charge sur le plan de leur santé
01:04somatique et psychique.
01:05Pour ça, on va avoir besoin de médecins généralistes,
01:07de pédiatres, de pédopsychiatres, de psychologues,
01:10de psychomotriciens, d'orthophonistes.
01:12Et en fait, l'idée, c'est que ce soit un lieu où les enfants se sentent bien,
01:16où ils puissent bénéficier aussi d'argent,
01:17d'aide sociale, d'éducation, d'éducation sociale.
01:20Et puis, on va avoir besoin de médecins généralistes,
01:22de pédiatres, de pédopsychiatres, de psychologues,
01:24où les enfants se sentent bien,
01:26où ils puissent bénéficier aussi d'arthérapie, de médiation animale.
01:32Les enfants qui sont victimes de violences ou de négligences graves
01:35et qui ne sont pas prêts en charge précocement
01:36vont perdre 20 ans d'espérance de vie.
01:38Or, les enfants qui sont prêts en charge d'aides sociales à l'enfance
01:40ne sont que 10% à avoir un suivi de leur santé.
01:42On n'a que 13% des enfants de l'aide sociale à l'enfance
01:44qui passent le brevet des collèges.
01:461% qui va faire des études supérieures.
01:48Et surtout, on a les chiffres qui augmentent des jeunes sans-abri
01:51de 18 à 25 ans qui sont issus de la ZEU.
01:53C'est 45%.
01:58Vouloir être médecin, c'est ce qui a été mon étoile du berger.
02:00Dès la maternelle, en fait, je voulais être médecin.
02:02Probablement parce que j'avais un caractère un peu empathique.
02:05On peut pour le coup dire que c'était vraiment une vocation.
02:07Faire médecine, c'est vraiment ce qui m'a permis de tenir.
02:09Petite, quand je subissais des violences
02:11et que c'était un peu marche ou crève,
02:12j'ai vraiment choisi de marcher parce que j'avais ce rêve de faire médecine
02:16et je ne voulais pas lâcher.
02:16Et puis ensuite, quand j'ai été placée à l'étudiant à l'enfance,
02:18malgré pas mal de changements de lieu de placement,
02:20des trajets super longs pour aller au lycée,
02:23je n'ai pas lâché.
02:27À la base, moi, je voulais faire de la cancérologie.
02:29En fait, c'est dans un service de cancéro que j'ai rencontré des patients
02:32qui étaient douloureux et assez mal pris en charge de leur douleur.
02:34Je me suis rendu compte qu'en fait, on n'était pas assez bon,
02:37en tout cas en recherche sur la douleur.
02:38Et du coup, j'ai complètement bifurqué vers la douleur
02:40et encore plus vers la douleur de l'enfant.
02:46Je reste quand même persuadée qu'il y a un problème de formation,
02:48même si elle s'améliore, cette formation.
02:50Mais après, je me rends compte avec le temps
02:51que c'est quelque chose qui est très difficile à prendre en charge seule.
02:54Ce n'est pas facile quand tu es médecin traitant ou pédiatre libéral
02:57dans ton cabinet tout seul,
02:59de faire une information préoccupante, de faire un signalement.
03:01Et c'est aussi pour ça que du coup, en 2021,
03:04grâce à la Fondation des hôpitaux et Mme Macron,
03:07on a monté le projet PACT,
03:08qui permettait d'installer dans les hôpitaux pédiatriques
03:11des équipes mobiles hospitalières référentes en protection de l'enfance
03:13qui sont capables et formées pour faire le diagnostic
03:17d'une maltraitance ou d'une négligence grave,
03:19de faire cet IP, de faire le signalement, de rencontrer la famille,
03:23faire un peu le point en staff avec tous les professionnels autour de l'enfance
03:26et ensuite prendre les mesures nécessaires.
03:31Il y a 70% des enfants qui sont victimes de violences graves,
03:34de négligences graves, qui arrivent à l'ASE
03:35et qui ne sont pas prêts en charge au niveau de leur santé.
03:37Il n'y a même pas de bilan.
03:38C'est un mélange entre manque de moyens,
03:40manque de professionnels, délai d'attente très long
03:42et manque de structures qui sont adaptées à ce trauma complexe.
03:45Les enfants qui sont victimes de violences,
03:47ils vont sécréter de l'adrénaline, du cortisol,
03:49les hormones du stress en permanence.
03:51Et ce stress chronique va devenir toxique.
03:53Et donc ils vont développer trois fois plus de maladies cardiovasculaires,
03:56de l'hypertension artérielle,
03:57des risques d'AVC bien supérieurs à la population générale.
04:01Le système immunitaire qui a été mis au repos ne reprend pas,
04:03donc on a un taux très supérieur de maladies auto-immunes, de cancers,
04:07des troubles fonctionnels intestinaux parce que le tube digestif ne fonctionne pas bien.
04:11Le foie qui sécrète du glucose, qui est un système qui est très mal réglé,
04:14Le foie qui sécrète du glucose en permanence
04:16entraîne un risque de diabète supérieur aussi à la population générale.
04:20Il y a aussi l'architecture cérébrale qui est modifiée.
04:22L'amidale qui régit les émotions, elle est trop grosse,
04:25donc il y a une difficulté de réguler ses émotions.
04:27Il y a des troubles des apprentissages,
04:28il y a 32 fois plus de troubles des apprentissages chez les enfants victimes de violences.
04:32Il y a une dysrégulation des fonctions mésolimbiques.
04:34On a des enfants qui vont avoir plus de tendance à l'addiction, à la mise en danger.
04:42Ce n'est pas que ça me motive, en fait, c'est que c'est ma mission.
04:44C'est-à-dire que je n'ai pas le choix.
04:45En fait, je ne peux pas m'en être sortie,
04:46avoir vu les failles du système et ne rien faire pour essayer de faire changer la donne.
04:50Faire de la recherche, faire de la médecine de la douleur, pour moi, c'est une passion.
04:53Impact, c'est une mission.
04:54C'est-à-dire que je ne pourrais pas me coucher le soir si je ne faisais pas ça.
04:58Je me le dois.
05:02La phrase d'impact, c'est que nos enfants sont notre avenir
05:05et que donc, si on veut vivre dans une société plus sereine, plus tolérante, plus bienveillante,
05:10en fait, on doit prendre en charge les enfants,
05:12notamment ceux qui sont victimes de violences,
05:15ceux qui sont victimes de négligences,
05:16pour leur offrir un avenir professionnel.

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