Jean-Pierre Raffarin, ancien Premier ministre, était l'invité de la semaine de Benjamin Duhamel dans C'est pas tous les jours dimanche, sur BFMTV.
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00:00Vous regardez C'est Pas Tous Les Jours Dimanche, et tout de suite, l'invité de la semaine.
00:08Bonsoir Jean-Pierre Raffarin.
00:09Bonsoir et bonsoir à tous.
00:11Merci beaucoup d'être avec nous ce soir dans C'est Pas Tous Les Jours Dimanche.
00:14Vous êtes ancien Premier ministre et je le disais tout à l'heure,
00:16vous avez eu Michel Barnier comme ministre dans votre gouvernement,
00:20c'était il y a 20 ans.
00:21Je voudrais qu'on commence avec ses premiers pas et ses premières déclarations.
00:25Je cite, le président va présider et le gouvernement va gouverner.
00:31Alors qu'on voit justement des images en 2004,
00:34vous êtes tous les deux sur les marches de l'Elysée.
00:37Le président va présider et le gouvernement va gouverner.
00:39C'est une sorte de raffarinade ça Jean-Pierre Raffarin ?
00:41C'est la Constitution.
00:43Il est dit clairement que le gouvernement doit gouverner.
00:46Donc c'est la responsabilité de chacun qui doit être bien définie.
00:49Dans cette période complexe où il faut, et de la continuité,
00:53mais aussi des ruptures et des changements,
00:55il est clair que la responsabilité du Premier ministre doit être facile.
00:59Souvent je raconte que pour moi, j'avais demandé à Jacques Chirac
01:04qu'est-ce que vous attendez du Premier ministre ?
01:06Il m'avait dit, moi je m'occupe du régalien.
01:09Et le régalien c'est surtout la défense et les armées.
01:12Et puis aussi trois sujets qui touchent directement les Français.
01:15Le cancer, le handicap et la sécurité routière.
01:19Et puis pour le reste c'est toi.
01:21Et il avait ajouté jusqu'à deux millions de personnes dans la rue.
01:25Au-delà de deux millions, je m'en occupe.
01:27Jean-Pierre Raffarin, ça c'était pour Jacques Chirac.
01:30Évidemment dans la pratique du pouvoir d'Emmanuel Macron,
01:33c'était légèrement différent.
01:34C'est aussi ce que veut dire Michel Barnier.
01:36Il y a une volonté d'expliquer au Président de la République
01:39que désormais c'est lui qui gouverne et qu'il faut que le Président,
01:42qui a tendance à s'occuper de tout, en fasse moins.
01:45Absolument, s'il va assumer la responsabilité.
01:48La situation est suffisamment difficile pour qu'il ait les coups défranches.
01:51De toute façon, il a une situation parlementaire très complexe.
01:54Donc il faut en effet qu'il ait les coups défranches.
01:57Il faut un respect du régalien, un respect des fonctions présidentielles.
02:02Mais en même temps, il faut gouverner.
02:04Dans son premier déplacement, c'était à l'hôpital Necker,
02:06Michel Barnier a dit qu'il ne ferait pas de miracle.
02:09Il a beaucoup mis en avant l'écoute, l'humilité, le respect.
02:13Il dit, moi je ne ferai pas d'esbrouf.
02:15Est-ce qu'au fond, Michel Barnier à Matignon,
02:17c'est un retour de la politique à l'ancienne ?
02:19Je ne crois pas.
02:20C'est un retour à la politique sérieuse, sobre et solide.
02:24Parce qu'ils n'étaient pas sérieux, sobres et solides avant ?
02:26Pas forcément suffisants, dans toutes ces années-là.
02:29Mais le milieu politique, regardez les débats à l'Assemblée nationale,
02:32ils ne sont pas sobres, pas sérieux et pas solides, très souvent.
02:36Heureusement, la présidente veille à ce que ça soit meilleur.
02:39Mais il est aujourd'hui clair que Michel Barnier, il est là pour agir,
02:44avec son tempérament, avec sa nature.
02:47Et c'est quelqu'un qui respecte les gens, qui respecte les structures.
02:50Donc, il ne va pas faire en sorte qu'avec la communication,
02:54on va bousculer les choses.
02:55Il va essayer de bousculer avec les résultats.
02:57C'est plus compliqué, c'est moins spectaculaire.
03:00Mais dans la situation dans laquelle on est,
03:02il n'y a aucune chance que la communication, ça marche.
03:05Parce que le plus fort en communication, c'est Mélenchon.
03:07Et donc, ce n'est pas sur le match de la communication que Barnier va gagner.
03:10Il va gagner sur l'action.
03:12Je le disais, il a été dans votre gouvernement quand vous étiez Premier ministre.
03:15Et vous avez aussi été collègues ensemble.
03:17C'était entre 1995 et 1997,
03:20après la victoire de Jacques Chirac à l'élection présidentielle.
03:22Regardez ce que vous disiez de Michel Barnier.
03:29Dans un an.
03:30Le logiciel, c'était étudiant ministre.
03:33On savait qu'il serait ministre.
03:35Est-ce qu'on savait qu'il serait Premier ministre un jour ?
03:38C'était possible.
03:39Il avait évidemment les ambitions et surtout les capacités.
03:42Mais quand il était étudiant,
03:43moi c'était à l'école supérieure de commerce de Paris dans les années 70.
03:46On était dans la même promotion.
03:48Vous étiez en école de commerce ensemble.
03:49Voilà.
03:50Et il était déjà conseiller général.
03:52Et donc, il était déjà un notable, quelqu'un de responsable.
03:57Donc, parmi des étudiants un peu agités,
04:00il était une forme de sobriété, de solidité.
04:03Il y a une phrase qui a été soulignée dans son discours de passation.
04:07Il a parlé des gens d'en bas.
04:08Et ça a été critiqué notamment par un certain nombre de membres de la France insoumise.
04:12Quand on entend « gens d'en bas »,
04:13on pense aussi à l'expression que vous aviez utilisée vous-même à Matignon,
04:16« la France d'en bas ».
04:17Est-ce que c'était une erreur d'utiliser cette expression ?
04:20Est-ce que ça disait une forme de…
04:22Certains ont dit de mépris.
04:24La France insoumise,
04:25ils sont aujourd'hui dans cette forme de radicalisation, d'extrémisme.
04:29La France d'en bas, c'est les gens qu'on n'écoute pas.
04:31C'est les gens qui sont allés à un moment ou à un autre dans des ronds-points.
04:36Quand j'avais utilisé cette expression,
04:38j'avais le président de Michelin à l'époque
04:40qui m'avait écrit pour me dire « moi, je fais partie de la France d'en bas ».
04:43Il dit « je fais de la France d'en bas, c'est la France qui n'est pas écoutée ».
04:45Moi, le Medef ne m'écoute pas à l'époque.
04:47C'était le patronat.
04:49Il se plaignait de ne pas être entendu.
04:51C'est ça la France d'en bas.
04:52C'est ceux qui ne sont pas écoutés.
04:54Ce n'est pas quelque chose de méprisant.
04:56Ce n'est pas une catégorie sociale.
04:57Et donc cette expression-là…
04:59Au fond, on voit bien que les LFI,
05:02ils sont en train de radicaliser tout.
05:04Je dirais que c'est peut-être la chance de Barnier.
05:06Car son opposition est marquée aujourd'hui par l'extrémisme.
05:10Ils ont dévoré la social-démocratie.
05:12En fait, avec cet épisode, d'une certaine manière triste,
05:15de Cazeneuve à Matignon,
05:17finalement, l'extrémisme a dévoré le centre-gauche.
05:21Et finalement, l'opposition de gauche à Michel Barnier
05:24va être une opposition radicale.
05:26Et je ne crois pas la radicalité en France aujourd'hui
05:28comme message politique.
05:29Et on va parler dans un instant de ce qui s'est passé
05:31autour de Bernard Cazeneuve, aussi du Rassemblement national.
05:33Encore un mot sur le style Barnier,
05:36qui dépendra bien sûr de l'espace que lui laissera Emmanuel Macron.
05:39Est-ce que vous pensez, vous qui connaissez bien
05:41non seulement Michel Barnier,
05:42mais aussi le président de la République,
05:43qu'il est prêt à lui laisser de l'espace ?
05:45Est-ce qu'au fond, Emmanuel Macron a compris
05:47qu'une partie de son pouvoir avait disparu,
05:50devait disparaître,
05:51que c'était le message que lui avaient envoyé les Français ?
05:53Je crois qu'il l'a compris.
05:55En tout cas, on va bien voir.
05:57Parce que là, pour le moment, jusqu'à maintenant,
05:59on avait en effet souvent un exercice
06:00qui était relativement solitaire du pouvoir.
06:02Donc, on va voir s'il a changé.
06:03Mais dans ce qu'il dit à Michel Barnier,
06:05ce que dit Michel Barnier,
06:06il a de fortes libertés.
06:08Et puis, je pense que le président a compris
06:11que ça devait changer,
06:12que c'était une organisation institutionnelle différente,
06:15que la source allait être parlementaire
06:18dans bien des domaines.
06:19Et donc, c'est un changement.
06:20Coexistence exigeante ?
06:21Je crois que, naturellement...
06:23C'est l'expression qu'il a utilisée.
06:24On ne peut pas dire cohabitation, non ?
06:25Non, je pense qu'il va falloir partager responsabilité.
06:28Ne serait-ce que, par exemple,
06:30dans ce qui a été bien et ce qui a été mal.
06:32Il faut faire un tri.
06:33Il y a un certain nombre de politiques
06:35qu'il ne faut pas changer.
06:36On a des bons résultats de la politique économique,
06:38par exemple, sur la politique des entreprises,
06:40sur les entreprises, les startups,
06:42sur les hauts de bilan,
06:44sur tout ce qui concerne l'innovation.
06:46Il y a des choses qu'il faut garder.
06:47Et puis, il y a des choses qu'il faut changer.
06:49Il faut faire une rupture en matière de décentralisation.
06:51Donc, il faut de la continuité et de la rupture.
06:53Et c'est le discernement
06:54qui est une qualité de Barnier pour ça.
06:56Un mot, vous qui connaissez les coulisses
06:58et la difficulté de composer un gouvernement.
07:00On a attendu plus de 50 jours avant d'avoir un Premier ministre.
07:02Il va falloir attendre autant pour avoir un gouvernement ?
07:04Non, je ne le pense pas.
07:05Je ne le pense pas.
07:06Je pense que, d'abord,
07:07Michel Barnier sait comment ça fonctionne, un gouvernement.
07:09Il a travaillé avec quatre présidents de la République.
07:11Donc, il a quand même de la bouteille.
07:13Je pense qu'il ira assez vite.
07:14Il va composer un gouvernement.
07:15Et peut-être, il a des solutions.
07:17Il n'est pas obligé de sortir 40 ministres d'un seul coup.
07:19Il peut en sortir une première étape
07:21avec une première action engagée.
07:23Il a des recettes tout à fait faisables
07:25qui doivent lui permettre
07:27de résister aux difficultés de sa fonction.
07:29Et vous-même, vous pourriez rentrer au gouvernement ?
07:31Non, c'est fini.
07:32J'ai quitté le Sénat trois ans avant la fin de mon mandat
07:34parce que je ne voulais plus faire de la politique opérationnelle
07:36après 70 ans.
07:37D'accord.
07:38Et vous lui donnez des conseils, à Michel Barnier ?
07:40Il n'a pas besoin de conseils.
07:42Jean-Pierre Raffard, si Michel Barnier a été nommé,
07:44c'est parce que le Rassemblement national ne s'y est pas opposé
07:47considérant qu'il jugerait sur pièce
07:49après son discours de politique générale.
07:50Écoutez ce que disait ce matin Marine Le Pen.
07:53Nous serons amenés dès les prochaines semaines
07:55à indiquer au Premier ministre les lignes rouges
07:58et les mesures que nous jugeons importantes
08:01et dont la prise en compte est indispensable
08:04afin de respecter le vote de nos 11 millions d'électeurs.
08:07Si au fil des semaines,
08:09les Français devaient à nouveau être oubliés ou maltraités,
08:13nous n'hésiterons pas à censurer le gouvernement.
08:17Nous n'hésiterons pas à censurer le gouvernement.
08:19Ça commence le chantage du Rassemblement national.
08:21Mais je pense que de toute façon, dans cette situation,
08:23il y aura toujours une forme de chantage du Front national,
08:26de LFI, des uns et des autres.
08:28Mais c'est souvent ça la politique, les rapports de force.
08:30Donc là, Michel Barnier...
08:32Tous les gouvernements Jean-Pierre Raffarin
08:33n'ont pas vu leur destin entre les mains du parti de Marine Le Pen
08:37et de Jean-Denis Barbalat.
08:38C'est ça la spécificité de la situation.
08:39Mais toujours entre les mains du Parlement quand même.
08:41Quand il y a les majorités, c'est plus facile.
08:42Mais même à l'intérieur des majorités,
08:44il y a quand même eu des batailles.
08:45Souvenez-vous des batailles jusqu'à Chirac.
08:46Ce n'était pas facile non plus.
08:48Et donc il y a quand même dans l'histoire
08:50toujours un travail parlementaire
08:51qui fait qu'un Premier ministre,
08:53son avenir dépend en grande partie
08:55de sa relation avec le Parlement.
08:57Donc le travail de Michel Barnier
08:58est particulièrement compliqué.
09:00Cela dit, il n'a pas été nommé
09:02parce que le Front national ne voulait pas
09:03faire de motion de censure.
09:04Il a été nommé...
09:05Non, non, pas du tout.
09:06Il a été nommé...
09:07Xavier Bertrand, Marine Le Pen avaient dit
09:08qu'elles le sanctionneraient.
09:09Bernard Cazeneuve, pareil.
09:10Et à la fin, l'Élysée même a dit
09:12que le critère de la stabilité institutionnelle prévalait
09:14et que c'était pour cela qu'il était nommé.
09:16La stabilité, c'est sa qualité,
09:18ce sont ses aptitudes, c'est son passé.
09:20C'est qu'il a toujours été au bout des chemins.
09:22Quand il était commissaire européen,
09:23il a fait les réformes qu'il devait faire.
09:25Quand il a été ministre de l'Agriculture,
09:26de l'Environnement, il a eu beaucoup de fonctions
09:28aux affaires étrangères.
09:29Donc il a montré que c'était quelqu'un,
09:31un, qui savait négocier,
09:32deux, qui savait dialoguer.
09:33Et c'est quelqu'un qui a ce respect
09:36qui est nécessaire aujourd'hui.
09:37Attendez, Jean-Pierre Raffarin,
09:38j'entends les qualités que vous listez
09:39de Michel Barnier.
09:40Est-ce qu'il n'y a pas malgré tout
09:41un problème ?
09:42Pardon, on est passé du Front républicain
09:44début juillet pendant les législatives
09:46à un gouvernement qui réussit à tenir
09:50que, et seulement parce que,
09:52le ratio environnemental national dit
09:53qu'on jugera sur pièce
09:54s'il n'y a pas de censure a priori.
09:55Vous le verrez.
09:56Vous présumez que la motion de censure
09:58va arriver tout de suite comme ça.
09:59C'est très difficile une motion de censure.
10:02Ce n'est pas si facile que ça
10:04d'avoir une majorité sur une motion de censure.
10:06Je vous assure.
10:07Parce que la motion de censure,
10:08elle se fait aussi sur des idées.
10:09Et si Michel Barnier porte de fortes idées
10:12pour l'opinion publique,
10:13pour des réformes qui intéressent
10:14l'opinion publique,
10:15ce ne sera pas facile de censurer
10:16un gouvernement positif et constructif.
10:18Et donc, si l'attitude de Michel Barnier
10:20est comprise par le pays,
10:21ce ne sera pas si simple que ça
10:23de faire une motion de censure.
10:24Vous pensez vraiment que le Rassemblement
10:25national fera le cadeau à Michel Barnier
10:26de, par exemple, ne pas le censurer
10:28au moment du vote du budget ?
10:29Ça dépend de ce qu'il proposera
10:30sur un certain nombre de sujets
10:31comme la sécurité ou l'immigration.
10:33De toute façon, c'est le fonds qui va gagner.
10:36Mais ça dépendra bien du vote
10:38de Marine Le Pen.
10:39Un jour de Marine Le Pen,
10:40le lendemain du radio républicain,
10:42le surlendemain de LFI.
10:43Par définition, quand vous avez
10:45des groupes comme ça,
10:46personne, à lui seul,
10:48ne peut renverser.
10:49Donc, la question,
10:50ce n'est pas est-ce que je veux renverser.
10:51La question, c'est est-ce que je trouve
10:53une majorité pour renverser.
10:54Et là, on verra que ce n'est pas
10:55si simple que ça,
10:56trouver une majorité.
10:57Il faudra voter avec le FN,
10:58il faudra voter avec LFI.
10:59Vous pensez qu'il va tenir plus de deux mois ?
11:01Écoutez, je pense qu'il a les capacités
11:03à tenir.
11:04On va voir.
11:06Vous savez, la politique,
11:07c'est quelque chose qui se fait
11:08avec les Français.
11:09Et donc, si les Français
11:11comprennent,
11:12si les Français adhèrent,
11:13vous verrez que ça sera plus difficile
11:15de les déstabiliser.
11:16Ce qui compte,
11:17c'est que les Français comprennent,
11:18et ça, j'espère qu'ils le comprendront,
11:20mais il faut que Michel en apporte la preuve,
11:22il est constructif.
11:23Et qu'aujourd'hui,
11:24si on n'a pas cette logique de construction,
11:26on aura une logique de destruction,
11:28ce qui est l'objectif de Mélenchon.
11:30Jean-Pierre Raffarin,
11:31vous évoquiez tout à l'heure
11:32Bernard Cazeneuve,
11:33ce midi, François Bayrou,
11:34patron du MoDem,
11:35chez nos confrères d'RTL,
11:36assumé de dire qu'il aurait préféré
11:38que Bernard Cazeneuve soit nommé.
11:40L'ancien Premier ministre,
11:41qui d'ailleurs s'est exprimé
11:42sur ses réseaux sociaux,
11:43voilà ce qu'il dit,
11:44il cite Mendes France.
11:57Visiblement,
11:58il y a un peu d'amertume
11:59côté Bernard Cazeneuve.
12:00Est-ce qu'au fond,
12:01la logique, pardon,
12:02et d'ailleurs François Bayrou
12:03le dit lui-même,
12:04n'aurait pas été de nommer
12:05l'ancien Premier ministre socialiste ?
12:06Franchement,
12:07l'ancien Premier ministre socialiste
12:08vote contre Cazeneuve.
12:09À partir du moment
12:10où sa famille politique est contre.
12:12Il ne peut pas aller à Matignon.
12:13Et il était évident
12:14qu'on représente toujours
12:15une famille politique,
12:16on représente toujours
12:17une base politique.
12:18C'est un peu facile
12:19de mettre la responsabilité
12:20sur la gauche.
12:21Emmanuel Macron aurait pu décider,
12:22compte tenu du résultat
12:23des élections,
12:24d'assumer de voter Bernard Cazeneuve.
12:25C'est un peu facile.
12:26Comment vous dites ça ?
12:27C'est un peu…
12:28Faire siffler,
12:29dans une enceinte politique,
12:30faire siffler
12:31ses propres camarades politiques,
12:32qu'est-ce que c'est que cette histoire ?
12:33Ce n'est pas quand même
12:34quelque chose de…
12:37C'est la préférence
12:38à ce qui s'est passé
12:39aux universités de rentrée,
12:40Clémentine Dautin,
12:41qui effectivement a fait siffler
12:42Bernard Cazeneuve.
12:43Qui a combattu Cazeneuve ?
12:44Les socialistes.
12:45Vous pensez vraiment,
12:46Jean-Pierre Raffarin,
12:47que Emmanuel Macron…
12:48Les socialistes se sont fait dévorer
12:49dans cette affaire
12:50et nous le regrettons.
12:51Nous nous sommes fait dévorer
12:52par l'extrême gauche.
12:53Vous pensez vraiment
12:54qu'Emmanuel Macron
12:55avait envie de nommer
12:56Bernard Cazeneuve ?
12:57Mais ça, je pense que
12:58quand on est dans ces situations politiques,
12:59ce n'est pas des questions d'envie.
13:00Si, parce que vous voyez bien
13:01ce qui est dit à gauche.
13:03Il aurait détricoté
13:04la réforme des retraites
13:05parce qu'il aurait
13:06augmenté les impôts.
13:07Ce que ne souhaite pas
13:08Emmanuel Macron.
13:09La politique,
13:10ce n'est pas ce spectacle
13:12j'ai envie, j'ai pas envie,
13:13qu'on me donne l'envie
13:14et d'avoir envie.
13:15Non, c'est pas ça.
13:16La politique,
13:17c'est de faire en sorte
13:18qu'on puisse proposer
13:19un certain nombre de solutions
13:20pour un certain nombre
13:21de problèmes.
13:22Et donc, en l'occurrence là,
13:23on a bien vu que
13:24les solutions socialistes
13:25n'étaient pas supportées
13:26par les élus socialistes.
13:27Et qu'ils ont voté
13:28après avoir sifflé
13:29ces représentants
13:32de cette famille politique.
13:33De ce point de vue,
13:34ils ont mis dans une impasse,
13:35ils ont accepté
13:36que la stratégie
13:38soit dominée
13:39par Mélenchon.
13:40C'est ça,
13:41le fait politique.
13:42Et l'autre fait politique,
13:43Jean-Pierre Raffarin,
13:44c'est que celui
13:45qui arrive à Matignon
13:46est le représentant
13:47d'une famille qui a 47 députés,
13:48qui est arrivé cinquième
13:49aux législatives
13:50et dont la candidate
13:51à l'élection présidentielle
13:52Valérie Pécresse
13:53a fait 4,7%.
13:54Est-ce que là,
13:55il n'y a pas une forme
13:56d'anomalie démocratique
13:57pour ceux qui,
13:58aux élections,
13:59se sont tournés notamment
14:00à la gauche ?
14:01Absolument pas,
14:02parce que tout va dépendre
14:03de la politique
14:04qui va mener
14:05à arrêter de faire du casting
14:06l'essentiel de la chose.
14:07La chose, c'est l'action.
14:08Est-ce qu'il va mener
14:09une politique
14:10qui regarde un peu
14:11vers la gauche aussi ?
14:12Mais vous allez voir
14:13qu'il y aura des gens
14:14de gauche dans son gouvernement.
14:15On prend le pari.
14:16Ah bon ?
14:17On prend le pari.
14:18Le pari est là ?
14:19Mais oui, le pari est là, tiens.
14:20Ok.
14:21D'accord.
14:22Vous revenez
14:23si jamais vous perdez le pari ?
14:24Si je perds, je reviens.
14:25De toute façon,
14:26je reviens.
14:27De toute façon,
14:28vous revenez, très bien.
14:29Il y a un gouvernement
14:30qui rassemble
14:31l'espace politique disponible.
14:32Et vous verrez
14:33qu'il n'y aura pas
14:34de Front National dedans,
14:35à mon avis.
14:36Ça, là-dessus,
14:37pour le coup,
14:38ça a été dit.
14:39Donc, ils ne sont pas
14:40dans la coalition.
14:41Un mot avec vous,
14:42Jean-Pierre Raffarin,
14:43sur la déclaration
14:44de candidature de la semaine.
14:45Elle est signée,
14:46Édouard Philippe.
14:47Je rappelle que vous en êtes
14:48un des soutiens.
14:49Vous appartenez
14:50au mouvement Horizon.
14:51C'était dans les colonnes
14:52du Point, mardi soir.
14:53En pleine crise politique,
14:54est-ce que ce n'est pas
14:55un drôle de timing
14:56d'aller annoncer sa candidature
14:57à l'élection présidentielle
14:58au moment où Emmanuel Macron
14:59est en grande difficulté,
15:00reçoit des responsables politiques
15:01pour essayer
15:02de trouver un gouvernement ?
15:03Décidément, ce soir,
15:04vous êtes extraordinairement sévère
15:05sur mes choix.
15:06Ça s'appelle
15:07le sens de la contradiction,
15:08Jean-Pierre Raffarin.
15:09Oui, oui, je vois bien.
15:10On voit que la chose
15:11est très difficile.
15:12On a une crise
15:13où l'immédiat
15:14est très difficile.
15:15Et Michel Barnier,
15:16il est au four
15:17et au moulin aujourd'hui
15:18dans une situation
15:19extrêmement complexe.
15:20Il faut signaler
15:21son courage
15:22d'assumer les responsabilités
15:23dans ces circonstances.
15:24Mais les problèmes
15:25de la France,
15:26les problèmes de la France
15:27ne vont pas se traiter
15:28en trois mois,
15:29en six mois,
15:30en un an
15:31ou même en deux ou trois ans.
15:32Il faut aujourd'hui
15:33que quelqu'un travaille
15:34à préparer en profondeur
15:36un projet
15:37et des équipes.
15:38On a vu
15:39dans cette situation politique
15:40que les équipes politiques
15:41étaient très fragiles.
15:42On a vu
15:43qu'il n'y avait pas
15:44de parti présidentiel puissant.
15:45On a vu qu'il manquait
15:46dans la décentralisation
15:47des relais nécessaires.
15:48On voit qu'il y a
15:49aujourd'hui des difficultés.
15:50J'entends Jean-Pierre Raffarin,
15:51mais est-ce que ça justifie
15:52de le faire
15:53à ce moment-là ?
15:54Oui, oui, parce qu'il faut
15:56Edgar Morin vous l'a dit,
15:57quand l'immédiat dévore,
15:58l'esprit dérive.
15:59Et donc, on ne construit pas
16:00la politique de la France
16:01sur l'immédiat.
16:02On construit la politique
16:03de la France sur des visions,
16:04sur des horizons,
16:05sur une profondeur de réflexion,
16:06avec du dialogue,
16:07avec de la concertation.
16:08Et donc, c'est très bien
16:09qu'il y en ait un
16:10qui est au four au moulin
16:11qui fait face à l'actualité
16:12et il y a l'autre
16:13qui prépare l'avenir.
16:14Et donc, moi, je trouve
16:15que c'est plutôt
16:16quelque chose qui est positif.
16:17Jean-Pierre Raffarin,
16:18vous connaissez trop la politique
16:19pour ne pas voir
16:20la question lui posée
16:21sur la possibilité
16:22qu'il y ait une présidentielle
16:23anticipée.
16:24Ce qui n'est pas, franchement,
16:25le scénario retenu par l'Elysée
16:26et qu'à ce moment-là,
16:27Édgar Philippe répond
16:28« Je vous confirme
16:29que j'y suis prêt ».
16:30Ce n'est pas très sympa
16:31pour Emmanuel Macron.
16:32Pardon.
16:33Ça, franchement,
16:34vraiment, je relève ça.
16:35C'est de la lucidité.
16:36Nous sommes dans
16:37une crise politique
16:38où il y a des impasses.
16:39On a une constitution
16:40qui est faite
16:41pour une majorité d'opposition
16:42avec deux pôles
16:43et là, on a
16:44une organisation parlementaire
16:45avec trois pôles.
16:46Donc, on risque toujours
16:47l'un contre l'autre.
16:48Il y a peut-être un moment
16:49où ça va être difficile.
16:50C'est intéressant ce que vous dites.
16:51Vous, vous pensez
16:52que le scénario
16:53d'une démission
16:54du président de la République
16:55est quelque chose
16:56d'envisageable.
16:57Je ne le pense pas.
16:58Mais je ne peux pas dire
16:59qu'aujourd'hui,
17:00compte tenu de la situation
17:01internationale,
17:02compte tenu du désordre...
17:03Quand je vois qu'on organise
17:04des manifestations
17:05le jour de la nomination
17:06quasiment du Premier ministre
17:07avant même qu'il ait fait
17:08son discours
17:09de politique générale,
17:10je me dis qu'il y a
17:11une crispation
17:12qui est une crispation
17:13de grande nervosité
17:14dans le pays.
17:15Quand j'ajoute à tout ça
17:16les déséquilibres internationaux
17:17et les menaces réelles,
17:18je me dis que tout
17:19peut être possible.
17:20Et que c'est bien
17:21qu'il y ait des gens
17:22qui travaillent
17:23sur l'avenir de la France,
17:24sur une politique de l'éducation.
17:25Une politique de l'éducation,
17:26ce n'est pas une rentrée,
17:27c'est dix rentrées.
17:28C'est ça qu'il faut
17:29construire aujourd'hui.
17:30Deux questions rapides encore.
17:31La première,
17:32sur les comparaisons historiques
17:33qui ont été faites.
17:34On a pu lire
17:35qu'au fond,
17:36Édouard Philippe,
17:37il faisait comme
17:38Georges Pompidou en 69
17:39avec le général de Gaulle.
17:40Général de Gaulle
17:41qui était censé aller
17:43après avoir perdu
17:44un référendum.
17:45C'est ça la référence
17:46d'Édouard Philippe ?
17:47C'est d'être le Pompidou
17:48d'Emmanuel Macron ?
17:49Rappelons que les deux hommes
17:50ne se parlaient plus
17:51quasiment jusqu'à l'avance
17:52du général de Gaulle.
17:53C'était plus compliqué que ça.
17:54Mais non,
17:55Benjamin,
17:56soyez raisonnable.
17:57Pensez quand même
17:58tout ça avec une grande sagesse
17:59et pas avec les émotions.
18:00Tout se passe très bien
18:01entre Emmanuel Macron
18:02et Édouard Philippe.
18:03C'est les meilleurs amis du monde.
18:04En politique,
18:05ça ne se passe jamais
18:06quand on est des rivaux.
18:07En politique,
18:08il y a toujours des tensions.
18:09La politique,
18:10c'est naturellement
18:11qu'il y a des opportunités,
18:12naturellement qu'il y a
18:13des ambitions,
18:14naturellement qu'il y a tout ça.
18:15Ce qui compte,
18:16c'est de reprofessionnaliser
18:17la vie politique.
18:18On a déprofessionnalisé
18:19la vie politique.
18:20On n'a plus de cumul
18:21de mandats.
18:22Regardez,
18:23on a des difficultés
18:24pour la ressource humaine.
18:25Ce qu'il faut,
18:26c'est que quelqu'un travaille.
18:27Travaille au projet
18:28pour la France.
18:29Cette personne-là,
18:30elle ne peut pas être
18:31au four et au moulin
18:32tous les jours.
18:33Il faut qu'elle puisse réfléchir,
18:34qu'elle aille voir l'étranger,
18:35qu'elle parle avec
18:37qu'elle aille sur le terrain
18:38de la France,
18:39qu'elle écoute les Français.
18:40Je pense vraiment
18:41que c'est très important
18:42qu'il y ait une réflexion
18:43présidentielle.
18:44Et si possible,
18:45naturellement,
18:46c'est pour trois ans.
18:47Pour le reste,
18:48il est évident...
18:49Mais ça peut être plus tôt.
18:50Personne ne...
18:51Moi, je suis pour les instituts.
18:52Je suis républicain.
18:53Qu'est-ce que ça veut dire
18:54être républicain, Benjamin ?
18:55Ça veut dire qu'il faut,
18:56pour être républicain,
18:57respecter l'état de droit.
18:58L'état de droit,
18:59c'est quoi ?
19:00C'est que le président,
19:01il est élu jusqu'en 2027.
19:02Je respecte l'état de droit.
19:03Il n'y a que ceux
19:04qui ne seraient pas républicains
19:05qui pourraient revenir
19:06sur cette question.
19:07Mais ça ne veut pas dire
19:08qu'il ne faut pas se préparer.
19:09Et je pense que Édouard
19:10a eu raison de s'engager
19:12pendant que les Français
19:13étaient concentrés
19:14sur les médias,
19:15de leur dire,
19:16oui, les médias,
19:17c'est important,
19:18mais les horizons aussi.
19:19Toute dernière question,
19:20ça ferait donc un bon
19:21président de la République ?
19:22Pourquoi il serait meilleur
19:23que, par exemple,
19:24Gabriel Attal,
19:25qui, visiblement, lui aussi
19:26a des ambitions présidentielles ?
19:27Mais nous verrons.
19:28Nous verrons.
19:29Ils vont se construire,
19:30les personnes.
19:31Moi, je ne dis pas
19:32que c'est bien de se construire.
19:33Je dis que c'est bien
19:34de se construire.
19:35Moi, je suis un constructif
19:36et quand je vois des constructeurs,
19:37des gens qui travaillent
19:38au projet,
19:39je me dis que c'est mieux
19:40que l'improvisation
19:41ou la déprofessionnalisation.
19:42Merci beaucoup,
19:43Jean-Pierre Raffin,
19:44d'avoir été l'invité
19:45de C'est pas tous les jours dimanche.