Ce documentaire fait partie d'une série en 3 épisodes qui retrace le chantier colossal de restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris suite à l'incendie d'avril 2019.
Contenu du documentaire
Ce troisième et dernier épisode se concentre sur la dimension sacrée et spirituelle de la cathédrale. Il explore comment les artisans et experts travaillent pour restituer l'atmosphère unique et le caractère sacré de Notre-Dame. Le documentaire montre les défis techniques et artistiques pour recréer les éléments qui font de Notre-Dame un lieu de culte et de spiritualité, comme :
La restauration des vitraux et des peintures
La reconstruction de la flèche et de la charpente
La restitution de l'acoustique particulière de la cathédrale
Accès privilégié au chantier
La série offre un accès sans précédent au chantier de restauration, permettant de suivre au plus près le travail des ouvriers, architectes, historiens et scientifiques impliqués dans ce projet exceptionnel.
Contenu du documentaire
Ce troisième et dernier épisode se concentre sur la dimension sacrée et spirituelle de la cathédrale. Il explore comment les artisans et experts travaillent pour restituer l'atmosphère unique et le caractère sacré de Notre-Dame. Le documentaire montre les défis techniques et artistiques pour recréer les éléments qui font de Notre-Dame un lieu de culte et de spiritualité, comme :
La restauration des vitraux et des peintures
La reconstruction de la flèche et de la charpente
La restitution de l'acoustique particulière de la cathédrale
Accès privilégié au chantier
La série offre un accès sans précédent au chantier de restauration, permettant de suivre au plus près le travail des ouvriers, architectes, historiens et scientifiques impliqués dans ce projet exceptionnel.
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ÉducationTranscription
00:30Le 15 avril 2019, le feu a ravagé la cathédrale la plus célèbre du monde.
00:42Sa toiture a disparu dans les flammes.
00:45Son immense flèche s'est effondrée, transperçant les voûtes de pierre.
00:49Le lendemain, Notre-Dame de Paris est devenue une ruine.
01:20Après sa mise en sécurité, la décision a été prise.
01:27Elle sera reconstruite à l'identique.
01:30Mais par où commencer ?
01:33Comment reconstruire aujourd'hui une cathédrale médiévale ?
01:36Où rebâtir ? Comment restaurer ?
01:40Avec quels matériaux et selon quelles techniques ?
01:42Commence alors une aventure humaine étonnante en plein cœur de Paris.
01:52Archéologues, historiens de l'art, géologues, spécialistes de la pierre, du verre, du bois et du métal.
02:02Mais aussi ingénieurs structure, spécialistes de l'acoustique et du numérique.
02:07Ils explorent pour la première fois les entrailles de la cathédrale,
02:12scannent ses voûtes, sondent ses fondations
02:16et accèdent à des espaces restés cachés pendant plus de huit siècles.
02:22Au fil de leurs recherches, ils retrouvent les gestes et les techniques des bâtisseurs de Notre-Dame.
02:29Ils livrent les clés pour permettre sa reconstruction.
02:34Dans un vertigineux mouvement entre la matière et le sacré, le réel et le virtuel,
02:40scientifiques et architectes partagent une seule obsession.
02:45Redonner vie à Notre-Dame.
03:04Cette nuit du 15 avril 2019,
03:07toutes et tous sont accourus pour voir de leurs yeux ce qui semblait proprement inimaginable.
03:13Notre-Dame de Paris en train de brûler.
03:20J'ai ressenti une immense souffrance, évidemment, de voir le bâtiment vraiment en grand danger.
03:26Et en même temps, j'ai ressenti l'inquiétude.
03:29C'est un peu curieux, en plein XXIe siècle, qu'on retrouve cette expérience
03:33en étant aussi démunis par rapport à l'ampleur du désastre,
03:37mais c'est franchement l'expérience qui a eu existé des dizaines de fois dans l'histoire du bâtiment et dans toutes les cathédrales.
03:43Certains désastres, mais une résurrection quelque part.
03:47Quand le jour s'est levé, face à l'ampleur des dégâts,
03:51les bâtisseurs de Notre-Dame de Paris se sont réunis.
03:55Quand le jour s'est levé, face à l'ampleur des dégâts,
03:59la sidération a gagné le monde entier.
04:02Mais qu'a-t-on pleuré exactement ?
04:06Notre-Dame est une image de permanence.
04:09D'abord parce qu'elle est iconique.
04:11Elle est reproduite par des milliards de photographies et de dessins partout dans le monde,
04:15et elle ne peut pas changer.
04:18Et puis, la cathédrale, dans notre imaginaire, c'est la pierre.
04:21La pierre, c'est la permanence.
04:23Ça a frappé au cœur de la notion de patrimoine.
04:26D'abord parce que Notre-Dame appartient à la nation.
04:29Elle est affectée à l'Église, mais elle appartient à tous les Français.
04:32Et même si on ne croit pas, elle renvoie à une image de ce qu'est la sacralité,
04:36de ce qu'est le sacré en général.
04:39Pour comprendre ce qui fait de Notre-Dame un monument hors norme,
04:43porteur de tant d'émotions,
04:45les chercheurs de l'INRAP
04:47et les experts du chantier scientifique,
04:49CNRS, ministère de la Culture,
04:52étudient du haut de ce qui fut sa flèche jusqu'à ses fondations,
04:56ce que le feu a effacé.
04:59Son espace, sa lumière et son acoustique.
05:15Au-delà des matériaux qui la composent,
05:18la cathédrale représente une somme de mémoire
05:20qui nous relie à un passé commun.
05:24Un imaginaire que symbolisait sa flèche disparue.
05:29La flèche, c'est l'élément qui vient couronner une architecture.
05:34C'est un prodige de construction.
05:41C'est évidemment pousser le rêve de la hauteur à son point ultime.
05:46La flèche va chercher la plus grande hauteur
05:48et, par sa forme pyramidale pointue, va toucher le ciel.
05:56Cet axe vertical entre la terre et le ciel
05:59fut une des grandes inventions de l'architecture gothique du XIIe siècle.
06:03Le sommet visible par tous,
06:06d'une métaphore de l'ascension des hommes vers le ciel.
06:10C'est par cette flèche,
06:12dont la restauration devait tout juste commencer,
06:15que le malheur est arrivé.
06:19Aujourd'hui, il n'en reste plus rien,
06:22sinon des débris de bois calcinés.
06:25C'est cette flèche qu'il faut maintenant reconstruire dans son intégralité.
06:30Les gros accidents qu'il y a eu à Notre-Dame après l'incendie,
06:33c'était évidemment la perte irrémédiable d'un chef-d'œuvre de charpente
06:37et des parties de voûte, dont la croisée.
06:41C'est ce qui a fait qu'il n'y ait plus d'incendie.
06:44C'est ce qui a fait qu'il n'y ait plus d'incendie.
06:46Donc, on l'a croisée.
06:49La nef a également été brisée en plein centre,
06:53parce que la partie supérieure de la flèche
06:56est passée par-dessus l'échafaudage qui était en place et qui a très bien tenu.
06:59D'ailleurs, heureusement qu'il a tenu,
07:01parce que si l'ensemble de la flèche avait basculé sur les voûtes de la nef,
07:04toute la nef était quasiment par terre.
07:06L'autre partie, elle est restée droite,
07:09fichée dans l'échafaudage et, vous, ça s'est effaussé ici.
07:15À la croisée du transept,
07:17l'endroit le plus sacré de Notre-Dame,
07:20là où se trouvait l'hôtel.
07:25Pour le général Georges Lain,
07:27la mission de l'établissement public
07:30était d'assurer la sécurité de l'hôtel.
07:32Pour le général Georges Lain,
07:34la mission de l'établissement public,
07:36en charge de la conservation et de la reconstruction de Notre-Dame,
07:39est de rendre au plus vite la cathédrale aux visiteurs et aux fidèles.
07:46Il faut à la fois conduire la recherche scientifique,
07:50conduire l'étude approfondie de cette cathédrale,
07:54mais en même temps, il faut conduire le chantier.
07:57Donc il faut trouver l'équilibre.
07:59Et tout ce que vous voyez là,
08:00cette espèce de cathédrale de fer
08:03qu'on a construite dans la cathédrale,
08:06c'est le résultat d'une planification rigoureuse.
08:09Et nous devons en permanence comparer
08:11là où nous en sommes avec cette planification.
08:15Un défi que doit relever Philippe Villeneuve,
08:18architecte en chef des monuments historiques,
08:20en charge de la reconstruction de la cathédrale.
08:25En tant qu'architecte, j'ai un planning à tenir,
08:27j'ai des conditions structurelles extrêmement strictes ici,
08:31puisque je vais devoir bâtir là,
08:33un échafaudage qui va monter jusqu'à 96 m, au moins,
08:37et qui va peser pas moins de 600, 700 tonnes.
08:41Et donc, il faut que j'ai un sol stable et rigide,
08:44il ne faut pas qu'il y ait de déformations.
08:51Pour déterminer la solidité des fondations,
08:54il faut fouiller le sol de Notre-Dame.
08:55L'occasion pour les archéologues de remonter son histoire.
09:01Difficile à ce stade de creuser sous le dallage ?
09:04La méthode utilisée par les scientifiques
09:07sera non-destructive dans un premier temps.
09:12Les géophysiciens de l'Institut national de recherche d'archéologiques préventives
09:17sondent les entrailles de la cathédrale,
09:20à l'endroit même de sa destruction la plus complète.
09:22Un lieu devenu trop dangereux pour une intervention humaine directe.
09:31Vision incongrue d'un robot télécommandé,
09:34arpentant l'endroit même où, 18 mois plus tôt, officiaient les prêtres.
09:43Suite à l'enlèvement et au tri de tous les vestiges,
09:46on s'est retrouvés face à une cathédrale qui était quasiment vide.
09:48Et on s'est dit que c'était une occasion un peu rêvée
09:51pour pouvoir faire cette prospection,
09:54donc cette radiographie grâce à l'aide d'un radar,
09:57de l'état du sous-sol, la présence dans le sol de la cathédrale
10:01de ce qu'on appelle des anomalies archéologiques,
10:05qui témoignent de la présence de maçonnerie,
10:08qui témoignent de la présence éventuellement de sépultures.
10:11C'est maintenant ou jamais qu'il faut le faire.
10:14Je pense que c'est une occasion qui ne se représentera pas
10:16avant extrêmement longtemps,
10:19donc on a entre guillemets la chance de pouvoir être là aujourd'hui.
10:24Centimètres par centimètres,
10:27le géoradar scanne l'intégralité du sol de la cathédrale.
10:31Un travail qui va durer 48 heures
10:34avant que les données puissent être analysées en laboratoire
10:37et restituées aux architectes.
10:40Il y a des pistes de réflexion qui se sont lancées
10:43et qui permettent aujourd'hui aux architectes notamment
10:46de réfléchir sur le problème des restaurations.
10:49Et c'est parce qu'il y a cette collaboration hors normes sur le chantier
10:52qu'on arrive à des choses comme ça.
10:56Une fois que la stabilité du sol aura été confirmée,
10:59l'échafaudage à la croisée du transept
11:02surplombera les voûtes de la cathédrale de près de 70 mètres de hauteur.
11:07La construction de la flèche pourra alors commencer.
11:10Mais sur quel modèle ?
11:16Le fait que Notre-Dame de Paris soit une icône
11:19et un symbole extrêmement fort fait que
11:22on peut se poser naturellement la question de savoir
11:25qu'est-ce qu'on fait après une telle destruction ?
11:28Est-ce que vraiment Notre-Dame de Paris, iconique,
11:31peut subir un geste contemporain ?
11:34D'autres architectes s'étaient déjà posé cette question au XIXe siècle.
11:38Lorsque Eugène Viollet-le-Duc et Jean-Baptiste Lassus
11:42commencent la restauration de Notre-Dame en 1844,
11:46la flèche d'origine a déjà disparu.
11:51Fragilisée par le temps,
11:54elle avait été déposée 50 ans plus tôt.
11:57Après la mort prématurée de Lassus au cours du chantier,
12:01Viollet-le-Duc décide de reconstruire une flèche bien plus imposante
12:05et surtout de 20 mètres plus haute que la précédente.
12:09Elle est l'élément architectural
12:12sur lequel vont se cristalliser toutes les émotions lors de l'incendie.
12:16Cette nuit-là, des centaines de joueurs d'Assassin's Creed
12:20ont ressorti de leur placard leurs jeux vidéo
12:24qui prenaient place dans le Paris de la Révolution française.
12:47Ils ont grimpé au sommet de Notre-Dame,
12:50partageant leurs exploits sur les réseaux sociaux.
12:53L'hommage d'une génération connectée
12:56à la flèche qui venait de disparaître dans les flammes.
13:00Mais en réalité, à la Révolution,
13:03la flèche médiévale avait déjà disparu.
13:06Un des piliers d'Assassin's Creed, c'est la reconstitution historique,
13:10que ce soit en culture matérielle, architecturale,
13:13comme en dynamique sociale.
13:17C'est vraiment fondamental dans le jeu.
13:20Il faut que l'expérience soit la plus immersive possible.
13:23On aurait sûrement pu faire une Notre-Dame sans la flèche.
13:26C'est une question qu'on s'est posée.
13:28A nous-mêmes, il nous semblait qu'il manquait quelque chose.
13:30En plus, on a fait des tests auprès des joueuses et joueurs
13:33qui se plaignaient du fait qu'il y avait un morceau de la cathédrale qui manquait.
13:38Nous avons fait le choix de représenter celle de Viollet le Duc,
13:41celle que tout le monde connaît, celle qui est la plus iconique,
13:43même si, effectivement, il s'agit d'un anachronisme.
13:50Les archives de la restauration du XIXe siècle
13:53sont conservées à la médiathèque du patrimoine.
13:56Elles permettent de comprendre comment l'architecte
13:59a transformé Notre-Dame en archétype de la cathédrale gothique.
14:04Une église, c'est une histoire de sédimentation.
14:08Au Moyen-Âge, comme aujourd'hui, une église est légitime
14:10à condition qu'elle garde l'empreinte
14:13de toutes les époques qu'elle traverse.
14:18Viollet le Duc propose quelque chose de totalement différent,
14:22en partie, mais qui fait mémoire de la flèche antérieure.
14:26Déjà, c'est une flèche.
14:29Le sujet est bien médiéval.
14:32La technique charpente recouverte de plomb est bien médiévale.
14:35Mais la hauteur est totalement nouvelle.
14:37Surtout, la proposition, c'est de mettre
14:41cette disposition de personnages en gradin.
14:45Et en cela, il est dans une restauration créative.
14:49Il n'est pas dans une restitution.
14:52Il n'est pas dans la rupture non plus.
14:56Et il va plus loin.
14:59Pour lui, utiliser un matériau contemporain au XIXe siècle
15:02dans la restauration d'un monument du Moyen-Âge,
15:04ça ne pose pas de problème.
15:07Parce que dans son esprit, d'héritier des hommes du Moyen-Âge,
15:10si les hommes du Moyen-Âge avaient connu ces techniques,
15:13bien sûr, ils les auraient employées.
15:16Donc, il n'est pas dans une relation de réplication,
15:19de reproduction à l'identique pur et dur.
15:22Il observe, il améliore et il prolonge.
15:28Mais la Notre-Dame médiévale n'avait pas été conçue
15:31pour supporter une telle masse.
15:35Un énorme défi structurel pour l'architecte
15:38qui va déconstruire et reconstruire les murs,
15:41les voûtes et la charpente à la croisée du transept.
15:48Finalement, Viollet le Duc réécrit le passé
15:52et brouille les pistes pour ses successeurs.
15:56On ne savait pas comment la structure
15:59de cette formidable flèche reposait.
16:01On s'est rendu compte que Viollet le Duc
16:04avait bâti un véritable pilier
16:07au-dessus des piliers de la croisée
16:10qui sont enchâssés dans la maçonnerie.
16:13Et on a retrouvé les quatre assises
16:16qui vont dans le prolongement des piliers de la croisée,
16:19qui sont gothiques, et c'est là-dessus
16:22que, sur une table de plomb,
16:25il est venu poser sa première pièce de bois
16:28qui constitue le tabouret.
16:31Et donc il était important de le dégager
16:34pour pouvoir, nous aussi, bénéficier d'une assise absolument saine
16:37et on s'aperçoit qu'elles sont parfaitement saines.
16:40Donc on va pouvoir rebâtir la flèche exactement au même endroit
16:43que Viollet le Duc, au centimètre près.
16:46Cette flèche était une innovation hors norme
16:49qui a ouvert, dès le XIXe siècle,
16:52un débat sur les principes de restauration d'un monument.
16:55Les 16 statues de cuivre
16:58dessinées par Viollet le Duc
17:01symbolisaient cette pensée nouvelle.
17:04Déposées tout juste quatre jours avant l'incendie,
17:07leur restauration a duré deux ans
17:10pour leur redonner leur aspect et leur couleur d'origine.
17:14Dans l'attente de leur retour sur Notre-Dame,
17:17elles sont conservées à la Cité de l'Architecture et du Patrimoine.
17:21Au milieu d'un ensemble étonnant
17:24de moulages grandeur nature,
17:27des monuments médiévaux français les plus remarquables.
17:30Un musée créé au XIXe siècle,
17:33en hommage au savoir-faire des bâtisseurs de cathédrales.
17:36Il fut imaginé par Viollet le Duc lui-même,
17:39qui s'était représenté parmi les statues de saints
17:42ornant sa flèche.
17:45Il a ce qu'il appelle sa petite armée.
17:48Cette armée, en fait, ce sont des artisans,
17:51ce sont des entrepreneurs,
17:54envers lesquels, finalement, il a une confiance
17:56qui est extrêmement forte
17:59et qui participe pleinement de son projet.
18:02Le maître charpentier Bellu,
18:05ainsi que les plombiers Durand et Monduit,
18:08qui réaliseront par la suite l'enveloppe
18:11de la statue de la liberté.
18:14Des hommes qui ont accompagné Viollet le Duc toute sa vie
18:17et qui ont retrouvé et perfectionné
18:20les techniques des bâtisseurs médiévaux.
18:23Ce qui évolue, en fait, dans cette sphère,
18:26c'est l'esprit gothique pour ce qui concerne nos cathédrales.
18:29Lorsqu'ils interviennent,
18:32ils ont, finalement, pénétré de l'esprit
18:35de leurs prédécesseurs
18:38et procèdent à une recomposition
18:41d'un passé qui leur est à la fois totalement étranger,
18:44mais qu'ils ont parfaitement compris.
18:47Avec les peintres verriers Auguste Steinheil
18:50et Maréchal de Metz,
18:53Viollet le Duc va sublimer un art
18:56qui n'a jamais été fait dans le siècle.
18:59L'art du vitrail.
19:02Cette maîtrise technique,
19:05épanouie avec l'avènement de l'architecture gothique,
19:08était d'une efficacité spirituelle majeure,
19:11en offrant aux fidèles la sensation d'entrer
19:14dans la Jérusalem céleste baignée d'une lumière colorée.
19:17Il n'y a pas beaucoup d'architecture
19:20qui soit capable de générer une telle énergie
19:23sur un ensemble humain.
19:26C'est l'idée de vivre dans la lumière.
19:29Tout est organisé
19:32pour que les sens soient mis en action.
19:37Le verre est un matériau génial
19:40parce qu'on verra dans cette matière
19:43qui n'offre pas d'obstacle à la lumière
19:46un signe de l'incarnation.
19:52L'art est d'utiliser les matériaux
19:54pour produire de l'immatérialité
19:57et pour produire ce vide
20:00qui va être le lieu du rassemblement,
20:03le lieu de l'accueil et le lieu de la lumière.
20:06C'est ça le génie de cette architecture.
20:09C'est de créer du vide, mais un vide habité,
20:12un vide animé.
20:25À quelques centaines de mètres
20:28de Notre-Dame de Paris,
20:31les remarquables vitraux polychromes
20:34de la Sainte-Chapelle représentent
20:37un véritable choc esthétique pour le Moyen-Âge.
20:40Ici, tout est lumière.
20:46Érigée en 1248 par Saint Louis
20:49à son retour des croisades
20:51pour accueillir les reliques de la Passion du Christ,
20:54la Sainte-Chapelle poussera l'évêque de Notre-Dame de Paris,
20:57Guillaume d'Auvergne, à imaginer encore plus grand.
21:03Les roses de Notre-Dame marquent
21:06l'aboutissement même de l'art du vitrail.
21:09Par leur forme rayonnante,
21:12ces chefs-d'œuvre du XIIIe siècle
21:15invitaient l'âme contemplative à se laisser emporter
21:18vers le monde spirituel.
21:21C'était une agréable surprise de voir
21:24que tout était là au niveau des vitraux.
21:27Il y a juste au niveau de la toiture,
21:30où il y avait des ouvertures mais en vitrerie losangée,
21:33blanche, sans patine, qui ont explosé et disparu.
21:36Mais en ce qui concerne les vitraux historiés,
21:39tout est là et dans un bon état de conservation
21:42par rapport à ce qu'on aurait pu avoir.
21:45Claudine Loisel, responsable du groupe vitrail,
21:48a pour mission d'analyser l'ensemble
21:51des vitraux de la cathédrale,
21:54afin de définir un protocole de nettoyage et de restauration.
21:58Quand on travaille sur des vitraux de ces époques,
22:01on ne peut pas rester insensible, mais je dirais que
22:04tout le monde a cette vibration avec une œuvre.
22:07C'est la première émotion, on va dire.
22:10On se dit, waouh, c'est super et merci aux générations d'avant
22:13de nous avoir permis de les conserver, de les préserver
22:16pour qu'on puisse s'en nourrir.
22:18Après, on se dit, allez, au travail.
22:21Et là, c'est à notre tour de les transmettre aux générations futures,
22:24mais en préservant vraiment la matière d'origine.
22:28On va faire la phase de décontamination.
22:31Parce que là, on n'est pas...
22:34On est hyper accessible, il n'y a pas de problème.
22:37Et puis là, avec un pinceau et un embout d'aspiration,
22:40ça se fait bien.
22:44Bien avant le 15 avril 2019,
22:46des années de pollution urbaine avaient assombri
22:49l'ensemble des vitraux de Notre-Dame.
22:52Lors de l'incendie,
22:55cette couche de particules fines s'est transformée
22:58en une croûte de gypse qu'il faut maintenant retirer.
23:05Donc voilà ce qu'on obtient.
23:08Cette surface-là.
23:11On retrouve un petit peu ces phases cristallisées
23:13sur l'ensemble du dépôt.
23:16Et il y a ces petites billes ici, composées uniquement de plomb.
23:19On a la présence de nodules de plomb
23:22qui proviennent de l'incendie,
23:25suite à la fusion des tables de plomb
23:28qui étaient présentes sur la toiture.
23:31Alors évidemment, ces dépôts de sulfate de calcium
23:34viennent opacifiés, et lors de la restauration,
23:37il s'agira d'éliminer le plus délicatement possible
23:40ces dépôts en préservant les verres et les peintures.
23:44Plus de 1 000 m2 de vitraux ont été déposés
23:47afin de les protéger pour la durée du chantier.
23:50Ils seront analysés, nettoyés et restaurés.
23:55Un travail titanesque,
23:58coordonné par Claudine Loisel,
24:01qui sera effectué dans des ateliers de vitraux
24:04à travers toute la France.
24:07D'avoir accès à l'ensemble de tous les vitraux
24:10vu le contexte du chantier qui est global,
24:13ce qui n'arrive jamais,
24:16ça nous a permis d'avoir accès
24:19aux différents ensembles de vitraux,
24:22puisque Notre-Dame, il faut bien avoir gardé ça en tête,
24:25on a des vitraux du XIIe, du XIIIe et de différentes époques.
24:28Elle raconte l'histoire du vitrail en France
24:31depuis le XIIe siècle, et c'est une force de Notre-Dame.
24:36Ce véritable casse-tête de verre
24:39a toujours été une énigme pour les experts.
24:42Grâce aux échafaudages,
24:45Claudine Loisel et les historiens du centre André Chastel
24:48vont pouvoir étudier au plus près les trois roses,
24:51restées en place car trop fragiles pour être déposées.
24:56C'est tout simplement de savoir sur quoi on va travailler.
24:59Parce que si on ne fait pas l'effort de se demander
25:02mais qu'est-ce qui est restauré, qu'est-ce qui a été refait,
25:05on va prendre pour argent comptant n'importe quel élément,
25:08sans se poser la question,
25:11mais est-ce que j'étudie un panneau qui est réellement ancien
25:14ou est-ce que c'est une création du XIXe siècle ?
25:17Parce que le discours ne sera pas du tout le même ensuite.
25:20La rose que les historiens vont étudier en priorité
25:23est la plus ancienne et la plus méconnue.
25:26Celle de la façade occidentale de la cathédrale,
25:29visible de l'extérieur, mais cachée à l'intérieur
25:31derrière le grand orgue.
25:41Qu'est-ce qu'on peut noter ? On regarde d'abord les têtes ?
25:44Pour moi, les têtes sont authentiques.
25:47Déjà, les nuances pour les tons chers
25:50sont comparables à ce qu'on a vu ailleurs.
25:53Et on a des verres qui sont très épais.
25:56Ici, il éclate sur la main, tu vois bien l'épaisseur du verre.
25:58Ce qui est aussi remarquable, c'est ce qu'on appelle les rouges fouettés.
26:01Alors les rouges sont authentiques.
26:04Très inégaux, mais en même temps, ça donne une vibration extraordinaire
26:07à ces verres rouges.
26:10Les verres verts, on voit bien la différence.
26:13Ici, tu as un verre qui a été refait, et là, on voit bien la différence.
26:16C'est un verre qui est épais, qui n'est pas égal, il n'est pas plat.
26:19On voit des petites bulles un peu partout,
26:22alors que celui-là est très plat, d'une couleur qui n'a pas la même densité
26:25que les verres du XIIIe siècle.
26:28Ils sont marqués, mélangés à des panneaux du XVIe siècle
26:31et des restaurations du XVIIe et du XIXe siècles.
26:34Un véritable puzzle de couleurs
26:37que seul l'oeil averti de l'historien peut reconstituer.
26:41Donc là, on est sur un des panneaux qui a été refait au XVIe siècle,
26:44là? C'est pas un bouche-trou, c'est vraiment...
26:47Non, c'est à la question de la passion.
26:50Je pense qu'on est vraiment... Au tournant du siècle.
26:53On avait une formule qui nous situe vers, autour de XV100, à peu près,
26:55à peu près, avec un travail de peinture très putoisé,
27:00la grisaille a été travaillée au pinceau verticalement pour donner cet effet granité.
27:06Et puis ce magnifique effet d'enlever pour indiquer la toison de l'animal.
27:12C'est intéressant d'un point de vue vraiment archéologique ici,
27:15parce que l'intervention de la fin du Moyen-Âge est identifiable.
27:20Et puis, les restaurations du XIXe siècle, ici, dans l'arrière-train de l'animal.
27:27Une restauration d'ailleurs dans la peinture n'a pas bien tenu.
27:33Quand Viollet-le-Duc intervient, il trouve un vitrail qui porte toutes les traces
27:39d'interventions multiples au cours des siècles.
27:43Son objectif n'est pas de conserver ces différentes traces d'interventions anciennes,
27:47comme l'observerait un archéologue aujourd'hui.
27:51Son objectif est de restituer l'édifice pour arriver à retrouver ce que eux considèrent
27:58comme une authenticité, c'est-à-dire une vision idéale,
28:02et en principe proche de l'état initial.
28:08Quand Viollet-le-Duc commence la restauration de Notre-Dame en 1845,
28:12les vitraux d'origine, à l'exception des trois roses, ont disparu.
28:16Ils ont été retirés par le clergé au XVIIIe siècle.
28:19Car durant ces années, qui voient l'avènement du néoclassicisme,
28:23on préfère le vert transparent.
28:26En voulant redonner à la cathédrale la couleur de sa lumière gothique,
28:30l'architecte va former les meilleurs peintres de son temps.
28:37Les panneaux de maréchal de Metz, l'un des grands maîtres de la couleur,
28:41sont déposés pour la première fois depuis 150 ans.
28:46Ils sont en cours d'études au laboratoire de recherche des monuments historiques.
28:58Pour ces vitraux du XIXe siècle, qui ont été réalisés par maréchal de Metz,
29:02ils parfois peuvent être un petit peu mis à l'écart.
29:06On peut avoir une petite préférence pour les vitraux du XIIe, XIIIe, les siècles antérieurs.
29:10Et quand on les regarde du bas, on s'interroge, on se demande
29:14est-ce qu'il a utilisé comme vert ? A quoi est dû cet effet de mosaïque ?
29:18Est-ce que c'est une pâte cristalline ?
29:22Et puis ce qui est assez bluffant, c'est que quand on les a sous les yeux,
29:26là on voit vraiment que c'est un jeu de techniques de peinture.
29:30Pour les restaurateurs du XIXe siècle,
29:33retrouver la lumière gothique n'était pas juste une question de vitrail.
29:37La peinture sur les murs faisait partie de cette expérience totale de la couleur.
29:42Mais bien avant avril 2019,
29:46la couleur et la lumière avaient disparu à Notre-Dame.
29:50Les siècles et la pollution avaient assombri la cathédrale.
29:54Avec l'incendie, s'est rajoutée une couche de particules de plomb.
29:58L'une des priorités du chantier de restauration
30:02est de retrouver la lumière en aspirant toutes ces poussières
30:06qui ont noirci l'ensemble de la cathédrale.
30:10A la sortie, les murs et les voûtes retrouvent leur blancheur perdue.
30:18Dans une des chapelles rayonnantes du cœur, la chapelle Saint-Ferdinand,
30:22une restauration des vitraux et des peintures murales du XIXe siècle vient de s'achever.
30:26Au XIIe siècle, lorsqu'un homme ou une femme
30:30ne serait-ce que s'approche d'une cathédrale,
30:34il fait l'expérience de la lumière.
30:38Quand un fidèle ou simplement un visiteur pénètre dans ce monument,
30:42il est dans un lieu qui est tout à fait perturbant
30:46parce que tout est furieusement polychrome, du sol au plafond.
30:50Sachant qu'au Moyen-Âge, la couleur s'est considérée comme de la lumière,
30:54on a bien cette impression, cette sensation
30:58que doit procurer l'Église, celle de mettre le fidèle
31:02dans un espace intermédiaire entre la terre et le ciel.
31:08Et Viollet-le-Duc et Lassus ont bien compris ça.
31:14Les représentations figurées telles qu'elles nous sont parvenues en peinture
31:18sont très proches des teintes et des couleurs choisies pour les vitraux.
31:24Ils utilisent des couleurs intermédiaires à ces pastels,
31:28comme le verdot, comme le rose ou le bleu clair,
31:32qui créent donc un étoilement polychrome sur les murs
31:36totalement en harmonie avec les vitraux,
31:40ce qui n'était pas le cas au Moyen-Âge.
31:44Restitution d'une ambiance médiévale,
31:48mais restitution d'une lumière qui n'est pas médiévale.
31:56Tous les vitraux qu'on étudie au LRMH,
32:00il faut se dire clairement que c'est la dernière fois
32:04que je les verrai d'aussi près.
32:08Après, ils sont remis en place et la prochaine restauration
32:12aura peut-être lieu dans 100, 150, 200 ans.
32:16C'est aussi un privilège d'en prendre soin au moment où on les a
32:20et de faire au maximum tout ce qu'on peut faire pour les étudier,
32:24les caractériser, les préserver et tout mettre en place
32:28pour le meilleur.
32:50Lors de l'incendie, Notre-Dame n'a pas juste perdu sa flèche
32:54Les prières et les chants ont laissé place au vacarme du chantier.
33:02Avec la destruction partielle de ces voûtes, Notre-Dame a aussi perdu son acoustique.
33:28Une diffusion du son basée sur un équilibre entre le volume de l'espace et la nature de la pierre qui compose son enveloppe.
33:37Une cathédrale, et Notre-Dame en particulier, c'est aussi de l'immatérialité.
33:42L'immatérialité du son.
33:44Une cathédrale a été conçue pour que sept fois par jour, Echanouane chante les offices, pour que deux fois par jour soit célébrée la messe au cœur de la cathédrale, et pour que chaque prêtre du clergé célèbre une messe sur l'un des hôtels de la cathédrale.
33:58C'est-à-dire que du matin au soir, au moins jusqu'à la Révolution française, Notre-Dame de Paris, elle est plongée dans le chant liturgique.
34:11Cette cathédrale sonore, elle marque une rupture avec ce qu'il y a dans le monde profane.
34:20Quand vous rentrez dans la cathédrale, dans le portail, ça n'est plus du tout le même univers sonore.
34:28Une expérience du son propre à chaque cathédrale, qui depuis l'incendie a disparu à Notre-Dame.
34:38En attendant sa réouverture au public, le travail de Mylène Pardoen, archéologue du son et responsable du groupe acoustique, est d'en restituer l'expérience et la mémoire.
34:48Pour recréer cette expérience sensorielle immersive, elle utilise un espace architectural similaire, la cathédrale de Sens, qui inspira les bâtisseurs de Notre-Dame de Paris.
35:18Le son dans le passé, c'est quelque chose qui est perdu.
35:23Ce que l'on peut retrouver, ce sont des objets sonores du passé qui sont encore présents aujourd'hui.
35:31Nous allons les capter, un peu comme certains font la chasse aux papillons, nous on fait la chasse aux sons.
35:38Moi je suis archéologue du paysage au nord, je ne suis pas son designer, et donc ici, ce que je viens chercher, ce sont les conditions pour retrouver ces sons.
35:49Notamment le son qui matérialise l'identité d'une cathédrale, la sonnerie de ses cloches.
36:02Les cloches de Sens, elles ont les mêmes caractéristiques que celles de Notre-Dame, et c'est pour ça qu'on a choisi Sens.
36:09Le même fondeur, les mêmes dates, et les mêmes notes, ce sont ces cloches là qu'il faut aller enregistrer.
36:33Qu'est-ce que les cloches racontent dans le temps ?
36:36Aujourd'hui on se promène avec une montre, et on sait quelle heure il est.
36:41Quand on remonte dans le passé, on n'avait pas de montre ou d'horloge, et il fallait un repère, et ce sont les cloches qui donnaient ce repère.
36:48Qui plus est, comme toutes les cloches, elles ont leur personnalité, c'est aussi un repère du temps.
36:55Le lien entre l'arrestation de Notre-Dame et le travail très scientifique que je fais autour du paysage au nord, c'est recontextualiser l'histoire de Notre-Dame.
37:06En particulier un moment fondateur de son histoire, le chantier de construction.
37:11A la fin du XIXème siècle, le chantier de construction a été transformé en lieu d'un lieu d'exploitation.
37:18C'est à plusieurs centaines de kilomètres de Paris, sur le chantier d'archéologie expérimentale de Montcornel, dans le Bugey, qu'elle enregistre le son des artisans et des outils de l'époque.
37:32Enregistrer un son, ce n'est pas seulement mettre un micro pour enregistrer, c'est comprendre l'action, et c'est enregistrer le son.
37:41Enregistrer un son, ce n'est pas seulement mettre un micro pour enregistrer, c'est comprendre l'action avant et après.
37:52Pour nous, c'est un gros travail de compréhension de la totalité du geste de l'artisan.
37:57Milène Pardohen veut recréer l'ambiance sonore qui régnait lors de la construction de Notre-Dame en 1170,
38:04quand tailleurs de pierre, maîtres verriers, forgerons et bûcherons travaillaient à l'oreille, avec la connaissance du son de leurs matériaux respectifs.
38:17Le son, quand on va le capter, ça va nous donner des idées de son.
38:23Le son, quand on va le capter, ça va nous donner des idées de son.
38:29Tout à l'heure, on a capté l'attaque d'un nœud dans le bois.
38:37On a à la fois le fil qui avance, qui est relativement sonnant, et puis d'un seul coup, on l'entend qu'on va arriver vers le nœud, le bruit devient très mat.
38:47Donc ça, c'est un élément très intéressant, puisque ça fait partie de la vie de l'artisan, et nous, ça participe de la vie d'un possible chantier.
39:04L'aboutissement d'une longue collecte de sons dans toute la France a lieu en studio,
39:09où l'archéologue restitue le paysage sonore du chantier de Notre-Dame en 1170.
39:15Quand seul le chevet de la cathédrale avait été érigé.
39:28On est juste au moment où on va avoir une intégration du passé, du présent, et puis une partie, quelque part, future.
39:37C'est-à-dire que tout ce qu'on enregistre aujourd'hui va rentrer dans la mémoire de Notre-Dame pour les générations futures.
39:46Écoutez le passé.
39:49Le travail minutieux de Mylène Pardoën est un document historique important pour l'ensemble des chercheurs du chantier scientifique.
39:56Mais c'est aussi et surtout un document pédagogique destiné à un large public, pour une expérience sensible et immersive de Notre-Dame.
40:16Quel est le lieu dans une société, dans une cité, qui permet à un groupe humain d'avoir conscience de son vivre-ensemble ?
40:28Les bâtiments qui offrent un espace intérieur dans lequel l'ensemble de l'humanité peut se retrouver à grande échelle
40:35sont des lieux extrêmement précieux pour la conscience même que l'humanité est une humanité.
40:41Au point que, justement, l'expression Notre-Dame, c'est la Dame de nous qui nous fait nous, qui crée le nous.
40:51À la croisée du transept, le passé continue de se révéler jusque dans les entrailles de la cathédrale.
40:58Les analyses du géoradar ont donné des résultats partiels.
41:03Mais il n'est pas la seule chose qui s'est déroulée.
41:07Dans le cadre de l'expérience de Notre-Dame, l'ensemble des chercheurs du chantier scientifique
41:13Les géologues doivent documenter les vestiges encore en place
41:17avant que l'installation de l'échafaudage pour la reconstruction de la flèche ne risque de les détruire.
41:26Il y a des travaux qui ont été réalisés au 19e siècle,
41:29et qui ont permis d'établir un certain nombre d'échantillons
41:32et d'établir un certain nombre d'échafaudages pour la reconstruction de la flèche.
41:38Il y a des travaux qui ont été réalisés au 19e siècle sous Viollet-le-Duc.
41:41On savait qu'il y avait ces fameux carneaux qui avaient un petit peu mité la zone.
41:45On ne savait pas justement jusqu'à quel point les travaux du 19e siècle
41:48avaient pu endommager la conservation des vestiges préexistants.
41:55On est dans le cadre de l'archéologie préventive.
41:57Donc l'idée c'est vraiment de s'intégrer dans le planning du chantier,
42:00de prendre en compte les contraintes techniques,
42:03tout en essayant de répondre aussi à ces questionnements scientifiques
42:06qui sont extrêmement nombreux dans ce secteur-là.
42:18Une caméra endoscopique fait apparaître une cavité plus profonde que les autres.
42:23La découverte que les archéologues attendaient.
42:26Ils ont trouvé une tombe, mais elle est vide.
42:29Ce qu'on voit aujourd'hui à Notre-Dame,
42:31c'est en fait le résultat d'une stratification séculaire.
42:35C'est vraiment un millefeuille archéologique, un millefeuille historique,
42:39puisque même cette cathédrale du 12e siècle,
42:41elle remplace une cathédrale qui a été fondée probablement au 4e siècle.
42:45Des couches archéologiques jusqu'à la pointe de la flèche,
42:48vous aurez, après la reconstruction de la flèche, 17 siècles d'art et d'histoire.
42:52Il y a peu de monuments qui peuvent se permettre d'avoir un art historique
42:56sans jamais avoir changé de fonction.
42:58C'est-à-dire qu'elle a toujours été la cathédrale du diocèse de Paris.
43:03Les fouilles archéologiques, conduites par l'INRAP
43:06sur la direction scientifique de Christophe Besnier,
43:09viennent de donner lieu à une importante découverte.
43:13Sous l'épaisseur du radier de pierre,
43:15un sarcophage anthropomorphe en plomb est apparu, bien conservé.
43:20Seules des églises et des cathédrales sont truffées d'inhumations.
43:23Et ici, à la croisée transèbre, c'est un lieu tellement privilégié pour être enterré.
43:27Et les dernières inhumations dans Notre-Dame ont lieu au 18e siècle.
43:30Donc là, on est sur un radier de sol, finalement, qui est plus ancien que ce qu'on pensait.
43:34Et ce radier repose sur une couche de remblai sableux
43:38avec du mobilier du début du 14e siècle, en première analyse.
43:42Donc, en fait, on a une couche de remblai sableux
43:47D'après les strates archéologiques dans lesquelles le sarcophage est inhumé,
43:51il pourrait dater du 14e siècle.
43:56Les archéologues ont retiré la première couche du radier de pierre
43:59et dégagé l'intégralité du cercueil.
44:02Il est quasi intact.
44:04Mais deux ouvertures de la couche de remblai sableux
44:07ont été détruites,
44:09et la couche de remblai sableuse n'est plus présente.
44:12Le cercueil est à l'intérieur du cercueil.
44:15Il est quasi intact.
44:17Mais deux ouvertures dans l'enveloppe de plomb inquiètent les chercheurs.
44:21Après tant de siècles enfouis dans le sol,
44:24que reste-t-il de son contenu ?
44:27Les ingénieurs du laboratoire de recherche des monuments historiques
44:30sont venus prêter main-forte à leurs collègues.
44:33Une caméra endoscopique introduite dans le sarcophage
44:36laisse apparaître des ossements.
44:39Un crâne en parfait état de conservation,
44:42autour duquel les chercheurs vont découvrir cheveux,
44:45feuillages et fragments de textiles.
44:48Une découverte scientifique remarquable,
44:51qui devra être confirmée plus tard avec la fouille du cercueil
44:54dans un laboratoire de recherche.
44:57C'est une très belle surprise de voir que,
45:00à l'exception de ces carnaux,
45:02il y a encore énormément de vestiges qui sont conservés,
45:05que ce soit du XVIIIe mais également des périodes antérieures.
45:10Au plus près du cœur,
45:13à seulement quelques mètres du sarcophage,
45:16les archéologues de l'INRAP ont fait une autre découverte.
45:19Sous le dallage de la cathédrale,
45:22ils ont retrouvé des blocs et fragments de sculptures
45:25à la finesse et à la polychromie d'une qualité remarquable.
45:30Les archéologues et les historiens
45:33estiment qu'ils dateraient du XIIIe siècle.
45:37C'est une chance extraordinaire, incroyable
45:40de pouvoir les fouiller aujourd'hui.
45:43C'est la grosse surprise pour l'instant de la fouille.
45:48Il s'agirait des éléments de l'ancien jubé médiéval,
45:51érigé vers 1230.
45:54Aujourd'hui, les échafaudages ont remplacé le jubé.
45:57Cet écran de pierre qui clôturait le cœur,
46:00lieu de dévotion des chanoines.
46:03Ce mur de sculpture représentait la passion du Christ.
46:09Il fut détruit au XVIIIe siècle.
46:12Les blocs ont été précieusement déposés,
46:15comme enterrés au pied du cœur,
46:18par respect pour leur caractère sacré.
46:24Ce qu'on a pu voir, c'est que notamment sur toutes les parties basses,
46:27il a été enfoui, mais avec soin.
46:30Il y a des éléments qui représentent des visages,
46:33des mains, des pieds, des torses, des drapés.
46:36Donc là, on est plutôt sur des représentations humaines,
46:39entreprenant des personnages de la Bible.
46:42On a aussi retrouvé des éléments qui représentent de l'architecture,
46:45des églises.
46:48On a trouvé beaucoup d'éléments de décors, des feuillages,
46:51des grappes, peut-être de raisins.
46:54Toute une série d'éléments qui, une fois restitués,
46:57nous permettent d'avoir un aperçu du décor initial du Jubay.
47:10L'archéologue Christophe Besnier et son équipe
47:13ont retrouvé plus de 500 blocs et fragments de sculptures.
47:18Ils seront inventoriés, nettoyés, étudiés
47:21et conservés par les archéologues qui espèrent reconstituer le Jubay.
47:28Les techniciens du groupe numérique,
47:31qui seront chargés de leur numérisation,
47:34les intégreront au double virtuel de la cathédrale,
47:37qu'ils ont alimenté durant ces deux dernières années
47:40avec toutes les découvertes faites sur le chantier.
47:43Toute personne qui s'intéresse au patrimoine
47:46a systématiquement un regard vers le passé et vers le futur.
47:49C'est cet exercice qu'aujourd'hui le numérique reprend.
47:53Ce genre de système permet de dévoiler
47:56la richesse et la complexité exponentielle
47:59d'une croisée des regards pluridisciplinaires
48:02sur le même objet.
48:05On est capables de mettre sur le même plan
48:08la représentation de l'espace,
48:11donc la représentation de la cathédrale physique,
48:14avec la représentation de la cathédrale des corps,
48:17avec la représentation de la cathédrale des corps,
48:20avec la représentation de la cathédrale des connaissances
48:23qui sont mobilisées pour étudier.
48:26Donc on peut à terme imaginer
48:29que par cette action,
48:32on est en train de constituer un nouveau patrimoine
48:35qu'il faudra de toute façon
48:38transmettre aux générations futures.
48:42À Notre-Dame,
48:45le temps de la reconstruction approche.
48:48L'archéologue Christophe Besnier et ses collègues
48:51doivent maintenant laisser la place au grand échafaudage
48:54qui va remplir la croisée du transept.
48:57Il prépare une des phases les plus délicates
49:00de leur fouille exceptionnelle,
49:03la sortie hors du chantier du sarcophage de plomb.
49:06La sortie hors du chantier du sarcophage de plomb.
49:36...
49:39...
49:42...
49:45...
49:48...
49:51...
49:54...
49:57...
50:00...
50:03...
50:06...
50:09...
50:12...
50:15...
50:18...
50:21Cette phase de fouille achevée,
50:24l'aventure des scientifiques va se poursuivre ailleurs,
50:27dans les universités et les laboratoires,
50:30et à terme, dans un lieu unique en son genre,
50:33un centre de stockage et de recherche au nord de Paris.
50:36Un entrepôt immense
50:39où seront conservés l'ensemble des vestiges de Notre-Dame
50:42pour les besoins des chercheurs dans le futur.
50:46Il y a eu, dès le lendemain de l'incendie,
50:49une volonté de la part des chercheurs qui se sont mobilisés
50:52de préserver les vestiges issus de l'incendie
50:55considérant qu'ils avaient une valeur patrimoniale.
50:58C'est pourquoi on a décidé de mettre en place ce local de stockage
51:01pour permettre à la recherche de se développer
51:04et de donner les meilleurs résultats.
51:07On va pouvoir ici faire accéder des chercheurs en nombre,
51:10dans des bonnes conditions, dans un délai de plusieurs années,
51:13pour qu'ils puissent mener des études de plus long terme
51:16qui n'auront pas d'impact réel sur le chantier
51:19mais qui vont intéresser des disciplines scientifiques
51:22en lien avec l'histoire de la cathédrale
51:25et plus globalement avec des problématiques scientifiques actuelles.
51:30Tous ceux qui ont pris part au chantier scientifique
51:33savent qu'il y aura un avant et un après l'incendie de Notre-Dame.
51:37Cet entrepôt, devenu bibliothèque de vestiges,
51:40est une expérience inédite
51:43qui bouleverse les notions de conservation.
51:47Les restes archéologiques d'une cathédrale porteur d'une mémoire
51:50à jamais préservés.
51:55Sous-titrage Société Radio-Canada
52:25© Sous-titrage Société Radio-Canada