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Chaque jour, Jean-Philippe Longo revient sur des événements de l'histoire de la télévision.
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NewsTranscription
00:00Et Jean-Philippe Longo qui m'accompagne dans ce club de l'été.
00:04Jean-Philippe, nous entraînes dans l'histoire de la télévision, Hugo Fray, figurez-vous.
00:08Des émissions cultes, parfois estivales, ou des événements marquants racontés par les animateurs que vous avez rencontrés.
00:14Aujourd'hui, Jean-Philippe, vous faites un grand bond dans le temps.
00:17Eh oui, on va parler d'une émission que notre invité connaît peut-être et qui a révolutionné la télé à sa façon.
00:22Si vous êtes né à la fin des années 60, début des années 70, vous étiez certainement traumatisé
00:27comme toute une génération d'enfants le mardi soir à l'écoute des premières notes de cette musique.
00:31Ah oui, ce générique mythique, c'est bien évidemment celui des dossiers de l'écran.
00:43Et en 1967, le producteur Armand Jameau, à qui l'on doit également des chiffres et des lettres,
00:47a une idée simple mais brillante, proposa à une heure de grande écoute un film, le plus souvent sur un fait historique,
00:52suivi d'un débat réunissant parfois les témoins de ce fait et leurs contradicteurs.
00:56C'est bête comme idée, mais ça n'avait jamais été fait à la télé.
00:58Et qui se retrouve à la tête de cette émission ?
01:00Pour animer les débats, Jameau fait appel en alternance au journaliste Joseph Pasteur,
01:04et un jeune homme de 30 ans seulement, il n'a jamais fait de télé, il se retrouve propulsé à 20h30 en présentateur de débat, c'est Alain Jérôme.
01:11Et Alain Jérôme, il a aujourd'hui 88 ans, je l'ai retrouvé au milieu de sa petite retraite paisible,
01:15et il se souvient à quel point il devait bosser les sujets ardus des dossiers de l'écran.
01:19J'avais un bibliothécaire qui était à l'époque à la maison de la radio.
01:24J'étais tombé sur lui un jour, je lui avais expliqué ce que je faisais, il l'avait vu,
01:28et je lui ai dit « j'ai besoin de quelqu'un comme vous pour vous fournir de la littérature, pour préparer les dossiers ».
01:32Et le type m'a aidé considérablement, il trouvait des bouquins, il trouvait des tas de trucs,
01:37et j'allais chercher mes trucs chez lui, à la maison de la radio,
01:40et je bossais évidemment beaucoup là-dessus, pour pas faire cette émission sans travailler, ça c'est pas possible.
01:45Ça c'est pas possible évidemment. Les sujets portés sur quoi en général ?
01:48Il faut se rappeler qu'on est seulement un peu plus de 20 ans après la fin de la seconde guerre mondiale,
01:51donc au départ, les thèmes abordés tournent autour de cet événement,
01:54ce qui peut amener des moments très émouvants pour Alain Jérôme, comme ce jour à la sortie du studio.
01:58On descend dans la Cognacley, j'étais à côté de deux personnes âgées, françaises,
02:04qui avaient hébergé un parachutiste, et d'un seul coup ils voient leur parachutiste,
02:08qui attendait dans un coin, il n'avait pas été autorisé par les gardes à monter plus haut,
02:14mais il attendait le bonhomme, il avait vu ça, alors ils se sont tombés dans les bras,
02:18c'était deux braves parisiens, français, qui avaient cassé le type pendant la guerre.
02:23Ça c'était un moment extraordinaire.
02:25Et en plein temps, on retrouvait régulièrement des historiens également,
02:27qui n'hésitaient pas à réagir et à remettre complètement en question
02:30certains films proposés comme les Péplum, venus tout droit des Etats-Unis.
02:33On passait des films qu'on appelle les Péplum,
02:36c'est-à-dire ça racontait les combats des gladiateurs au temps de Rome.
02:40L'équipe regardait, ils venaient voir, parce que c'était des historiens compétents,
02:44on avait besoin d'eux, et ils disaient « mais vous allez quand même pas passer ça ? »
02:48Ça c'était le film qu'ils voulaient, l'Americanophantasis.
02:52« Monsieur, on n'en a pas d'autre pour raconter ces événements-là,
02:56à vous de corriger tout ça. » Ils ne s'en privaient pas.
02:59Mais qu'est-ce que c'est que ce film, c'est très américain,
03:02et ça ne collait pas du tout à la réalité, surtout pour des historiens.
03:05Il y a autre chose de novateur, Jean-Philippe, qui va faire le succès de l'émission.
03:09Oui, on le fait aujourd'hui dans le Club de l'été,
03:11c'est ce qu'on appelait le standard SVP 11-11 à l'époque.
03:13C'était l'une des premières fois à la télé où les téléspectateurs
03:15étaient amenés à réagir par téléphone en posant des questions,
03:18et le tout en direct, bien sûr.
03:20Et l'avantage du direct, c'est qu'on est au plus proche de l'actualité,
03:23comme ce jour du 2 avril 1974,
03:25où un événement dramatique chamboule le déroulement de l'émission.
03:28On avait une émission qui était assez normale, assez classique,
03:31et j'avais un téléphone qui me reliait à Jameau, qui était en haut, en régie.
03:35Très brièvement, il me dit « Pompidou vient de mourir, annonce-le ».
03:39Bon, alors j'avais des gens autour de moi qui étaient capables
03:44de pouvoir rebondir là-dessus.
03:46Alors je dis, ben voilà, je vous interromps,
03:49je viens d'apprendre que le président Georges Pompidou est mort.
03:53Alors j'ai tenu l'antenne avec les gens que j'avais avec moi,
03:59ça s'est bien passé.
04:01Ça m'émeut un peu parce que je me souviens de ces moments-là.
04:06C'est ça, ça crève le cœur.
04:09Et l'émission va battre des records d'audience chaque semaine,
04:11atteignant même 13 millions de téléspectateurs lors de la venue d'Yves Montand,
04:15jusqu'à devenir culte pendant près de 25 ans à la télé, mais aussi au cinéma.
04:19En 1993, c'est Christian Clavier qui parodie l'émission
04:22« Dans Papy fait de la résistance » de Jean-Marie Poiré.
04:24Et il demande même à Alain Jérôme de jouer son propre rôle
04:26dans une des scènes les plus mythiques du cinéma français.
04:29Je ne voulais pas le faire, je considérais que c'était
04:31me foutre de la gueule des dossiers de l'écran.
04:33Ça n'était pas bien.
04:35Finalement, ils m'ont convaincu, ils ont appelé Armand Jameau,
04:39ils lui ont dit qu'il faut qu'il le fasse, etc.
04:42Ils voulaient absolument que ce soit moi.
04:44Le problème, c'est de ne pas rigoler.
04:46Est-ce qu'ils n'arrêtent pas de se balancer des balles ?
04:49Mais voilà, c'est un bon souvenir, c'est un bon souvenir.
04:52« Dans Papy fait de la résistance » en 1983, bien sûr.
04:54Et après 25 ans de succès, Jean-Philippe, l'émission va s'arrêter malheur du jour au lendemain.
04:58Ben oui, en 1991, alors qu'Alain Jérôme venait de terminer
05:00l'enregistrement d'un numéro de l'émission depuis Antibes,
05:03il apprend que l'émission ne sera pas renouvelée pour une nouvelle saison
05:05et qu'il vient de présenter son tout dernier numéro
05:07sans avoir pu remercier, et saluer une dernière fois ses téléspectateurs.
05:10Il y a un type qui est venu nous apprendre que les dossiers de l'écran étaient terminés.
05:15Il y a un type qui a été envoyé par Pierre Desgropes,
05:18qui était le patron de la chaîne numéro 2,
05:20qui est venu nous dire, voilà, c'est la dernière que vous faites.
05:24Mais on savait que c'était toutu, c'était arrêté.
05:27Et en fait, c'est Desgropes qui a décidé ça en tant que patron.
05:31On ne pouvait pas s'opposer à ça, il a décidé, il a décidé.
05:34On aurait pu lui argumenter beaucoup de choses.
05:36C'était passionnant de faire cette émission.
05:38S'ils avaient pu continuer, je le ferais encore.
05:40Et c'est donc le 6 août 1991 que l'émission prend fin,
05:43avec un 880e numéro consacré à la Cour d'Angleterre
05:46et dans lequel Alain Jérôme reçoit un tout jeune journaliste encore inconnu,
05:49un certain Stéphane Bern.
05:50Ah, on le connaît bien !
05:51Et donc cette émission mythique, les dossiers de l'écran,
05:53aura ouvert la porte à tant d'autres par la suite
05:55et restera, comme le disait un journaliste à l'époque,
05:57la seule émission qui réunit des gens dont le point commun est d'avoir envie de s'engueuler.
06:01D'avoir envie de s'engueuler, merci beaucoup Jean-Philippe Longo,
06:04les dossiers de l'écran.
06:05Vous restez avec nous, le club de l'été sur Europe.