Guy Sergent témoigne sur le massacre du 13 août 1944

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00:00Le 13 août 1944, j'avais 11 ans. Je ne suis pas resté le 13 août 1944 parce que ma mère
00:21nous a sauvé la vie en nous emmenant à l'Aventrousse parce qu'elle pensait toujours qu'il y aurait
00:29eu un bombardement dans le Corfou de Tours. Parce que toutes les nuits les Allemands montaient
00:36sur la route de Bubertré en allant sur Caen. Maman disait qu'on allait être bombardés un de ces jours.
00:46Les enfants, on ne reste pas là, on va chez les parents. On a été chez les grands-parents
00:51à l'Aventrousse ici. On est partis quelques jours avant le 13 août. Moi j'étais à l'école
00:59de Tours. J'ai connu les Allemands qui ont fait les dégâts, qui ont brûlé Tours.
01:06Moi j'ai connu l'ancien Tours bien sûr, j'avais 11 ans. Et à l'école on était ramassés dans
01:15une classe. Les Allemands avaient pris une classe et nous on était là. On était là avec eux. Au
01:24départ ils n'étaient pas du tout méchants. Est-ce que c'est les mêmes qui étaient là,
01:31qui sont repartis pour aller au fond de Caen? Parce que le débarquement avait eu lieu le 6 juin.
01:41Moi je ne vous parle pas de ça, c'est fin juin, début juillet. Moi j'étais en classe avec mon
01:51ancien étudiant qui s'appelait Fernand Guérin. Et je me rappelle en sortant de l'école on avait
01:59vu Monsieur Perrault, qui était photographe, qui a photographié les Allemands sur les marches
02:05à la mairie de Tours. Ceux qui ont fait le massacre à Tours. J'ai connu tous les Allemands
02:12bien entendu. Je me rappelle aussi en sortant de l'école, il arrivait un camion allemand,
02:21avec tous des gamins dedans, des jeunes de 15-16 ans, avec un fusil. Ça je me souviens
02:29comme aujourd'hui. Et puis ils ne nous ont rien dit. Je peux vous dire qu'à l'époque on restait
02:39pour longtemps sur la place Vigny à Tours. On partait directement chez nos parents. On avait
02:47l'ordre de ne pas parler. Les gamins de l'époque on ne parlait pas nous. Parce qu'il y avait des
02:57écoutes, il y avait des dénonciateurs. On ne parlait jamais de nos parents, on ne parlait
03:04jamais de rien, parce que c'était secret. On a vécu une drôle d'époque bien entendu. Mais moi
03:12je me rappelle que j'étais à la Ventrouse et mon père était, le jour du 13 août,
03:23mon père était quand même resté chez lui à Tours. Il est parti à 5 heures du soir quand il
03:29a entendu les premiers coups de fusil qui tiraient dans les cheminées. Les Allemands faisaient sauter
03:36les mitres des cheminées à l'époque. Et mon père est parti chez ses parents qui s'appelaient
03:42Auboulay. J'ai été les voir pour les réconforter un peu. Et puis les Allemands sont venus chez nous.
03:52Le docteur Moignot qui était à sa fenêtre dans un petit coin qui a vu les Allemands arriver chez
03:58nous. Ils ont mis une rafale de mitraillette dans la porte et ils ont fait sauter la serrure.
04:05On était seulement visés parce qu'il y a eu seulement une dénonciation. Je pense qu'il y a
04:12eu une dénonciation, mais on n'a jamais su qui c'est. Et en même temps ils ont été chez M. Maheu,
04:18rue Mondrel. Ils ont mis une révolver en face de Mme Maheu. Mais Mme Maheu a dit que son mari
04:27était parti dans sa ferme. Alors ils sont partis, ils n'ont rien dit à Mme Maheu. Mais sans ça,
04:34on avait deux personnes qui étaient visées à Tours. C'était M. Sergent et M. Maheu. Donc il y a
04:42eu quelque chose. On ne sait pas qui. Alors autrement, la vie était triste pour nous,
04:52pour les jeunes de l'époque. Mais enfin, on a survécu et je suis très malheureux d'avoir eu
05:01autant de fusillés à Tours, malgré que Tours soit disant, c'était un officier allemand qui
05:10avait été tué. Mais ce n'est pas vrai, il n'a pas été tué par la résistance, il a été tué par
05:17l'aviation anglaise à la gare de Tours. Et que sa voiture restait des années entre les tilleuls
05:25de l'allée de la gare de Tours. Et ça, je m'en souviens, il a été tué. Et ensuite, il y a eu
05:33aussi ce qui n'a pas été très bien des Français, à mon avis, il ne faut jamais faire des choses
05:40comme ça. Il y avait une remorque sur la Place des Partis, je m'en souviens, je l'avais revue,
05:48qui était pleine de denrées, de ravitaillement pour les Allemands. Et les Français sont venus,
05:56ils ont pris des victoires. Et ça, les Allemands ont pris ça comme prétexte, je suis disant. C'était
06:05pas loin de la commandature de Tours, ça je m'en souviens, sur la Place des Partis. Et donc,
06:12ils ont pris des marchandises, les Allemands ont pris ça comme prétexte, je suis disant,
06:17pour faire la... qu'est-ce qu'ils ont fait à Tours. On a vu Tours, les maisons étaient par terre,
06:2565 maisons qui ont été brûlées. Et malheureusement, il y a eu des fusillés,
06:30comme M. Jamais, que j'ai connu, M. Biolovic, que j'ai connu, tous ceux qui ont été fusillés à Tours,
06:37ils les ont tous connus. Même un jeune de Caen, il s'appelait Molton, qui avait 14 ans,
06:43il faisait partie de la Croix-Rouge, les Allemands l'ont tué. Non, mais je pense qu'ils avaient bu,
06:50ils n'étaient pas dans l'état normal. Parce qu'ils chantaient qu'il fallait qu'ils partent,
06:57ils se sont saoulés, c'est tout. Non, ce n'était pas brillant à ce point-là. Mais,
07:09que voulez-vous, c'est la guerre, malheureusement. Mais moi, je pense qu'à mon avis,
07:17s'il y avait eu la vraie résistance dans notre région, ils auraient pu attaquer les 40 Allemands
07:26qui étaient à la Foucauldière, à mon avis. Moi, je suis un ancien militaire, parce que j'étais
07:32en Afrique du Nord, mais rappelez, je pense que la résistance a eu peur, sûrement,
07:40d'avoir des représentants, et c'est peut-être pour ça. Et aussi, au sujet de Jean Richard,
07:53que j'ai connu, la veille de l'histoire, il était à la Gestapo, il était chez moi,
07:58il était chez mes parents. Parce que, je vais vous dire pour quelle raison, c'est que j'étais à
08:04l'école et je voyais les avions anglais, ils faisaient des pirouettes dans le ciel et ils
08:11mitraillaient la moto où Jean Richard emmenait mon père voir le dépôt de Courserault. Et mon père
08:22a sauté sur la moto, Jean Richard lui dit tu sautes, et lui il a sauté, ils ont été tous les
08:27deux sauvés. La moto est partie dans le fossé et quand les Anglais ont vu que la moto était toute
08:35seule, ils sont partis. Ça, je m'en souviens comme aujourd'hui, je les voyais dans le ciel,
08:41je disais à mon copain, regarde les avions, c'était sur mon père. Oui, c'était marrant,
08:47c'était pas marrant. Et Jean Richard, c'était un copain à mon père. Jean Richard, malheureusement,
08:54a été arrêté par la Gestapo. A mon avis, il a fêté des boulettes, il aurait dû se méfier. Mais
09:03quand on a 24 ans, on n'a peur de rien si vous voulez.

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