Trois sœurs de 70, 73 et 80 ans cuisinent la Norvège à Saint-Victoret

  • il y a 2 semaines
Tenu par trois soeurs Jacqueline-Gabrielle, Marie-Christine et Lylly, le restaurant situé à Saint-Victoret est devenu une véritable institution pour sa cuisine norvégienne et surtout, pour sa convivialité.
Dès 10 h dans la cuisine, Marie-Christine Aubry s'attelle à la préparation de l'aïoli ainsi qu'à la cuisson du cabillaud. Derrière le comptoir Lylly Aubry accueille les premiers clients, tandis que Jacqueline-Gabrielle Aubry Saeby met en place le saumon fumé dans son présentoir...

Depuis 2007 ces trois soeurs tiennent le restaurant La P'tite Norvège à Saint-Victoret, avec toujours depuis 17 ans la même passion et le plaisir de recevoir. À l'intérieur de l'établissement les drapeaux norvégiens côtoient les photos des paysages du pays scandinave, situé à plus de 1 800 km de Saint-Victoret à vol d'oiseau. Au-dessus de la cuisine, on peut aussi apercevoir un cliché du célèbre marché aux poissons de la ville de Bergen, sur les bords de la mer du Nord. Un décor qui tranche avec celui de la Provence mais que les trois soeurs ont voulu faire découvrir notamment à travers de nombreuses recettes dont elles seules gardent le secret.

Et pourtant, rien ne les liait au départ à ce pays nordique. Le trio a grandi derrière les fourneaux auprès de leur père, chef cuisinier à bord du paquebot Le Normandie, mais surtout dans son établissement du Var, à Saint-Zacharie, dans lequel elles ont appris les bases du métier, dans les années 60. Marie-Christine et Lylly, aujourd'hui 73 et 70 ans, décident ensuite de devenir saisonnières dans la restauration. Jacqueline-Gabrielle, 80 ans, s'installe à Marignane en 1982 et ouvre son propre restaurant gastronomique, La table de Triana. Mais une hernie discale la contraint à fermer l'établissement et c'est lors de son séjour à l'hôpital qu'elle rencontre en 1991, un certain Hans Saeby, un Norvégien qui deviendra son futur mari. "Quelques jours après notre rencontre je suis parti avec lui vivre en Norvège, pendant 25 ans !", raconte-t-elle, en montrant la photo de leurs noces en Norvège, accrochée sur le mur du restaurant.

À la mode des Vikings
Ensemble ils font le tour du pays et surtout ils visitent les fumoirs et les centres d'élevages de saumon. Jacqueline-Gabrielle apprend, note, et se forme même aux méthodes de la cuisine traditionnelle viking ! Ses soeurs viennent lui rendre visite et découvrent alors elles aussi les plats traditionnels norvégiens. Hans Saeby décède en 2013 et Jacqueline-Gabrielle revient vivre à Marignane. "À mon retour, mes soeurs ne voulaient plus être saisonnières et on a décidé de se rassembler afin de créer ce restaurant. L'idée d'y faire de la cuisine norvégienne est venue naturellement", continue Jacqueline-Gabrielle.

Les soeurs préparent une fois par mois un plat norvégien comme le ribbe, une recette de Noël composée de poitrine de porc au miel, de pommes de terre, de choux rouge et d'airelles, ou encore le nissegrøt, le riz au lait scandinave, en plus de l'assiette norvégienne et du saumon fumé ou en gravlax, disponibles plus régulièrement. "On nous demande à quel moment on a prévu de cuisiner norvégien, les gens ont pris l'habitude de venir manger ce type de nourriture", remarque Marie-Christine. Depuis 2020, elles font même fumer elles-mêmes leur saumon et en vendent facilement entre 150 et 200 kg durant les périodes de fêtes.

À Saint-Victoret, leur restaurant est devenu une véritable institution et au-delà du repas, les clients viennent discuter avec les soeurs pour partager un moment convivial. "Ce sont les mamies de Saint-Victoret", résume une cliente devant le comptoir. Et "les mamies" ne sont pas près d'arrêter de travailler : "C'est notre vie, on le fera jusqu'à ce que mort s'en suive", lance Jacqueline-Gabrielle. "Le contact avec les gens ça nous manquerait. C'est tellement agréable quand on voit qu'ils apprécient notre cuisine. On se dit qu'on est encore utile à quelque chose. Ce restaurant nous permet de conserver un lien social", ajoute Marie-Christine, avant de retourner en cuisine, toujours avec le sourire.

Sur son téléphone Jacqueline-Gabrielle fait défiler les photos de sa belle-famille norvégienne : "Ils viennent régulièrement nous rendre visite, confie-t-elle, heureuse. Nous, on aimerait y retourner pour Noël, le soleil se couche tôt, c'est féerique. On a deux pays et la Norvège c'est notre pays de coeur".
Transcript
00:00C'est les mamies de Saint-Victoré.
00:01Les mamies sont bien connues parce qu'elles sont très sympathiques.
00:04Elles font très très bien à manger.
00:05C'est la cuisine de mamie, en fait.
00:20Nous sommes trois sœurs à tenir la petite Norvège.
00:22Je vous présente.
00:24Allez, venez mes sœurs.
00:25Voilà, Gabriel qui s'occupe de toute la gestion.
00:29Et Lili, on est toutes les deux à tenir la petite Norvège.
00:33Moi, je fais la cuisine et Lili s'occupe des clients,
00:36de recevoir les clients, de les servir et tout.
00:38J'ai fait une petite expo.
00:40Je suis l'artiste de la famille.
00:42Donc ça fait carrément une équipe, une équipe soudée.
00:45Bon, des fois, comme je dis, dans les équipes, il y a des heurts.
00:49Dans toutes les familles, mais c'est bien.
00:51C'est ce qu'il faut de toute façon.
00:52Et si c'était trop plat, ça serait pas plat.
00:55Vous avez Berguel, là c'est guerre en guerre, là on y était.
00:58On était en haut des montagnes.
00:59Et puis là, c'est nous, quand on s'est mariées avec mon mari norvégien.
01:03Hans Theodor Seibi.
01:05Ma sœur a été mariée avec son mari norvégien,
01:07donc elle habitait là-bas et tout.
01:09Donc c'est elle qui est allée voir les fumoirs avec son mari en Norvège.
01:15C'est elle qui fume le poisson.
01:16J'ai appris avec les Vikings là-bas en Norvège.
01:19D'ailleurs, Marie-Christine est allée travailler là-bas aussi.
01:22Voilà, quelques temps.
01:23Pour qu'elle connaisse un petit peu le système norvégien.
01:27Ça a été une découverte, un coup de cœur.
01:29Et on a fait tout en bateau, la côte norvégienne et tout ça.
01:33Vous savez, tout le monde dit, dans les pays froids, les gens sont froids.
01:36Mais c'est pas vrai du tout.
01:38C'est des gens qui sont affables.
01:39Ma sœur, elle a eu au départ un coup de cœur pour son mari.
01:42Et moi, j'ai eu le coup de cœur quand je suis partie travailler là-bas, voilà.
01:47Vous voyez, chez nous, c'est tout petit, c'est vraiment minuscule.
01:50Les clients, ils voient tout.
01:52Ils voient tout ce qui se passe en cuisine.
01:54Comme ça, ils savent ce qu'ils mangent.
01:57La Petite Norvège, 17 ans.
01:58On a ouvert en juillet 2007.
02:01Et depuis 17 ans, on est là.
02:04Je ne comptais pas rester autant à Saint-Victoré
02:06parce que moi, je ne suis pas vraiment de Saint-Victoré.
02:08Nous, on est de la côte d'Azur.
02:10J'ai habité Grasse pendant une vingtaine d'années.
02:14Moi, j'aimais bien voyager.
02:15Avant, je ne faisais que des saisons.
02:16J'allais à Val d'Isère, à Méribel, l'hiver.
02:19L'été, on allait à Saint-Raphaël.
02:21Mon frère avait un restaurant, donc des fois, on a fait des saisons avec lui.
02:25Et on s'est arrêtés là, à la Petite Norvège.
02:27Et en fin de compte, comme ça nous plaît,
02:29puis que maintenant, on a un certain âge,
02:31que les voyages, ça déforme les valises, et pas que les valises.
02:36Donc automatiquement, on s'est installés là, tranquilles.
02:39Ici, à Saint-Victoré, parce que ma soeur a une propriété.
02:42Donc, c'était plus facile de se rassembler.
02:45Ça, c'est la pâte à crêpes.
02:47Pour faire les crêpes maison.
02:51Vous avez le goût de vin ?
02:53Des fois, je la loupe.
02:55Si je vais m'énerver.
02:56Je goûte tout, moi.
02:57T'as raison, goûte.
02:59Moi, je la crêpe.
03:01Tu me permets que je pose l'autre ?
03:03N'ajoutez pas.
03:03Ah non.
03:05Voilà, merci.
03:08Alors, les plats qu'on a importés.
03:09Le dessert, c'est le fameux riz crème.
03:12Vous avez le riz bain.
03:14Le riz bain, c'est le plat de côte de porc, bien sûr,
03:16qui a une cuisson très, très, très longue
03:18et qui est un petit peu, pas caramélisé, mais presque.
03:21Il y a trois, quatre heures de cuisson.
03:23Et puis après, c'est fondant, c'est délicieux.
03:25Ça se sert avec, ils appellent ça le surcolle,
03:28mais en fait, c'est du chou rouge.
03:29Et le saumon, le fameux saumon, bien sûr.
03:31L'assiette norvégienne, pour nous, c'est deux toasts grillés,
03:35l'omelette sur le toast, comme les Norvégiens le mangent avec une brouillade,
03:39avec un écrasé de pommes de terre mayonnaise,
03:42des petits légumes en spaghettis, courgettes et carottes,
03:46de la salade verte, un peu des tomates.
03:48Donc, ça fait une assiette complète.
03:50Ça, c'est les pieds paquets.
03:51C'est pas norvégien, mais c'est apprécié.
03:52Non, mais c'est traditionnel.
03:54C'est la tradition.
03:57Les petits légumes à la niçoise,
03:59pour servir avec le cabillaud, l'aïoli qui est là.
04:03Les quelques plats qui sont à la carte et tout ça,
04:07c'est tout avec des produits frais, il y a une rotation rapide.
04:09Et puis, bien préparé, bien sûr.
04:12Moi, vous savez, quand je vais dans un restaurant et que j'aurai une carte immense,
04:15je me méfie toujours pour la fraîcheur.
04:17Voilà, l'aïoli, comment on la mange ?
04:22Comme ça.
04:24Ça y est, on est à la retraite depuis,
04:27moi, presque depuis 10 ans maintenant, à un certain âge.
04:30Et au lieu de rester à tourner à la maison à la retraite,
04:33le matin, on arrive, on sait qu'on a des choses à faire, à préparer et tout.
04:38Puis, en plus de ça, on accueille après le client.
04:40Et c'est vrai que c'est très agréable.
04:42Les gens, des fois, ils sont étonnés.
04:44Mais moi, c'est vraiment...
04:46D'abord, la cuisine, c'est une passion.
04:49Nous, on a toujours été dans la restauration.
04:52Mon père avait un restaurant, une hostellerie La Fouque à Saint-Zachary.
04:56Et on a grandi dans la restauration.
04:58Donc, il nous a, à chaque fois, fait venir en cuisine.
05:01Parce que lui, c'était un chef cuisinier.
05:03Il avait travaillé sur le Liberté et sur le Normandie.
05:05Après, il a ouvert cette auberge pour voir ses enfants grandir.
05:08Donc, il nous faisait venir en cuisine en tant que marmiton, nettoyage de la cuisine.
05:15Marie a travaillé en cuisine avec papa.
05:18Et moi, je suis responsable des charcuteries et des desserts.
05:21Et des salades.
05:22Et en plus, quand même, c'est tellement agréable.
05:25Quelqu'un qui déguste quelque chose et qui vous fait des compliments et tout.
05:30Vous avez passé une super journée, là.
05:33Quand vous arrivez le soir, vous dites, c'était une super journée.
05:36Parce que c'est agréable de savoir qu'on est encore utile à quelque chose.
05:41Et que les gens vous apprécient.

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