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Transcription
00:00Marc Brincourt avec nous, bonjour !
00:03Bonjour !
00:04Vous êtes journaliste et surtout proche d'Alain Delon.
00:08Avant de dérouler sur sa carrière, Marc Brincourt,
00:11c'est vrai que depuis quelques mois,
00:14Alain Delon le disait de manière à peine voilée,
00:17pardon de le dire aussi directement,
00:19je le cite Alain Delon, il voulait que ça s'arrête.
00:22Oui, je pense qu'il devait être fatigué de tout ça,
00:26de plus ce qu'il se passait avec ses propres enfants.
00:30Oui, je le connaissais bien,
00:33je n'étais pas un ami intime d'Alain Delon,
00:36j'avais une énorme complicité,
00:38une grande complicité professionnelle avec lui pendant 15 ans.
00:42C'est vrai qu'on était souvent en contact.
00:46La dernière fois que je l'ai eu au téléphone,
00:48il m'avait même appelé le jour de Noël cette année,
00:51avec une voix très fatiguée.
00:55Qu'est-ce qu'il vous avait dit justement ?
00:57Ça date d'il y a quelques mois, c'est encore tout frais.
01:01Sans vouloir être trop intrusif,
01:04en respectant la complicité que vous aviez avec lui,
01:07Marc Brincourt, qu'est-ce que vous vous êtes dit ?
01:10Quand je l'ai eu au téléphone,
01:12je me suis dit qu'il avait une voix...
01:14Ça n'a pas duré longtemps, ça a duré vraiment une minute.
01:18Vous vous êtes échangé des banalités ?
01:21Vous avez parlé peut-être de l'échéance qui approchait selon lui ?
01:25C'était une banalité, mais tellement forte et tellement intime.
01:30Parce qu'il m'a dit,
01:32« Mon Marc, je te souhaite un bon Noël, prends soin de toi. »
01:37Il m'a dit « Je t'aime » à la fin,
01:40avec une voix très très fatiguée.
01:43Et j'ai pensé tout de suite,
01:46il était tellement...
01:48Une voix qui fait mal à entendre.
01:51En même temps, j'étais tellement heureux qu'il m'appelle.
01:55Tout de suite, j'ai pensé même à Anthony Delon,
01:58que je connais quand même bien, et son fils.
02:01Et je me disais, tout ça, c'est...
02:04Parce qu'il n'y a encore pas si longtemps que ça.
02:07J'étais avec lui pour les 70 ans de Paris Match.
02:11On avait fait une photo extraordinaire.
02:13C'est moi qui avais monté cette photo avec Catherine Taboui.
02:16Vous savez, on le fait poser avec un bras de fer, avec Belmondo.
02:20Je connaissais bien aussi.
02:23Donc évidemment, il y a plein de choses qui ressortent.
02:26Sur sa carrière, Marc Brincourt.
02:28Sur sa carrière, Alain Delon.
02:30Il n'a eu qu'un seul César.
02:33C'était en 1985.
02:35C'était un regret pour lui.
02:38Et c'est vrai qu'on se gossait,
02:41par rapport à sa personnalité.
02:44Il était très imbut de lui-même.
02:46Il l'avait dit, un seul César, c'est peut-être pas assez.
02:49Et puis, quand il est arrivé, le César, c'était trop tard.
02:52C'était un vrai regret, ça, dans sa carrière.
02:55La reconnaissance de ses pairs.
02:57Alors, il l'avait, mais pas assez à son goût.
02:59Oui, disons que même nous,
03:02par rapport à ceux qui aiment le cinéma,
03:05qui aiment l'acteur.
03:07C'est vrai que je trouvais ça injuste.
03:09En même temps, il l'avait eu, déjà, un César.
03:11Il n'était pas venu le chercher.
03:13C'était Coluche qui l'avait récupéré.
03:15Qui l'avait reçu pour lui.
03:17Oui, c'est sûr.
03:19Mais après, il a été récompensé, rappelez-vous, à Cannes.
03:22Avec cette palme d'honneur qu'il a reçue.
03:25Alors que, des années avant,
03:28quand Cannes fêtait ses 50 ans,
03:31ils avaient oublié d'inviter Delon et Belmondo
03:36pour les 50 ans de Cannes.
03:38C'était complètement dingue.
03:40Et on avait fait une couverture, un match d'ailleurs,
03:42où ils sautent sur un trampoline, tous les deux, avec Jean-Paul.
03:45Bon, après, Cannes s'est rattrapé.
03:47Chacun a reçu une formidable palme d'honneur.
03:50Et d'ailleurs, c'était extraordinaire,
03:52parce que quand il a reçu cette palme d'honneur à Cannes,
03:54j'avais vu, avec Anoushka,
03:56un défilé sur le tapis rouge.
03:58Et je me disais, mais qu'est-ce qu'il a au veston ?
04:00Il avait un badge, il avait comme un pin's,
04:02un pin's sur le revers de son smoking.
04:04Et ce pin's était une couverture de badge
04:07avec, quand il a éposé, avec Anoushka.
04:10Marc Brincourt, c'est vrai qu'alors, Philippe,
04:12tout le monde réagit, tous ses proches,
04:14toutes les personnalités du monde de la culture.
04:16Philippe Labraud, à l'instant,
04:18et je cite Philippe Labraud,
04:20il était habité par la grâce,
04:22la France perd,
04:24et le cinéma français perd,
04:26le dernier de ses géants.
04:28C'est vrai qu'il y a eu Belmondo,
04:30et vous l'évoquiez, Belmondo, à l'instant, Marc Brincourt.
04:32Bon, après Alain Delon,
04:35on se sent un peu orphelin,
04:37parce que le cinéma français n'a plus,
04:39dans son réservoir,
04:41de géants, de la trempe d'Alain Delon.
04:43Vous partagez l'analyse de Philippe Labraud ?
04:46Complètement.
04:48De toute façon, Philippe dit toujours les mots justes.
04:51Quand on parle de ces monstres sacrés,
04:54c'est vrai, je veux dire,
04:56c'était quelqu'un,
04:58c'est le dernier.
05:00Pour moi, c'est le dernier, je veux dire,
05:02j'en ai parlé, je me souviens,
05:05je connaissais bien Mireille Dark,
05:07et de temps en temps,
05:09on parlait d'Alain, et à chaque fois,
05:11elle me disait, c'est vraiment
05:13le grand dernier,
05:15vous voyez ce que je veux dire ?
05:17Et puis, beaucoup,
05:19comme vous dites, il parlait de lui-même,
05:21souvent, comme ça, on exagère
05:23beaucoup là-dessus.
05:25Cette personnalité qu'on adorait,
05:27j'allais dire détester,
05:29dont on adorait se moquer,
05:31notamment les guignols de l'Info,
05:34c'est aussi ça
05:36qu'il rendait si attachant, selon vous,
05:38Marc Brincourt ?
05:40Oui, parce qu'Alain, j'ai eu la chance
05:42d'aller à Douchy, j'ai eu la chance
05:44de le connaître un peu.
05:46Il parlait de lui à la troisième personne.
05:48Il parlait de lui à la troisième personne,
05:50c'est vrai que ça faisait sourire.
05:52Moi, je ne l'ai jamais entendu parler de lui
05:54à la troisième personne. Par contre,
05:56oui, il était fier,
05:58très fier de cette carrière exceptionnelle.
06:00Moi, je me souviens, à Douchy,
06:03à un moment donné, on est dans la maison
06:05et il y a une espèce de couloir,
06:07il y a des centaines et des centaines
06:09de photos encadrées
06:11sur les murs,
06:13et il marchait devant moi,
06:15et avec la main gauche-droite,
06:17il disait « mort, mort, mort, mort, mort,
06:19voilà, je suis le dernier ».
06:21C'est vrai que ça peut paraître
06:23peut-être un peu,
06:25il en faisait beaucoup,
06:27mais non, il avait raison,
06:29c'est vrai qu'il était le dernier.
06:31Avec cette carrière extraordinaire,
06:33il ne pourrait pas dire « j'ai fait du cinéma,
06:35j'étais une grande star,
06:37j'ai tourné avec les plus grands,
06:39j'ai fait les plus beaux films ».
06:41Lui, il le racontait à sa façon,
06:43mais disons que c'est vrai qu'après,
06:45les guignols, comme vous le dites,
06:47sont parés de ce genre de choses
06:49à la troisième personne.
06:51Moi, ça fait 15 ans d'amitié,
06:53disons, professionnelle,
06:55je ne l'ai jamais entendu parler
06:57de lui à la troisième personne.
06:59Merci Marc Brancourt.

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