Quand Dijon dominait les Rois de France (F303)
Un palais aux dimensions royales, d'imposantes maisons bourgeoises à colombage, des tombeaux richement décorés mais aussi de nobles cépages témoignent du passé glorieux de Dijon. Au XIVe siècle, avec l'arrivée des Valois, la ville prend son essor. Les ambitions grandissantes des ducs de Bourgogne vont transformer leur petit empire en rival du royaume de France.
Gaston Fébus, roi des Pyrénées (Q546)
Entre Béarn et Ariège, les montagnes des Pyrénées apparaissent majestueuses et austères à la fois, et forment une frontière naturelle avec l'Espagne. Depuis le XIVème siècle résonne ici le nom de Gaston Fébus, comte de Foix et grand prince méridional du XIV siècle. Ambitieux et charismatique, il réussit à créer un territoire pyrénéen uni où l'art occitan est célébré. Il forge ainsi sa légende qui est encore aujourd'hui célébrée dans tous les villages de la région.
Année de Production :
Un palais aux dimensions royales, d'imposantes maisons bourgeoises à colombage, des tombeaux richement décorés mais aussi de nobles cépages témoignent du passé glorieux de Dijon. Au XIVe siècle, avec l'arrivée des Valois, la ville prend son essor. Les ambitions grandissantes des ducs de Bourgogne vont transformer leur petit empire en rival du royaume de France.
Gaston Fébus, roi des Pyrénées (Q546)
Entre Béarn et Ariège, les montagnes des Pyrénées apparaissent majestueuses et austères à la fois, et forment une frontière naturelle avec l'Espagne. Depuis le XIVème siècle résonne ici le nom de Gaston Fébus, comte de Foix et grand prince méridional du XIV siècle. Ambitieux et charismatique, il réussit à créer un territoire pyrénéen uni où l'art occitan est célébré. Il forge ainsi sa légende qui est encore aujourd'hui célébrée dans tous les villages de la région.
Année de Production :
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00:00Générique
00:02...
00:19Sonnerie d'horloge
00:21...
00:27Presque tout le monde l'ignore,
00:29mais Dijon a bien failli devenir la capitale de la France.
00:34Un glorieux passé qui saute aux yeux
00:36lorsqu'on découvre les trésors cachés de cette cité médiévale.
00:40Un palais aux dimensions royales des tombeaux,
00:44chef-d'oeuvre du gothique flamboyant
00:46et les maisons à colombage des bourgeois fortunés.
00:49Les Dijonnais sont fiers de leur histoire.
00:53...
00:56Celle des ducs de Bourgogne, les Valois,
00:59qui remontent au XIVe siècle.
01:01...
01:04Cette dynastie hors norme avait le sens des titres qui claquent.
01:09Philippe le Hardi, Jean sans peur,
01:12Philippe le Bon et Charles le Téméraire.
01:16Les quatre ducs vont régner sur une partie de l'Europe.
01:19Ils feront de la Bourgogne l'adversaire le plus sérieux
01:22de la couronne de France.
01:24...
01:27C'est une famille princière. C'est assez inimaginable.
01:30Il y a un respect, c'est quasiment des demi-dieux.
01:32Il y a une vénération devant cette famille,
01:35ce qui va donner une image, une aura à cette ville.
01:38Dijon est connue dans le monde entier
01:40comme étant la ville des ducs de Bourgogne.
01:42...
01:44Au milieu du XIVe siècle, en pleine guerre de Cent Ans,
01:47le prince Philippe, 14 ans seulement et déjà Hardi,
01:50sauve la vie de son père, le roi de France Jean le Bon,
01:53sur le champ de bataille.
01:55...
01:58Pour le remercier, son père lui offre un territoire
02:01de l'est de la France, la Bourgogne, dont il le fait duc.
02:04Mais n'est-ce pas, en réalité, un cadeau empoisonné ?
02:08...
02:11Quand les Valois arrivent ici, Dijon, c'est vraiment rural.
02:15Ils trouvent rien à acheter.
02:17Pour les épiceries, par exemple, ils montent jusqu'à Troyes.
02:21Troyes, c'était la France, la grande ville.
02:23Soit Troyes, soit Châlons.
02:25...
02:27Philippe décide de s'installer malgré tout sur son duché,
02:30qu'il va développer.
02:33Il commence par agrandir l'hôtel du Cal,
02:35construit par ses prédécesseurs, en plein coeur de Dijon.
02:38Aujourd'hui, les parties les plus visibles
02:41datent du XVIIe siècle.
02:43...
02:46Mais sa tour de 46 mètres remonte à l'époque des ducs.
02:49Une construction monumentale pour le Moyen Âge.
02:53...
02:57C'est des bâtiments de pierre, forcément,
02:59avec un toit de pierres, de la lave, de la lose.
03:02Extérieurement, très peu de sculptures,
03:04mais tout le luxe, c'est à l'intérieur.
03:06La richesse de Philippe Lehardi, c'est ses tapisseries,
03:09de soie et de fils d'or, avec des kilos d'or dans les tapisseries.
03:13L'intérieur coûte plus cher que les bâtiments.
03:16On pourrait dire que l'intérieur du palais des ducs
03:18est recouvert d'or.
03:21...
03:25Ce palais féérique est toujours un lieu de pouvoir,
03:28puisqu'il est aujourd'hui l'hôtel de ville des Dijonais.
03:31...
03:41Ici, on entre dans ce qu'on appelle la salle des joyaux.
03:44C'est là qu'ils mettent ses joyaux, son trésor,
03:47donc c'est à peu près 90 coffres,
03:49qui sont pleins d'orfèvreries,
03:51de reliques, de manuscrits enluminés,
03:55de tapisseries, d'habits, aussi.
03:58On trouve des gris-gris, on trouve une main de singe.
04:01On trouve des cantes de licornes, très précieuses,
04:04qui étaient des antipoisons.
04:06C'est la fortune de Bourgogne.
04:07Il faut deux salles pour contenir tout ça.
04:10Peut-être une pour les joyaux de monsieur,
04:12une pour les joyaux de madame.
04:14...
04:16Le duché de Bourgogne prospère rapidement.
04:18...
04:20Philippe Lehardi va même étendre les frontières de son territoire,
04:24comme en témoigne encore aujourd'hui l'un des symboles de la ville.
04:28...
04:31Juste en face du palais du Cal,
04:33les mascottes de Dijon veillent sur les habitants.
04:36...
04:38Jacques Marre, son épouse Jacqueline et leurs deux enfants.
04:42...
04:46Installée tout en haut de Notre-Dame,
04:48Jacques Marre sonne l'heure dijonaise depuis plus de 600 ans.
04:52...
04:54...
05:00Un Jacques Marre, déjà, par définition,
05:02c'est un automate qui frappe l'heure.
05:04C'est exactement le système que l'on retrouve ici.
05:08C'est un principe
05:10qu'on retrouve assez fréquemment dans les villes du nord de l'Europe.
05:14Celui de Dijon, eh bien, provient de court trait,
05:18donc en Belgique,
05:20non loin de la frontière française, à côté de Lille.
05:23...
05:24Philippe Lehardi est un fin stratège.
05:27Grâce à son habile mariage avec Marguerite,
05:30fille du comte de Flandre,
05:31il doit acquérir une partie des territoires de l'actuel Belgique.
05:35...
05:37Mais en cette fin de XIVe siècle,
05:39éclate une grande révolte des Flamands.
05:42Le duc part défendre son héritage
05:44et avec son armée de 1 000 hommes, il écrase la rébellion
05:48et s'empare de l'un des chefs-d'oeuvre de court trait, son horloge.
05:51Mais son indispensable cloche est endommagée pendant le trajet.
05:56...
05:59Très fier de cette prise de guerre,
06:01les Dijonais vont se cotiser et payer eux-mêmes sa réparation.
06:05Ce qui explique sans doute, aujourd'hui encore,
06:08l'attachement des habitants à leur jacquemard.
06:11...
06:14On se trouve ici, au coeur du mécanisme extérieur du jacquemard,
06:18qui, vous voyez, se compose d'une grande cloche principale
06:23et de deux petites cloches qui sonnent les quarts.
06:25Pour les grosses cloches, on a des marteaux de grande dimension
06:29qui sont actionnés par un système bien plus complexe
06:33de tirants métalliques que l'on retrouve ici
06:36et de contrepoids.
06:37...
06:40A la mort de Philippe Lehardi en 1404,
06:43la Bourgogne, qui lègue à son fils, est métamorphosée.
06:46...
06:49Sa superficie a été multipliée par cinq
06:52et comprend désormais également l'actuel Franche-Comté,
06:55le Comté de Nevers
06:57et une partie de la Belgique et des Pays-Bas.
07:00Elle est devenue l'un des duchés les plus puissants du royaume.
07:03Tandis que la couronne de Francelle
07:06est très affaiblie par la guerre de Cent Ans
07:08et par son roi Charles VI, en proie à des crises de démence.
07:12On l'appelle le folle.
07:14De quoi titiller l'ambition du nouveau duc Jean Sanspeur,
07:18qui se prend à rêver du trône de France.
07:21...
07:28Les ducs font de Dijon l'un des foyers culturels
07:31les plus fastueux de l'époque,
07:33éclipse en Paris.
07:35...
07:37En périphérie de la ville, ils fondent la chartreuse de Chamolles.
07:41...
07:44Ils vont couvrir ce monastère d'oeuvres d'art
07:47réalisées par les sculpteurs et peintres
07:49les plus renommés de l'époque.
07:51...
07:55Les ducs étaient de grands mécènes.
07:57Ils utilisaient l'art à des fins de propagande.
08:00Ils n'hésitaient pas à débourser énormément d'argent.
08:03On le sait dans les comptes du Co,
08:05où on a traces des commandes qu'ils passent aux artistes.
08:08On voit les matériaux qu'ils achètent,
08:10des matériaux luxueux, des pigments luxueux,
08:13comme le lapis lazuli, l'or, etc.,
08:15qui sont utilisés pour réaliser ces oeuvres d'art
08:18installées à la chartreuse.
08:19...
08:22Au centre du cloître de l'époque subsiste le puits de Moïse,
08:26piédestal d'un calvaire, représentant six prophètes et rois.
08:30...
08:31Avec ses personnages très réalistes
08:33et ses colonnettes au chapiteau de feuillage,
08:36c'est l'un des chefs-d'oeuvre de l'art médiéval.
08:38...
08:40A l'époque, le site abritait d'autres merveilles,
08:43les tombeaux des ducs.
08:45...
08:46Aujourd'hui, ils sont précieusement conservés
08:49dans une aile du Palais du Cal, transformée en musée.
08:52...
08:55Là, on voit très bien l'ensemble des tombeaux,
08:57avec les gisans qui sont représentés de façon très traditionnelle.
09:01C'est-à-dire les mains jointes en prière.
09:04Sur le tombeau de Philippe le Hardi, il est représenté seul,
09:07avec à ses pieds le lion, un symbole de force,
09:09un animal qu'on avait l'habitude de voir sur les tombeaux,
09:12avec deux anges qui portent le casque, le homme, sur ce tombeau.
09:17Et puis, sur l'autre tombeau, on aperçoit également deux gisans,
09:21Jean Sempeur et son épouse, Marguerite de Bavière,
09:23qui sont représentés avec les mêmes codes et les mêmes symboles.
09:27...
09:29En cette époque d'intrigue et de complot,
09:32Jean Sempeur a tout juste le temps de faire achever le tombeau de son père,
09:35avant d'être assassiné par son grand rival,
09:38le fils du roi de France, en 1419.
09:41...
09:43Son tombeau, à lui, sera commandé par son fils,
09:46le nouveau duc Philippe le Bon,
09:48avec la même ambition,
09:50avoir les gisans les plus somptueux possibles,
09:52plus somptueux que ceux des rois de France.
09:55...
09:57Il faudra près de 30 ans pour réaliser chacun de ces tombeaux faits d'or,
10:01de marbre noir,
10:02et d'albâtre pour les cortèges de pleurants,
10:05d'un réalisme époustouflant.
10:10Si on veut comprendre le niveau de réalisme
10:13atteint dans ces sculptures de pleurants,
10:15on peut regarder l'évêque, qui est représenté ici,
10:18avec un luxe de détails et de raffinement dans son costume,
10:22avec des réaux colorés et dorés, bien sûr,
10:24pour mettre en valeur certains détails des accessoires et du costume.
10:28Et ce visage, également, de l'évêque,
10:30qui exprime toute sa compassion et sa tristesse.
10:36Au milieu du XVe siècle,
10:38le duché de Bourgogne est à son apogée.
10:41Philippe le Bon s'est allié avec les Anglais
10:43contre le royaume de France.
10:46Il règne sur une grande partie du nord de l'Europe occidentale.
10:50Cette extension territoriale
10:52va permettre de faire connaître à travers tout le continent
10:55un autre trésor bourguignon, les vignobles.
11:02Sur les côteaux de Chenove, ville mitoyenne de Dijon,
11:05on cultive toujours un des domaines de l'époque,
11:08alors nommé le clôt des ducs.
11:12On ne peut pas donner de chiffres précis sur la superficie viticole
11:15au Moyen Âge, car on n'a pas de cadastre.
11:17Par contre, on sait qu'il y avait des vignes partout.
11:20Une ville comme Dijon était ceinturée de vignes,
11:22tant sur les côteaux qu'en direction de la plaine de Saône.
11:27Les ducs vont faire du vin un outil de propagande.
11:30Ils le veulent excellent, à hauteur de leur dignité de duc,
11:34et en abondance, pour pouvoir le servir
11:36sur toutes les grandes tables d'Europe.
11:39Ils édictent donc la première politique viticole au monde
11:43pour privilégier les cépages les plus nobles.
11:46Ils interdisent le gamet, jugent trop ordinaire
11:49et promeuvent le pinot, qui représente encore aujourd'hui
11:52près de la moitié du vignoble bourguignon.
11:54Les ducs font également construire à grands frais,
11:57toujours à Cheneuve, des pressoirs monumentaux,
12:0130 m de long sur 17 m de large.
12:05On a des comptes qui précisent qu'il a fallu dépenser 1 860 livres
12:09pour la reconstruction du bâtiment.
12:11Ca représente 25 ans de salaire
12:13pour un ouvrier moyen, un tailleur de pierre ou un charpentier.
12:15C'est une somme considérable,
12:17investie pour les ducs de Bourgogne
12:18dans le cadre de la production de leur vin.
12:22Une fortune qui va permettre de concevoir
12:24ces pressoirs révolutionnaires au 15e siècle.
12:28Ca fonctionne comme un casse-noix.
12:29C'est-à-dire qu'on va mettre l'avant-dange de ce côté,
12:33on va venir actionner le cabestan ici,
12:35faire descendre le levier, qui va venir donc appuyer
12:39sur l'avant-dange pour permettre la pressée du raisin.
12:42On peut presser 40 pièces de vin en une seule pressée
12:44avec un raisin pressoir comme celui-là.
12:47A la mort de Philippe Leboux, au milieu du 15e siècle,
12:50les vins bourguignons sont réclamés à travers l'Europe entière.
12:54Mais son fils, Charles le Téméraire, qui lui succède,
12:57se désintéresse malheureusement de la viticulture.
13:00Il n'a qu'une obsession, la guerre et l'extension de son duché.
13:06La bataille de Nancy, en 1477, sera celle de trop.
13:12Il meurt au combat et finit dévoré par les loups.
13:15Le roi de France s'empresse de reprendre le pouvoir
13:18sur l'état bourguignon.
13:20Et ça commence par le vin.
13:22Il rebaptise les domaines des ducs en clôt du roi.
13:28Six siècles plus tard, les bourguignons cultivent
13:31le souvenir de leur grand-duc à travers leur grand cru.
13:35Car les vrais connaisseurs le savent,
13:37à défaut d'avoir pu régner sur la France,
13:40Dijon est l'autre capitale du vin.
13:44Musique intrigante
13:48...
13:52Musique intrigante
13:54Une terre des confins, majestueuse et austère à la fois,
13:59une frontière mystérieuse pour la France comme pour l'Espagne.
14:04Entre Ariège et Béarnes, les montagnes des Pyrénées
14:07ont un jour formé le coeur d'un puissant territoire.
14:11Un fief dont le prestige a rayonné sur l'Occident,
14:16celui de Gaston Phébus, prince du XIVe siècle,
14:20dont le nom résonne sur ces montagnes depuis le Moyen Âge.
14:26Pas un château ou un village
14:28qui ne se réclame ici de son héritage.
14:31...
14:34Gaston Phébus a été le plus grand comte de foi,
14:37mais aussi le plus grand prince méridional, on peut dire.
14:40Sa personnalité a frappé ses contemporains,
14:43mais a aussi créé une légende qui s'est perpétuée au cours des siècles.
14:47Et dans les Pyrénées, tout ce qui est grand et beau,
14:51tout ce qui est impressionnant, tout ce qui est magnifique,
14:53a été fait par Gaston Phébus.
14:55...
14:58Ambitieux et charismatique,
15:01parfois cruel, mais éclairé,
15:04la personnalité complexe de Gaston Phébus
15:07lui a permis de créer un territoire uni,
15:10une sorte d'Etat pyrénéen,
15:12le seul qui ait jamais existé,
15:14où l'art occitan a été célébré.
15:17...
15:19De quoi forger une légende à jamais associée aux Pyrénées.
15:23...
15:27...
15:36C'est une vaillante sentinelle
15:38qui surveille depuis dix siècles les ruelles de la vieille ville.
15:42...
15:44Le château de Foix n'est pas seulement un témoignage éclatant
15:47de l'art défensif médiéval,
15:50il est aussi une démonstration de la puissance de l'illustre prince.
15:56À la venue au monde de Gaston Phébus en 1331,
16:00la forteresse est le centre d'un comté, celui de Foix,
16:03parmi les plus puissants que possède son clan,
16:06la maison Foix-Béarnes.
16:08Une famille du Midi respectée,
16:11mais à la puissance toute relative.
16:13Avec leurs possessions éclatées,
16:16depuis le vicomté de Béarnes, à l'ouest,
16:19jusqu'aux terres de Catalogne, au sud-est,
16:21les Foix-Béarnes règnent sur un territoire en pointillé.
16:25...
16:27On peut dire qu'il a reçu les Pyrénéens en héritage
16:30et toute sa vie, il va faire en sorte de faire rejoindre
16:34les deux... les deux entités.
16:38...
16:42Pour mener à bien ce projet,
16:44Gaston Phébus décide, à la mort de son père,
16:47de renforcer le pouvoir dont jouit sa famille.
16:50...
16:52Au Moyen Âge, la puissance n'est rien
16:55si elle n'est pas ancrée dans le sacré.
16:57L'abbatiale de Saint-Volusien-de-Foix
17:00devient le lieu de cette démonstration de pouvoir
17:03voulue par Gaston Phébus.
17:07Son avènement, sa mère l'a amené en pays de foie,
17:11et c'est dans le cloître de Saint-Volusien
17:13que tous les seigneurs du pays de Foix
17:16et les représentants des villes
17:18sont venus prêter hommage au jeune prince.
17:20La prestation d'hommage s'accompagnait d'un baiser
17:23ou de mains mises dans les mains du prince,
17:26c'est-à-dire qu'ils l'ont touché.
17:28C'était important, ça crée un lien charnel, on peut dire,
17:32entre le jeune comte et son peuple.
17:38Ainsi naît l'image d'un Gaston Phébus aimant son peuple.
17:43Mais il demeure plus attaché encore à ses montagnes,
17:46où il s'adonne à sa grande passion, la chasse.
17:50S'inscrivant dans la mode récente des princes écrivains,
17:54il lui consacre même un livre,
17:56le Livre de Chasse,
17:58un ouvrage du Moyen Âge
17:59dans lequel les princes de toute l'Europe vont s'arracher.
18:03Dans le Livre de Chasse,
18:04on peut discerner un amour de ses montagnes.
18:07Il parle des Isards en disant,
18:09dans mes montagnes, j'en ai vu beaucoup, etc.
18:11Il dit pas dans les montagnes des Pyrénées
18:14ou des Bernes, il dit dans mes montagnes.
18:16C'est un élément quand même très...
18:20qui montre l'amour de son pays.
18:30Ses montagnes,
18:32il les sillonne inlassablement, à pied ou à cheval.
18:36Mais avant la chasse proprement dite,
18:39le maître des Pyrénées passe de longs moments
18:42à observer les animaux.
18:45Sans le savoir, il effectue un minutieux travail de naturaliste,
18:50très utile à celui que fait Jérôme Laffitte
18:53du Parc national des Pyrénées,
18:55sept siècles plus tard.
19:00Là, du coup, on a plusieurs femelles, situées sous l'arbre.
19:04Si on regarde à droite,
19:06les cabris de l'année sortent sur le bloc et rejoignent leur mère.
19:12Le Livre de Chasse de Gaston Phoebus fait partie du patrimoine pyrénéen,
19:16notamment pour la description de cette faune emblématique du parc.
19:20Ce sont les premières descriptions des espèces.
19:23On parle aussi du niveau d'abondance de certaines espèces.
19:26Ca permet de servir d'élément de comparaison
19:29avec ce qu'on voit aujourd'hui.
19:31Ca fait partie du patrimoine pyrénéen.
19:36Le témoignage du Comte de Foix est précieux.
19:39Il recense toutes les espèces présentes dans les Pyrénées au Moyen Âge.
19:44L'indétrônable ours, bien sûr,
19:47mais aussi le cerf, l'hysare ou encore le bouctin.
19:51Pour ce dernier, le Livre de Phoebus est capital,
19:56notamment depuis la disparition de l'espèce au début du XXe siècle.
20:02C'est une espèce emblématique des Pyrénées.
20:05On témoigne les ossements qu'on a pu retrouver dans les Pyrénées
20:08et qu'on a datés à au moins 80 000 ans.
20:10Les représentations rupestres qu'on peut retrouver
20:13dans certaines grottes, comme Agneau en Ariège.
20:16Et les plus anciens écrits, c'est le Livre de la Chasse,
20:19où Gaston Phoebus parle du bouctin.
20:21Il le décrit et parle d'une espèce abondante
20:24dans les Pyrénées françaises.
20:29Pour les naturalistes, le Livre de chasse de Gaston Phoebus,
20:33ce prince dont tout le monde se réclame ici,
20:36est une aide précieuse.
20:40Il permet à Jérôme Laffitte et à ses équipes
20:43d'appuyer leur démonstration auprès des populations locales
20:46sur la nécessité de réintroduire le bouctin
20:49dans la vallée de Luz-Gavarnie, comme ailleurs, en Béarnes.
20:54L'intérêt que j'y vois, c'est de se dire
20:56que, historiquement, l'espèce était là,
20:59que l'homme a fait une erreur,
21:00et cette erreur est réparée avec ce programme de réintroduction.
21:04On remet le bouctin dans son espace naturel,
21:06ici, dans les Pyrénées françaises.
21:10Témoin d'un temps où l'homme vivait au rythme de la nature,
21:13le Livre de chasse, légué par Phoebus,
21:16construit aussi sa légende,
21:18celle d'un prince érudit, un des premiers de son époque.
21:25Ce n'est pourtant pas par les lettres
21:28que Gaston Phoebus va unifier son territoire.
21:31Montanée, une forteresse remaniée par ses soins,
21:36permet de saisir le stratège de génie
21:38qu'a aussi été le prince.
21:44C'est un château qui a des dimensions tout à fait exceptionnelles,
21:48avec un donjon très imposant, 40 m de haut,
21:52qui est posé dans un coin nord-est de la Vicomté de Béarnes,
21:57comme une vigie.
21:58C'est un site stratégique
22:00parce que, depuis le haut de ce donjon,
22:02on a un panorama absolument exceptionnel,
22:06totalement ouvert,
22:07dirigé vers la Vicomté de Béarnes,
22:10mais aussi vers la Bigorre,
22:13qui est une contrée toute proche
22:16et que le comte convoite.
22:19Et puis aussi, tournée contre l'Armaniac,
22:23les terres des Armaniacs,
22:25qui sont ses grands rivaux depuis des décennies.
22:32Convoitée par les Armaniacs,
22:34la Bigorre est alors le principal chêneau manquant
22:38qui permettrait à Phoebus d'unifier ses terres du Béarnes
22:41à celles de Foix.
22:44Phoebus jette toutes ses forces dans cette bataille
22:47contre les Armaniacs.
22:49Et en 1390, à la fin de son règne,
22:52il met enfin la main sur la Bigorre.
22:55On peut désormais aller de peau à foie
22:58en demeurant sur ces terres.
23:00Sa puissance n'est plus à démontrer.
23:03Et ce prince des Pyrénées intrigue,
23:05fascine au-delà de ses frontières.
23:09Au point d'intéresser le plus célèbre des chroniqueurs de l'époque,
23:13Jean Froissart, qui lui consacre un livre,
23:16Le voyage en Béarnes.
23:18Quand il quittait sa chambre à minuit
23:20pour venir souper dans la grande salle,
23:23douze torches flamboyantes le précédaient,
23:25portées par douze valets,
23:27et ces douze torches étaient ensuite placées devant sa table,
23:30ce qui donnait une grande clarté à la pièce.
23:34Cette salle était pleine de chevaliers et d'écuyer,
23:37et les tables étaient toujours couvertes à foison
23:39pour faire souper qui voulait.
23:41Nul ne lui adressait la parole à table sans invitation de sa part.
23:46Celle-là, l'autre facette du personnage.
23:50Celle d'un homme autoritaire
23:52qui n'hésite pas à répudier sa femme sans explication,
23:56ni à tuer son unique héritier soupçonné de trahison.
24:00C'est finalement d'une crise cardiaque
24:02que Phébus meurt au retour d'une partie de chasse
24:05à l'âge de 60 ans.
24:08De quoi forger l'image d'un personnage mystérieux,
24:10source de fierté pour les Pyrénéens
24:13et objet de fascination pour les écrivains,
24:16comme Alexandre Dumas,
24:18qui lui consacre un roman,
24:20Monseigneur Gaston Phébus.
24:22Je pense qu'il parle aux gens
24:24parce que c'est un personnage de roman,
24:27par cette vie riche, longue, complexe,
24:30ce personnage a plusieurs faces,
24:32et en même temps, parce qu'il donne, d'une certaine manière,
24:36une forme d'identité pyrénéenne.
24:39On se réclame de lui,
24:41on se réclame de lui, entre Foix et Béarnes.
24:46Très souvent, son nom est accolé
24:49à des manifestations, à des événements touristiques,
24:53voire même à des produits.
24:55Donc, c'est devenu, en effet,
24:59un trait d'identité.
25:05Car ici, personne n'a oublié
25:07que nombre de ses écrits ont été rédigés en langue occitane,
25:11un des piliers de l'identité pyrénéenne.
25:15Si Gaston Phébus maîtrise le français et le latin,
25:19c'est dans sa langue maternelle, l'occitan, qu'il gouverne.
25:23Une langue qu'il soigne, lui, le mécène des arts,
25:27qui accueille à sa cour, comme à celle du château de Pau,
25:30Ménestrelles et Troubadour.
25:32Au XIVe siècle, l'occitan est la seule langue véhiculaire
25:36dans l'ensemble de l'air qui va de l'Atlantique jusqu'aux Alpes,
25:40et plus particulièrement dans les états de Gaston Phébus.
25:43Cette langue est également une langue de l'administration,
25:47une langue du champ politique,
25:50et à la cour de Phébus, plus particulièrement encore,
25:53une langue de la littérature, une langue des arts
25:56et une langue de la science.
25:58Pour lui, c'est une langue à égalité avec d'autres langues d'Europe
26:02de cette époque.
26:04Son amour pour la langue occitane traverse les âges.
26:08C'est ainsi qu'au XIXe siècle,
26:10alors que les artistes s'entichent
26:12d'un Moyen Âge idéalisé, romantisé,
26:15la figure de Gaston Phébus est exhumée
26:18pour donner à la culture occitane
26:21la figure historique qui lui manque,
26:24jusqu'à unir son nom à l'hymne du pays.
26:27On est en pleine période du style Troubadour.
26:30On se réintéresse au Moyen Âge,
26:33on va attribuer la paternité
26:36d'une chanson populaire extrêmement connue
26:39depuis des siècles dans la zone occitane,
26:42la chanson Akeros Montagnos,
26:44ou appelée aussi le Sekanti.
26:46On va en attribuer la paternité à Gaston Phébus.
27:03...
27:14Gaston Phébus est-il l'auteur de cet hymne
27:18narrant les amours impossibles d'amants
27:21séparés par d'infranchissables montagnes ?
27:24Au fond, la réponse importe peu,
27:27car dans tous les cas,
27:29il aura réussi à dominer ce massif
27:32pour en devenir le maître incontesté
27:35et s'imposer au fil des siècles
27:37comme la figure tutélaire des Pyrénées.
27:40...