Le Dr Benjamin Davido, infectiologue à l'Hôpital Raymond Poincaré de Garches revient sur l'épidémie de coqueluche qui touche le pays, en effet, plus de 18 000 cas ont été recensé en France depuis début 2024 dont 17 décès. Il revient sur les symptômes de cette maladie, son mode de transmission et son traitement.
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00:00Les petites devinettes pour passer à la suite, est-ce que vous avez déjà entendu ça ?
00:03C'est une toux, une toux d'un enfant en bas âge ici et pourquoi on vous fait écouter
00:12cette toux-là ? Parce qu'elle est représentative de quelqu'un qui est contaminé par la coqueluche.
00:16Plus de 18 000 cas recensés en France depuis janvier 2024, 17 décès enregistrés, principalement
00:22des nourrissons.
00:23Pour en parler ce matin, nous recevons Benjamin Davido, bonjour.
00:25Bonjour à tous.
00:26Merci d'avoir accepté notre invitation.
00:27Vous êtes infectiologue à l'hôpital Raymond Poincaré de Garches.
00:30Cette toux, nous l'avons entendue, c'est un des symptômes, j'imagine, de la coqueluche.
00:35Comment la reconnaît-on ? D'abord, vous avez raison, c'est un des symptômes
00:39parce qu'en fait, dans le début de la phase de la maladie, souvent, c'est un syndrome
00:41banal, pseudo-grippal avec le nez qui coule et c'est cette toux asphyxiante de moco-cluche
00:46au champ du coq qui imite le bruit du coq, qui est très évocatrice et qui fait porter
00:50son nom.
00:51Les Chinois, d'ailleurs, l'appellent la toux des 100 jours parce que c'est une maladie
00:53qui donne une toux chronique extrêmement longue.
00:56On peut être symptomatique pendant plusieurs mois absolument, ça s'appelle une toux chronique
01:00et on sait qu'on est contagieux sans traitement pendant au moins trois semaines, c'est-à-dire
01:03une durée de contagiosité extrêmement longue.
01:05Ça se transmet comment ? Ça se transmet par voie gouttelette, par voie
01:08respiratoire, en réalité, comme le Covid, comme l'ensemble de ces maladies respiratoires
01:11dont on a beaucoup parlé ces dernières années et c'est une maladie qui évolue de façon
01:14saisonnière.
01:15On estime que globalement, on a des résurgences environ tous les 5 à 10 ans et aujourd'hui,
01:21on le sait un petit peu comme les autres maladies dont on a pu parler les mois derniers, notamment
01:25le mycoplasme.
01:26Ces maladies-là ont été endormies un petit peu en incubation quelque part pendant la
01:29période du Covid et des gestes barrières et aujourd'hui, on voit la résurgence de
01:32ces maladies malgré une maladie évitable par la vaccination.
01:34Mais oui, c'est ça, il y a un vaccin quand même qui permet d'éviter la coqueluche.
01:38Pourquoi il y a une recrudescence alors qu'il y a un vaccin ? Ça semble un peu contre-intuitif.
01:42Oui, vous avez raison.
01:43En fait, c'est une très bonne remarque.
01:44En réalité, vous l'avez évoqué dans les chiffres, d'abord ce qui est extrêmement
01:47dur, c'est que le peu de décès qu'on voit, ce sont des tout petits enfants et des décès
01:52chez les enfants, évidemment, c'est extrêmement frustrant.
01:54Et on sait que la vaccination des tout petits, elle commence à partir de deux mois et que
01:57finalement, le risque, il est majeur chez ces tout petits, chez ces nourrissons.
02:01Et on estime que pour avoir une protection maximale, il faut au moins chez ces enfants
02:06avoir reçu trois doses, ce qui nous ramène à l'âge de onze mois.
02:09Et on sait qu'aujourd'hui, le trois quarts de ces enfants qui font des formographes sont
02:13des nourrissons, d'où l'importance de la vaccination de la mère enceinte qui sont
02:17des nouvelles recommandations depuis avril 2022.
02:19Ça permet de protéger le nourrisson ? Absolument.
02:22Et peut-être on dira un mot tout à l'heure du Covid, c'est aussi des recommandations
02:24qui maintenant émanent pour l'ensemble de ces maladies, dont la Covid-19, notamment
02:27au dernier trimestre de la grossesse, qui permet d'avoir une immunisation passive par
02:30la mère et d'augmenter la protection en plus de ce rappel vaccinal que l'enfant a
02:35à deux mois, à quatre mois et à onze mois.
02:36Donc c'est hyper important, effectivement.
02:38Comment on explique que certains adultes, vaccinés aussi parfois, soient aussi contaminés
02:43par la coqueluche ? Alors, ça dépend bien sûr des publications,
02:48des cohortes.
02:49On estime que le vaccin est efficace contre les formes graves de 80 à 90%, mais est beaucoup
02:54plus lâche face aux risques de contagiosité.
02:56Vous savez, on a souvent tenté un procès de mauvaise intention, à mon sens, sur le
02:59vaccin de la Covid.
03:00On se dit, finalement, ce vaccin, il n'empêche pas de tomber malade.
03:02On sait qu'il y a, pareil, dans la coqueluche, un distinguo entre ces formes dites bénignes,
03:06ces formes graves qui conduisent notamment les plus petits ou les personnes très âgées
03:09ayant des comorbidités à l'hôpital, et donc on a une vaccination qui est extrêmement
03:14forte et imparfaite.
03:15Et puis aussi, on le sait, cette vaccination, elle va s'estomper après cinq ans caricaturellement
03:19et des données très solides qui montrent que globalement, après sept ans, il est bon
03:23temps de faire des rappels vaccinaux.
03:24Et là où vous avez raison, c'est que le calendrier vaccinal, en réalité, il est
03:28très serré, j'allais dire, jusqu'à l'adolescence, avec des rappels à l'âge de 13 ans, puis
03:33à 25 ans.
03:34Et puis ensuite, on disparaît des radars, sauf pour les professionnels, notamment de
03:37la santé ou de la petite enfance, qui sont en contact avec ces enfants jusqu'à 65 ans.
03:42On peut faire des rappels à 45 ans, à 65 ans, et c'est peut-être ça, aujourd'hui,
03:45qui nous manque pour être en ordre de bataille, pour limiter aussi le risque de transmission
03:49au sein des populations.
03:50Vous l'avez évoqué à plusieurs reprises comme un point de comparaison qui nous a tous
03:54marqués.
03:55C'est évidemment l'épidémie de Covid.
03:57Paris accueille les Jeux olympiques.
03:59Est-ce qu'on peut craindre que la capitale devienne une espèce de cluster géant ?
04:03J'allais dire, elle est déjà en quelque sorte comme beaucoup de capitales du monde.
04:08D'abord, il faut souligner le fait qu'on va arriver sur un mois d'août et que, malgré
04:13cela, on est face à une épidémie de maladies respiratoires hivernales qui sévit en été.
04:17C'est tout un paradoxe.
04:18Et quand on regarde les chiffres de la saison dernière, en réalité, le Covid a grimpé
04:22à partout de la 30e semaine, sans me tromper, on est autour de la 29e, et donc le risque,
04:26vous avez raison, ça coïncide complètement avec cette période des Jeux olympiques où
04:29surtout on va recevoir du public du monde entier.
04:30Le Covid, ce n'est pas une maladie française.
04:32Et donc, il va falloir faire particulièrement attention parce qu'on sait que ce virus peut
04:36se transmettre en été parce qu'il est extrêmement contagieux.
04:39Ce fameux R0, ce taux de reproduction, on estime que pour ces sous-variants d'omicron,
04:43il est supérieur à 10, c'est-à-dire qu'une personne contamine en moyenne plus de 10 personnes
04:46dans l'entourage.
04:47C'est beaucoup.
04:48C'est beaucoup.
04:49Et aujourd'hui, malheureusement, les seules personnes « protégées » face à ces nouveaux
04:53variants, notamment qu'on appelle Kp2, Kp3 de la famille Flirt, sinon amusant, on a
04:57envie de flirter ou pas vraiment avec eux, ce sont ceux qui ont eu la malchance ou la
05:02chance, ça dépend de quelque chose qui se passe, d'avoir été contaminés l'hiver
05:04dernier.
05:05Ça représente peu de personnes, en réalité.
05:06Et donc, aujourd'hui, on est tous quelque part à risque de se contaminer.
05:10Et puis on le sait, la campagne de vaccination pour les personnes les plus fragiles, parce
05:13que l'enjeu, c'est ça, c'est d'éviter une saturation de l'hôpital, et bien elle
05:17n'a pas battu son plein, pour être clair, moins de 5% de la cible pour la vaccination
05:21du printemps, ce qui, malheureusement, fait qu'il y a un risque et qu'on revoit des patients
05:25arriver à l'hôpital pour des formes graves avec ces nouveaux variants.
05:28Très rapidement, on a parlé de la coqueluche, du Covid, est-ce qu'on est à même d'être
05:32peut-être contaminés par d'autres choses, de voir d'autres épidémies, justement, dans
05:35ce contexte des JO ? Et qu'est-ce qu'on fait, du coup ?
05:38Sans être monomaniaque de la vaccination, d'abord, on oublie le trésor de la vaccination
05:42qui nous a protégés contre beaucoup de ces maladies dont on parle, des maladies oubliées,
05:46c'est le cas de la coqueluche, c'est le cas de la rougeole, et en fait, ces maladies,
05:50on en parle beaucoup depuis le début de l'année, et ces maladies ne sont pas des exclusions
05:53françaises, et justement, elles vont faire le tour du monde, et donc la meilleure façon,
05:56on va dire, le risque pour les JO, il va surtout être d'une transmission par voie respiratoire,
06:00et donc probablement les bons réflexes à avoir face à ces maladies...
06:02Le retour du masque.
06:03Alors évidemment, pas le retour du masque, on est sailleurs, on n'a pas envie d'être
06:06ridicule, mais c'est lorsqu'on est symptomatique, lorsqu'on a des symptômes, lorsqu'on sait
06:09qu'on est tombé malade, finalement, de se dépister, de porter un masque pour se protéger,
06:14le lavage des mains, tous ces gestes barrières qu'on connaît, pour éviter en réalité
06:17de transmettre à d'autres personnes, et je pense que ça va être ça l'enjeu si on veut
06:20être responsable et limiter la consommation du système de soins.
06:23Merci, merci beaucoup Benjamin Davidot d'avoir répondu à nos questions ce matin.