• il y a 6 mois
Découvrez les six ouvrages en lice pour remporter le prix Sport Scriptum 2023 ! Remis le 20 décembre lors de la cérémonie des Micros d'or, ce prix récompense le meilleur ouvrage de sport de l'année. Le gagnant sera annoncé dès le jeudi 23 novembre !

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Sport
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00:00Bonjour à tous, soyez les bienvenus, on va commencer par un aveu, c'est peut-être l'émission
00:15de l'année que je préfère, s'attarder sur la littérature sportive à l'occasion de,
00:20alors ça c'est un peu moins drôle, ça s'appelle Sportscriptum et je crois que c'est un exercice
00:25de prononciation, Sportscriptum, je l'ai dit, je crois que je ne le répéterai pas, nous avons
00:30le plaisir d'accueillir cinq des six nommés pour ce prix, le jury présidé par notre amie Nathalie
00:37Yaneta se réunira le 23 novembre et c'est le 20 décembre lors de la cérémonie des micro d'or que
00:45sera remis le premier prix de ce Sportscriptum. Alors avec nous cinq, je le disais, des six
00:52auteurs retenus, le sixième n'a pas pu être là, je vous en parlerai ensuite, je vous présente tout
00:56d'abord Caroline Bouffaut, Caroline bonjour, autrice de Thelma, ensuite nous recevrons Céline Noni,
01:02Alina l'amour secret de Poutine, tout un programme, ensuite Patrick Roux, on ira du côté du judo,
01:08ancien champion de judo, on y reviendra, le revers de nos médailles et puis Charles Aubert danser
01:13encore, il sera question de boxe et enfin de cyclisme avec Etienne Bonamy pour ce très beau
01:20titre, les forcés de la route, le tour fantôme. Il y a un sixième livre en compétition, je vous le
01:26dévoile tout de suite, c'est Ludovic Niney qui nous propose aux presses de la cité l'affaire Cécillon,
01:32Chantal, récit d'un féminicide. Alors juste un mot sur ce livre dont on ne parlera pas, c'est que
01:39l'auteur Ludovic Niney a donc décidé de revoir l'histoire de ce féminicide, Marc Cécillon,
01:45ancien grand champion de rugby, plusieurs fois capitaine de l'équipe de France qui a tué
01:51son épouse lors d'une fête, l'histoire est absolument tragique et jusque là, l'histoire
01:56avait été traitée plutôt du point de vue de Marc Cécillon et Ludovic Niney a eu la très belle idée
02:00et la très digne idée surtout de traiter ça comme un féminicide, plutôt avec le regard, si j'ose
02:06dire, de Chantal, l'épouse assassinée. Mais venons-en au livre présenté ici et représenté
02:13ici, on va commencer tout de suite, on a plein plein de choses à se dire et rappelez quand même que
02:18c'est Renaud Leblon qui avait été sacré long passé pour son roman Le nageur d'Arschwitz aux
02:23éditions L'Archipel, très très beau livre qui méritait bien cette consécration. Alors vous
02:29êtes cinq à défendre entre guillemets vos ouvrages, on va commencer avec Patrick Roux,
02:38donc je le disais tout à l'heure, ancien judocage, champion d'Europe en 87 en moins de 60 kg, vous
02:44avez été entraîneur national, vous avez été membre aussi de la direction technique nationale
02:48de la fédération française de judo et là vous mettez un peu, j'allais dire, les pieds dans le
02:54plat avec le revers de nos médailles, en finir, j'avoue que ça m'a assez troublé quand même
02:59cette accroche, en finir avec les violences dans le sport, des clubs au haut niveau, donc à tous
03:07les niveaux, en finir avec les violences. Alors pourquoi et d'abord quelle violence par rapport
03:12à ce sport de combat, très codifié, très réglé, qu'est-ce que vous dénoncez, puisque la baseline,
03:19si j'ose dire, chez Duneau le montre, vous dénoncez des violences dans le sport, par quel
03:24angle ? Oui alors effectivement il faut bien préciser que c'est dans tout le sport, tous les
03:29sports et non pas uniquement dans le judo. Je crois que depuis les révélations de Sarah Abitbol
03:35au début de l'année 2020, la cellule de signalement du ministère a reçu environ 1000
03:41signalements et les pouvoirs publics le disent eux-mêmes, il y en a probablement dix fois plus.
03:45En réalité c'est presque un phénomène de santé publique qui se révèle au fil des jours et en
03:53fait, si vous voulez, il y a presque une vingtaine d'années, j'avais moi-même essayé d'alerter ma
03:58fédération parce que j'avais été en contact justement de bribes d'informations, on est en
04:042004-2005 à peu près, et donc à cette période-là, c'était un sujet totalement tabou, vous ne
04:10pouviez pas parler de ce genre de choses au sein du mouvement sportif. De quelles violences
04:15faites-vous allusion ? Les violences dont vous avez été témoin ou indirectement témoin ? Alors dans les cas
04:22qui m'avaient été rapportés, il s'agissait de maltraitance, de harcèlement à la fois physique
04:27et psychologique envers de jeunes sportifs mineurs, jeunes athlètes qui pouvaient avoir 15 ou 16 ans,
04:34presque des enfants. Et donc à cette époque-là, moi j'avais été surtout surpris de la violence,
04:40de la réaction de la fédération à mon égard, si vous voulez, je ne comprenais pas pourquoi,
04:44alors que ce que je rapportais méritait une enquête interne, bien évidemment, méritait une réaction,
04:50mais en l'état à cette époque-là, je ne pensais pas du tout que ça pourrait se retourner contre
04:57moi ou générer une réaction aussi violente des instances. Or c'est ce qui s'est produit et depuis
05:03j'ai eu le temps de réaliser qu'en fait la fédération était vraisemblablement au courant
05:09de choses beaucoup plus graves, beaucoup plus vastes. C'est le prix de la médaille, c'est qu'il
05:14faut absolument avoir des résultats et on est prêt à passer sur tout le caractère éthique de la
05:19préparation des champions ? Alors sans pour autant porter trop intensément l'opprobre envers le sport,
05:27si vous voulez, parce que le sport reste une aventure extraordinaire qui révèle les gens,
05:31moi je suis un passionné de sport et j'ai passé ma vie à transmettre dans des formations,
05:38des temps pédagogiques et techniques, mon expérience du sport et du judo en particulier,
05:43aux professeurs, aux athlètes, etc. Mais si vous voulez, je crois qu'on est arrivé aujourd'hui à
05:48une situation complètement déraisonnable qui en fait révèle un état de notre société. Je pense
05:55que les violences et les dérives du sport en réalité révèlent des dysfonctionnements beaucoup
06:02plus vastes et beaucoup plus graves dans la société elle-même. Et moi c'est ce que j'ai trouvé au
06:06judo, surtout en me rendant compte en réalité que je n'étais pas le seul. C'est-à-dire qu'il y a 20
06:10ans quand j'ai voulu révéler ces choses-là, exactement à la même époque, d'autres entraîneurs,
06:15d'autres cadres du sport, des kinésithérapeutes, des psychologues étaient en train de faire les
06:19mêmes révélations aux instances et elles ont subi exactement le même sort que moi. Alors ce qui
06:23est assez paradoxal, vous l'avez quand même bien signalé, il ne s'agit pas que du judo,
06:26mais le judo est un sport très réglé avec justement cette notion de respect, c'est encore
06:32plus paradoxal de découvrir cela. Comment réagit, vous disiez, la Fédération ? On a vu d'autres
06:38fédérations réagir d'une manière encore plus misérable dans d'autres sports. Je pense au
06:42patinage, je pense au football, on a eu sa rabie de bol sur ce plateau aussi. La Fédération à la
06:48limite, on est parfois, j'allais dire, peu surpris par les réactions cyniques et politiques. Mais là,
06:54le monde du judo, vos collègues entraîneurs, les champions, vous n'avez pas eu de voix qui se
07:00sont élevées avec vous ? Alors à l'époque, encore une fois, non. Aujourd'hui la situation est
07:04différente, c'est-à-dire qu'aujourd'hui nous nous sommes passés de 10 puis 20 puis 50 témoignages
07:11d'ex-victimes ou de gens qui ont essayé de les aider à une commission d'enquête parlementaire,
07:16que mon association Artemis Sport, que nous avons créée il y a deux ans, a demandé, nous avons
07:23vraiment milité pour cette commission d'enquête parlementaire avec d'autres associations. Donc si
07:28vous voulez, aujourd'hui c'est tout le mouvement sportif qui petit à petit bascule et au-delà,
07:33le monde médiatique et le monde politique. Le problème c'est que si vous voulez, le monde du
07:38sport, il y a un certain parallèle avec l'église, c'est-à-dire que dans tous les discours, les
07:43dirigeants convoquent les valeurs pour dire voilà le sport c'est extraordinaire, l'éducation par le
07:49sport, le bien-vivre, le lien social par le sport, le sport qui va recréer une vie apaisée dans les
07:56quartiers les plus difficiles, etc. Le problème c'est que quand ça devient une forme de propagande
08:01ou quand c'est trop instrumentalisé, ça pose question. On est d'accord, on ne jette pas tout,
08:06on ne jette pas le bébé avec l'eau du vin, il y a encore des associations qui font un boulot
08:10extraordinaire dans les quartiers, il y a encore des champions qui s'épanouissent. Les clubs font un
08:15travail la plupart du temps extraordinaire. Mes enfants tout petits ont fait du sport, moi je
08:19recommanderais le sport à n'importe qui mais avec une certaine vigilance parce que le sport
08:25malheureusement ça n'est pas que les clubs amateurs, c'est aussi le sport business et le
08:29sport spectacle. Aujourd'hui dans le sport, il y a des enjeux qui sont colossaux et on le voit
08:34bien dans la manière dont le sport professionnel se développe, surtout à l'international. Il faut
08:39voir comment le sport international est régulé ou pas, contrôlé ou pas et là je pense que vous
08:47connaissez le phénomène encore mieux que moi puisque vous êtes au contact des plus grands
08:52sportifs, des plus grandes fédérations donc tout le monde sait comment ça se passe.
08:56En tout cas c'est bien d'avoir cette vigilance. Le revers de nos bédailles donc en collaboration avec
09:00Karine Roperand qui est psychologue, si je ne me trompe pas, c'est chez Duneau. Alors évidemment c'est
09:06moins, j'allais dire, fictionné, c'est moins poétique, littéraire que certains ouvrages mais ça en
09:14dit beaucoup et puisque vous avez cité Artemis Sport, je voudrais citer une autre association
09:18qui nous avait vraiment impressionné lorsqu'on avait fait l'émission sur les violences dans le
09:21sport, notamment les violences sexuelles, c'est le Colosse aux pieds d'argile donc c'est une
09:25association exceptionnelle avec beaucoup de courage et de témoignages dans le monde du rugby notamment
09:30à supporter si j'ose dire autant au sens supportaire du mot. On parle d'Omerta et bien
09:39l'Omerta il y en a aussi avec vous Céline Noni puisque grand emporter à l'équipe vous nous
09:46proposez Alina l'amour secret de Poutine. Alors ça c'est accrocheur, je ne voudrais pas dire mais moi
09:51quand j'ai vu ça j'ai dit mais qu'est ce qui se passe et j'ai vite vite essayé de comprendre.
09:54Enquête sur la femme, là vous n'y allez pas de la morte, je ne sais pas si c'est les éditions
09:59Artaud qui ont mis ça mais enquête sur la femme la plus puissante de Russie, vous allez un peu loin
10:05là non ? Peut-être non non évidemment pas non c'est effectivement l'une des femmes les plus
10:12puissantes du pays parce qu'elle est la voix de la propagande depuis depuis quelques années depuis
10:182014, elle est à la tête d'un consortium de médias et à ce titre elle est effectivement
10:27la voix du pouvoir donc elle a une vraie puissance sur le pays. Alors ce qui m'intéresse Céline c'est
10:35votre travail d'écrivain, votre travail journalistique aussi c'est qu'il faut aller
10:38chercher l'info oui donc vous êtes sur place en Russie je pense que ce n'est pas tout à fait
10:44facile d'aller recueillir les vraies infos. C'est pas facile surtout que le alors j'ai vécu en Russie
10:51j'ai suivi toute la carrière d'Alina Kabayeva qui quand même est une championne olympique
10:56de gymnastique rythmique à Athènes en 2004 exactement c'est un sport que j'ai moi-même
11:04pratiqué donc les infos de ce côté là étaient assez faciles à obtenir en revanche l'écriture
11:10du livre s'est faite après le début de la guerre en Ukraine donc je ne suis pas retournée en Russie
11:14pour mener l'enquête notamment sur on va dire sur la partie la plus récente de sa vie et sa
11:23relation avec Vladimir Poutine tout ça s'est fait à distance. Relation sexuelle amoureuse ou
11:30relation d'influence ou les deux ou les trois ? C'est relation sexuelle, c'est sa maîtresse ça ne fait
11:41doute pour personne même si eux l'ont toujours nié enfin il se donne plus la peine de le nier
11:47d'ailleurs maintenant mais il y a assez peu de doutes sur le fait que par exemple les enfants
11:52d'Alina Kabayeva sont ceux de Vladimir Poutine. Jusque là ? Oui. Et avez-vous rencontré Alina ?
11:59Alors je l'ai rencontré quand elle était gymnaste donc depuis son premier titre de championne
12:06Europe en 98 jusqu'à la fin de sa carrière alors presque la fin de sa carrière moi j'ai la dernière
12:12fois que je l'ai rencontré ça devait être en 2005 ou 2006 et elle s'est arrêtée en 2007. Depuis non
12:18en revanche et c'est peut-être un signe aussi. Vous avez tenté de la contacter ? Elle est au courant du
12:23projet ? Elle est au courant du livre ? Alors je n'ai pas tenté j'ai appris en revanche que pour la
12:29contacter maintenant il fallait passer par le Kremlin ce qui est peut-être un signe quand même
12:32aussi. Est-ce qu'ils sont au courant ? J'aurais tendance à croire que oui puisque une de mes
12:40amies russes une ancienne gymnaste avant même que j'ai commencé à écrire le livre m'avait envoyé un
12:47message en me disant je suis désolée on m'a demandé de ne pas te parler et de couper tous
12:52les liens avec toi. Vous avez une anecdote dans le livre qui montre à quel point ce livre peut être
12:58dérangeant. Un chauffeur présidentiel que vous avez interrogé vous aura répondu j'ai des enfants
13:04je tiens la vie ? Oui c'est il faut bien comprendre que la relation entre Alina Kabayeva et Vladimir
13:12Poutine est le plus gros tabou du pays. Tout le monde le sait, tout le monde en parle mais à mot
13:19couvert. Le premier journal qui a commencé à en parler a fermé quelques semaines après l'apparition
13:27du premier article. Les gens vivent en exil. Comment vous vous enquêtez alors puisque vous
13:33pouvez pas plus aller là-bas pour écrire le livre ? C'est par des contacts par mail,
13:38par comment vous avez fait ? Par mail, par téléphone, ça a été de longs mois pour réussir
13:46à convaincre les personnes de parler. Beaucoup ont commencé en me disant non on t'aime beaucoup
13:54mais ça va pas être possible. C'est pour ça d'ailleurs que tous les témoins parlent de manière
14:01anonyme parce que eux sont sur place et prendraient des risques s'ils me parlaient ouvertement. Donc
14:12oui effectivement ça a mis du temps pour qu'ils acceptent de parler. Toutes les portes se sont
14:19d'abord fermées. Donc là on se pose la question de savoir si on va réussir à écrire ce livre. Et
14:25puis finalement avec la persuasion et heureusement j'ai gardé beaucoup de liens et de contacts là-bas
14:33de gens qui savent comment je travaille et qui m'ont fait confiance. Le bouquin je ne sais pas
14:39s'il a beaucoup de chance d'être traduit en russe ? Je ne sais pas mais j'ai donné une interview à la
14:44télé russe quand même. Mais en visio. Il serait intéressant de voir la suite. C'est donc Alina
14:52l'amour secret de Poutine en quête sur la femme la plus puissante du monde chez Artaud par Céline
14:58Noni. Donc deuxième troisième livre puisque je vous ai présenté également le livre de Ludovic
15:04Ninet tout à l'heure. Alors j'ai un camarade de télévision qui disait toujours vive le sport à la
15:10fin des émissions. Alors là c'est vive le sport. Là on a les agressions. Là on a la politique tordue.
15:16Et maintenant on en vient à une image encore joyeuse du sport. Caroline Buffo. Le 6 janvier 2023 est
15:24sorti aux éditions Fugue Thelma, quel beau nom, qui traite d'un sujet très particulier et aussi
15:30alors très présent dans le sport du haut niveau et notamment pourquoi pas dans la gymnastique dont
15:37on vient de parler. C'est l'anorexie. Alors cette fois-ci grande différence. Il s'agit d'une fiction.
15:44Vous avez la belle idée d'appeler cette lycéenne Thelma. Ça me rappelle de belles références
15:49cinématographiques. Je sais pas si ça vient de là. Et donc sous la coupe de son entraîneur, elle lutte
15:54contre l'anorexie qu'il lui impose. D'où est venue cette idée ? Alors en fait l'entraîneur c'est une petite
16:01voix tyrannique qui est dans sa tête. D'accord. C'est pas un vrai entraîneur. Même si effectivement
16:06Thelma c'est une lycéenne de 15 ans qui s'impose des privations de nourriture et des activités
16:11physiques ultra intenses, ce qui sont les deux composantes de sa maladie mentale qu'est l'anorexie.
16:18L'entraîneur c'est vraiment une petite voix imaginaire et au début du roman donc elle a
16:23un rapport au sport qui est complètement maladif et malsain. Elle va aller faire des
16:33kilomètres en pleine nuit, elle va s'immerger dans une piscine d'eau glacée pour aller faire
16:37des battements de jambes. Le sport c'est une sorte de péage pour obtenir le droit de manger ou d'amende
16:43si elle considère qu'elle a trop mangé. Et elle s'impose ça avec l'idée qu'au bout du chemin,
16:51quelque part, elle pourra vivre sa vraie vie. Et en fait quand vous avez commencé par dire encore
16:58une belle idée du sport là-dedans, ben oui en fait parce que finalement le sport dont elle m'a,
17:01tout au long du roman, elle va avoir un rapport au sport qui va évoluer. Elle a une lucidité
17:10intermittente malgré sa maladie, elle a envie de s'en sortir, elle a envie de se libérer de cet
17:15entraîneur imaginaire et pour le faire elle se met en tête de séduire son professeur de sport au lycée.
17:22C'est quelqu'un qui est tout à fait respectable et qui se met en tête de l'aider à sa manière et
17:29lui son idée c'est de l'inciter à prendre le départ d'un marathon. Et donc en fait on va suivre
17:35Thelma, donc c'est pas forcément la meilleure idée, c'est pas forcément l'idée que je recommanderais
17:39pour une jeune fille anorexique, en tout cas c'est l'idée qu'il a. Et au fur et à mesure du roman,
17:47le sport va aider Thelma à se donner un autre objectif, à se décentrer, à avoir autre chose
17:54que ce rapport maladif à son corps.
17:58Vous vous disiez d'une liberté dont nos deux précédents interlocuteurs doivent être très jaloux,
18:03parce que c'est ce qui est formidable dans la fiction. C'est vous, vous pouvez partir, mais il y a toujours un peu de nous
18:07dans ce qu'on écrit évidemment. Comment est née cette idée ? Pourquoi traiter ce sujet-là ? Vous, Caroline Bouffaud.
18:13Alors moi je me suis inspirée de mon anorexie, j'ai eu 18 mois d'anorexie à peu près à l'âge de Thelma,
18:20donc je connaissais la maladie. Et puis j'ai des souvenirs formidables de marathon, j'ai couru trois marathons
18:28en amateur, et j'ai un peu fait un amalgame pour créer une histoire autour de ça.
18:34Patrick Rousseau, donc vous parlez de ça, parce que ça rejoint quand même le thème de votre livre,
18:38même si on est dans la fiction. Alors moi ce que j'aime beaucoup, c'est cette idée de cet entraîneur qui a cette petite voix,
18:45parce qu'en fait, le sportif lui-même, et je pense que ça nous intéresse tous, va être aussi son automutilateur, j'allais dire.
18:56Mais c'est vrai que c'est aussi une démarche psychologique qui s'explique et qui se travaille et qui se guérit sans doute facilement.
19:02Mais ce n'est pas seulement l'entraîneur qui va obliger, je ne pense pas qu'il ait affaire à des gens dociles qui disent
19:09« je le fais parce que l'entraîneur veut ». Ça a un sens bien plus profond que ça.
19:14Ce que nous confirment très précisément les psychologues, d'ailleurs Karine Repérand, la co-étrice de mon livre « Le revers de nos médailles »,
19:24insiste beaucoup là-dessus, puisque nous sommes un sport à catégorie de poids, et donc en quelque sorte il y a une pression supplémentaire,
19:31une sorte d'opératif pour les sportives et les sportifs de contrôler leur poids, mais jusqu'à des choses totalement déraisonnables.
19:37C'est-à-dire que vous voyez des enfants de 16 ans qui perdent 8 kilos en l'espace de deux semaines.
19:42C'est vraiment des choses très, très scandaleuses. Ce sont des pratiques qui ont été, je ne sais pas, passées sous silence pendant des années,
19:49mais aujourd'hui elles sont révélées. Et si vous voulez, il y a aussi le cadre législatif qui est en train de bouger.
19:54C'est-à-dire qu'on le voit à la gymnastique pour la première fois l'été dernier, il y a quelques mois donc,
20:00un entraîneur a été condamné à de la prison avec sursis pour ce genre de faits que l'on considère être du harcèlement psychologique en fait, de la maltraitance.
20:09– Je veux presque faire un parallèle avec le dopage. Le corps dit « je suis fatigué, je n'en peux plus »,
20:14on va avoir affaire à des produits dopants, et dans ce cas-là, le corps est fatigué, il n'en peut plus,
20:20mais il va s'imposer quand même une perte importante de kilos, ce qui est complètement aberrant par rapport à l'équilibre de l'athlète.
20:26– Bien sûr.
20:27– Oui, et puis dans l'anorexie, il y a vraiment une jouissance justement de l'épuisement.
20:31C'est une sorte de… l'impression de surpuissance par rapport au reste du monde,
20:37parce qu'on arrive à pousser son corps au-delà de ce qu'il pourrait produire normalement,
20:41et donc c'est ce côté un peu… qui rappelle beaucoup les addictions en fait, c'est une forme d'addiction.
20:48– Une chose qui me plaît bien en plus, c'est que c'était une nouvelle maison d'édition.
20:51– Oui.
20:51– Donc c'est une aventure ça.
20:52– Tout à fait.
20:53– C'est le premier bouquin de la maison ?
20:54– C'est le premier roman.
20:55– Premier roman qui est nommé pour un prix.
21:00C'est une belle récompense déjà, l'essentiel n'est…
21:03Il y en a un qui a dit un jour l'essentiel c'est de participer, je ne suis pas complètement d'accord,
21:06mais là pour vous en tout cas c'est plus que l'essentiel d'être participé,
21:09c'est que cette participation est un succès, et je salue ici donc la maison d'édition FUG.
21:15Il en faut des maisons d'édition.
21:17Telma, alors dites-moi Telma, vous n'avez pas bondi quand je vous ai dit
21:20c'est une référence cinématographique, ça n'a rien à voir.
21:22– Non, c'est une référence personnelle.
21:23– D'accord, je pensais bien sûr à Telma et Louise, ce fameux film.
21:27– Ça marche aussi.
21:28– Voilà, mais ça marche aussi.
21:30Et en tout cas il y a une quête aussi,
21:31oui c'est vrai qu'il y a un parallèle qui peut être assez intéressant.
21:34Merci Caroline, n'hésitez pas à interagir sur les autres livres si vous le souhaitez.
21:40On va parler maintenant d'un roman encore, qui est daté de l'époque de…
21:49attendez, il faut que je le prenne d'abord, d'ancien corps,
21:51un boxeur tzigane qui osera défier les nazis.
21:55Alors dans les deux derniers bouquins que nous allons présenter,
21:57nous nous retrouvons dans la même époque de l'occupation et des nazis.
22:02Charles Aubert, un boxeur en couverture de votre livre d'ancien corps,
22:09alors je n'ai pas la maison d'édition, elle doit être là-dessous, Istia et compagnie.
22:13Alors racontez-moi comment est cette idée, inspirée je crois d'une histoire vraie.
22:17– Alors c'est une histoire totalement vraie,
22:19c'est l'histoire d'un boxeur qui s'appelle Johan Trollman,
22:22Rukeli c'est son surnom et Rukeli en langage tzigane, ça veut dire l'arbre.
22:27Voilà, parce que c'est quelqu'un qui était, comme on le voit sur la photo de couverture,
22:32c'est une photo de Rukeli, c'était quelqu'un qui était plutôt costaud.
22:37Et donc cette histoire est née d'un précédent roman,
22:44c'était mon troisième roman qui s'appelait Vers en bas.
22:48– On va rappeler que vous avez écrit Bleu Calypso, Rouge Tango et Vers en bas.
22:52– Et Talayuna aussi, et Vers en bas c'était un roman policier
22:57qui se passait dans le milieu des tziganes,
23:00et Rukeli faisait une première apparition,
23:02mais c'était une apparition très rapide, de l'ordre d'une demi-page.
23:08Mais c'est vrai que c'est un personnage qui est resté,
23:10c'est-à-dire qu'une fois qu'on finit d'écrire son roman,
23:14souvent les personnages disparaissent avec la vie éditoriale du roman,
23:21là ce personnage est resté.
23:23Entre-temps j'écris Talayuna, mon quatrième roman,
23:27et à la fin de Talayuna j'avais encore en tête Rukeli.
23:30– Il ne vous a pas lâché.
23:31– Il ne m'a pas lâché, donc je me suis dit,
23:32il va falloir peut-être que je lui consacre un peu plus de pages.
23:36Et j'ai bien fait de le faire parce que j'ai découvert un personnage,
23:41c'est un roman, mais tous les faits sont réels, se sont réellement passés.
23:45Ce qui est romancé, c'est bien évidemment ce que peut penser ce boxeur
23:51au moment où il lui arrive toutes ses péripéties,
23:55mais tous les faits sont réels.
23:59Et en fait c'est l'histoire d'un jeune boxeur tzigane allemand,
24:05qui devient lui champion d'Allemagne des Milhours en 1933,
24:09quelques semaines seulement après l'arrivée d'Adolf Hitler au pouvoir.
24:13Donc là vous vous doutez bien que ça ne va pas se passer de la meilleure des façons pour lui,
24:19puisqu'il n'incarne pas forcément l'image que veulent donner les nazis de l'Allemagne.
24:30Donc il se retrouve avec ce titre de champion d'Allemagne des Milhours.
24:34Donc vous voyez sur la photo, c'est quelqu'un qui a les cheveux frisés,
24:38il ressemble vraiment à un tzigane.
24:40– Il n'est pas blanc aux yeux bleus.
24:42– Non, il n'est pas blanc aux yeux bleus pour le coup,
24:44mais ce qu'il faut préciser c'est qu'à l'époque c'était quand même le chouchou de toute l'Allemagne.
24:48C'est-à-dire que tout le monde était dingue de cet homme,
24:53malgré le fait effectivement qu'il soit d'origine tzigane.
24:57Mais bon, les autorités nazies n'ont pas accepté effectivement
24:59que ce type représente l'Allemagne, et une semaine après son titre,
25:05ils ont décidé de lui enlever son titre avec un prétexte fallacieux.
25:12Et alors il y avait deux éléments qui lui reprochaient,
25:15c'était le fait qu'il avait versé des larmes quand on lui avait remis sa couronne de laurier.
25:19Donc ils trouvaient que c'était un comportement pas très viril,
25:23pas très arien, pas très allemand.
25:26Et la deuxième, on lui reprochait aussi de danser.
25:30C'est pour ça que le titre s'appelle « Danser encore ».
25:32– Son jeu de jambes n'était pas conforme aux normes allemandes.
25:35– Tout à fait, ils pensaient que ça tirait les idéaux allemands dans la boue.
25:40C'était textuellement ce qu'ils lui reprochaient.
25:42Et ils trouvaient qu'effectivement un boxeur qui dansait,
25:44là aussi, c'était pas très viril.
25:47Et justement, ils ont retiré son titre pour ces raisons-là.
25:53Mais comme la foule, le public de spécialistes de boxe en Allemagne
25:58ne comprenait pas trop ces décisions-là,
26:00ils ont décidé de le refaire combattre en juillet 1933,
26:03donc quelques semaines après son combat pour le titre.
26:07À nouveau pour le titre, mais entre-temps,
26:09ils avaient décidé de changer les règles de la boxe.
26:12Alors là, c'était incroyable, c'est ça qui est formidable.
26:16Ils ont décidé que dorénavant, on devrait boxer les pieds ancrés au sol.
26:21C'est-à-dire qu'on pouvait éviter les coups avec des mouvements du buste.
26:24– Pas de jeu de jambes. – Mais pas de jeu de jambes.
26:26– Mohamed Ali n'est pas champion du monde.
26:29Et donc lui, il savait automatiquement que…
26:32parce que lui, c'était sa principale force, c'était son jeu de jambes.
26:35Donc il savait qu'il ne pourrait jamais regagner ce titre.
26:39Donc il a décidé, c'est un des éléments principaux du roman,
26:45mais c'est que le début de son histoire finalement.
26:48Mais cet acte, il est quand même invraisemblable.
26:50Imaginez-vous, en juillet 1933, il combat pour le titre à Berlin,
26:55une des plus grandes salles de boxe d'Europe à l'époque.
26:57Et il décide, dans les vestiaires, de se faire teindre les cheveux en blanc
27:01et de se recouvrir le corps de talc.
27:04Et il arrive tout blanc, comme un clown blanc,
27:06dans un silence de mort, au milieu de tous ces nazis.
27:11Il y a toutes les personnalités du gouvernement et de l'administration de la boxe.
27:18Et il arrive tout blanc sur le ring.
27:21Et au bout de deux ou trois rounds, il décide d'arrêter de boxer, carrément.
27:26Et il se tient les bras ballants le long du corps
27:30et il se laisse mettre KO au bout du cinquième round.
27:33– Vous qui êtes tous des écrivains autour de cette table,
27:36il n'y a pas besoin d'aller chercher bien loin l'inspiration.
27:38L'histoire, la réalité, c'est un poncif épouvantable.
27:42La réalité est plus forte que la fiction, genre hors des poncifs.
27:44Mais celui-là, allez, je me l'accorde.
27:46Mais c'est extraordinaire.
27:47– Et l'horreur surtout.
27:49Et c'est vrai qu'on touche du doigt.
27:51Et puis tout le reste de son histoire est vraiment du même ordre.
27:56C'est-à-dire qu'il aura une fin funeste, vous vous en doutez bien,
28:00comme nombre de tziganes.
28:01Parce qu'au passage, ce livre parle aussi du sort que les tziganes ont eu
28:12au cours de la Deuxième Guerre mondiale.
28:13– On en parle peu.
28:14– On en parle très, très peu.
28:16Tout le monde connaît le nom du génocide des Juifs, c'est la Shoah.
28:19Le nom du génocide des gens du voyage s'appelle le Porajmos.
28:22Ça veut dire la grande dévoration, dans le langage des tziganes.
28:27Et il y a eu entre 200 000 et 1 million de personnes qui sont mortes dans les camps.
28:32Rupedi en fera partie.
28:33Mais même là, sa fin sera aussi hors normes.
28:37C'est-à-dire que l'horreur va le poursuivre tout le long de sa vie.
28:43Et sa fin sera vraiment aussi totalement incroyable.
28:47Et c'est vrai, comme vous le disiez à l'instant,
28:50il n'y a même pas besoin de romancer.
28:52Il suffit d'essayer de ne pas trahir ce qu'il a été, de raconter sa vie.
28:59Moi, j'ai fait un gros travail.
29:01Je me suis forcé de faire en sorte que l'écrivain disparaisse au profit du personnage.
29:07– Vous avez mis en scène en quelque sorte.
29:08Il faut mettre en scène pour accompagner le lecteur, évidemment.
29:11– J'ai essayé de ne pas en faire trop, vraiment, de raconter son histoire.
29:14Parce qu'il n'y avait pas besoin d'en faire des mille et des cents.
29:19– Mais il y a une phrase qui est troublante.
29:20« Ses coups de poing ne sont pas allemands ».
29:23– Oui, oui.
29:24Les journaux lui reprochaient ce genre de choses.
29:27Mais il était insulté constamment.
29:30Et c'était vraiment…
29:34On le sait, mais c'est vrai que…
29:36Mais ce qui est intéressant aussi de voir, c'est que c'est aussi le…
29:41Comment dire ? La façon dont se développe l'horreur, en fait.
29:46C'est-à-dire que, comme je vous le disais au démarrage,
29:49en 1933, il est encore, Ruckeli, adulé par la foule allemande.
29:54C'est-à-dire qu'eux, ça ne les gêne pas que ce soit eine Zigane
29:56qui représente l'Allemagne dans les combats de boxe internationaux.
30:00Ça ne les dérange pas encore, je devrais préciser.
30:04Et c'est très rapidement, bien évidemment, que l'horreur se met en place
30:09et que des gens comme lui sont mis dans des camps.
30:14– Charles Aubert, merci. Charles Aubert dans ses rancors.
30:17L'histoire vraie du boxeur Zigane qui osa défier les nazis,
30:21c'est chez Istia et compagnie.
30:24Vous l'avez en tout cas très bien raconté et je vous en remercie.
30:28Alors, on va rester dans la période de l'occupation.
30:31Je ne sais pas du tout qui gagnera le prix et vu toutes vos interventions,
30:36je pense que ça va être très très serré.
30:37Moi, Etienne Bonamy, ce n'est pas parce que je le connais,
30:39mais j'aime bien son titre.
30:41Si vous avez la référence des forçats de la route,
30:43c'est un très joli titre, d'autant plus que ça reflète totalement
30:47la réalité de ce livre qui m'a scotché d'abord parce que j'ai bien connu
30:53les gens qu'on retrouve dans ce livre.
30:55Et c'est un exemple extraordinaire de cette volonté politique
31:00qu'il y a eu après la première épuration 45-46,
31:03de dire sous l'impulsion du général De Gaulle ensuite,
31:06avant qu'il ne traverse le désert, si j'ose dire,
31:09de dire qu'il faut oublier et qu'il faut mettre le tapis dessus.
31:14Et j'ai quand même découvert un personnage que j'ai fréquenté
31:17de nombreuses années, qui était le patron de Paris-Nice,
31:19qui était un homme formidable.
31:21Et je découvre là, grâce à vous, Etienne Bonamy,
31:24que M. Jean Leliot a été le complice des Allemands pour créer,
31:31vous allez nous le raconter, un tour de France bis,
31:35puisque le tour de France s'abordait,
31:37il n'existait pas pendant l'occupation,
31:40et bien les Allemands ont eu l'idée d'égayer un peu la vie
31:43et de se rendre sympathiques en créant une course cycliste comparable.
31:48Racontez-nous.
31:49Qui s'appelle le circuit de France.
31:50Donc voilà, j'ai raconté une histoire vraie,
31:53que j'ai romancée évidemment,
31:54mais c'est une histoire vraie qui raconte ce circuit de France.
31:58Le tour de France, il a existé jusqu'en 1939,
32:00il a été supprimé évidemment en 1940, à l'été 40.
32:03Et le vélo et le sport, on l'a déjà évoqué,
32:06sont très importants, même pendant la période d'occupation en France.
32:10Et pour l'occupant, comme pour le gouvernement de Vichy,
32:14on va dire le gouvernement collaborationniste,
32:16même s'il y a deux Frances à ce moment-là,
32:18c'est très important d'avoir du sport,
32:20parce qu'on le voit même encore aujourd'hui,
32:22comment le sport peut être mis en valeur,
32:24pour plein de bonnes ou de mauvaises valeurs.
32:26Et ils ont décidé, ils voulaient demander à Jacques Godet,
32:29qui était le président du tour de France,
32:32de redémarrer le tour de France.
32:34Il n'a pas voulu en 1941.
32:35Il avait une très grosse pression.
32:37Et les Allemands et le gouvernement de Vichy
32:40ont trouvé un quotidien qui s'appelait la France socialiste,
32:44qui était alors ultra-collaborationniste,
32:47et qui avait un service des sports dirigé par Jean Leliot,
32:50qui était un ancien de l'Auto, le journal qui possédait le tour.
32:55Et l'Auto paraissait toujours pendant la guerre,
32:56mais ne parlait pas du tour de France donc.
32:59Et ils ont créé un tour de France,
33:01en l'imaginant à partir du mois de mai, très grand,
33:05c'est-à-dire passant partout, descendant dans les Pyrénées.
33:07Le tour de France avant la guerre, c'est déjà un grand barnum.
33:10Il y a une caravane commerciale, il y a beaucoup de coureurs.
33:14On en parle de partout et dans les pays européens.
33:17Et évidemment, ça, c'est le plan A.
33:20Et le plan B, c'est qu'on est en 1942,
33:23c'est au milieu de la guerre, les plus grandes restrictions possibles.
33:28Il y a la ligne de démarcation.
33:29Et ce qui est annoncé en mai 1942,
33:32comme on va le faire, vous allez voir ce que vous allez voir,
33:34devient fin septembre, une semaine.
33:37Et ils sont partis de Paris, ils sont allés au Mans, à Poitiers.
33:40Ils sont passés la ligne de démarcation au sud de Poitiers.
33:44Ils sont allés à Clermont-Ferrand, à Saint-Etienne.
33:46Une journée de repos à Saint-Etienne, quelle chance.
33:49Puis ils ont fait Saint-Etienne, Lyon, Dijon dans la journée,
33:52puis Dijon, Paris, donc huit jours.
33:55Je vous résume ça très rapidement,
33:57mais il faut savoir qu'à ce moment-là,
33:59il n'y a pas beaucoup d'argent, il n'y a pas beaucoup de moyens.
34:01Et cette caravane-là, elle est partie dans des conditions apocalyptiques.
34:04La météo, on est le 28 septembre, donc évidemment, il ne fait pas beau.
34:08Et il a fait très mauvais.
34:10Il n'y avait pas d'argent pour loger les coureurs et la caravane.
34:13Donc, il avait été demandé à chaque équipe,
34:15parce que le Tour de France, avant, se courait par équipe nationale.
34:18Ah oui, alors ça, c'est quand même...
34:19C'est un clin d'œil de l'histoire formidable,
34:20parce qu'ils ont été précurseurs en quelque sorte.
34:23C'est-à-dire qu'ils ont quitté les équipes nationales,
34:24parce qu'en pleine guerre, on ne pouvait pas trop le faire.
34:26France, Allemagne, Grande-Bretagne, Italie.
34:29Donc, ils ont fait des équipes de marque,
34:31qu'on va retrouver ensuite, quand le Tour de France
34:33va quitter les équipes nationales.
34:35Quelle erreur.
34:36Pour se retrouver avec des équipes de marque.
34:38Et pourquoi des équipes nationales ?
34:39Parce que le vélo, de fait, pendant la guerre,
34:41il y a des millions et des millions de vélos vendus.
34:43Et puis le sport, le vélo, reste un sport très populaire.
34:47Le Veldiv est rempli.
34:49Il y a des courses cyclistes dans le nord
34:50et des courses cyclistes dans le sud de la France.
34:53Donc, ils ont fait pression sur les équipementiers,
34:57Mercier, Elliott, Halcyon, pour leur dire
35:00vous prenez vos coureurs.
35:01Donc, tout le monde a été un petit peu poussé à faire.
35:03Donc, le gouvernement a fait pression sur les équipementiers
35:07qui ont sélectionné leurs coureurs.
35:09Alors, racontez-moi quand même la pression sur les coureurs,
35:11parce que c'est ce qui est formidable.
35:12En fait, je résume à peine, c'est STO ou Tour de France ?
35:16En fait, l'idée du livre, j'avais commencé à travailler dessus
35:19parce que je faisais un documentaire
35:20sur la ligne de démarcation tout court.
35:23Et je suis tombé, en cherchant des spots, comme on dit,
35:26je suis tombé sur cette histoire de course
35:27qui traversait à Chauvigny, la ligne de démarcation.
35:30J'ai cherché et puis en 2020,
35:33on a commémoré le centenaire et l'anniversaire de Émile Hidé,
35:37le dernier survivant.
35:39Il est toujours vivant.
35:39J'allais y venir.
35:40Émile Hidé, on va avoir une photo d'ailleurs.
35:42Je crois que vous êtes avec Émile Hidé.
35:43Émile Hidé a aujourd'hui 103 ans.
35:45Donc, faites du cyclisme, ça conserve.
35:48Émile Hidé, regardez, avec vous, c'était quand ça ?
35:51Ça, c'est au mois de juin.
35:53De juin. Donc, il a déjà 103 ans.
35:54Voilà.
35:55Et il est né en 1920.
35:58Et Émile Hidé est dans cette aventure.
36:00Il est dans cette aventure.
36:00Et quand j'ai découvert qu'on lui fêtait son anniversaire,
36:04j'ai essayé de prendre contact avec lui.
36:07Je suis allé chez lui.
36:09Et je vous promets, c'était une grande émotion.
36:11J'ai interviewé des gens dans ma carrière de journaliste,
36:13mais j'ai frappé à la porte.
36:14Et quand il a ouvert, je me suis présenté.
36:16Je ne savais pas quoi lui dire
36:17parce que moi, c'était pour un article au départ.
36:19Et cinq minutes après, il m'ouvrait des casiers, des photos.
36:22Je suis resté deux heures.
36:23J'ai dû le voir de sept, huit fois depuis.
36:26Il m'a raconté tout.
36:27Alors, sa mémoire a par moments des à-coups,
36:30comme quelqu'un de 103 ans.
36:32Mais ce qu'il m'a raconté de sa vie de cycliste,
36:35de ce qu'était cette course, et pas seulement,
36:38de ce qu'était l'occupation,
36:39ce qu'était la vie d'un jeune homme de 22 ans,
36:43qui s'arrangeait avec le sport,
36:47des petites primes, etc. pour vivre.
36:49Ça m'a tellement ému, je me suis dit, voilà.
36:51Alors, je ne voulais pas raconter la vie d'Emile Hidé,
36:53parce que c'était au-delà.
36:54Il va falloir s'y mettre.
36:55Il va falloir faire un bouquin sur Emile Hidé.
36:56Mais je me suis dit, cette course en elle-même,
37:00voilà, toutes les péripéties,
37:01parce qu'ils sont partis à 72 la veille,
37:0469 le matin du départ.
37:06Ils sont arrivés à 27 à Paris, six jours plus tard.
37:08Ça vous donne une idée de qui a pu abandonner.
37:11Ils sont montés dans un camion la nuit
37:12parce qu'ils s'étaient perdus.
37:13Il était trop tard.
37:16Quand j'ai écrit ça, j'étais faire une signature
37:18pendant le Tour de France dans le Sud.
37:19Et il y a quelqu'un qui m'a dit,
37:21oh là là, c'est incroyable.
37:22Quelle imagination pour un roman.
37:24J'ai dit, mais je n'ai rien imaginé.
37:26Je l'ai romancée comme on peut.
37:28En romancée parce que j'adore ça.
37:30Donc, j'ai trouvé des histoires qui pouvaient se passer autour.
37:33Donc, j'ai mis des personnages qui font le lion dans l'histoire.
37:36Mais tous les faits sont authentiques.
37:38C'est-à-dire qu'Emile Hidé,
37:40à qui je venais faire valider non pas l'histoire des autres coureurs,
37:43mais est-ce que c'est vrai qu'ils avaient dormi dans un séminaire?
37:46Est-ce que c'est vrai qu'ils ont dormi dans des trains couchette?
37:48Est-ce que c'est vrai qu'à 10 heures du soir,
37:51il y avait des gars avec des lampes qui leur montraient
37:52qu'il fallait monter dans les camions parce qu'ils étaient perdus?
37:55Il m'a tout validé.
37:56Et je me suis dit, mais cette histoire, c'est incroyable.
37:59C'est-à-dire que je n'aurais même pas pensé inventer une histoire aussi...
38:03Ce n'est même pas incroyable parce qu'elle est allée au bout de l'histoire.
38:07Et elle s'est arrêtée, évidemment, même si Jean Leliot,
38:11la presse collaborationniste, a donné des roulements de tambour
38:15pour dire que c'est extraordinaire.
38:17Le président du conseil, Pierre Laval, a dit qu'on le referait, etc.
38:21Évidemment, un mois après la fin de cette course, c'était le 4 octobre.
38:24Un mois après, les troupes alliées débarquaient en Algérie.
38:27Donc, les Allemands ont envahi la zone dite libre, si on peut dire, la zone sud.
38:34Les courses à étapes ont été supprimées.
38:35Et là, c'est devenu beaucoup plus difficile de faire du sport,
38:38ce que m'a confirmé Émile Hidé.
38:39Mais à cette période-là, il y a tout un spectacle sportif.
38:44Cerdan, il boxait au Veldiv.
38:46Mais oui, c'est la deuxième fois que vous évoquez le Veldiv.
38:49C'est là où c'est quand même l'histoire, ce côté tragique qui nous pique.
38:53Quand on entend que le Veldiv était plein pour les six jours,
38:56que Cerdan boxait au Veldiv.
38:57Et quand on sait ensuite ce qui se passe au Veldiv à cette époque,
39:01tout ce choc entre ces histoires est bouleversant.
39:06C'est ce qui m'a le plus étonné, parce que j'ai discuté avec des historiens,
39:10par mon éditeur, José Carlin, là, en exergue.
39:13Ils m'ont envoyé en me disant, vous parlez de ceci, vous parlez de ça.
39:15Et en fait, j'ai retrouvé, il y a des gens qui m'ont envoyé des mails, des photos.
39:19Parce que j'ai fait une recherche.
39:20Eh bien, on trouve tous les journaux de 42, vous les avez exactement.
39:24Et je ne voulais pas raconter 43, je ne voulais pas raconter 41.
39:27Et je suis allé faire, j'ai refait le parcours.
39:30Je suis allé dans des mairies, dans des petits musées.
39:32Je suis allé dans les archives départementales.
39:35Et à chaque fois, j'ai trouvé des documents.
39:38C'était même au-delà, avec le recul, j'aurais même pu écrire plus.
39:42Il y a des endroits où il y avait 1000, 2000 personnes.
39:45Alors évidemment, au bord de la route, il n'y avait personne parce qu'on est fin septembre.
39:49Ce n'était pas encore la rentrée des classes, mais il n'y avait pas grand monde et il pleuvait.
39:52Mais dans les villes où c'est arrivé, c'était un événement incroyable.
39:57Parce que c'était le Tour de France.
39:59Ça s'appelait le circuit de France parce que le nom était déposé.
40:02Mais regardez, ça fonctionne.
40:03C'était une énorme opération de propagande.
40:06Mais elle s'est retournée contre ceux, les initiateurs.
40:10Puisque comme je le raconte, il y avait vraiment le gouvernement allemand.
40:14Les troupes allemandes en France, l'ambassadeur avait mis des représentants à eux
40:20pour non pas vérifier si ça se passait,
40:22mais parce qu'il y avait des possibilités que ça se passe mal et ça retombait sur eux.
40:27J'ai raconté des histoires de résistance.
40:29J'ai découvert des choses, mais beaucoup plus importantes que...
40:32Moi, j'ai remis ça en scène avec des faits que je lisais dans la presse de l'époque.
40:35Voilà, et tout ça, ça a devenu une histoire incroyable.
40:38Et ce qui est intéressant, c'est que ça s'est enfoui à la libération.
40:43– C'est ce que j'allais dire.
40:43– Jean Leliou, il devient un journaliste respecté
40:47et il devient surtout un très bon organisateur.
40:50– Journaliste, très bon organisateur, journaliste respecté aux Parisiens,
40:53si mes souvenirs sont bons.
40:54– Il a été à l'horreur, il a été au miroir.
40:55– Bien sûr, bien sûr.
40:57Et moi, jeune journaliste qui arrive, on va dire, 30 ans après,
41:03je n'entends pas parler une seconde de tout cela.
41:06Et Jean Leliou, je crois que j'ai eu du respect pour cet homme-là
41:10qui a peut-être réfléchi un peu après tout ça.
41:13Mais Jean-Michel, son fils, était un grand journaliste de TF1.
41:17Mais on découvre, quand j'ai ouvert votre livre,
41:19je dis mais Leliou, mais Jean Leliou, le Leliou qu'on connaissait.
41:22– Alors, il a fait partie, à la fin de la guerre,
41:24il y a eu des règlements de comptes, évidemment,
41:28il y a eu des procès, il y a eu des auditions.
41:29Alors, il faut se méfier aussi des termes juridiques,
41:33mais il est passé donc en procès.
41:36Et c'est ce que Émile Hidé m'a raconté avec sa petite voix et tout,
41:40il m'a dit, c'est les journalistes qui ont défendu ces salauds.
41:43Je lui ai dit, mais monsieur Hidé.
41:44Et j'ai retrouvé, en effet, Jacques Godet qui haïssait Jean Leliou
41:48parce que Godet avait suspendu le tour, Leliou l'avait repris.
41:51– Bien sûr.
41:52– Et c'était le second de Godet sur le tour, Jean Leliou.
41:56– C'était le trêve.
41:57– Il avait couru, voilà, il le détestait.
42:00Ils sont allés témoigner et il y a beaucoup de grands anciens qui sont allés…
42:04– En faveur de Jean Leliou.
42:04– Qui sont allés témoigner en disant, mais bon…
42:07Et je pense, avec tout ce que j'ai lu là-dessus,
42:10que, évidemment, il était dans un journal collaborationniste
42:12dont les écrits sur le reste du sport étaient odieux, forcément.
42:17Mais je pense qu'il était porté par quelque chose de plus grand en disant,
42:20je fais le Tour de France.
42:22Peut-être qu'il aurait été le Félix Lévitan du Tour.
42:25Après, sans aucun doute, il serait devenu…
42:26– Sans aucun doute.
42:27– Parce qu'il savait organiser les courses.
42:29Et il est devenu, finalement, porté par l'ambition,
42:33poussé par sa direction, poussé par les autorités françaises de l'époque,
42:38à se dire, voilà, je suis calife à la place du calife.
42:41Et il monte une course avec une obstination.
42:44Les écrits, pendant la course, c'est des éditos
42:48où il y a la moitié dont on parle de la course et l'autre moitié,
42:50ah, vous ne nous faisiez pas compte, ah, ceux qui nous ont critiqués…
42:54Il y avait une sorte de revanche, sans doute, de son inimitié avec Godet
42:58et peut-être même avec d'autres personnes.
43:01Ça a donné, voilà, on aurait pu presque faire un livre que sur Jean Leliot
43:05ou sur Émile Hidé, mais tout cet ensemble, ces gens-là,
43:08à peu près 150 personnes, journalistes, techniciens et tout ça,
43:12qui ont été dans une histoire incroyable et de ce que j'ai relu droite à gauche,
43:16je me dis, ces gens-là, ils sont partis vraiment dans l'inconnu
43:18parce qu'ils ne savaient pas où ils allaient,
43:20ils ne savaient pas où ils allaient dormir,
43:21ils ne savaient pas comment ils allaient courir.
43:23Et on parlait tout à l'heure du règlement qui a changé,
43:26il y a même eu une anecdote, Jean Leliot,
43:28il y a un coureur qui s'appelait Marcel Tiguer,
43:31qui était un bon coureur, même après la guerre,
43:33qui a cassé son dérailleur, évidemment,
43:35le bris de matériel était rédhibitoire
43:38puisqu'il n'y avait pas moyen de réparer, il y avait très peu de choses.
43:41Il y avait deux camions d'assistance et il était tellement malheureux
43:45qu'il l'a fait monter sur une moto pour rejoindre la course,
43:49alors qu'il avait abandonné pour reprendre la course avec le vélo de quelqu'un d'autre.
43:51Évidemment, il a été mis hors course, mais tout était possible.
43:54Le but du jeu, c'était, il faut qu'on arrive pour qu'on montre que ça a marché.
43:57Et quand ils sont arrivés, il y avait 25 000 personnes au Parc des Princes
44:00qui les attendaient, 25 000 personnes.
44:02Donc, c'est un truc, voilà, c'est un peu fou.
44:05Et quand je dis les forcés, c'est que tous n'étaient pas volontaires.
44:07Loin de là, il y avait des Belges et des Français exclusivement.
44:10Il y avait deux Italiens de la zone sud.
44:13Mais ils se sont, voilà, le clin d'œil, évidemment, les forçats de la route,
44:16mais ils se sont mis dans cette histoire-là, un peu poussés, forcés.
44:22Pour ne pas partir à l'ESTO.
44:25Émile Hidé qui ne voulait pas le courir et qui était le champion de France
44:28quelques jours avant à Lyon, il est arrivé à la Croix-Rousse là-haut.
44:31Et voilà, il avait eu le malheur, pour lui, avec quelques autres,
44:36de s'ouvrir et d'aller courir la prime.
44:39Et il passait en frot du côté de Monceau, il passait la ligne de démarcation.
44:44Il courait, sauf qu'un coureur connu qui se retrouve à Avignon pour courir s'associe.
44:49Il est dénoncé par un journaliste-collaborationniste qui était au courant.
44:54Ils ont été interdits quand ils sont revenus.
44:55Côté zone occupée, ils ont fait de la prison.
44:58Et lui, il me disait, mais j'ai eu la peur parce que j'étais à Fresnes.
45:01Et Fresnes, à cette époque-là, c'était la prison où on gardait les gens
45:05avant de les envoyer, soit dans les camps, soit au peloton.
45:08Il avait une petite notoriété, s'en est sorti.
45:11Le jour où on lui a dit, si tu ne fais pas ça, il ne serait pas retenu en prison.
45:14Mais il aurait sans doute eu de gros problèmes.
45:16Voilà, tous ces gens-là vivaient avec.
45:17Lui, il me disait, c'est une façon de... C'est un petit statut.
45:21Lui, il m'a dit, j'ai traversé la guerre.
45:22J'ai traversé la guerre parce que j'étais connu.
45:25Donc, quand on a 20 ans et qu'on est un peu connu, on évite de partir.
45:28Ça ne révèle pas autre chose.
45:32Parce que, bon, voilà, là, on a le sport au temps de la collaboration.
45:39Tout à l'heure, on avait la discrimination d'un boxeur sous le régime du Troisième Reich.
45:46Ensuite, on avait l'abus d'une mineure comme tant de sportive, j'aurais envie de dire.
45:51Elle était abusée quand elle était mineure.
45:54Elle n'était pas mineure, pardon.
45:55Elle n'était pas mineure.
45:56Tant d'autres le sont.
45:58Les phénomènes d'anorexie, les pressions qu'exercent les sportifs.
46:03Nous, dans nos investigations, on a trouvé des viols, des agressions sexuelles, du harcèlement.
46:09Absolument toute la panoplie de l'horreur que peuvent vivre de jeunes sportifs
46:14dans leur quête vers le haut niveau.
46:16Et donc, si vous voulez, moi, je vois un point commun.
46:19Et là, pour le coup, ce n'est pas une question d'époque historique.
46:23C'est encore le cas aujourd'hui, à mon avis.
46:25Le sport et les sportifs ont toujours été instrumentalisés politiquement.
46:29Qu'on le veuille ou non, le sport est politique.
46:32Le sport est de la politique.
46:33Et ça ne va qu'en s'accentuant.
46:36C'est-à-dire qu'aujourd'hui, si vous voulez, le sport de haut niveau est une industrie.
46:39Une industrie globale et planétaire.
46:41Avec des fédérations internationales qui vendent des produits sportifs
46:46via les télévisions à des annonceurs.
46:48Ça représente des milliards.
46:49Donc, quel est le statut du sportif dans cette situation ?
46:53Et notamment du jeune sportif.
46:55Puisqu'en fait, ces mécanismes sont en train de se reporter sur les classes d'âge les plus jeunes.
47:01Toutes les fédérations internationales, plus ou moins sous le modèle FIFA en réalité,
47:06vendent les événements.
47:08On a désormais un circuit de grands événements planétaires qui se déroulent tous les mois.
47:16Il y a une vingtaine d'années, il y avait 5-6 grands rendez-vous internationaux dans mon sport.
47:22Aujourd'hui, il y en a tous les mois.
47:24On est obligé d'y aller parce qu'il y a un système de ranking list pour pouvoir se qualifier aux Jeux olympiques.
47:28Et c'est à péage.
47:29C'est-à-dire que chaque fois que vous rentrez dans cette compétition,
47:32la fédération nationale, pour le coup, doit abonder la trésorerie du système international.
47:37Ce système-là s'est reporté désormais sur les tout jeunes.
47:41Sur les juniors, sur les cadets.
47:42Et maintenant, ils parlent de le faire aussi sur les pré-cadets.
47:45Il y a une psychothérapeute très connue qui s'appelle Claire Carrier
47:49qui a dénoncé cet état de fait il y a une vingtaine d'années en disant
47:53que ce n'est pas seulement la maltraitance, c'est aussi le droit du travail et le droit pénal
47:58qui doit intervenir pour protéger les jeunes sportifs.
48:02Parce que si vous voulez, en fait, on a dépassé complètement le cadre du sport.
48:07On est dans une forme de commerce, en fait.
48:09Je ne pense pas que les parents soient les mieux placés pour protéger leurs enfants dans ce cas-là.
48:14Pour avoir vécu, comme vous l'avez dit tout à l'heure, proche de très grands champions,
48:19généralement, les parents sont plutôt prêts à pousser et même prêts à pousser
48:24pour des raisons économiques, pour des raisons de notoriété.
48:27Donc, je pense vraiment qu'il faut réguler au sein des fédérations
48:30et ne pas attendre la protection des parents qui ne sont pas tous dans le même sac.
48:33Mais j'ai tellement vu d'enfants de champions qui étaient prêts presque à doper leur enfant.
48:39La question, c'est l'avenir du sport.
48:41C'est comme pour le dopage.
48:43Il y a quelques années, on était effrayé de voir la multiplication des cas de dopage
48:47dans tout plein de nouvelles disciplines.
48:49Et on se disait, mais si on laisse faire, si on n'est pas capable de réguler ça,
48:53c'est l'avenir du sport, la pérennité du sport qui est en jeu.
48:56Parce que ça n'a plus de sens de se consacrer de cette manière-là,
48:59de manière complètement déraisonnable, alors qu'on sait qu'en in fine, voilà ce qui se passe.
49:04Là, avec ce dont on est en train de parler, c'est-à-dire, finalement,
49:07l'intégrité psychologique et physique des jeunes athlètes,
49:12de nouveau, le sens du sport est véritablement posé.
49:16Je prolonge en disant que les spectateurs que nous sommes, les amateurs de sport, quels qu'ils soient,
49:22ils ont aussi besoin qu'on leur donne de la compétition à voir.
49:26Et ce que vous disiez sur le boxeur, Jesse Owens, il est ovationné par le stade à Berlin en 1936.
49:34Il est ovationné.
49:35Et celui qui l'aide, c'est Lung, le sauteur.
49:38Donc, je veux dire, il y a la manipulation que tentent les pouvoirs, et parfois réussissent les pouvoirs,
49:44et il y a aussi comment la foule, le peuple, les admirateurs sont contents de s'en emparer.
49:52Moi, je connaissais des gens qui allaient aux Veldives il y a quelques années,
49:56enfin, qui étaient allés aux Veldives.
49:58Ils m'ont raconté, ils avaient des programmes, j'avais vu des programmes de 39, 40.
50:04Et je lui disais, mais monsieur, vous êtes allé, oui, mais vous êtes allé à telle époque, oh, j'ai eu ça.
50:09J'ai dit, c'était comment, le Veldive ? Parce que ça a rouvert début septembre.
50:13Ils me disent, tout avait été nettoyé.
50:15C'est-à-dire que la personne, mais les gens, nous, avec 80 ans après, on se dit, les Jeux de Berlin,
50:22évidemment, le Veldive et plein de situations, même l'Argentine 78 avec les généraux.
50:28On a le recul de l'histoire de dire, mais comment les gens ont pu faire ça ?
50:31Quand j'ai demandé à Émile Hidé ce qu'avait été le Veldive, ce jour-là, il courait à Tours,
50:36les demi-finales des championnats de France sur piste, voilà.
50:40Il m'a dit, mais personne ne nous en a parlé, on l'a pris.
50:42Je ne le pense pas.
50:43J'ai regardé toute la presse des 17, 18, comme on regarde aujourd'hui.
50:48Tout est mentionné le lendemain.
50:50Il n'y a rien.
50:50C'est-à-dire que j'étais sur des semaines et des semaines.
50:53Il n'y a même pas un moment où on dit, il y a eu des incidents, il y a eu un...
50:57C'est-à-dire qu'il faut raconter les histoires avec comment les gens les ont vécues.
51:02Moi, je m'attendais à ce qu'ils me disent, c'est terrible,
51:03parce que lui qui est cycliste, qui courait au Veldive, il m'a dit...
51:06– Vous faites bien de faire ce parallèle.
51:07Aujourd'hui, une histoire comme celle de cette course cycliste qui veut être Tour de France
51:11avec une presse collaborationniste qui l'organise,
51:15entre les réseaux sociaux et tout ça, la personne, c'est fini.
51:18On vit quand même dans un monde radicalement différent
51:22et peut-être tant mieux au moins pour ça, pour la transmission.
51:24– Il y a une autre question, dans le prolongement de ce que vous venez de dire.
51:28Il y a une autre question très actuelle pour le coup,
51:31c'est qui contrôle et qui a le devoir d'intervenir ?
51:36Parce que ce n'est pas le petit monde du sport, les clubs qui sont en capacité de faire ça,
51:40c'est les forces régaliennes d'un État qui sont capables d'intervenir dans ce cas-là.
51:45Quelle est la question que pose Sarah Abitbol avec Emmanuel Anison
51:49et la ministre Roxana Maracini ?
51:51– Au printemps dernier, lorsqu'elle est sur le plateau de France 2,
51:56en prime time, quasiment, c'est 9h30 du soir,
52:00après la projection de son film, la question qu'elle pose c'est qui savait quoi ?
52:06Elle dit, j'ai appelé jusqu'aux plus hautes autorités du ministère
52:11pour expliquer mon histoire et ce qui m'arrivait,
52:13et en gros, elle aurait dit, elle aurait entendu,
52:16on vous conseille d'oublier parce qu'on ne peut rien faire pour vous.
52:20Et donc la véritable question, telle qu'elle est posée aujourd'hui,
52:24pas en 36, c'est celle-là de mon point de vue.
52:28– C'était passionnant, je vous recommande, je vais quand même vous les montrer à nouveau.
52:32Alors l'absent du jour, Ludovic Ninet, donc l'affaire Cécillon,
52:37Chantal, un récit d'un féminicide.
52:40Nous avons également Patrick Roux, donc le revers de nos médailles chez Duneau.
52:44Alina, l'amour secret de Poutine, Artaud.
52:49Les forcés de la route d'Etienne Bonamy, chez Enexergue.
52:54Dans ces rancors de Charles Aubert, c'est à chaque fois que je découvre Istia et compagnie.
53:01Et Caroline Bouffaud nous a proposé Thelma aux éditions FUG.
53:05Je vous disais au début de cette émission que c'était peut-être mon émission préférée de l'année.
53:09Eh bien ça ne changera pas, grâce à vous.
53:11Merci, et puis que le meilleur gagne, comme on dit.
53:14Mais entre nous, tout est passionnant et soyez fiers d'être sélectionnés
53:18parce que je les vole d'ailleurs.
53:20Je pars en courant et je vous remercie.
53:23Et vous, là-bas, je vous donne rendez-vous très bientôt pour une nouvelle édition,
53:27non pas de Sportscriptum, mais des grandes questions du sport.
53:30À bientôt.
53:48Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org

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