L'impossible prouesse humaine qui pose question | Documentaire Complet | Architecture, Antiquité

  • il y a 4 mois
Découvrez les mystères autour de 5 chambres taillées dans le granit il y a plus de 2300, à Barabar en Inde, véritable prouesse technologique.

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Genre : Film Complet en Français, Documentaire, Cvilisation,, Société, Art, Histoire, Inde, Architecture
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Transcription
00:00:00Je n'ai jamais vu quelque chose de tel, je n'ai jamais entendu parler de quelque chose de tel.
00:00:08Je pense que ces grottes sont uniques et simplement exceptionnels.
00:00:14Une cathédrale et ses grottes, ce n'est pas la même chose.
00:00:17C'est moins compliqué à faire la cathédrale que ça.
00:00:20C'est fait dans du granit, c'est quand même un des matériaux les plus durs.
00:00:24Pour moi, ce n'est pas une grande précision, c'est d'une extrême précision.
00:00:29On peut refaire une cathédrale avec 300 tailleurs de pierre bien motivés,
00:00:33mais barre à barre, c'est actuellement à la mesure de l'impossible.
00:00:39Bienvenue au cœur de l'Inde ancienne, dans un chapitre oublié de son histoire,
00:00:43qui pourrait bien changer l'histoire.
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00:01:53De tous les pays que nous avons eu la chance de visiter, l'Inde est probablement celui
00:02:00qui nous a le plus impressionné.
00:02:02De ses enfants des rues à ses incessants concerts de klaxons sur ses routes saturées,
00:02:12l'Inde est une terre inclassable et la visiter, une expérience unique.
00:02:15Leader technologique mondial et pays le plus peuplé au monde avec plus d'un milliard
00:02:24trois cents millions d'habitants, pont entre temps ancien et modernité, entre science
00:02:29et spiritualité, l'Inde est porteuse d'une riche histoire dans laquelle les Vedas, au
00:02:33cœur de la tradition hindoue, constituent un véritable trésor littéraire et spirituel.
00:02:37Ses vieux écrits rédigés en sanskrit, langue ancienne et sacrée de l'Inde, sont composés
00:02:43de rituels, d'hymnes, de prières et de connaissances philosophiques qui ont considérablement
00:02:48influencé la pensée indienne.
00:02:49Les plus célèbres sont probablement la Bhagavad Gita et le Mahabharata où quelques-uns ont
00:02:56cru voir le portrait d'une Inde ancienne fantastique et technologique.
00:02:59Mais ces récits, comme tous ceux fondateurs des peuples du monde, sont considérés comme
00:03:04mythologiques et comme le reflet de l'imagination fertile des anciens auteurs.
00:03:08Comment pourrait-il en être autrement ? Science et technologie avancées dans un lointain
00:03:12passé sont, selon notre histoire, rigoureusement impossibles.
00:03:15Avant ces récits fondateurs, nous étions des humains préhistoriques, de simples primitifs,
00:03:23comme nous l'aurions été durant près de 220 000 ans, vivant simplement de chasse
00:03:27et de cueillette.
00:03:28Bien ancré par notre histoire, le sens du progrès démarre de la roue, il y a quelques
00:03:37milliers d'années, pour aboutir au smartphone.
00:03:39La première et unique révolution industrielle humaine a eu lieu en Europe, il y a un peu
00:03:47moins de deux siècles.
00:03:48Dans le cas contraire, nous aurions évidemment retrouvé des traces d'industrie, mais l'Inde,
00:03:53comme tous les autres pays, n'ont rien laissé de tel.
00:03:55C'est du moins ce que nous croyons.
00:03:57Toujours selon notre histoire, les chambres de Barabar et Nagarjuni seraient de simples
00:04:02abris, offerts il y a 2300 ans par des rois à une secte de mandyans, afin qu'ils se
00:04:07protègent de la pluie pendant la mousson.
00:04:09L'affaire est pour ainsi dire classée, car contrairement à d'autres sites archéologiques
00:04:13de la région, elles ne sont ni grandioses, ni richement décorées, et c'est peut-être
00:04:18la raison pour laquelle elles sont si peu connues, même des Indiens.
00:04:21Mais c'est l'arbre qui cache la forêt, car lorsqu'on les investigue en profondeur,
00:04:28elles se révèlent si exceptionnelles qu'elles pourraient constituer les marques d'un passé
00:04:32de l'humanité très différent de celui que l'histoire nous rapporte.
00:04:35Parce que nous ne possédons aucune archive concernant la conception, la fabrication ou
00:04:41la fonction de ces chambres.
00:04:42Parce qu'elles sont uniques, jusqu'à preuve du contraire, de telles prouesses n'ont
00:04:45jamais été reproduites ni en Inde, ni ailleurs dans le monde.
00:04:48On ne peut pas se lancer sur un travail comme ça, du jour au lendemain, en disant « tiens,
00:04:52on va faire une grotte ». Ce n'est pas possible, ce n'est pas un coup d'essai.
00:04:56Parce que les inscriptions les plus anciennes parlent de donations et non de fabrication.
00:05:05Parce qu'elles ont été réalisées avec une précision digne du monde industriel moderne.
00:05:09C'est une précision hallucinante.
00:05:11Aller taper sur du millimètre, on va faire ça sur de l'auscultation, on va faire ça
00:05:16sur de la surveillance d'ouvrages d'art.
00:05:17On a du mal à imaginer sur des tels volumes.
00:05:19Oui, c'est ultra précis.
00:05:21Parce que leur forme ne révèle leur réelle complexité qu'avec des scans 3D.
00:05:25Effectivement, on ne suit pas une forme parfaite, mais on suit une répartition, un volume symétrique
00:05:31parfait, qu'on soit à droite, qu'on soit à gauche, en haut ou en bas.
00:05:35Parce que leur conception fait intervenir des savoirs mathématiques très au-delà
00:05:38de ceux attribués à l'indentielle.
00:05:40Il faut maîtriser le nombre de pi avec beaucoup de décimales après la virgule.
00:05:44Et parce qu'elles jouent avec les fréquences sonores comme aucun autre endroit au monde,
00:05:49et que c'est peut-être là que réside la véritable clé de leur mystère.
00:06:01C'est en janvier 2017 que nous les avons visités pour la première fois.
00:06:08Inscrite au patrimoine mondial de l'UNESCO, les chambres se répartissent sur les sites
00:06:18archéologiques de Barabar et Nagarjuni.
00:06:19À une quarantaine de kilomètres de Bodhgaya, ville célèbre pour le bouddhisme, car c'est
00:06:25ici que le Bouddha aurait vécu son illumination.
00:06:27Après environ une heure et demie de route, on accède au site de Barabar par un long
00:06:51escalier qui nous mène à ce que les géologues appellent un dos de baleine.
00:06:55Une immense carotte de granit, d'une centaine de mètres de long.
00:06:59À l'intérieur, trois chambres ont été creusées et taillées.
00:07:03Par commodité, nous avons conservé pour les chambres les noms employés dans notre
00:07:07film précédent, mais il n'est pas certain qu'ils soient originels.
00:07:10La première en arrivant sur le site est Karan Chopar.
00:07:16L'entrée est un passage de forme trapézoïdale, plus large en bas qu'en haut, qui pénètre
00:07:21directement dans la roche-mer.
00:07:22On aperçoit des inscriptions, gravées dans ce passage, qui débouchent sur une salle
00:07:27rectangulaire à sa base, dont les parois sont très légèrement inclinées.
00:07:30Sur la largeur, un banc, solidaire de la roche, a été taillé.
00:07:35Malgré quelques imperfections, elle est tellement polie qu'elle paraît presque métallique
00:07:42à la caméra.
00:07:43La voûte semble cylindrique.
00:07:49Passons maintenant sur l'autre versant de ce dos de baleine.
00:08:02Voici l'entrée de la chambre Sudama, différente de la précédente parce qu'elle possède
00:08:13d'abord un renfoncement, que les tailleurs de pierre appellent un premier nu, dans lequel
00:08:17le passage est taillé.
00:08:19Également gravé d'inscriptions, il mène à une salle rectangulaire, surplombée d'une
00:08:24voûte cylindrique et des parois lisses et brillantes, légèrement inclinées elles aussi.
00:08:28Dans cette paroi, on aperçoit une niche, pas terminée et pas d'époque.
00:08:32La paroi qui lui fait face possède une forme courbe et est coiffée d'une portion de
00:08:40coupole qui la fait ressembler à un champignon.
00:08:43Au centre de cette paroi, un passage mène à un dôme avec un plafond en forme de demi-sphère.
00:08:50À une trentaine de mètres de Sudama, toujours taillée dans le même dos de baleine, se
00:09:07trouve la chambre Lomas Ritchie.
00:09:08Elle est la seule à posséder un porche, joliment orné et très circulaire, souvent
00:09:17la première photo que l'on voit lorsque l'on fait des recherches sur ce site.
00:09:20Contrairement aux deux précédentes, l'encadrement de l'entrée est courbe, il est percé d'un
00:09:27passage trapézoïdal qui, lui, ne comporte pas d'inscription.
00:09:30Cette chambre inachevée semble être une copie de Sudama, à moins qu'elle soit un
00:09:36essai raté.
00:09:37Trois des parois apparaissent quasiment finies, tandis que le reste de la chambre en est encore
00:09:42aux grosses œuvres.
00:09:43Le passage qui mène au dôme est presque terminé, mais le dôme en est bien loin.
00:09:50On observe partout des traces anarchiques de piques, un outil utilisé pour dégrossir
00:09:56la forme en enlevant de grosses portions de matière.
00:09:59Depuis ce dos de baleine, un chemin mène à la dernière chambre, isolée, de vice
00:10:10vase au prix, qui est également inachevée.
00:10:11Elle diffère totalement des autres par son entrée.
00:10:20C'est une sorte de vestibule, quasi terminée, car ses parois sont polies mais pas le sol.
00:10:24Une inscription est gravée sur la paroi de droite.
00:10:29Un passage trapézoïdal débouche sur une pièce pas assez avancée pour déduire la
00:10:36forme finale, probablement circulaire.
00:10:38A 1,6 km à vol d'oiseau du site de Barabar se trouve celui de Nagarjuni, un empilement
00:10:58naturel de centaines de roches formées sur des millions d'années qu'on appelle un
00:11:02chaos granitique.
00:11:03De ce côté, au terme d'un escalier assez raide, la chambre Gopika a été taillée
00:11:11à l'intérieur d'une roche massive.
00:11:13Un passage trapézoïdal sans encadrement, ressemblant à celui de Karan Chopar, mène
00:11:24à une grande salle de forme ovale.
00:11:26Ses parois inclinées sont à nouveau lisses comme du verre et s'avoutent harmonieuses.
00:11:33Une longue fissure la traverse dans toute sa longueur.
00:11:38De l'autre côté de ce chaos granitique, au terme d'un long chemin, on arrive à
00:11:57la chambre Vapiyaka.
00:11:58Elle possède une entrée similaire à celle de Sudama, faite d'un encadrement rectangulaire
00:12:05suivi d'un passage trapézoïdal dans lequel des inscriptions sont gravées de part et
00:12:08d'autre.
00:12:09Orientée au sud, c'est la plus lumineuse de toutes.
00:12:13Ses parois également inclinées sont surplombées d'une voûte cylindrique.
00:12:16Dans la roche juste à côté, le passage d'entrée de Vatatika se trouve un peu enclavé.
00:12:37De sections trapézoïdales du même type que ceux de Karan Chopar et Gopika, il nous conduit
00:12:46à une salle entièrement courbe, en forme harmonieuse de chaussons, dont les parois
00:12:49sont à nouveau totalement lisses.
00:12:51Ce qui nous fait donc un total de 7 chambres, 5 terminées et 2 inachevées, qui auraient
00:13:18été offertes il y a environ 2300 ans, soit en moins 300 avant notre ère.
00:13:22Nous avons été très surpris par leurs parois dressées, lisses et planes comme des plaques
00:13:36de marbre, si lisses et polies qu'on s'y reflète presque comme dans un miroir, alors
00:13:40qu'elles ont pourtant été taillées dans le granit, une des roches les plus dures.
00:13:43Vous n'êtes probablement pas plus familier avec ce jargon de tailleur de pierre que nous
00:13:49l'étions au début de nos recherches, alors expliquons tout d'abord ce qu'est une surface
00:13:53dressée.
00:13:54C'est une surface brute qu'on a percutée pour la rendre à peu près plate.
00:13:57Il existe une grande différence entre une surface lisse et une surface plane.
00:14:03Lisse, c'est lorsque c'est doux au toucher, que ça a été poncé et poli, alors que
00:14:08plan, ça signifie que c'est totalement plat.
00:14:10Ça peut être lisse mais pas forcément plan, et ça peut être plan mais pas forcément
00:14:16lisse.
00:14:17Mais à Barabar et Nagarjuni, c'est à la fois lisse et plan, ce qui est apparemment
00:14:24une configuration unique dans l'art rupestre, c'est-à-dire taillée à l'intérieur de
00:14:28la roche.
00:14:29En parler est une chose, mais mesurer les surfaces en est une autre, et pour ça nous
00:14:34employons entre autres outils un rugosimètre.
00:14:37Mais ceux qui ne nous connaissent pas doivent certainement se demander ce qu'est cet appareil,
00:14:41ce que nous faisons avec, et qui nous sommes.
00:14:48Nous sommes une équipe passionnée par l'étude de sites archéologiques anciens, auxquels
00:14:52nous avons déjà consacré plusieurs films, avec un regard différent, davantage technique
00:14:56qu'historique.
00:14:57Car lorsque les écrits sont muets, les édifices parlent, leur conception et leur réalisation
00:15:10témoignent du niveau scientifique et technique de leurs auteurs, et racontent leur rapport
00:15:14au monde.
00:15:15Par leur étonnante complexité, les chambres de Barabar et Nagarjuni sont une véritable
00:15:21énigme, dont vous allez bientôt prendre toute la mesure.
00:15:24Confronté à une énigme sans solution apparente, le philosophe et mathématicien français
00:15:28René Descartes recommandait de se défaire de ses a priori et préjugés, c'est-à-dire
00:15:33tout ce qu'on croit savoir sur un sujet, pour faire table rase et repartir de zéro.
00:15:40Face à ce genre de surface, nous ne nous interdisons donc pas de penser au-delà de
00:15:44l'ouvrier en tenue légère, équipé du simple marteau burin, qui jalonne les représentations
00:15:49du passé, et capable de prouesses qui défient notre raison moderne.
00:15:53Et si notre histoire avait oublié ? Comme le mécanisme denticitaire, par exemple,
00:15:58présenté dans notre film précédent, disparu depuis 2000 ans, avant qu'on en retrouve
00:16:02un exemplaire au fond de la mer.
00:16:04Un mécanisme qui remet en question tout ce qu'on croyait savoir du niveau scientifique
00:16:08et technique des grecs anciens.
00:16:10Le pire est que, non-contente de l'avoir oublié, l'histoire ne prenait pas au sérieux
00:16:15les auteurs qu'il évoquait.
00:16:17Mais revenons à notre rugosimètre.
00:16:20Cet appareil permet de mesurer la rugosité d'une surface, soit les écarts entre ses
00:16:24reliefs au micron ou micromètre, c'est-à-dire au millième de millimètre.
00:16:29Pour vous expliquer son fonctionnement, nous avons fait appel à Michael Toutain, un ingénieur
00:16:33du fabricant de notre appareil.
00:16:35Le SJ210 se compose d'un corps, d'un stylet à patins, pour prendre des rugosimètres
00:16:41On mesure ce qu'on appelle la rugosité.
00:16:43C'est une mesure d'état de surface d'un produit.
00:16:47Le RZ est un type de mesure.
00:16:49Plus sa valeur est petite et plus la surface est lisse, et sans défaut.
00:16:53Le granit est composé de quartz, de feldspat et de mica.
00:16:57Le quartz étant le plus dur et le plus difficile à rendre plat et à polir, mesurer la précision
00:17:02de la surface sur le minéral le plus dur, c'est la meilleure mesure.
00:17:06En 2017, lors de notre première visite, le géologue Eric Gontier avait passé le rugosimètre
00:17:11à Barabar et Nagarjuni, et voici ce que nous avions obtenu.
00:17:18Pour apprécier ces résultats, il nous faut un point de comparaison.
00:17:21Nous avons demandé à Michael de passer le rugosimètre sur ce que l'on appelle un
00:17:25système d'échantillonnage.
00:17:27Le système d'échantillonnage est un système d'échantillonnage qui est composé de
00:17:31Il nous faut un point de comparaison.
00:17:33Nous avons demandé à Michael de passer le rugosimètre sur ce que l'on appelle un marbre,
00:17:37bien que ce soit une plaque de granit polie industriellement.
00:17:40On va faire une mesure sur un marbre fabriqué par un procédé industriel qui va être rectifié
00:17:45et donc c'est du granit.
00:17:47On va lancer notre mesure tout simplement.
00:17:52On peut en même temps voir la valeur de Rz de 9,492.
00:17:57Ces marbres sont faits par des machines et on s'aperçoit que ce sont des gouttes en verticale
00:18:04faites à la main avec des valeurs de Rz de 9 fois moins imposantes.
00:18:10C'est plutôt incroyable quand même.
00:18:13Pour continuer dans les comparaisons, cette plaque de marbre a été polie de cette manière
00:18:17avec cette machine.
00:18:20Et lorsque l'on passe le rugosimètre dessus, voici ce que l'on obtient.
00:18:25Et sur le verre d'une vitre ?
00:18:31Nous avons refait environ 80 mesures à barres à barres en avril 2023.
00:18:43Voici la meilleure obtenue dans Sudama, une chambre qui a 2300 ans, au moins.
00:18:49Soit à peine plus que le verre d'une vitre et presque 20 fois plus précis que celle de cette plaque de granit,
00:18:54polie industriellement.
00:19:04C'est absolument incroyable.
00:19:07Vous croyez que ça a été fait au laser ?
00:19:11Ça n'a pas été fait au laser.
00:19:13Ça s'est fait à la main.
00:19:16Face à de tels parois, on ne peut en effet s'empêcher de penser à l'emploi de machines puissantes.
00:19:21Ce qui simplifierait considérablement la question.
00:19:25Mais à ce stade de l'enquête, de petites imperfections semblent orienter vers l'utilisation d'outils guidés par la main de l'homme.
00:19:31A un niveau de précision étonnant, il faut bien l'admettre.
00:19:36Le résultat de 9,492 ne signifie pas que nous serions aujourd'hui incapables de polir du granit aussi précisément qu'à barres à barres.
00:19:43Mais tout simplement que cela suffit amplement pour vérifier la conformité de certaines pièces industrielles.
00:19:51C'est dire le niveau de soin apporté aux parois de ces chambres.
00:19:54Des parois quasi verticales, comme le fait remarquer Michael Toutain.
00:19:57Car ce n'est pas du tout la même chose de polir des surfaces dans le sens de la gravité,
00:20:01que verticalement, ou pire, dans les voûtes.
00:20:04Mais pour mieux apprécier le caractère exceptionnel du travail effectué à barres à barres,
00:20:08allons visiter le site de Son Bandar.
00:20:14Son Bandar
00:20:19Sur ce site, on trouve deux chambres qui ont été datées à partir d'inscriptions aux alentours du 3e ou 4e siècle de notre ère,
00:20:25soit plus de 600 ans après barres à barres.
00:20:29Le passage d'entrée de la première est de section trapézoïdale.
00:20:33Il ressemble à celui de Karan Chopar, de Gopika et de Vadatika.
00:20:38Cette chambre est aujourd'hui surmontée d'une structure de béton,
00:20:41probablement pour la renforcer, car à droite, la voûte d'une seconde chambre a été totalement brisée,
00:20:46laissant le volume à ciel ouvert.
00:20:50La première chambre comporte une fenêtre, mais vu l'état dans lequel est la seconde,
00:20:54on ignore si elle en possédait également une.
00:21:00On y aperçoit des sculptures, ainsi que des inscriptions sur lesquelles repose la datation du site.
00:21:06Mais l'humain ayant la fâcheuse habitude de remplacer le nom de ses prédécesseurs par le sien,
00:21:11cette datation est contestée par un indologue, c'est-à-dire un archéologue dédié à l'Inde.
00:21:23Elles ont été taillées dans un schiste métamorphisé,
00:21:26une roche à priori moins dure que le granit, mais également moins homogène,
00:21:30ce qui explique que certaines parties soient davantage polies que d'autres.
00:21:35Mais la vague ressemblance avec Barabar et Nagarjuni s'arrête là.
00:21:41Les parois ne sont ni totalement planes, ni totalement polies, pas inclinées,
00:21:45le sol n'est pas horizontal et loin de l'être.
00:21:48Bref, le travail n'a pas grand-chose à voir.
00:21:51Ce chantier aurait pourtant été réalisé plus de 600 ans après ceux de Barabar et Nagarjuni.
00:22:01Le sens du progrès tel qu'on le connaît prend une belle claque.
00:22:04Mais comment expliquer cela ?
00:22:07Très simplement par le fait que les techniques peuvent rapidement se perdre à cause d'invasions,
00:22:11de guerres, d'épidémies ou de changements de pouvoir.
00:22:14Raison pour laquelle aucune chambre taillée n'égalera jamais plus celle de Barabar et Nagarjuni.
00:22:19Aucune chambre ? Non.
00:22:21Il en existe une dernière que nous avons mis un peu de temps à localiser.
00:22:25Ceci afin d'éviter une ou plusieurs journées perdues,
00:22:28car en Inde, les distances ne s'apprécient pas en kilomètres, mais en durée de parcours.
00:22:38À environ 70 kilomètres de Barabar, taillée à l'intérieur d'un rocher totalement isolé,
00:22:43auquel a été adossée une construction moderne, se trouve la chambre de Sitamari.
00:22:51Très petite, environ 5 mètres sur 3,5 mètres,
00:22:54sa forme pourrait être un croisement entre celle de Vapiaka et celle de Vadatika.
00:23:00Comme elle est utilisée religieusement de nos jours,
00:23:03il nous a été difficile de l'investiguer plus profondément.
00:23:09Les surfaces ont été bien dégradées et n'apparaissent pas en polymiroir comme à Barabar,
00:23:13car elles sont recouvertes de suie,
00:23:15ce qu'au passage, on ne voit ni à Barabar, ni à Nagarjuni.
00:23:20Elle est dépourvue d'inscriptions,
00:23:22et personne ne sait si elle faisait partie du lot des chambres de Barabar et Nagarjuni,
00:23:26ni si elle a été réalisée avant ou après.
00:23:34Il est difficile de trouver des informations détaillées à son sujet,
00:23:37et surtout vraies, car voici comment l'a représenté l'archéologue Percy Brown dans son livre.
00:23:43Article repris ensuite par d'autres livres et blogs,
00:23:46pour finalement être intégré à une page Wikipédia,
00:23:49dans laquelle on va même jusqu'à spéculer sur l'influence de sa voûte en Ogive sur les constructions ultérieures.
00:23:55Les études sur site sont incontournables.
00:23:57Elles permettent parfois des prises de conscience importantes,
00:24:00comme celle de l'indologue Harry Falk, spécialiste incontesté de la vie du roi Ashoka,
00:24:04selon nous l'auteur des plus importants travaux sur les chambres de Barabar et Nagarjuni.
00:24:12Voici ce qu'il a écrit à leur sujet dans son livre, l'un des plus complets à ce jour.
00:24:38Avant toute chose, faisons un bref historique de la découverte de ces chambres.
00:24:421785. John Herbert Arrington découvre quatre des chambres à l'abandon depuis des siècles.
00:24:48Karan Chopar, Sudama, Lomas Rishi et Gopika.
00:24:52Personne ne sait plus qui les a réalisées, ni quand, ni pourquoi.
00:24:571811. Francis Buchanan trouve une nouvelle chambre à Barabar, vice Vasopri,
00:25:02et deux autres à Nagarjuni, Vapiyaka et Vadatika.
00:25:071837. James Princep déchiffre à Nagarjuni
00:25:10des inscriptions en Brahmi, une langue employée il y a plus de 2000 ans,
00:25:14qui nous apprennent que Vapiyaka, Vadatika et Gopika
00:25:17ont été offertes par le roi Dasaratha à la secte des Ajivikas,
00:25:21afin qu'ils se protègent de la pluie.
00:25:251847. Markham Quito découvre sur la façade de Karan Chopar
00:25:29une inscription en Brahmi presque effacée et illisible.
00:25:351861. Alexander Cunningham attribue les chambres de Barabar au roi Ashoka,
00:25:39supposé être le père ou le grand-père de Dasaratha.
00:25:461925. Eugène Hulsch déchiffre l'inscription découverte par Quito
00:25:50et conclut que toutes les chambres de Barabar, comme celles de Nagarjuni,
00:25:53sont également des abris contre la pluie.
00:25:58L'affaire de ces énigmatiques chambres est enfin résolue.
00:26:03Mais en 1997, Harry Falck conteste la traduction de Hulsch
00:26:07si les chambres de Barabar ont bien été offertes par le roi Ashoka,
00:26:11aucune fonction n'est mentionnée.
00:26:15Voilà où en était la recherche en 2017, au moment où nous les avons découvertes.
00:26:20Troisième roi de la dynastie Maurya, fondé par son grand-père,
00:26:23le roi Chandragupta Maurya, Ashoka serait donc le commanditaire de ces chambres.
00:26:30À la huitième année de son règne, désireux d'annexer l'état féodal et pacifiste du Kalinga,
00:26:34Ashoka entraînera l'Inde dans la guerre la plus meurtrière de son histoire,
00:26:38qui fera plus de cent mille morts et plus de cent cinquante mille prisonniers.
00:26:56Épris de terribles regrets, Ashoka se convertira au bouddhisme
00:26:59et partira une année en retraite dans un monastère.
00:27:04Le petit mouvement des bouddhistes n'était pas une chose importante, comme nous le savons aujourd'hui.
00:27:11C'était un petit groupe, et sans Ashoka, le bouddhisme aurait disparu.
00:27:17Il aurait régné environ 28 ans et aurait donc légué les chambres de Barabar à la secte des Ajivikas,
00:27:22composée de mendiants qui vivaient quasiment nus.
00:27:26Ashoka a transformé l'Inde d'un pays de clé et de bambou à un pays de pierre.
00:27:32C'est pareil pour Augustus, qui a transformé l'Inde d'une ville de bois à une ville de pierre.
00:27:39Il n'y a rien que l'on peut indiquer et dire que cette technologie de pierre était là,
00:27:46et à telle hauteur de technologie.
00:27:49Ce n'est pas seulement le travail de pierre, c'est la perfection.
00:27:54Avec les piliers d'Ashoka, d'une trentaine de tonnes chacun,
00:27:57ces chambres constitueraient donc les premières œuvres moria de pierre,
00:28:01dont l'une des caractéristiques principales est le polymoria.
00:28:07Parlons maintenant de la datation des chambres, qui s'appuie sur les inscriptions gravées.
00:28:11Si on se fie à celles attribuées à Ashoka, les premières seraient celles de Barabar.
00:28:18Parmi elles, Sudama aurait été la première léguée par Ashoka.
00:28:21On trouve une dédicace qui a été traduite ainsi
00:28:24« Cette grotte, appelée Nigrodha, a été léguée aux Ajivikas par le roi Priyadarsin
00:28:29quand il a été ouin pour sa douzième année de règne.
00:28:32Priyadarsin se rapporte à Ashoka, le mot Ajivika a été gratté et aucune fonction n'est indiquée.
00:28:42C'est aussi à la douzième année du règne d'Ashoka que la chambre Visvasopri aurait été léguée.
00:28:49Ici encore, le terme Ajivika a été gratté, aucune fonction n'est indiquée et elle est dédiée alors qu'inachevée.
00:29:01Puis, sept ans plus tard, Karan Chopar aurait été léguée aux Ajivikas.
00:29:05Suivant Eugène Hulsch, l'inscription a longtemps été interprétée comme ceci
00:29:09« Dans ma dix-neuvième année de règne, moi le roi Priyadarsin offre cette grotte de la très plaisante montagne Kalatika
00:29:15pour servir d'abri durant la saison des pluies. »
00:29:19Mais après l'avoir nettoyée, Harry Falk a proposé une nouvelle lecture.
00:29:23Quand le roi Priyadarsin a été ouin pour sa dix-neuvième année de règne,
00:29:26il s'est rendu à Jaluta et cette grotte nommée Supriheksa a été léguée aux Ajivikas.
00:29:40Plus de mention d'abri donc.
00:29:42Quant à Lomas Rishi, elle ne comporterait aucune dédicace datant de la période Ashoka,
00:29:46parce qu'elle serait inachevée.
00:29:52Mais l'argument ne tient pas face à Visvasopri, qui n'est pas non plus achevé et pourtant dédié.
00:30:01Les chambres de Nagarjuni auraient quant à elles été léguées par le successeur d'Ashoka,
00:30:05Dasaratha, fils ou petit-fils d'Ashoka, dès qu'il serait monté sur le trône.
00:30:11Une première inscription dit « Cette grotte, appelée Vapiaka,
00:30:14a été léguée aux respectables Ajivikas comme résidence pour la saison des pluies
00:30:18pour aussi longtemps que la lune et le soleil dureront par Dasaratha,
00:30:21aimé des dieux dès qu'il fut installé comme roi. »
00:30:27Même texte sur Vadatika et Gopika, seul le nom des chambres change.
00:30:41Si Dasaratha les lègue dès son arrivée sur le trône, c'est qu'elles étaient déjà réalisées.
00:30:57Ce qui implique que toutes les chambres de Barabar et Nagarjuni
00:31:00auraient donc été produites en 28 ans, soit la durée totale du règne d'Ashoka.
00:31:05Fait important, aucune de ces inscriptions, ni à Barabar, ni à Nagarjuni,
00:31:09ne mentionne la fabrication, mais seulement des donations.
00:31:21D'autres inscriptions, plus tardives, montrent que certains n'ont pas hésité à faire graver leurs noms,
00:31:26sans pour autant être les auteurs de ces chambres.
00:31:29Comme à Barabar, sur le porche de Lomas Rishi, au Vème siècle de notre ère,
00:31:33soit environ 700 ans après Ashoka, puis sur les parois des passages d'entrée d'autres chambres.
00:31:51On trouverait enfin une mention de la donation des chambres de Barabar par Ashoka,
00:31:55à la 27e année de son règne, mais l'indologue Jules Bloch reste prudent,
00:31:59si les donations de grottes aux Ajivikas sont bien de lui.
00:32:05La partie supérieure, dénuée d'inscriptions de l'un de ces spectaculaires piliers brisés,
00:32:09a été transportée à Bodh Gaya.
00:32:26Ce caractère soudain des piliers, comme des chambres, a de quoi intriguer, car elles paraissent jaillir d'un coup.
00:32:32Point important de l'affaire, on ne retrouve nulle part ce que l'on appelle l'enfance de l'art,
00:32:37c'est-à-dire les endroits où les ouvriers se sont exercés et entraînés,
00:32:41pour apporter à l'enseignement et à l'enseignement de l'art,
00:32:44une forme d'éducation et d'enseignement.
00:32:47L'enfance de l'art, c'est-à-dire l'enfance de l'art,
00:32:50c'est-à-dire les endroits où les ouvriers se sont exercés et entraînés,
00:32:54pour acquérir les savoirs et la maîtrise exceptionnelles nécessaires pour réaliser les chambres.
00:33:00Si elles sont bien les premières du genre en Inde, d'où viennent les compétences ?
00:33:05Face à ce problème crucial d'absence d'enfance de l'art,
00:33:08cherchant peut-être une origine totalement indienne des savoirs et techniques,
00:33:11l'indologue Gupta a rejeté les inscriptions de Son Bandar,
00:33:15pour reculer sa datation d'un siècle avant Barabar, en moins 400 avant notre ère,
00:33:20et ainsi en faire le chénon manquant entre les grottes naturelles et les chambres de Barabar.
00:33:25En montrant au passage qu'une inscription peut donc être remise en question,
00:33:28fait intéressant à lire de la plume d'un indologue.
00:33:39Pour expliquer le miracle technique de Barabar, deux réponses.
00:33:43La première, surnaturelle, provient de Sitamari, où un Pujari, un prêtre, officie encore de nos jours.
00:33:49Harry Falk avait rencontré son prédécesseur lors de sa première visite en 1993.
00:34:02La deuxième, historique, est que les compétences nécessaires à leur réalisation
00:34:05proviendraient des Perses et de leurs tombeaux achéménides,
00:34:08ce qui expliquerait pourquoi Barabar et Nagarjuni sont uniques en Inde.
00:34:14Mais les rares photos disponibles, car leur entrée est strictement interdite,
00:34:18montrent que ce n'est pas du tout la même qualité de travail.
00:34:25Ni pour les voûtes, ni pour les parois, qui ne présentent pas de surface plane et polie,
00:34:31et pas davantage inclinées.
00:34:37Est-il possible de parvenir à d'autres photos ?
00:34:43Et de tels résultats du jour au lendemain, sans jamais l'avoir fait avant ?
00:34:48Mais sur ces questions de taille de pierre, comme le fait remarquer le compagnon Eric Bernard…
00:35:04Abordons maintenant le plus important, la fonction de ces chambres.
00:35:14Je pense qu'il y a une sorte de différence entre Nagarjuni Hills et Barabar.
00:35:20Dans Nagarjuni Hills, Dasharatha dit qu'il met les mains sur les chambres pour les ajibikas,
00:35:27pour qu'ils aient un lieu où rester quand les pluies commencent à s'accumuler dans la monsoon.
00:35:35Il n'y a pas de bonne raison de produire de telles chambres qu'une chambre de pluie.
00:35:44Pour mon goût, ces chambres sont des chambres royales.
00:35:52Cette brillance est royale.
00:35:55Elle n'a donc rien à voir avec la vie d'un ascétique ordinaire,
00:36:02qu'il soit bouddhiste, ajibika, jain ou autre.
00:36:06Tout le monde qui voit ces chambres pensera à la famille royale et à la personnalité d'Ashoka,
00:36:15qui a pu produire de telles chambres.
00:36:36Il ne les a pas faites pour les ajibikas.
00:36:39Au final, il voulait s'en sortir de ces chambres.
00:36:44Je pense que c'est possible que les deux inscriptions de 12 ans,
00:36:52soient inscrites plus tard que les inscriptions de 12 ans,
00:36:57et que même les noms ont été inventés par les ajibikas.
00:37:06Bon, récapitulons.
00:37:09Ces chambres seraient, avec les piliers, les premières œuvres Morya de Pierre Pauly.
00:37:14Elles auraient été réalisées sur une période d'environ 28 ans.
00:37:18Elles sont les premières du genre et les savoirs auraient pu être importés.
00:37:23La fonction d'abri ne serait pas nécessairement leur fonction première.
00:37:28Toutes les inscriptions pourraient avoir été gravées bien après la réalisation de ces chambres
00:37:32et ne constituent pas d'épreuves irréfutables de datation et de fonction.
00:37:37Et finalement, la synthèse de tous les travaux intérieurs ne nous apporte aucune certitude.
00:38:03Précisons que la présence d'Arief Falk dans ce film n'implique pas qu'il épouse nos hypothèses.
00:38:08Nous le remercions sincèrement d'avoir joué le rôle difficile de porte-parole d'une communauté archéologique,
00:38:13ne s'exprimant pas ici d'une même voix, ce qu'il résume avec humour.
00:38:33Mais rien d'anormal, il manquait à tous ces chercheurs des informations
00:38:37que la technologie de leur époque ne pouvait leur fournir.
00:38:40Et c'est exactement à ce moment-là que notre équipe entre en scène.
00:38:45Lors de cette session de janvier 2017, nous avions essayé de mesurer ces chambres au télémètre,
00:38:50à un laser qui mesure la distance.
00:38:52Mais ça n'a pas fonctionné à cause des parois inclinées.
00:38:55Le laser impactait plus bas en face et rendait les mesures précises impossibles.
00:38:58C'est pour cette raison que nous avons demandé à la Société Arts Graphiques et Patrimoines, ou AGP,
00:39:03fondée par un ancien tailleur de pierre, fils et petit-fils de tailleur de pierre,
00:39:07de scanner en 3D les chambres de Barabar et Nagarjuni.
00:39:11Chacune a été scannée dans l'état, avec un minima 2300 ans d'usure,
00:39:15de la poussière, des nids de guêpes et des concrétions calcaires sur certaines parois
00:39:19dues à des infiltrations d'eau, ainsi que toutes les dégradations faites au cours du temps.
00:39:22Il nous faudra deux jours entiers sur place, à raison de 3 à 6 sessions de scan par chambre,
00:39:27chacune étant définie par environ 100 à 300 millions de points,
00:39:31soit un point tous les millimètres, avec une précision absolue d'environ plus ou moins 2,5 millimètres.
00:39:37Cette imprécision fait varier les volumes en proportion, ce qui impacte beaucoup moins les angles.
00:39:42AGP a ensuite assemblé tous les nuages de points pour chaque chambre.
00:39:46Ces nuages de points rendent les chambres plus précises,
00:39:48sans aucune déformation optique.
00:39:51On pourrait croire qu'en fait c'est une modélisation 3D géométrique qu'on a faite.
00:39:55On va animaler en 3 dimensions comme un IRM l'existant,
00:39:59et une fois qu'on l'a en 3 dimensions, on coupe en tranches,
00:40:02comme un IRM, pour comprendre, pour interpréter.
00:40:05Ce ne sont donc pas des reconstitutions en images de synthèse,
00:40:09mais des représentations exactes des formes,
00:40:12ce qui s'apprécie plus facilement avec les scans des chambres inachevées.
00:40:15Elle est inachevée ou modifiée, on ne sait pas.
00:40:18On voit tout de suite que la captation est réelle.
00:40:21Et sur toutes les autres, c'est la même chose.
00:40:23Ce n'est pas parce qu'on a l'impression de voir un truc parfaitement géométrique,
00:40:26que c'est du pipeau.
00:40:28Non, c'est la réalité dès qu'elle a été captée par l'appareil métrologique.
00:40:31Lors du bouclage du précédent film,
00:40:33AGP nous avait fourni quelques planches,
00:40:35en nous annonçant que les chambres étaient toutes symétriques dans leur longueur.
00:40:38Symétriques ?
00:40:40Si vous n'avez pas sursauté à l'évocation de l'image,
00:40:42c'est parce que vous ne savez pas encore exactement ce que cela implique.
00:40:45Symétriques, cela signifie qu'on peut couper la chambre en deux
00:40:48dans le sens de la longueur,
00:40:50et superposer exactement chaque partie sur l'autre,
00:40:53la moitié gauche sur la moitié droite,
00:40:55et inversement.
00:40:57Si vous le faites chez vous, il n'est pas certain que la pièce soit symétrique,
00:41:00car la tolérance de précision dans les constructions modernes
00:41:03varie de quelques centimètres.
00:41:05Mais pour chiffrer ces symétries,
00:41:07il nous fallait le rapport d'analyse détaillé des scans.
00:41:09C'est un dossier d'environ 40 pages de planches,
00:41:12de chiffres et de constats,
00:41:14dont nous allons vous livrer quelques aspects.
00:41:16En préambule,
00:41:18AGP prévient d'un bruit dû aux surfaces très réfléchissantes
00:41:21qui rendent la mesure légèrement floue.
00:41:23Il y a un effet miroir dessus,
00:41:25et cet effet miroir va refléter le laser,
00:41:28et donc ça nous donne ce bruit de mesure-là.
00:41:30Des stries apparaissent aussi à divers endroits,
00:41:33mais elles n'existent pas dans la réalité.
00:41:35Justement, c'est le bruit de la lumière,
00:41:36mais elles n'existent pas dans la réalité.
00:41:38Justement, c'est le bruit de mesure qu'on voit ici.
00:41:40On a l'impression que les marquages ici sont très profonds,
00:41:44alors qu'on parle de cinquième de mille.
00:41:49Nous allons décomposer les volumes de cette manière.
00:41:52Grandes parois, petites parois,
00:41:54lignes de naissance des voûtes,
00:41:56et évidemment, voûtes.
00:41:58Sur cette coupe du scan au sol,
00:42:00le trait extérieur a une certaine épaisseur.
00:42:02Parce que le mur n'est pas parfaitement vertical.
00:42:04La différence d'aplomb qu'on a là,
00:42:06c'est qu'on la voit directement avec la troisième dimension.
00:42:10Pour vous familiariser avec leur langage,
00:42:12sur cette planche, AGP nous informe d'un tracé au sol
00:42:15avec quasiment aucune déformation.
00:42:17Ce qui signifie ?
00:42:19On peut dire qu'à 0,10 degrés près, on est parfait.
00:42:24Ce qui est en relatif la perfection.
00:42:26Et lorsqu'il est question de symétrie,
00:42:28comme par exemple ici avec Gopika,
00:42:30où 62% des 350 millions de points
00:42:33se trouvent à la même place à plus ou moins 2,5 millimètres ?
00:42:36Dans une chambre complète comme ça,
00:42:38oui, on est parfaitement symétrique.
00:42:40Il n'y a pas de discussion, c'est symétrique.
00:42:43Voici donc l'essentiel de ce rapport.
00:42:46Chambre numéro 1, Vapiaka.
00:42:49Ce scan est défini par 132 millions de points.
00:42:52Passage d'entrée précisément centré sur le petit côté.
00:42:55Rectangle au sol avec quasiment aucune déformation,
00:42:58angle droit parfait à 1,10 degrés près.
00:43:01Petite paroi inclinée à 88,5 degrés,
00:43:04variation de 0,8 degrés sur toute la longueur.
00:43:10Grande paroi à 87 degrés,
00:43:12variation de 1,10 degrés.
00:43:15Voûte formée par un arc de cercle parfaitement centré.
00:43:19Sol et ligne de mire parfaitement horizontaux.
00:43:22Symétrie longitudinale,
00:43:24voûte coupée dans le sens de la longueur,
00:43:26partie droite superposée sur partie gauche et inversement,
00:43:2969,7% des points à la même place
00:43:32à plus ou moins 2,5 millimètres.
00:43:34Symétrie transversale dans le sens de la largeur,
00:43:3775,1% des points à plus ou moins 2,5 millimètres.
00:43:43Chambre numéro 2, Karan Chopar.
00:43:45Nuage composé de 132 millions de points.
00:43:48Passage d'entrée placé à l'intersection d'un carré,
00:43:51construit sur le petit côté.
00:43:53Rectangle au sol quasi parfait.
00:43:57Petite paroi inclinée à 89 degrés.
00:44:00Grande paroi inclinée à 87,3 degrés.
00:44:06Voûte formée par association de trois arcs de cercle centrés.
00:44:11Sol parfaitement horizontal.
00:44:14Symétrie longitudinale,
00:44:1677,6% des points à la même place.
00:44:21Symétrie transversale,
00:44:2367,8% des points à la même place.
00:44:30Chambre numéro 3, Vadatika.
00:44:33Nuage composé de 110 millions de points.
00:44:36Passage d'entrée centré sur le petit côté.
00:44:39Désaxé de 5 degrés par rapport à la perpendiculaire.
00:44:43Pas de ligne de mire, section entièrement courbe.
00:44:46Chambre formée par carré plus demi-cercle.
00:44:51Angle sol de la paroi latérale, 85,5 degrés.
00:44:56Angle d'inclinaison de la paroi courbe du fond,
00:44:5983,7 degrés.
00:45:02Angle d'inclinaison du petit côté, 88,5 degrés.
00:45:07Voûte composée de trois arcs de cercle centrés.
00:45:11Sol parfaitement horizontal.
00:45:14Symétrie, 57,7% des points à la même place.
00:45:19Chambre numéro 4, Gopika.
00:45:22Nuage composé de 350 millions de points.
00:45:25Le passage d'entrée est placé à l'intersection d'un cercle construit sur le petit côté.
00:45:29Angle d'inclinaison des grandes parois, 87 degrés.
00:45:37Sol et lignes de mire précisément horizontaux.
00:45:41La forme de la chambre est très légèrement ovale.
00:45:44Les grandes parois sont très légèrement incurvées de moins de 6 cm sur toute la longueur.
00:45:48Au sol, ce sont des portions de cercles de 120 m de rayon.
00:45:54Voûte composée de trois portions d'ogive mêlées.
00:45:57À part le sol et les côtés des passages d'entrée,
00:46:00cette chambre est entièrement composée de courbes.
00:46:03Symétrie longitudinale, 62% des points à la même place.
00:46:07Chambre numéro 5, Sodama.
00:46:10Nuage composé de 232 millions de points.
00:46:13Cette chambre comporte deux salles.
00:46:16Premier passage d'entrée perpendiculaire placé à un cinquième de la longueur du grand côté.
00:46:20Second passage d'entrée perpendiculaire et centré.
00:46:24La paroi courbe de la salle 1 suit précisément la paroi interne de la salle 2.
00:46:29Grande paroi latérale inclinée à 87,1 degrés.
00:46:36Petite paroi latérale inclinée à 89 degrés.
00:46:40La paroi de la salle 2 est inclinée à 86,7 degrés.
00:46:43La voûte de la salle 1 est composée d'un cylindre de rayons constants bien centré à l'axe longitudinal.
00:46:48Sols horizontaux.
00:46:50Symétrie, 61,1% des points à la même place.
00:46:59Grâce à ce rapport, nous connaissons maintenant les contraintes données aux tailleurs de pierre
00:47:03avant qu'ils commencent à construire la salle 2.
00:47:06La paroi de la salle 1 est composée d'un cylindre de rayons constants bien centré à l'axe longitudinal.
00:47:10Nous connaissons maintenant les contraintes données aux tailleurs de pierre avant qu'ils commencent le travail.
00:47:14Formes, dimensions précises et angles, ce que l'on appelle le cahier des charges.
00:47:18Et dans ce cas, il est proprement édifiant.
00:47:21D'abord, ces cinq chambres sont symétriques.
00:47:24La moindre variation dans la forme d'un côté va se retrouver en miroir de l'autre.
00:47:28Ensuite, la position des passages d'entrée répond à une logique géométrique particulière.
00:47:40Enfin, les formes sont plus complexes qu'elles n'y paraissent.
00:47:44Les grandes parois de Vapyaka et de Karan Chopar sont inclinées selon des angles différents, et le tout en miroir.
00:47:50Les voûtes de Vapyaka et de Sudama sont des portions de cylindres.
00:47:54La forme de Vadatika est composée de plusieurs sphères mêlées.
00:47:59Les grandes parois de Gopika sont très légèrement courbées, en plus d'être inclinées.
00:48:04La voûte de Karan Chopar est composée de trois portions de cylindres.
00:48:07La voûte de Gopika est composée de trois portions d'ogives.
00:48:16Un ingénieur géomètre et topographe a effectué un deuxième rapport à partir des données brutes du scan.
00:48:22Il a prolongé le travail d'AGP et a aperçu de nouveaux éléments.
00:48:26On part de ce découpage de portions de nuages, on les décompose.
00:48:31Je ne prends que les points mesurés par le scanner, uniquement eux.
00:48:34Et après je demande au logiciel de venir faire le calcul du ou de la meilleure sphère qui va venir approcher l'ensemble de ces points.
00:48:41On refait la même chose par rapport à notre nuage de points qui est de l'autre côté.
00:48:45Pour nous c'est comme si c'était deux nuages complètement indépendants dans l'espace.
00:48:49Donc on relance un nouveau calcul.
00:48:51C'est ça qui va devenir intéressant, c'est que quand on prend ces nuages de points qui sont positionnés à des endroits différents,
00:48:58on va obtenir des informations similaires de part et d'autre à droite et à gauche.
00:49:01Autrement dit, ces deux extrémités de la voûte sont des portions exactes de sphères qui se trouvent en symétrie avec leur centre aligné.
00:49:083956, 3953, c'est peut-être numériquement des valeurs différentes,
00:49:14mais en termes de résultats et en termes de mesures et en termes de certitudes de mesures ou d'incertitudes de mesures,
00:49:21on peut très bien corréler ces deux chiffres.
00:49:23Compte tenu des imprécisions du bruit du scan, 3953 égale 3956.
00:49:28En réalité, ce ne sont pas exactement des portions de sphères.
00:49:32C'est encore un peu plus complexe que ça.
00:49:35C'est-à-dire que là, ici, les écarts de taille par rapport à la forme géométrique d'origine,
00:49:43elle est en symétrie.
00:49:45C'est-à-dire qu'on a fait la même erreur de chaque côté et on a fait la même erreur suivant le même modèle.
00:49:50Donc ce n'est pas une erreur.
00:49:52C'est dire la précision de réalisation.
00:49:54La voûte est donc faite de portions fusionnées d'ogives et de sphères, le tout en miroir.
00:50:00Il a ensuite procédé de la même manière avec Vadatica.
00:50:03Le logiciel a sorti une sphère parfaite en bleu sur cette image.
00:50:07Ce qu'on peut regarder, c'est la répartition des points par rapport à une sphère.
00:50:12Et on a ici une diffusion des couleurs qui est vraiment remarquable,
00:50:17que l'on retrouve de manière symétrique et homogène de chaque côté.
00:50:21Ce qui veut dire qu'on ne suit pas une forme parfaite,
00:50:24mais on suit une répartition, un volume symétrique parfait,
00:50:28qu'on soit à droite, qu'on soit à gauche, en haut ou en bas.
00:50:31Les réalisateurs de cette chambre ne souhaitaient donc pas obtenir une portion parfaite de sphère,
00:50:36mais cette forme spécifique puisqu'elle est symétrique.
00:50:39Voici pour terminer un extrait d'un troisième rapport produit par un compagnon tailleur de pierre,
00:50:44spécialiste de la géométrie en trois dimensions, un simple constat fait dans Gopika.
00:50:49Pour rappel, la norme aujourd'hui pour la planéité d'un dallage, la tolérance de niveau,
00:50:54une règle de deux mètres ne doit pas faire apparaître de différence d'alignement supérieure à deux millimètres,
00:50:59soit un pour mille sur un plan.
00:51:01Ici, nous avons un pour cent mille dans un espace en trois dimensions.
00:51:05Que dire ?
00:51:07Croire que c'est fait pour faire joli et se faire plaisir, je n'y crois pas une seconde.
00:51:11Quand on met autant d'énergie pour développer ça, c'est qu'il y a une raison.
00:51:16Je ne connais pas la raison.
00:51:18Quand on est dans un niveau de symétrie et de finition de taille de pierre comme ça,
00:51:24c'est qu'on est au niveau de l'excellence, dans la maîtrise du métier.
00:51:30Et donc là, on est au summum de ce qui peut être fait à ce moment-là.
00:51:35Des plans, des relevés, des chiffres, mais plus concrètement, qu'est-ce qu'ils signifient ?
00:51:40Est-ce si compliqué que cela de réaliser de telles chambres ?
00:51:43Qui, mieux que les tailleurs de pierre qui depuis des siècles font et se taisent,
00:51:46pourrait nous éclairer ?
00:51:51Notre enquête nous a menés en Bretagne, pays du granit, à Nantes, puis à Paris,
00:51:56où nous avons rencontré des tailleurs de pierre qui ont accepté de se pencher sur le cas de ces chambres.
00:52:04Éric Bernard, compagnon et architecte de plus de 40 ans d'expérience.
00:52:08Olivier Lavigne, commis d'architecte puis compagnon depuis 30 ans,
00:52:12qui a étudié la taille ancienne, notamment en Égypte, depuis 25 ans.
00:52:16Franck Petitat, ancien tailleur de pierre.
00:52:19Mathieu Hénaf, tailleur de pierre devenu appareilleur,
00:52:22qui gère actuellement des chantiers en maçonnerie et en taille de pierre
00:52:25dans une entreprise de restauration de patrimoine.
00:52:28Louis-Joseph Lamborough, fils, petit-fils et arrière-petit-fils de tailleur de pierre,
00:52:32qui a travaillé plus de 30 ans à la restauration des monuments historiques parisiens
00:52:36et qui maintenant gère son entreprise de fabrication de maisons en pierre.
00:52:40Joël K. Hervé, artisan tailleur de granit depuis plus de 40 ans.
00:52:43Et Christophe Kini, artisan tailleur de granit depuis 28 ans.
00:52:50Nous leur avons montré les chambres et le rapport AGP
00:52:53et demandé pour commencer de noter le travail sur une échelle de 1 à 10,
00:52:571 étant le plus facile et 10 le plus difficile.
00:53:00On est à 9,5 sur la difficulté de travail.
00:53:0310.
00:53:0510, voire même 12.
00:53:0810, même 20.
00:53:10C'est simple, je mettrais 12.
00:53:11Par provocation, je dirais 12.
00:53:13C'est pour au moins placer l'objet dans notre réalité.
00:53:19De savoir, avoir déjà tapé dans du caillou, dans du granit,
00:53:22pour savoir ce que c'est la complexité de ça et de faire de la géométrie.
00:53:25C'est pour ça que les gens qui n'ont pas pratiqué ce genre de jeu ne peuvent pas se rendre compte.
00:53:28Avant AGP, on pouvait se laisser un peu gagner par le,
00:53:31pas le romantisme mais le côté un peu,
00:53:34oui, on est des hommes de métier, on n'a peur de rien.
00:53:37Là, le cahier des charges est trop exigeant, il faut le comprendre.
00:53:39Alors nous, on peut très bien exécuter une chambre comme ça,
00:53:42avec un poli plus ou moins fini, qui contenterait l'œil.
00:53:48Mais on ne contenterait pas le cahier des charges qui est là.
00:53:51Ça, c'est clair.
00:53:53Des courbes de 120 mètres de diamètre sur 13 mètres de long,
00:53:57on va l'exécuter.
00:53:59Mais bon, après, si vous mettez le scale, si vous mettez AGP sur notre boulot,
00:54:02on risque de passer pour des...
00:54:09Avant d'arriver à la forme adoucie ou polie,
00:54:12il y a plein d'étapes.
00:54:14Et chaque étape amène son lot d'erreurs et son lot d'imprécisions.
00:54:17Donc si à la fin, on arrive à ça, c'est que les étapes sont bien maîtrisées.
00:54:22Il n'y a pas que le travail de la matière qui est maîtrisé,
00:54:24il y a aussi la géométrie qui est maîtrisée.
00:54:26Parce que ça veut dire qu'on commence par faire la porte pour accéder dans les salles,
00:54:30et on sait déjà exactement ce qu'on va faire.
00:54:33Si on avait disposé des bandeaux, des choses comme ça,
00:54:35ça aurait permis de scinder le travail
00:54:38et puis de dissimuler d'éventuelles imperfections.
00:54:41Là, le fait de la perfection géométrique,
00:54:44il n'y a pas de pardon, il n'y a pas d'erreur possible.
00:54:47Creuser à l'intérieur d'une roche
00:54:50et avoir un rendu poli comme celui-là,
00:54:53je ne sais pas du tout comment ils ont fait.
00:54:56Soit ils ont passé des siècles à polir, je ne sais pas,
00:54:59avec des tas de petits bras qui n'ont jamais arrêté.
00:55:02Honnêtement, je n'ai pas d'explication.
00:55:03C'est fait dans du granit.
00:55:05C'est quand même un des matériaux les plus durs.
00:55:07Mais aujourd'hui, je suis presque certain qu'on n'y arriverait pas.
00:55:10On pourrait peut-être actuellement arriver à cette exigence
00:55:13en faisant de l'appareillage de blocs, etc.
00:55:19Par contre, le faire en excavation comme ça,
00:55:22non, je ne vois pas de possibilité actuellement.
00:55:29Et même avec des outils mécaniques,
00:55:30arriver à un tel résultat, ça reste compliqué quand même.
00:55:35De nos jours, on ne serait pas plus précis
00:55:37avec des moyens beaucoup plus développés
00:55:39parce qu'en fait, on a affaire à une taille rustique,
00:55:41donc on ne pourrait pas y mettre toutes les installations
00:55:44qui nous permettraient d'avoir quelque chose d'encore plus précis.
00:55:47Donc, on ne ferait pas mieux.
00:55:50Pour réaliser une chambre du type barre à barre avec des outils manuels,
00:55:54il faut d'abord dégrossir la forme générale avec des pics,
00:55:57puis travailler avec différents ciseaux de plus en plus fins
00:56:00et ensuite abraser avec une pâte et un support qu'on frotte.
00:56:04Et on recommence autant de fois qu'il le faut.
00:56:06Et enfin polir.
00:56:09Au stade du polissage, la forme est déjà totalement terminée.
00:56:13Il faut absolument que le parement soit dressé et parfait
00:56:17avant même de commencer à frotter pour atteindre ce poli-miroir.
00:56:22Le polissage, lui, va être uniforme,
00:56:24donc il va retirer les mêmes épaisseurs partout.
00:56:27Donc le défaut, il sera visible.
00:56:28On voit bien que la volonté, c'est qu'il y a une forme géométrique qui est définie
00:56:32et donc il est hors de question de dépasser ses limites.
00:56:36Donc il faut s'en rapprocher.
00:56:39Il y a tout le polissage qui va prendre aussi un peu de matière.
00:56:44Donc pour arriver pile poil là-dessus,
00:56:46ça veut dire qu'on a compris et on sait combien d'épaisseurs on va polir.
00:56:51Ce qui est intéressant avec le polissage dans le cas de ces grottes,
00:56:53c'est qu'il montre encore là aussi le niveau d'exécution.
00:56:59Parce que polir des voûtes, des intradoses de voûtes, c'est un enfer.
00:57:04Là, il y a aussi encore une démonstration d'une maîtrise qui est extraordinaire.
00:57:08Autant c'est gérable sur des surfaces d'atelier, sur une table, etc.
00:57:13Mais là, sur une surface réglée, propre, sans coup d'outil, prêt à être polie,
00:57:18ça aussi c'est bluffant, c'est complètement unique.
00:57:25Est-il réellement possible de se lancer dans de tels chantiers sans jamais l'avoir fait avant ?
00:57:30Ce n'est pas le travail d'un débutant, ni d'un qualifié, ni d'un hautement qualifié.
00:57:36C'est d'un qualifié hyper qualifié qu'on ne connaît pas aujourd'hui.
00:57:41C'est voulu, c'est prévu et là, il n'y a pas d'erreur possible.
00:57:45On ne peut pas changer en cours de route.
00:57:50Il y a une maîtrise géométrique extraordinaire et une maîtrise de la matière qui est tout aussi extraordinaire.
00:57:55Là, ça veut dire qu'il y a des années et des années d'apprentissage avant ça.
00:58:00C'est pour ça qu'on ne peut pas se lancer sur un travail comme ça du jour au lendemain en disant
00:58:04« tiens, on va faire une grotte ». Ce n'est pas possible.
00:58:07On n'aurait pas une qualité, une finition aussi aboutie si c'était un coup d'essai.
00:58:12Il y aurait quelques petites erreurs, il y aurait des petits réglages
00:58:15et on verrait l'évolution à travers les grottes.
00:58:18Alors que là, on voit bien que, grosso modo, elles ont tous le même niveau de finition, etc.
00:58:22Ce qui correspond au niveau de la qualification des ouvriers.
00:58:25Donc, ça ne vient pas de nulle part.
00:58:28Quand on voit le résultat, on a un peu l'impression que c'est travaillé d'une seule main.
00:58:31Parce que c'est tellement régulier, c'est tellement parfait
00:58:35qu'on n'a pas l'impression qu'il y ait eu des quantités de bonhommes à travailler sur ce chantier-là.
00:58:38Le lieu vibre comme quelque chose qui résulte d'un travail d'effort commun, de cohésion, de groupe qui est implacable.
00:58:49Tout est fait pour que les rapports humains professionnels dérapent.
00:58:55On voit très bien qu'en allant sur ce chantier, j'ai été témoin d'une multitude de conflits.
00:59:01Et pour des raisons bien moins compliquées que ça.
00:59:04Donc là, à mon avis, ils sont arrivés à un degré d'entente qui est assez troublant aussi.
00:59:11Là, l'engagement humain est relativement énorme.
00:59:15Le rapport a entre autres révélé les symétries des chambres, ce que personne avant ces scans n'avait vu.
00:59:21Obtenir des formes symétriques peut-il être accidentel ?
00:59:24Ça ne peut pas être du hasard. Clairement, c'est vraiment calculé, c'est fait exprès.
00:59:29Rien n'est fait au hasard. Tout a une raison.
00:59:31Tout a une raison. Ça me paraît évident.
00:59:34Le hasard est exclu de l'affaire.
00:59:36On est obligé de partir de points de repère très précis,
00:59:39qui vont être calculés au démarrage, avant de tailler.
00:59:42C'est-à-dire qu'on n'arrive pas et on se dit, tiens, allez, je vais le faire là.
00:59:45Non, avant de le faire, on sait très bien qu'il y a un minimum de points de repère asymétriques qu'on doit faire.
00:59:50Et à partir de ceux-là, on va pouvoir définir tout le reste.
00:59:53Donc ils sont décidés avant.
00:59:55Ça veut dire que cette symétrie est quand même imposée et elle impose une pure rigueur à l'exécution.
01:00:02La symétrie est quand même poussée assez loin dans la construction.
01:00:06Ce n'est pas du tout du hasard. Ça a été voulu à un moment donné, ça a été exécuté.
01:00:10Ainsi, c'est ce que l'on constate aujourd'hui par les mesures.
01:00:14Si en plus, on rajoute une symétrie au volume, ça multiplie par deux la complexité.
01:00:19Encore une contrainte supplémentaire.
01:00:20Si on n'a pas cette contrainte de symétrie, on avance.
01:00:25Et puis lorsque c'est convenable à l'œil, on arrête les frais.
01:00:31Par contre, s'il y a un cahier des charges tellement exigeant qu'il faut que le millimètre soit partout,
01:00:37alors là, c'est une autre paire de manches.
01:00:39C'est deux fois le travail, dix fois le travail.
01:00:43Faire le copier-coller réversible des deux formes et arriver à ce taux d'erreur, c'est pareil.
01:00:50Là, c'est le pire du résultat de ce travail numérique
01:00:58qui porte tous les éléments de déstabiliser un professionnel.
01:01:04Que penser de la précision de réalisation révélée par les scans et les mesures ?
01:01:09Arriver à être plus précis que ça, ça va être très compliqué.
01:01:14Très très compliqué. C'est-à-dire que là, on sent qu'ils sont allés jusqu'au bout.
01:01:17Jusqu'au bout. Au vu des moyens de l'époque, je juge cette précision ahurissante.
01:01:23Pour moi, ce n'est pas une grande précision. C'est d'une extrême précision.
01:01:28C'est d'une précision hallucinante. Dans un matériau pareil, avec une finition polie,
01:01:34les écarts que l'on peut mesurer avec des outils extrêmement perfectionnés d'aujourd'hui,
01:01:38honnêtement, c'est ça le plus impressionnant, le plus bluffant.
01:01:43Nous-mêmes, pour des choses beaucoup plus simples, on n'est pas aussi précis.
01:01:45C'est que dans le domaine de la mécanique productive, avec des volumes mille fois plus réduits,
01:01:51donc beaucoup plus faciles à maîtriser. Donc là, je ne sais pas.
01:01:56C'est la partie la plus impressionnante, la précision. Pour moi, tailleur de pierre.
01:02:00Aller taper sur du millimètre, on va faire ça sur de l'auscultation,
01:02:04on va faire ça sur de la surveillance d'ouvrages d'art, sur la surveillance de stations nucléaires,
01:02:10de choses, d'ouvrages qui nécessitent d'analyser des mouvements qui sont eux au millimètre.
01:02:15Quand on voit les potentiels écarts relevés au scan 3D,
01:02:20où on parle d'une symétrie avec des écarts de 3, 4, 5 millimètres maximum,
01:02:25c'est quelque chose qu'on a du mal à imaginer sur des tels volumes.
01:02:28Oui, c'est ultra précis.
01:02:35Il y a l'obscurité, le côté poussière.
01:02:39S'il y a 20 artisans qui travaillent dans la même grotte, au bout de deux heures, tout le monde crève de chauve là-dedans.
01:02:45Il va falloir sortir, il va falloir rafraîchir, il y aura le problème de la lumière.
01:02:51Travailler dix ou douze heures par jour dans ces volumes aussi restreints,
01:02:55honnêtement, je ne vois pas comment on pourrait faire ça.
01:02:58Le souci, c'est que quelqu'un qui a suivi dix ans de formation pour arriver au top de son métier,
01:03:04ce serait dommage de le gâcher au bout de cinq ans avec la silicose parce qu'il travaille dans une grotte.
01:03:09On n'a pas changé en 3000 ans, en 4000 ans, on est les mêmes.
01:03:13Il y a un cahier des charges, des délais, et c'est comme aujourd'hui.
01:03:17C'est comme aujourd'hui, on a une réalisation à faire, un mètre d'ouvrage, un mètre d'œuvre, et puis il faut y aller.
01:03:23La question qui nous brûle les lèvres, combien de temps pour en faire une ?
01:03:28On peut tout imaginer en fait, mais ce ne serait que de la pure spéculation.
01:03:32Maintenant, si on imagine un travail manuel, il y a un certain nombre d'heures,
01:03:35il n'y a pas de spéculation.
01:03:37Maintenant, si on imagine un travail manuel, je l'imagine juste moi en travail sur des temps très longs
01:03:43et avec une patience infinie pour arriver à ce résultat, à ce miroir.
01:03:47Celles qui sont complexes, dix ans, c'est un minimum.
01:03:50Après, ça va dépendre aussi de l'outillage dont ils disposent, de leurs compétences.
01:03:56Plus ils vont être compétents, plus ils vont pouvoir gagner peut-être en vitesse.
01:04:00De toute façon, dans des exercices comme ça, ce n'est pas le temps qui compte.
01:04:03Eh bien si, justement.
01:04:05La chronologie déduite des inscriptions laisse peu de temps de réalisation pour ces sept chambres, 28 ans.
01:04:10Pour Soudama, la plus complexe de toutes, il serait même question de douze ans.
01:04:14Non. Non, non, ce n'est pas possible.
01:04:18Ce n'est pas faisable.
01:04:20Douze ans ?
01:04:22Mais ces durées de réalisation sont issues des dates de donation, livrées par les inscriptions gravées.
01:04:28Il y a un décrochage entre les inscriptions et les chambres.
01:04:30Les inscriptions et les chambres ne sont pas faites à la même époque, c'est une évidence.
01:04:33Il y a un écart qui donne l'évidence que ça a été fait bien après.
01:04:39En tout cas, ce n'est pas à la même époque.
01:04:41En comparant la grotte et l'inscription, il y a quand même un petit décalage entre les deux.
01:04:47Elle est lisible, mais ce n'est pas du même niveau.
01:04:52La gravure a été exécutée d'une manière très sommaire, qui n'a aucun rapport avec la qualité de l'ouvrage.
01:04:59C'est poinçonné.
01:05:01On pourrait dire qu'ils avaient besoin de mettre un message, la personne ne maîtrisait pas la gravure,
01:05:06et il est venu faire un acte de propriété.
01:05:09Ce n'est pas parce que c'est inscrit que c'est forcément de cette époque-là.
01:05:12Le roi a pu tout à fait dire, j'aimerais bien avoir mon nom sur ce truc qui est déjà existant.
01:05:19La liaison n'est pas forcément des plus évidentes.
01:05:23Il est au pouvoir à une telle date, et après il donne la grotte douze ans après.
01:05:28Mais on ne dit pas qu'il l'a fait faire ces grottes et qu'il les a fait construire.
01:05:33On peut très bien imaginer ce fameux roi qui a mis la main sur les grottes et qui a fait graver dessus,
01:05:38je les offre, c'est tout, mais ce n'est pas forcément lui qui les a fait faire.
01:05:42Rien n'atteste que c'est lui qui les a fait faire.
01:05:45On peut en effet se demander si ceux qui ont fait graver qu'elles étaient des abris contre la pluie,
01:05:50avaient réellement conscience du travail colossal que leur réalisation a demandé,
01:05:54ainsi que toutes leurs contraintes techniques majeures, inutiles pour de simples abris.
01:05:58Et donc qu'à cette époque-là, on ait pu déjà avoir oublié leurs fonctions.
01:06:03Pourquoi ces formes ? Pourquoi cette symétrie parfaite ? Pourquoi aller sur un polymiroir ?
01:06:09Si c'est juste un abri contre la mousson, on a juste besoin d'une grotte.
01:06:12Ça fait mal au cœur, on a l'impression que l'édifice a perdu sa dimension sacrée.
01:06:18Si elle est dédicacée et cédée après pour servir d'abri contre la mousson,
01:06:24j'ai du mal à croire que c'était sa vocation première.
01:06:26Visiblement, quand le roi la donne, c'est qu'il n'y en a plus d'utilité.
01:06:30C'est pour ça qu'il la donne.
01:06:32Donc en fait, là, on risque d'être sur des choses antérieures.
01:06:35Antérieures de combien ? Après, il n'y a que des fouilles archéologiques à proximité
01:06:40qui permettraient d'arriver à mettre un peu des choses en place.
01:06:43C'est le problème avec l'écrit. L'écrit, c'est de la propagande.
01:06:47Pour se faire mousser, on va se mettre des textes partout.
01:06:50On va parler dans ce cas-là de Ramsès II, qui a mis son nom partout, même quand ce n'est pas lui qui l'a fait.
01:06:57Quand je vois le travail de ces chambres, je suis ébahi, stupéfait, admiratif, sans voix, déconcerté.
01:07:07Je suis perdu. Je me dis comment ça a pu être fait ?
01:07:11Juste cet ensemble de chambres, c'est quelque chose de fantastique.
01:07:15C'est de l'ordre du fantastique, autant au niveau de la géométrie que de la finition et du travail accompli.
01:07:22J'ai beau retourner la chose dans tous les sens,
01:07:24je suis désarmé et c'est la première fois que, à titre professionnel, je suis déstabilisé à ce point-là.
01:07:39Par peur de voir bousculer leur conception du passé,
01:07:42certains diront probablement que nos anciens étaient capables de grandes choses que nous, les modernes, avons perdues.
01:07:47Mais si c'était si simple, ces chambres ne seraient pas les seules.
01:07:50Car les chantiers qui ont suivi en Inde, bien que grandioses, n'ont pas grand-chose à voir.
01:08:09Le site d'Ajanta est un ensemble de grottes bouddhistes creusées dans une longue falaise de basalte en forme de fer à cheval,
01:08:14dont le début de la construction date des environs du IIe siècle avant notre ère, soit un siècle environ après Barabar.
01:08:21Abandonnée et oubliée durant des siècles, redécouverte en 1819 par des soldats britanniques,
01:08:26ce site aujourd'hui classé au patrimoine mondial de l'UNESCO est considéré comme l'un des plus grands trésors architecturaux de l'Inde.
01:08:36Le terme grotte est assez réducteur.
01:08:38Ce sont en réalité des temples et des salles de prière, célèbres pour leur magnifique sculpture et leur peinture murale, qui reflètent les enseignements de Bouddha.
01:08:46Leur réalisation a nécessité des moyens considérables.
01:08:52Une partie d'entre elles aurait été employée comme refuge durant la saison des pluies,
01:08:57d'où vient peut-être l'inspiration des inscriptions des chambres de Nagarjuni.
01:09:00On reste très impressionnés face à l'immense quantité de travail qu'a dû demander la réalisation de ce site, étalé sur plus de six siècles.
01:09:09Ce que vous voyez a été taillé et non assemblé, et le tout a été minutieusement pensé et organisé.
01:09:16Mais bien que ce site soit proprement spectaculaire, le travail ne s'apparente pas à celui de Barabar et Nagarjuni.
01:09:21Quand les parois ne sont pas laissées brutes, elles sont couvertes de statues et de bas-reliefs sculptés, les angles sont mal définis et les sols pas vraiment plans.
01:09:34Mais il y a peut-être encore plus spectaculaire que ce site, le complexe d'Ellora.
01:09:41Elle a été lancée à l'église de Bouddha, à l'église d'Ellora.
01:09:44Également située dans l'état du Maharashtra, Ellora est un ensemble de 34 salles taillées dans la roche entre les VIe et Xe siècle, ou XIIe selon les sources, sur une distance totale de près de deux kilomètres.
01:10:01Ici encore, le terme « grotte » n'est ni très représentatif, ni très valorisant, car les salles sont parfois immenses.
01:10:08Douze d'entre elles sont bouddhistes, dix-sept hindous et cinq jaines.
01:10:19Comme à Ajanta, chacune est un chef-d'œuvre archéologique.
01:10:23Ellora est l'une des plus grandes grottes de l'Histoire.
01:10:26Elle est la plus grande grotte de l'Histoire.
01:10:29Elle est la plus grande grotte de l'Histoire.
01:10:32Comme à Ajanta, chacune est un chef-d'œuvre architectural, avec de multiples sculptures et bas-reliefs recouvrant les parois.
01:10:38Elle est la plus grande grotte de l'Histoire.
01:10:41Ellora est la plus grande grotte de l'Histoire.
01:10:58La plus célèbre construction de cet ensemble est appelée « grotte numéro 16 », bien qu'il s'agisse d'un temple et pas n'importe lequel.
01:11:04pas n'importe lequel. Toute la roche a été sculptée pour ressembler au Mont Kélash,
01:11:08la résidence légendaire de Shiva. Ce temple comporte galeries, colonnes, sanctuaires et
01:11:14sculptures complexes sur plusieurs niveaux. Gardez à l'esprit qu'il a été entièrement
01:11:19sculpté dans un seul bloc. Aucune statue ni aucun élément n'ont été rajoutés,
01:11:24tout a été pensé couche par couche, escaliers, niveaux, colonnes et statues.
01:11:29Considérée comme la plus grande structure monolithique au monde,
01:11:34son volume est estimé à deux fois celui du Parthénon en Grèce.
01:11:50Mais aussi remarquable et gigantesque soit-il, le travail accompli ne fait que contenter l'œil,
01:11:55comme disent les compagnons, et la précision ne va pas au-delà.
01:11:57Car lorsque l'on sort un simple télémètre, on s'aperçoit vite qu'aucun pied de colonne
01:12:05n'est précisément aligné avec son voisin. Mais pourquoi le devraient-ils ? C'est justement la
01:12:11question. Avec Barabar et Nagarjuni, nous sommes confrontés à deux questions majeures. Comment
01:12:20ont-elles été réalisées à ce niveau de précision et pourquoi ? Il existe une grande dissonance entre
01:12:34le discours des tailleurs de pierres et ce qui a pu être dit sur la manière dont ces chambres
01:12:37ont été réalisées. Notamment par l'indologue Huntington, suite à son rigoureux travail
01:12:48d'observation dans l'Omas Rishi. Cette chambre est cruciale dans la compréhension de cette affaire,
01:12:53et nous allons la considérer depuis le point de vue de l'enquêteur.
01:12:56Voyons tout d'abord les opinions des uns et des autres à travers le temps.
01:13:08Pour Cunningham et Fleet, le Porsche serait un ajoutardif qui viendrait après la dynastie
01:13:12Maurya. Une inscription d'Ashoka aurait pu exister et avoir été effacée au moment de la réalisation du
01:13:17Porsche. Pour Ferguson, le Porsche et la chambre auraient été réalisées en même temps. Pour Stern
01:13:24et Oboye, le Porsche serait un ajoutardif environ 200 ans après la réalisation des chambres. Pour
01:13:31Huntington, l'Omas Rishi serait la dernière de bar à bar après Sudama, Karan Chopar et
01:13:36vice versa au prix, et les travaux auraient été stoppés à la mort d'Ashoka, faute de financement.
01:13:41Pour lui, le Porsche et la chambre auraient été réalisées en même temps.
01:13:46Pour Gupta, elle n'aurait rien à voir avec Ashoka et Dasaratha parce qu'elle n'a pas
01:13:50d'inscription d'eux, parce qu'elle serait la seule de toutes les chambres Maurya à ne pas avoir de
01:13:54forme originale, parce qu'elle est inachevée et parce que son Porsche serait de style bouddhique.
01:13:59Il pense qu'elle aurait été taillée bien après Barabar et Nagarjuni. Et enfin, Harry Falck serait
01:14:05allié à la vie d'Huntington et de Ferguson. Pour lui, le Porsche et la chambre auraient été réalisées
01:14:09en même temps et le Porsche ne serait pas bouddhique. Face à ces opinions divergentes, nous ne sommes
01:14:16pas plus avancés. Il s'agit pourtant d'un point important car c'est à partir de cette chambre
01:14:20qu'ont été déduits les outils et les méthodes pour la réalisation de toutes les chambres.
01:14:26Tournons-nous vers le terrain. Lomas Rishi est la seule à posséder un Porsche et un encadrement
01:14:30extérieur courbe. Elle est la seule à ne pas avoir de forme originale. Soit elle est la première de
01:14:35toutes et Soudama une copie, soit c'est l'inverse. La différence majeure entre les deux géométries
01:14:42étant la position du passage d'entrée. Elle surprend par ses murs polis alors que le reste
01:14:50en est encore aux grosses oeuvres. L'état d'avancement des travaux dans cette grotte est surprenant.
01:15:00Il faut conduire tout le travail de dégrossissage avant d'entamer le polissage.
01:15:05Ce polissage des murs est une aberration. On voit bien mais le mode opératoire n'est pas cohérent.
01:15:11C'est commencé de partout et c'est fini nulle part. C'est pareil, j'ai du mal à comprendre.
01:15:18Ça ne rend pas la chose impossible, ça rend la chose plus compliquée. On finit tout de la forme et
01:15:22après on va polir brillant tout d'un coup. C'est des étapes clés de chaîne de fabrication. On ne peut
01:15:27pas finir une et puis commencer une autre. Non, c'est tout en même temps qu'il doit se faire.
01:15:30Là, c'est incompréhensible, c'est pas logique. On ne fait pas définition tant qu'on n'a pas maîtrisé le reste.
01:15:37On a l'impression qu'ils ont dû exploiter une chambre qui avait été faite et qui n'avait pas été terminée.
01:15:43Mais ceux qui ont voulu terminer, ils n'ont pas compris. Je ne sais pas, honnêtement je ne sais pas.
01:15:46Mais en tout cas, ce n'est pas la logique du reste des chambres.
01:15:54Les tailleurs de pierre indiens commencent traditionnellement par le plafond. Or là, c'est l'inverse.
01:16:00Dans le dôme de Soudama, en faisant jouer la lumière, on observe les spectres de deux cercles
01:16:05mieux visibles sur les scans. On va essayer un premier cercle et puis on envoie un deuxième à l'intérieur.
01:16:10Et quand on regarde les centres de chacun de ces cercles, ils sont exactement tous alignés.
01:16:16Ce qui suggère l'emploi d'un dispositif mécanique permettant de tailler la coupole.
01:16:20Technique qu'on n'aperçoit pas du tout dans le dôme de Lomas Ritchie.
01:16:23Les coups de pique vont également trop près de la forme finale de la voûte.
01:16:27Ce qui risque de générer, si on creuse trop, des négatifs d'enlèvement, des trous, qu'on observe sur place.
01:16:34Et enfin, sur la paroi extérieure de cette chambre, des indices renforcent l'impression de se trouver
01:16:39face à deux périodes de tailles et de techniques différentes.
01:16:42Ces rainures, cerclées de rouge sur cette image.
01:16:46Bien connues des tailleurs de pierre, ces rainures sont les marques de l'aiguisage des pierres.
01:16:51Ces rainures sont les marques de l'aiguisage des lames de ciseaux, qu'on frotte contre le granit.
01:17:00On en observe un peu à l'extérieur de Sudama.
01:17:03Mais curieusement, ni sur la paroi externe de Karan Chopar, ni sur Vis Vasopri,
01:17:08et pas davantage à l'extérieur de Gopika, de Vadatika et de Vapiyaka,
01:17:12montrant que les tailleurs de pierre n'ont pas procédé ainsi.
01:17:16Pourquoi alors sur la façade de Sudama ?
01:17:19Très probablement à cause de cette niche, rajoutée et non terminée.
01:17:23La difficulté, c'est le manque de documentation archéologique par rapport à tout ça.
01:17:26Parce que là, on sent bien qu'il y a des lacunes, on sent bien que les inscriptions,
01:17:31un peu comme le porche d'entrée...
01:17:34J'ai des doutes que ce soit contemporain, vraiment, du creusement des grottes.
01:17:41Du coup, l'inscription du roi, en fait, est-ce que ça correspond à la même date que la réalisation de ça ?
01:17:47Il n'y a rien qui le prouve, quoi.
01:17:49Mais il y a des fois, il faut savoir dire qu'on ne sait pas.
01:18:05Pour confronter ces observations, nous avons proposé à Éric Bernard de la visiter.
01:18:10Comme le géologue Éric Gontier avant lui, il a d'abord constaté la différence de qualité d'exécution
01:18:15entre le porche et l'intérieur des chambres terminées.
01:18:18Il n'y a rien de dressé, c'est vraiment pour donner la forme.
01:18:21Là, la forme était demandée, le gars a exécuté dans l'urgence les arêtes.
01:18:26Ici, vous avez en plus une courbe relativement bien réglée, qui est un jardeau givre.
01:18:34Et vous n'avez aucune arête de fond taillée correctement.
01:18:38Alors par contre, c'est poli.
01:18:40Il est hors de question d'imaginer que l'équipe qui a même démarré l'ouvrage
01:18:45et à l'intérieur de celui-ci puisse être en rapport avec cette exécution.
01:18:52C'est tout à fait anachronique.
01:18:55On voit bien que l'équipe a perdu la géométrie, c'est-à-dire que ça a été attaqué partout.
01:19:01On a cherché des points, plus ou moins, et en fin de compte, ça a été abandonné
01:19:06parce que l'équipe ne pouvait pas mener à bout le travail qui avait été fait ailleurs.
01:19:13C'est de toute évidence.
01:19:17Un détail auquel nous n'avions pas fait attention, l'a interpellé.
01:19:22La petite paroi au fond est partiellement polie,
01:19:25tandis que la partie supérieure n'est pas encore dressée.
01:19:28La reprise du travail va générer ce que les tailleurs appellent un spectre,
01:19:31c'est-à-dire une empreinte qui va ensuite se voir avec la lumière.
01:19:35C'est physique dans la pierre, on le perçoit,
01:19:39parce qu'en reprenant une surface, ça laisse toujours des traces.
01:19:44Or, on n'en observe pas sur les petites parois des autres chambres,
01:19:47ce qui veut dire qu'elles n'ont pas été réalisées de cette manière.
01:19:52Même chose avec le sol inachevé, qui aurait contraint à reprendre tout le bas des parois polies.
01:20:02Récapitulons.
01:20:03Dans cette chambre, les opérations de taille et de polissage se déroulent de manière illogique
01:20:08et les coups d'outils démontrent une absence de méthode et de rigueur.
01:20:11La qualité du travail du Porsche n'est pas la même que celui de l'intérieur des chambres.
01:20:16On n'observe pas de rainures d'aiguisage sur les façades des chambres,
01:20:19à l'exception des sols qui présentent des éléments inachevés,
01:20:22sous-damas et l'hommage richi.
01:20:26Si l'hommage richi est la première des chambres,
01:20:28et si le Porsche a été réalisé en même temps que l'intérieur,
01:20:31cela veut donc dire qu'il fait partie du principe architectural de construction.
01:20:36Dans ce cas, pourquoi Soudama et Karin Chopard, juste à côté et terminés, n'ont-elles pas de Porsche ?
01:20:46Mais si, comme le pensent certains endologues, le Porsche a été ajouté après,
01:20:49cela devrait alors se voir sur place.
01:20:52Il s'avère que c'est le cas.
01:20:54Il est très facile pour n'importe quel homme de métier de venir poser la main ici.
01:21:00On voit bien que la surface que vous avez ici est pratiquement identique aux autres salles,
01:21:07c'est-à-dire avec la précision.
01:21:10Et quand vous glissez sur une forme d'arête qui est par là,
01:21:14le tailleur des pieds qui a repris dans cette surface et qui a exécuté le Porsche,
01:21:19s'est retrouvé lui, à tailler, avec une certaine maladresse.
01:21:24On voit bien qu'il y a une incohérence de maîtrise.
01:21:27Et là, on le retrouve ici.
01:21:30Et tout ça, vous voyez cette partie-là étant creux, ou mal polies, ou mal taillées.
01:21:35Et puis quand on reprend le Porsche ici, pareil,
01:21:39il y a des creux énormes sur une surface de 40 cm.
01:21:43Et là, il y a un creux de pratiquement 1 cm.
01:21:46Vous prenez n'importe quel pierreux qui vient ici regarder la surface, etc.,
01:21:52sans avoir la connaissance géométrique,
01:21:54et il vous dit qu'il y a un souci de facture entre cette partie-là et le reste.
01:22:00C'est tout à fait évident.
01:22:05Ceux qui ont taillé ce Porsche avaient évidemment dans l'idée de réaliser ou de terminer l'intérieur.
01:22:10Les coups d'outils qu'on observe aujourd'hui viennent donc de cette même équipe
01:22:13et ne peuvent pas nous éclairer sur la manière dont ont été réalisées les autres chambres.
01:22:20Soit ce Porsche date d'Ashoka, soit il y a été ajouté bien après.
01:22:24Mais s'il date de la période Ashoka, alors les autres chambres sont plus anciennes
01:22:28et étaient déjà terminées depuis longtemps, au moment de leurs donations aux Agévikas,
01:22:32ce qui expliquerait qu'on avait déjà, à cette époque, oublié leur véritable fonction.
01:22:38Je suis d'accord avec vous que l'idée originale a disparu.
01:22:45Car compte tenu de la complexité du travail que représentent ces chambres,
01:22:49comment décemment les réduire à de simples abris,
01:22:51à moins justement d'en avoir hérité et d'ignorer le travail qu'elles ont réellement représenté ?
01:22:59Un mois après notre visite à Barabar, nous sommes retournés voir Éric Bernard.
01:23:04Ce qui pose surtout problème dans ce cadre de figure,
01:23:07c'est surtout le donneur d'ordre, celui qui a imaginé le volume
01:23:11et puis qui se dit, voilà, j'exige ça et je vais trouver l'équipe qui va me le produire.
01:23:18Là même, maintenant, dans les labos de recherche et les labos d'exécution,
01:23:22ça demande un certain nombre d'hommes et d'femmes,
01:23:25Maintenant, dans les labos de recherche et les labos d'exécution,
01:23:28ça demande un travail colossal de mettre en phase ces deux mondes.
01:23:33Là, ça a été fait.
01:23:35Ça a été fait sans aucune intériorité.
01:23:37L'exigence de géométrie a une raison.
01:23:41Parce qu'on n'a pas de référence, nous, occidentaux, d'un exemple de ce type-là.
01:23:48Monolithique et taillé comme ça, d'un seul jet, en plus, en cavité.
01:23:55Où en était sa réflexion sur les outils et méthodes ?
01:23:58Disons, le dégrossis, ça se fait très vite.
01:24:01Je veux dire, quelqu'un de vigoureux, en forme et puis avec une technique,
01:24:06on peut abattre du gros boulot.
01:24:09Après, cette approche de finition, parce qu'en plus, on est dans l'obscurité,
01:24:13avec des bougies, avec des systèmes d'éclairage complètement...
01:24:18Donc là, après, il y a un timing qu'on ne maîtrise pas de tout.
01:24:20Alors j'ai cherché, j'ai cherché les erreurs, évidemment.
01:24:23Sur place, j'ai vu les flashes, j'ai vu les spectres de taille qui ressortent.
01:24:28Donc là, ça m'a un peu rassuré, d'une certaine manière,
01:24:32de me dire, voilà, ça, c'est des confrères à moi qui ont fait ça, voilà.
01:24:37Mais tout de même.
01:24:40Avec quoi pourrait-on comparer le travail de ces chambres ?
01:24:43Le seul élément de référence avec des archives, c'est ce socle.
01:24:47C'est en fait ce piédestal qui a été taillé pour recevoir l'obélisque de Luxor,
01:24:52donc à la Concorde.
01:24:54Et cet élément est la seule référence qu'on a sur le volume,
01:24:59c'est-à-dire, disons, 16 mètres cubes, donc 40 tonnes de roches granitiques,
01:25:05du granit assez proche de barre à barre, en plus,
01:25:08mais évidemment taillé en carrière, sortie de carrière, etc.
01:25:15On sait très bien qu'à cette époque-là, en 1836,
01:25:18ils étaient encore sur des formes d'outils,
01:25:21des formes de techniques qui venaient dans la nuit des temps.
01:25:25Puisque nous étions sur place, nous avons décidé de passer le rugosimètre
01:25:29sur ce socle, parfaitement documenté.
01:25:32Première Z de 60 microns, deuxième 47 et troisième 25,
01:25:39bien loin des valeurs relevées à barre à barre et nagarjuni,
01:25:41sachant que cet objet n'a pas été poli verticalement mais horizontalement,
01:25:45dans le sens de la gravité, ce qui n'est absolument pas le même travail.
01:25:51Un détail qui parlera probablement aux ingénieurs,
01:25:53la différence de l'angle d'inclinaison entre les grandes et les petites parois.
01:26:00Pourquoi ce changement d'angle ?
01:26:01Et pourquoi 88,5 degrés, un degré et demi de la verticale,
01:26:05ce qui ne se voit quasiment pas à l'œil nu ?
01:26:08C'est dix fois plus difficile de respecter cet angle-là
01:26:11que de rester sur une paroi verticale, bien maîtrisée, etc.
01:26:17Un détail qui n'a l'air de rien, mais qui devait avoir son importance
01:26:20puisque c'est une contrainte de plus qui se répète d'une chambre à l'autre,
01:26:23et en plus en symétrie.
01:26:27Cela fait penser à une amélioration des formes suite à un processus d'expérimentation,
01:26:32des angles différents pour un but spécifique.
01:26:34Mais lequel ?
01:26:40Parlant du poli, on remarque quelques éclats dans celui des chambres terminées,
01:26:44comme ici, dans le bas de la paroi de Karin Chopard.
01:26:47Nous pensions qu'il s'agissait de dégradations intérieures,
01:26:49mais pour lui, ce sont des faiblesses du granit au moment de la taille.
01:26:54Le fait de passer au poli sans avoir à essayer de cacher,
01:27:00c'est-à-dire de cacher les erreurs de la nature, disons.
01:27:04Et on voit bien que le poli est venu sur une forme
01:27:09extrêmement rigoureuse et définie au niveau des côtes.
01:27:13Et après, il y a des trous et des choses comme ça.
01:27:17Donc on voit bien que ce poli n'est pas du tout esthétique,
01:27:19n'est pas du tout en rapport avec un besoin de confort visuel ou quoi que ce soit.
01:27:26C'est tout à fait, à mon avis, à oublier.
01:27:31Un poli davantage technique qu'esthétique.
01:27:34Un autre tailleur de pierre nous avait confié que si ces chambres,
01:27:36réalisées avec autant de précision et de sobriété,
01:27:39étaient dépourvues d'images religieuses ou de motifs divers,
01:27:43cela plaidait pour des objets ayant une fonction bien précise.
01:27:47À ce sujet, les scans ont révélé une autre curiosité,
01:27:50découverte par le chercheur Quentin Lepla.
01:27:52Alors que tous les passages d'entrée sont à 90 degrés, ou presque...
01:27:56La chambre de Vanatika, elle a un couloir qui est légèrement désaxé,
01:28:00qui n'est pas dans le même axe que la chambre.
01:28:03C'est le couloir d'entrée ici, là, qui, lorsqu'il est prolongé,
01:28:08vient, entre guillemets, taper sur Vapilyaka à 90 degrés.
01:28:14Et en plus de ça, l'axe de ces deux couloirs,
01:28:18il indique les axes Nord-Sud, Est-Ouest.
01:28:22Ces deux grottes, pour moi, elles ont été pensées ensemble.
01:28:24Ce n'est pas deux trucs indépendants qu'on a faits.
01:28:26Il y a une pensée globale pour les concevoir.
01:28:29Ça veut dire qu'ils ont, eux, des méthodes de tracé,
01:28:32des méthodes de report de tracé intérieur vers l'extérieur,
01:28:35qui leur permet, avec des scènes d'arpentage que je ne connais pas,
01:28:39de pouvoir reporter ce qu'il y a à l'intérieur parfaitement à l'extérieur,
01:28:42sans aucune perte de géométrie.
01:28:43La géométrie est une contrainte telle qu'on ne peut pas y intégrer le hasard.
01:28:51Ça, c'est quelque chose d'extrêmement important.
01:28:53C'est-à-dire que quand on est face à un volume géométrique extrêmement maîtrisé,
01:28:58c'est que derrière, il y a une pensée extrêmement complexe ou maîtrisée.
01:29:02On n'est pas dans l'à-peu-près.
01:29:05Ça aussi, c'est assez troublant qu'ils soient arrivés à faire un lien entre deux cavités.
01:29:11On est petit, on est là, humainement, on est face à un élément géologique majeur.
01:29:20À quoi peut bien servir une telle particularité qui ne se découvre qu'à l'aide d'un scan 3D ?
01:29:25Pourquoi positionner le couloir perpendiculairement au grand côté de l'autre chambre ?
01:29:29Pourquoi cette contrainte supplémentaire ?
01:29:35Considérons maintenant la géométrie de ces chambres.
01:29:38Grâce à des mesures effectuées sur place,
01:29:40Harry Falck a déterminé la valeur de l'étalon de mesure employé,
01:29:43qu'il a appelé Yard Moria, ou Yard de barre à barre, d'environ 85,5 cm.
01:29:49Grâce au scan, Quentin Leplat a fait le même travail de son côté et a pu affiner cette valeur.
01:29:54On observe qu'il y a, par exemple, une géométrie particulière qui en émerge, des proportions.
01:29:59Donc si j'ai des proportions de deux unités sur la largeur, trois sur la longueur,
01:30:05je vais pouvoir assez facilement trouver un dénominateur commun.
01:30:08Et il se trouve que ce dénominateur commun, il revient sur les cinq scans que j'ai étudiés.
01:30:13Pour une raison inconnue, cet étalon varie très précisément d'une chambre à l'autre.
01:30:17À quelques millimètres près, mais en moyenne, ce que je retrouve, c'est 85,4,
01:30:21c'est la valeur moyenne d'un yard de barre à barre, par exemple, théorique,
01:30:26qui a servi à dimensionner ces chambres-là.
01:30:28Parce qu'il est évident qu'on a utilisé une unité de mesure.
01:30:31On a vu à quel point on a positionné l'entrée des couloirs, on a vu le côté modulaire.
01:30:36Donc on a forcément une unité de mesure.
01:30:38Cet étalon a en effet permis de comprendre la géométrie au sol de ces chambres.
01:30:42Ici, on a un rapport de proportions qui est très simple, c'est deux tiers.
01:30:46Deux pour la largeur, trois pour la longueur et on a les proportions des chambres.
01:30:50Et celles d'à côté, c'est exactement pareil, c'est des proportions deux par trois.
01:30:55La mesure qui en ressort est la même.
01:30:58On est dans quelque chose qui est clairement calibré
01:31:02suivant des critères géométriques et métrologiques.
01:31:05Ce n'est pas quelque chose qui est fait, évidemment, pour aller stocker de la farine
01:31:11ou s'amuiter quand il pleut, on sent que c'est quelque chose de bien plus réfléchi.
01:31:15On a un rapport de 5 par 12 avec Arane Chopard et de 3 par 7 avec Gopika.
01:31:21Mais passons maintenant au volume, car les scans nous les ont donnés très précisément
01:31:25ce qui lui a permis de remarquer un extraordinaire rapport entre Vatatika et Vapiaka.
01:31:30Elles ont des volumes qui ont des rapports en nombre entier,
01:31:337 par 8 avec une précision qui est vraiment remarquable.
01:31:37C'est en proportion.
01:31:39Rappelez-vous les produits en croix de votre enfance.
01:31:41Si le volume de Vatatika vaut 7, alors celui de Vapiaka vaut 8.
01:31:48Même chose avec Sudama.
01:31:49Si le volume de la Grande Salle vaut 12, alors le volume du Dôme vaut 5.
01:31:56Un rapport de 12 sur 5 déjà présent dans la géométrie au sol de Karane Chopard,
01:32:01dont le volume est lié avec celui de Gopika.
01:32:04Là, on a un rapport encore plus simple de 2 tiers.
01:32:07Si le volume de Karane Chopard vaut 2, alors celui de Gopika vaut 3.
01:32:12Et en plus de ça, si je l'ai converti, ces deux grottes,
01:32:17en yards de barres à barres, ou de moria comme on veut,
01:32:22l'unité de mesure que j'ai déduit avant,
01:32:24je tombe sur 200 et 300 yards cubes de barres à barres.
01:32:29200 yards cubes et 300 yards cubes, 200 et 300 piles,
01:32:33pour des volumes en rapport de 2 par 3,
01:32:35ce qui permet également de déduire la valeur du yard de barres à barres à partir des volumes.
01:32:42Les plus sceptiques hargueront peut-être le hasard
01:32:45en disant qu'il ne s'agit que de 2 chambres sur 5.
01:32:48Mais les rapports de volumes de 7 sur 8 entre Vadatika et Vapiaka,
01:32:52et 5 sur 12 entre le Dôme de Sudama et sa grande salle,
01:32:55montrent que les concepteurs savaient calculer les dimensions de toutes ces chambres
01:32:59pour que leurs volumes soient en rapport.
01:33:12L'humanité est capable de planifier quelque chose,
01:33:15et on ne peut pas atteindre 200 ou 300 yards cubes
01:33:19pendant que l'on coupe une grotte.
01:33:22Il faut le planifier avant.
01:33:24Cela signifie qu'on ne peut pas planifier et penser en numéros cubes.
01:33:30Et c'est quelque chose qui n'a jamais été pensé.
01:33:36Personne n'a jamais pensé à quelque chose
01:33:39que l'on pouvait prouver,
01:33:41et qu'on pouvait aller là-dedans avec nos machines modernes
01:33:44et qu'elles pouvaient trouver le contenu cubique de Gopika.
01:33:50Et là, on a 300 fois plus de yards cubes.
01:33:57Vous vous souvenez à quel point les formes des chambres sont complexes ?
01:34:00Pour connaître les volumes sans passer par les scans,
01:34:03il faut décomposer chacun en assemblages de volumes simples,
01:34:06calculer chaque portion de volume, puis les additionner.
01:34:10Mais le problème posé aux concepteurs de barre à barre est inverse,
01:34:13et beaucoup plus complexe.
01:34:15Il consiste à déterminer chacune des dimensions des chambres,
01:34:18longueur, largeur, hauteur, rayon des courbes, etc.,
01:34:21pour que les volumes terminés fassent les nombres attendus.
01:34:24Ce qui, face à la complexité des géométries de chacune d'elles,
01:34:27va bien au-delà du triangle de Pythagore.
01:34:31Ça vient non seulement confirmer l'usage du yard de barre à barre,
01:34:35ça confirme le fait qu'on a dimensionné ces deux chambres-là
01:34:39avec des rapports de volume en nombre entier.
01:34:41Et la précision, d'après les données qu'on a,
01:34:44c'est de 1 mille cinq centième.
01:34:46Donc c'est ultra précis.
01:34:48On aurait du mal à faire mieux, je ne vois pas comment on pourrait faire mieux.
01:34:52Et forcément, il faut maîtriser le nombre pi
01:34:55avec beaucoup de décimales après la virgule.
01:34:57Parce que si on veut faire des calculs
01:34:59avec toutes les portions de cônes, de cylindres, de sphères qu'il y a,
01:35:03le nombre pi, il ne faut pas qu'on joue avec des fractions approximatives.
01:35:07Il faut qu'on donne une très très bonne connaissance.
01:35:10La conception et le dimensionnement de ces géométries
01:35:13font intervenir des équations complexes
01:35:15qui témoignent d'un niveau mathématique
01:35:17totalement hors de portée des capacités supposées de l'époque.
01:35:20Donc je pense que ce que vous avez trouvé ici,
01:35:23c'est impressionnant, et c'est unique, incroyable.
01:35:27Cela montre que les géométristes
01:35:31qui travaillaient peut-être main dans la poignée
01:35:33avec les décimales de pierre iraniennes,
01:35:36pouvaient présenter leur connaissance,
01:35:40et ils l'ont fait.
01:35:42Et en même temps, ils savaient
01:35:45que personne ne rentrant dans ces caves
01:35:48ne verrait ces nombres.
01:35:51Ils sont à l'intérieur d'une construction
01:35:54produite de nombres entiers,
01:35:57mais on ne voit pas que l'on est à l'intérieur.
01:36:21On ne peut s'acquérir qu'à la suite d'une longue période d'apprentissage.
01:36:24Le problème étant qu'on ne la voit nulle part.
01:36:27Voilà pourquoi les scans changent tout,
01:36:29et pourquoi nous devons nous sortir des a priori de l'histoire
01:36:32pour comprendre ces chambres.
01:36:37La forme des entrées des chambres a également posé question.
01:36:44À Elora et à Genta, nous n'avons pas vu de porte trapézoïdale,
01:36:47car ce n'est pas une forme typique indienne.
01:36:49Dans son ouvrage dédié à Barabar, reprenant Huntington,
01:36:52l'indologue Gupta évoque une similarité
01:36:55avec les encadrements de portes égyptiennes,
01:36:58également trapézoïdales, qu'il balaye aussitôt
01:37:01au motif que les datations ne correspondraient pas.
01:37:04Mais la datation des chambres n'a absolument rien de certain.
01:37:07Lors du tournage de notre précédent film,
01:37:10nous avions également vu ce type d'entrées trapézoïdales au Pérou,
01:37:13sur des constructions très précisément réalisées,
01:37:16comme celle de Kousko.
01:37:19Ironie du sort, on trouve en Égypte des surfaces de granit poli
01:37:22presque aussi précisément qu'à Barabar.
01:37:25Dans les énigmatiques cuves du Sérapéum de Saqqara,
01:37:28elles aussi dataient à partir d'inscriptions plus que douteuses.
01:37:32Et si nous nous trouvions face aux traces des mêmes bâtisseurs ?
01:37:38Car nous avons fait un autre constat,
01:37:40cette fois avec la chambre Soudama, la plus complexe de toutes.
01:37:43On analyse, le géomètre fait des mesures.
01:37:46Il fait des mesures de manière la plus objective possible,
01:37:49avec un appareil dont il connaît les caractéristiques techniques,
01:37:52notamment ces fameuses incertitudes.
01:37:55Et après, à la fin, on va venir constater ce que l'on a mesuré.
01:37:58Et qu'est-ce qu'on constate quand on mesure l'objet
01:38:01tel qu'on l'a assemblé ? C'est effectivement
01:38:0411 mètres de longueur pour la salle.
01:38:07Après, c'est 11,008 mètres.
01:38:10Si on était à 11,004 mètres,
01:38:13ou à tomber à 11,11 mètres,
01:38:16pour moi, ce serait pareil.
01:38:195,96 mètres pour la largeur.
01:38:22On a une sphère, ici, qui a un rayon de 3 mètres.
01:38:25Un centre, un mètre au-dessus du sol.
01:38:28On a un cône, ici.
01:38:31Un cône, et puis les murs de voûte,
01:38:34qui sont à 2 mètres pile.
01:38:37On arrive aussi à un rayon de 3,03 mètres.
01:38:40Et un centre du cylindre principal
01:38:43à 1,02 mètres au-dessus du sol.
01:38:46Donc, 11 mètres, 6 mètres, 2 mètres, 1 mètre,
01:38:49on ne fait que constater.
01:38:52C'est du constat le plus factuel possible.
01:38:55Je prends plusieurs de ces points,
01:38:58et voilà ce que l'on obtient.
01:39:01Le constat, c'est qu'ici, on retrouve des valeurs métriques
01:39:04à 1, 2, 3, 4 reprises.
01:39:07Mais sur des volumes en 3D,
01:39:10sur une régularité, sur une longueur totale,
01:39:13sur un point ponctuel.
01:39:16C'est des choses remarquables et intéressantes à noter.
01:39:19Un simple constat, mais qui dérange.
01:39:22Car le mètre ayant été déterminé en France en 1795,
01:39:25il apparaît impossible que ces dimensions
01:39:28puissent avoir été pensées et mesurées en mètres.
01:39:31On tombe sur des nombres entiers seulement en mètres,
01:39:34alors qu'en yard de bar à bar, ce n'est pas le cas.
01:39:37C'est vrai qu'on tombe assez souvent sur le mètre quand on mesure.
01:39:40Il est fort probable que le concepteur a pensé les choses
01:39:43avec le mètre et le yard de bar à bar.
01:39:46Dans le film précédent, nous avons constaté le mètre
01:39:49sur divers sites anciens majeurs de la planète,
01:39:52en Bolivie, en Égypte, en France,
01:39:55et maintenant, à bar à bar.
01:39:58Ce qui pose un évident problème historique,
01:40:01car cette connaissance du mètre implique d'une part
01:40:04avoir mesuré la circonférence de la Terre,
01:40:07et d'autre part de l'avoir divisé en 40 millions,
01:40:10comme nous l'avons fait.
01:40:13A moins que ce ne soit l'inverse, c'est plutôt nous qui y ayons fait commun.
01:40:16En Égypte, la valeur de la coudée royale,
01:40:19employée dans la Grande Pyramide, est liée au mètre
01:40:22par l'intermédiaire d'un cercle de 1 mètre de diamètre,
01:40:25en 1795.
01:40:28Mais à bar à bar, il semble qu'il existe aussi un lien géométrique
01:40:31entre mètre et yard.
01:40:34Si je dis que le yard de bar à bar, c'est un cercle de 1 yard,
01:40:37pour le diamètre,
01:40:40et si je divise en 6 comme j'ai fait pour la coudée royale,
01:40:43ce qu'il en ressort, c'est une coudée de 44,72 cm.
01:40:46Et cette coudée de 44,72, si j'en fais un double carré,
01:40:49la diagonale, elle fait 1 mètre.
01:40:52La conception des chambres de bar à bar, c'est des cercles,
01:40:55des angles droits et des figures carrées.
01:40:58Quand on conçoit les choses, on utilise des compas, des équerres.
01:41:01On est dans un travail qui utilise ce genre de géométrie.
01:41:04Donc il est possible qu'on ait déployé
01:41:07les deux mesures dans une seule pièce.
01:41:12Non seulement les compétences viennent bien de quelque part,
01:41:15mais les cahiers des charges des chambres dignes du monde industriel
01:41:18ont bien une raison objective,
01:41:21et ces chambres, une utilisation spécifique.
01:41:24Mais alors laquelle ?
01:41:27Tout dépend de la manière dont on les regarde.
01:41:30Si elles avaient été réalisées par des ingénieurs du futur,
01:41:33on se dirait qu'il y a forcément quelque chose d'important
01:41:36à découvrir dans leur fonctionnement,
01:41:39quelque chose qu'on ne connaît pas encore,
01:41:42mais nécessairement important, car futur égale progrès.
01:41:45Que pourraient-elles être d'autres que de curieux objets
01:41:48à destination de lointains ancêtres aux curieuses croyances ?
01:41:54Forcément moins évoluées ?
01:41:57Prenons un peu de recul.
01:42:00Selon nos connaissances actuelles,
01:42:03l'être humain tel que vous et moi existe depuis au moins 230 000 ans.
01:42:06230 000 ans est une période incroyablement longue.
01:42:09Nous serions restés chasseurs-cueilleurs pendant environ 220 000 ans,
01:42:12durant lesquels nous aurions parcouru la planète à pied
01:42:15pour nous établir presque partout.
01:42:18Et la civilisation humaine aurait démarré il y a seulement quelques milliers d'années.
01:42:21Nous avons longtemps pensé que c'était à Sumer,
01:42:24il y a environ 6 000 ans.
01:42:27Puis nous avons découvert Gobekli Tepe, en Turquie,
01:42:30qui fait reculer cette date 7 000 ans plus tôt.
01:42:33Mais il reste encore beaucoup de zones d'ombre sur notre passé.
01:42:36Comme en Égypte, où l'histoire ne se souvient même plus
01:42:39de comment les pyramides de Gizeh ont été bâties,
01:42:42il y aurait à peine quelques millénaires.
01:42:45Pas grand-chose face aux 230 000 ans d'histoire de notre humanité.
01:42:48Les Égyptiens ont pourtant énormément écrit dans toutes sortes de domaines,
01:42:51mais apparemment rien sur la réalisation de ces chantiers pharaoniques,
01:42:54ni sur la fonction de ces édifices,
01:42:57considérés aujourd'hui seulement comme des monuments funéraires.
01:43:00Soit rien n'a été écrit, soit cela a été effacé par leurs successeurs.
01:43:03Car notre histoire a toujours été remaniée en faveur des rois,
01:43:06des empereurs et des dictateurs qui se sont succédés au cours des siècles,
01:43:09et qui, traitant au passage leurs prédécesseurs de barbares,
01:43:12ont chaque fois réécrit le passé pour se donner le beau rôle au présent.
01:43:15Les exemples sont nombreux.
01:43:18L'homme de Néandertal, sorte d'homme-singe réhabilité par les récentes découvertes.
01:43:21Les Gaulois, peuples grossiers et barbares
01:43:24selon la propagande romaine jusqu'à récemment.
01:43:27Et enfin les Grecs et leurs prodigieux savoirs et techniques insoupçonnés,
01:43:30qui ont permis de réaliser le mécanisme d'Anticythère.
01:43:37L'histoire n'est donc pas fausse.
01:43:40Elle est juste partielle, et si fiée aveuglément, dangereuse.
01:43:43Concernant Barabar et Nagarjuni, elle n'a pas grand-chose à nous servir.
01:43:46Soit personne n'a jugé utile de rapporter à la postérité
01:43:49comment les chambres ont été réalisées,
01:43:52ni à quoi elles servaient véritablement.
01:43:55Soit cela a été perdu. Ou détruit.
01:43:58Sur les inscriptions attribuées à Ashoka et Dasaratha,
01:44:01le nom Ajivika a été gratté par leurs successeurs,
01:44:05Pourquoi gratter ces inscriptions,
01:44:08si ce n'est pour tenter de faire disparaître cette mention ?
01:44:11L'histoire ne se souvenait également plus d'Ashoka.
01:44:14Surnommé Ashoka le Grand, il fut pourtant un roi important,
01:44:17fondateur de l'histoire de l'Inde,
01:44:20et sans lequel le bouddhisme aurait probablement disparu.
01:44:23Mais il a été oublié pendant près de 2000 ans,
01:44:26avant d'être redécouvert il y a à peine deux siècles, grâce à ses piliers.
01:44:29Tout ce qui ne repose pas sur une preuve, donc sur un fait incontestable,
01:44:33Poursuivant la réflexion, tout ce qui n'est pas ou n'a pas été démontré,
01:44:36est donc toujours sujet à caution et peut potentiellement être remis en question.
01:44:50Pratiquer l'art de la table rase de Descartes consiste à ne pas rejeter une hypothèse qu'on croit impossible.
01:44:55Difficile dans les faits, car nous sommes tous, absolument tous,
01:44:58influencés par nos croyances,
01:45:01qui ne se limitent pas à la sphère religieuse.
01:45:07La croyance, par exemple, que bien que notre histoire humaine puisse comporter quelques lacunes ou zones d'ombre,
01:45:12rien ne pourrait fondamentalement la remettre en question.
01:45:17La croyance encore que le sens du progrès va crescendo, de la roue au smartphone,
01:45:21et qu'il n'a pu en être autrement.
01:45:25La croyance, enfin, que les chambres de Barabar et Nagarjuni n'ont rien à nous apprendre d'utile,
01:45:30à nous, les modernes inventeurs de satellites et d'intelligence artificielle.
01:45:37Ces chambres apparaissent pourtant totalement anachroniques
01:45:40et semblent avoir un but davantage technique qu'artistique ou religieux.
01:45:45Faire table rase, c'est accepter d'envisager que notre histoire puisse avoir oublié une partie de notre passé,
01:45:50et tenter de considérer ces objets sans idées préconçues.
01:46:01Immédiatement, tout le monde respire.
01:46:04Aujourd'hui comme hier, personne ne va se donner autant de mal pour aboutir à des réalisations
01:46:32aussi précises s'il n'y a pas un but à la hauteur des efforts déployés, qui dans
01:46:36ce cas sont colossaux.
01:46:37Quand on va venir pousser l'analyse plus finement, il y a quelque chose d'autre qui
01:46:46apparaît, une autre philosophie, donc une autre volonté.
01:46:49Pour moi c'est tout évident, c'est évident, c'est un objet scientifique, un objet de
01:46:54mesure tellement exceptionnelle que la raison de ces objets doit avoir une utilité scientifique.
01:47:04Voilà, ce ne peut être que ça.
01:47:06Il a été observé par plusieurs scientifiques que le son à l'intérieur d'une telle cave
01:47:16augmente.
01:47:17Si en plus il y a une autre mesure qui est celle du son, parce que c'est peut-être
01:47:36ce qu'ils cherchaient, ça peut expliquer les parois inclinées, ça peut expliquer
01:47:40les voûtes, les voûtes sur trois arcs, faites avec trois rayons différents, le polymiroir
01:47:48qui justement va favoriser la propagation et la réverbération, ça permettrait de
01:47:53justifier en fait la forme et pourquoi on est allé par exemple faire des polymiroirs
01:47:59dans ces grottes.
01:48:00On aurait pu s'arrêter à l'étape avant, on avait déjà le maîtrise de la géométrie.
01:48:05Puisque les chambres sont taillées dans la masse, les voûtes n'ont en effet pas
01:48:12d'utilité structurelle et les plafonds auraient pu avoir n'importe quelle forme.
01:48:16Lorsqu'on entre dans ces chambres obscures, l'interaction du son avec leur géométrie
01:48:26saute aux oreilles et produit des effets impressionnants, difficiles à restituer avec des micros.
01:48:31Le plus remarquable avec ces chambres est la combinaison de la résonance et de la réverbération,
01:48:51comme on vient de l'entendre grâce à la voix de la chanteuse Tritacina.
01:48:54Le temps de réverbération correspond au temps que met le son à décroître après
01:48:59qu'on ait éteint la source, tandis que les résonances acoustiques correspondent
01:49:08à des fréquences spécifiques pour lesquelles le son est amplifié.
01:49:11Le faible taux d'absorption du granit et la géométrie des parois produisent des effets
01:49:17différents entre les basses et les hautes fréquences.
01:49:19Mais ces effets dans les chambres sont-ils des conséquences involontaires dues à leur
01:49:24géométrie ou au contraire intentionnelles et maîtrisées dès la conception ?
01:49:29Depuis que nous les avons découvertes, nous avons réalisé des expériences et des enregistrements.
01:49:37En mai 2017, en parallèle des scans, nous avons enregistré des explosions de ballons
01:49:46calibrés et des variations de fréquences sur tout le spectre audible par l'humain
01:49:50pour permettre aux acousticiens de comprendre l'acoustique des chambres.
01:49:53Nous avons ensuite fait analyser ces données, mais les instruments utilisés n'étaient
01:50:08pas assez précis.
01:50:09Nous sommes donc retournés sur place en mars 2020, avec un protocole de mesure très précis,
01:50:16deux sonomètres, un enregistreur et des ballons.
01:50:18Nous avons enregistré une centaine d'explosions de ballons dans les chambres avec nos sonomètres.
01:50:24Nous avons ensuite fait analyser toutes ces données par plusieurs acousticiens.
01:50:39Pour l'anecdote, au travers d'une étude réalisée par un calcul numérique, un des
01:50:45rapports conclut qu'une source d'émission de 74,9 Hz placée au sol, au centre du dôme
01:50:50de Sudama, produirait un son qui serait très amplifié autour d'elle et des parois.
01:50:55Il se trouve que c'est ce que nous avions expérimenté par hasard en 2020, en diffusant
01:51:00une fréquence de 75 Hz avec notre enceinte placée au sol, au centre du dôme.
01:51:05Très concrètement, notre enceinte a littéralement grillé.
01:51:27Ce qui s'est reproduit lorsque nous sommes retournés en mars 2023 vérifier certaines
01:51:33données et réaliser de nouveaux enregistrements.
01:51:35Et voici ce que nous avons constaté.
01:51:55Ces chambres sont une sorte de cas d'école, car elles cumulent différentes caractéristiques
01:52:00qui ne sont pas actuellement recherchées par les acousticiens modernes.
01:52:03Tout d'abord, elles génèrent une inintelligibilité de la parole et des chants rapides, qui deviennent
01:52:09inaudibles lorsqu'on est à plus de 50 cm de la source.
01:52:13Autrement dit, elles ne sont pas faites pour écouter un prêche, ni pour parler.
01:52:16Elles conjuguent à la fois réverbération et résonance.
01:52:35Les temps de réverbération dans les basses fréquences sont très élevés.
01:52:56A titre de comparaison, pour Notre-Dame de Paris, la réverbération dans les basses
01:53:00fréquences dure de 10 à 12 secondes, quand dans le dôme de Sudama, elle atteint 62 secondes
01:53:06et dans Vadatika, 70 secondes.
01:53:08Depuis environ une centaine d'années, les acousticiens réalisent des salles réverbérantes
01:53:18pour mesurer l'absorption d'un objet, c'est-à-dire l'énergie acoustique qu'il va conserver.
01:53:22Si la réverbération y dure jusqu'à 15 secondes, il neutralise en général l'effet de résonance.
01:53:28Or, à Barabar et Nagarjuni, les résonances sont également très marquées, c'est-à-dire
01:53:36qu'on a une amplification très importante du son pour certaines fréquences, qu'on
01:53:40entend donc beaucoup plus fort.
01:53:41Ces temps de réverbération exceptionnels viennent confirmer le caractère intriguant
01:53:53de ces chambres.
01:53:55Selon les acousticiens, qui ont confirmé notre intuition d'une utilisation des fréquences,
01:54:00ils sont dus au faible taux d'absorption du granit, mais également au poli, à l'inclinaison
01:54:04des parois, et aux symétries des volumes.
01:54:06Car le poli des surfaces augmente la réverbération des très hautes fréquences.
01:54:12Les symétries des volumes augmentent celles des basses fréquences par la présence de
01:54:16fortes résonances.
01:54:17L'inclinaison des parois neutralise l'effet déco flottant et semble jouer avec la focalisation,
01:54:22c'est-à-dire la concentration des sons, en des endroits particuliers, ce qui est
01:54:26également le cas avec les voûtes, comme l'a remarqué Olivier Lavigne.
01:54:29Quelques explorations montrent un retour focal extrêmement intéressant entre 70 et 80 cm
01:54:35de hauteur dans Gopika, où des perceptions sensorielles pourraient être maximales dans
01:54:39une configuration d'émissions en position basse, mais nos recherches sont toujours en
01:54:43cours.
01:54:44Bien que l'intentionnalité apparaisse de manière géométrique, avec la coordination
01:54:48des volumes, nous n'avons pas encore pu déterminer d'intentionnalité acoustique
01:54:52dans la conception des chambres.
01:54:53Mais cela ne veut pas dire qu'il n'y en ait pas, car un détail a interpellé les
01:55:01acousticiens.
01:55:02Vapiaka, Gopika et Karan Chopar résonnent chacune sur la fréquence propre de 34,4 Hz,
01:55:09relevée précisément à partir des éclatements de ballons de 2020.
01:55:12Dans Sudama, on relève 34,5 Hz à seulement 0,1 Hz d'écart.
01:55:22La température influence les mesures, et comme nous ne sommes pas certains de celles
01:55:26de Sudama au moment de nos enregistrements, nous n'allons donc retenir que les trois
01:55:30premières, Vapiaka, Gopika et Karan Chopar.
01:55:34Compte tenu de la rareté du nombre de fréquences de résonance en dessous de 50 Hz pour chacune
01:55:39des chambres, et leur grande différence de taille et de forme, il est remarquable
01:55:43de retrouver cette même fréquence propre commune à trois d'entre elles.
01:55:47Cela suggère très fortement une intentionnalité de la part des bâtisseurs.
01:55:51Si c'est le cas, cela vient rajouter encore un niveau de complexité à leur capacité
01:55:55à calculer des volumes, car cela voudrait dire qu'ils auraient donc été en mesure
01:55:59d'anticiper les fréquences produites par les géométries.
01:56:02Le son a toujours occupé une place centrale dans les mythes fondateurs et les récits
01:56:10sacrés des multiples traditions spirituelles du monde.
01:56:13L'un des acousticiens a fait remarquer que l'effet de l'utilisation de salles réverbérantes
01:56:17sur la méditation et les chants à caractère spirituel est bien connu.
01:56:20Mais si l'effet est connu, les chambres de Barabar et Nagarjuni paraissent bien seules.
01:56:25Des chantiers titanesques, totalement incompris par les générations suivantes, qui les ont
01:56:30reléguées à de simples abris contre la pluie.
01:56:32Tout en elles témoigne pourtant d'un long processus de recherche.
01:56:40A moins de croire au miracle, ces chambres ne peuvent jaillir de nulle part et être
01:56:45uniques au monde.
01:56:46Il doit en exister d'autres ailleurs.
01:56:48Si les fréquences jouent bien un rôle dans ces chambres, seraient-ce davantage pour être
01:56:55ressenties plutôt qu'entendues ? Pourrait-il s'agir de la mise en œuvre d'effets naturels
01:57:00par la combinaison de géométrie et de fréquences, en rapport avec l'organisme, et peut-être
01:57:04la conscience ? Une musique peut relaxer, mettre en joie, provoquer des émotions ou mettre
01:57:13au pas.
01:57:14Mais les ondes sonores peuvent également soigner, en impactant des endroits précis,
01:57:19comme la recherche médicale moderne l'explore par la destruction de tumeurs.
01:57:23Les champs peuvent également induire des états modifiés de conscience, c'est-à-dire
01:57:30une perception différente de la réalité que nos anciens, partout sur la planète,
01:57:34semblaient bien connaître.
01:57:35S'il est possible d'induire des états modifiés de conscience au son d'un tambour
01:57:43dans une forêt, quel pourrait être l'impact de ces géométries complexes sur ce phénomène ?
01:57:47Pourquoi, un jour, nos lointains ancêtres ont-ils bâti ces chefs-d'œuvre inégalés ?
01:57:57Pourquoi de telles formes géométriques, complexes et symétriques ? Pourquoi ces
01:58:06cahiers des charges dignes de l'industrie actuelle ? Pourquoi une telle précision,
01:58:13visible seulement par notre technologie moderne ? Comment ont-ils pu réaliser ces chambres
01:58:20avec cette exceptionnelle maîtrise ? D'où viennent-elles ? À quoi servent-elles ?
01:58:27Quelle était leur science ?
01:58:29Après ces années d'exploration et de réflexion, il nous apparaît évident que ce travail colossal
01:58:39avait un but précis et important. Si important qu'il a poussé ces bâtisseurs à accomplir
01:58:43l'impossible, à braver le temps pour réaliser ces chambres aussi étrangères par leur conception
01:58:48que futuristes par leur aspect.
01:58:50Trop simples en apparence, trop complexes en réalité, elles incarnent selon nous l'expression
01:59:03d'une pensée et d'une science différente de la nôtre par l'apparente simplicité de son génie.
01:59:08Une pensée qui pourrait être celle de l'humanité de demain. Un univers entier pourrait s'ouvrir à
01:59:18l'exploration, peut-être celle faite il y a des millénaires par les bâtisseurs de Barabar et
01:59:23Nagarjuni. Voilà peut-être en cet entrouble ce que nous racontent ces chambres, qui nous avons été,
01:59:29mais aussi qui nous sommes, des extraordinaires bâtisseurs, capables du pire comme du meilleur.
01:59:38Les Chambres des Bâtisseurs
01:59:40Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org

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