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NewsTranscription
00:00 Alexis Poulin, sans réserve, l'invité.
00:04 Benjamin Morel, bonjour.
00:06 Vous avez peut-être écouté également ce matin le discours de Volodymyr Zelensky
00:10 et surtout hier l'interview d'Emmanuel Macron,
00:13 assez floue en réalité sur l'aide apportée par la France à l'Ukraine.
00:18 Alors il y aura des avions, des Mirage 2000-5 a-t-il dit,
00:22 mais on ne sait pas le nombre, on ne sait pas non plus le nombre d'armes
00:25 qui seront fournies par la coalition.
00:27 Pour ce qui est de la formation des soldats ukrainiens,
00:30 il a parlé d'une brigade de 4 500 personnes avec équipement, armes, etc.
00:35 et sur l'envoi de formateurs français, de l'armée française sur le territoire ukrainien,
00:40 alors là c'était le grand flou, une sorte de tour de passe-passe
00:43 expliquant qu'il y avait le territoire ukrainien en guerre
00:45 et le territoire ukrainien qui n'était pas en guerre
00:47 et donc on pouvait quand même faire un truc.
00:49 Mais bon, qu'est-ce que vous en avez pensé vous de cette interview ?
00:52 On est sur un flou qu'on peut entendre du point de vue, je dirais,
00:55 des relations diplomatiques, des affaires militaires,
00:57 c'est-à-dire que si vous annoncez trop clairement ce que vous allez faire,
01:00 fondamentalement cela devient relativement inutile.
01:03 Le problème en la matière pour Emmanuel Macron,
01:05 et ce n'est pas la première fois que là-dessus il pêche,
01:07 c'est qu'il y a une forme de conjonction de différents agendas.
01:12 Un agenda qui est un agenda extérieur,
01:14 où là, en effet, le flou s'entend, le flou est nécessaire,
01:17 et également pour ménager les partenaires européens et les partenaires américains.
01:21 Et de l'autre côté, un agenda interne,
01:23 qui implique de faire des annonces parce que potentiellement,
01:25 tout ça peut avoir un impact sur une campagne électorale,
01:28 sur un effet drapeau, sur une cote de popularité du chef de l'État.
01:31 Souvenez-vous quand il parlait potentiellement de l'angoisse de troupes en Ukraine.
01:35 Pareil, Berlin est tout d'un coup hérissée
01:39 parce qu'on ne l'avait pas prévenu qu'on allait rentrer dans la Troisième Guerre mondiale,
01:41 mais ça avait un sens du point de vue de la politique interne.
01:44 Conjoindre les deux, c'est fondamentalement contre-productif,
01:47 parce que du point de vue de l'extérieur, ça décrédibilise notre parole,
01:50 et du point de vue intérieur, pour l'instant, l'effet drapeau se fait attendre.
01:54 Ça a été de nombreuses critiques, d'ailleurs des oppositions,
01:56 qui disaient que cette utilisation de l'Ukraine est un peu une grosse ficelle,
02:01 et la prise de parole d'hier soir du président de la République au JT,
02:06 pour pousser sa candidate, qui est à la peine dans les sondages,
02:08 et que finalement, tout ça, c'est du discours de campagne, et pas autre chose.
02:12 Alors, il y a un élément structurel, un élément conjoncturel.
02:14 D'un point de vue structurel, on a un président de la République en France
02:16 qui est une sorte de Janus, il incarne à la fois l'unité de l'État,
02:19 la continuité de cet État, la France à l'international,
02:23 et là, on ne peut pas lui reprocher que le 6 juin, c'est le 6 juin, en effet.
02:26 Et de l'autre côté, il est chef officieux d'un gouvernement, d'une majorité.
02:30 Et donc, cette conjonction pose fondamentalement problème.
02:33 Ce n'est pas la première fois, d'ailleurs.
02:35 Vous savez, la question des temps de parole en période de campagne,
02:37 on a déjà eu de la jurispondance en 2008, c'est la jurispondance Hollande,
02:40 et à l'époque, c'est Hollande, chef de l'opposition, qui attaque Sarkozy.
02:42 Donc, ce n'est pas si nouveau.
02:43 En revanche, il est vrai qu'ici, il y a un intérêt majeur pour Emmanuel Macron.
02:46 Qu'est-ce qui se passe aujourd'hui d'un point de vue électoral ?
02:49 L'électorat macroniste est démobilisé. Il n'est pas là.
02:51 Alors que, de moment, c'est un électorat qui doit être là aux élections intermédiaires.
02:54 C'est un électorat retraité CSP+, il n'a pas envie d'aller voter.
02:58 Si vous voulez le mobiliser, il faut rendre les enjeux extrêmement importants.
03:02 Il faut lui expliquer qu'il y a quelques mois, c'était Munich 1938,
03:06 maintenant, c'est le D-Day, et en espérant que, in fine, dimanche matin,
03:10 il se dise "quand même, je vais aller voter, parce que sinon, le pays va retomber sous l'occupation".
03:14 Oui, mais qu'est-ce que vous avez pensé, justement, de cette campagne ?
03:17 On peut revenir dessus, au-delà de la locution d'Emmanuel Macron,
03:20 où la candidate de renaissance, Valérie Ayé, a été tout le temps shadowbanned,
03:26 enfin, mis de côté par le Premier ministre, Gabriel Attal, qui prend la parole pour elle,
03:30 Emmanuel Macron qui se met sur les affiches et qui l'enlève carrément.
03:33 Un des derniers posts sur les réseaux sociaux, c'est simplement Emmanuel Macron en photo
03:37 pour dire "le 9 juin, votez pour l'Europe".
03:39 On a l'impression que cette pauvre Valérie Ayé, d'ailleurs c'est François-Xavier Vézémy qui le disait,
03:43 n'est pas aidée et qu'elle est clairement mis de côté par ceux qui gèrent la campagne à sa place,
03:48 Premier ministre et Président inclus.
03:50 Elle est clairement mis de côté et elle n'a jamais eu pour but, en réalité,
03:53 dans le camp macronien, d'exister réellement dans cette campagne.
03:55 Tout bêtement, parce que vous n'envoyez pas une candidate.
03:57 Une campagne européenne, c'est une campagne où il y a beaucoup d'abstentions,
03:59 qui passent en règle générale sous les radars.
04:01 Vous ne nous faites pas un nom sur une campagne européenne,
04:03 mais vous pouvez capitaliser, en revanche, sur un nom qui existe déjà.
04:06 On envoie Valérie Ayé, personne ne la connaît, il n'y a pas de teasing sur son nom,
04:09 elle n'est pas connue en amont et donc évidemment ça ne va pas bien se passer.
04:12 Mais malgré tout, on a envoyé Gabriel Attal dès le mois de janvier.
04:15 On sait qu'il plaît à l'électorat macronien.
04:17 On sait également que l'électorat de 2022, il n'a pas voté Renaissance,
04:20 il a voté Emmanuel Macron.
04:22 On est dans le cadre d'une structure mouvementiste,
04:24 le parti d'identité politique, ça n'existe pas pour l'électorat.
04:27 Ce qui existe, c'est le chef de l'État.
04:29 Et donc, si jamais on veut ramener cet électorat aux urnes,
04:32 il faut lui donner du Macron, il faut lui donner un peu d'Attal.
04:34 La tête de liste n'a que relativement peu d'importance.
04:36 Le problème évidemment, c'est que un, c'est très méprisant pour Valérie Ayé qui fait le boulot,
04:40 et de l'autre côté, forcée de constater que depuis deux mois, ça ne marche quand même pas.
04:44 - Et non, ça ne fait que baisser même.
04:46 Elle est partie sur 20% d'intention de vote, elle est à 15-16,
04:50 avec bien sûr la question de savoir si Raphaël Glucksmann pourrait passer devant le candidat du PS.
04:55 Mais il y a eu de nombreuses critiques également sur cette mise en scène de l'adversaire choisi,
05:02 en l'occurrence le Rassemblement National,
05:04 avec ce débat, Attal, Premier ministre et Bardella, candidats du RN,
05:09 avec ce moment de question, est-ce qu'Emmanuel Macron serait prêt à débattre avec Marine Le Pen,
05:14 comme si toutes les élections dorénavant seraient un candidat d'un parti unique
05:19 contre le Rassemblement National, et puis on sort les grosses ficelles sur l'extrême droite.
05:23 Attention, le rempart.
05:25 D'ailleurs, hier soir, dans l'interview, Anne-Sophie Lapix posait la question,
05:29 mais vous aviez dit que vous alliez faire baisser l'extrême droite.
05:32 Regardez où on en est, ils sont aux portes du pouvoir en 2027.
05:36 C'est logiquement absurde, et en même temps stratégiquement, c'est pas incohérent.
05:40 Logiquement, c'est absurde, parce qu'en effet, l'idée qu'il y aurait un vote utile,
05:44 que le RN serait aux portes du pouvoir avec cette élection, est idiot.
05:47 Tout bêtement, parce que fondamentalement, ce qui peut se passer au niveau du Parlement européen,
05:51 c'est peut-être une poussée des groupes de l'extrême droite, eux-mêmes divisés,
05:55 le CRD, il y en aura peut-être même un troisième,
05:57 et in fine, il n'y aura pas de basculement de la majorité au sein du Parlement européen,
06:01 ce sont des chimères.
06:03 - C'est le PPE, le parti social-démocrate allemand, qui tient le gros des sièges, depuis toujours.
06:09 - Il y aura le PPE, et le PPE ne peut vraiment construire d'alliance structurelle qu'avec l'ONU,
06:13 le parti dans lequel siège La République En Marche, et avec les sociaux-démocrates.
06:17 Donc il n'y a pas vraiment de majorité alternative au sein du Parlement européen,
06:20 il peut y avoir quelques basculements vis-à-vis du CR, le groupe de Mélanie, sur certains textes, mais c'est tout.
06:25 Donc l'idée que le RN soit à 30 ou à 25% ne changera rien dans la configuration européenne.
06:31 En revanche, si vous voulez mobiliser votre électorat, si vous voulez que vos électeurs aillent voter,
06:36 or, dans une élection européenne où il y a beaucoup d'abstentions,
06:38 celui qui l'emporte, c'est celui qui arrive le mieux à mobiliser son électorat.
06:41 Eh bien, vous avez tout intérêt à dramatiser les enjeux.
06:43 Il n'y a pas de vote utile, ça n'a absolument aucun sens pour une élection transnationale,
06:47 à la proportionnelle, le vote utile.
06:49 Mais si jamais vous l'arrivez à mobiliser, il faut déclencher un effet de vote utile.
06:52 Regardez ce qui s'est passé pour François-Xavier Bellamy, pas cette fois mais en 2019.
06:55 L'électorat LR se divise à peu près en trois.
06:59 Une partie reste à LR, une partie vote à l'époque Bardella pour mettre des bâtons dans les roues d'Emmanuel Macron par anti-macronisme,
07:05 et une partie vote Loiseau pour faire barrage au RN.
07:09 Ça n'a pas de sens, d'un point de vue logique.
07:11 Mais en revanche, électoralement, ça permet de capitaliser, et donc c'est pas tout à fait idiot,
07:15 et c'est le principe de la campagne de 2019, comme de celle de 2022,
07:19 même si, aujourd'hui, on le voit, il y a quelques petites choses qui changent, et ça marche moins bien.
07:23 Alors on va se retrouver dans un instant pour parler de cette campagne des européennes,
07:26 et de l'omniprésence médiatique d'Emmanuel Macron,
07:29 avec, bien sûr, en toile de fond, cette guerre d'Ukraine.
07:32 [Musique]
07:54 Et on se retrouve avec Benjamin Morel, politologue et maître de conférences en droit public,
07:58 qui va parler de l'allocution d'Emmanuel Macron, mais aussi de la campagne des européennes.
08:02 Au-delà de la mise en scène de deux candidats très visibles,
08:07 Bardella et Emmanuel Macron, puisqu'on n'a pas vu beaucoup Valérie Ayé,
08:12 il y a quand même 38 listes qui présentent des listes,
08:16 des parties qui ont eu droit à très peu de temps médiatique.
08:19 Le débat des "petits partis", c'était mardi soir, en deuxième partie de soirée,
08:23 ils ont eu 10 minutes, même pas, pour s'exprimer.
08:26 Qu'est-ce que ça dit, en fait, de la vitalité démocratique du pays ?
08:31 Est-ce qu'il n'y a pas aussi un problème de prime au plus gros,
08:34 avec l'équité, avec la façon dont sont gérés les temps médiatiques des différents responsables politiques ?
08:40 C'est très compliqué à gérer, en réalité, d'ailleurs, y compris pour les autorités publiques,
08:43 surtout d'ailleurs pour les autorités publiques.
08:45 Il y a un principe assez fondamental en sociologie électorale.
08:48 Plus vous êtes visible, plus vous vous attirez de vos temps.
08:51 Et donc, il y a un effet, qui est un effet, je dirais, pervers.
08:53 Plus vous montez dans les sondages, plus les médias s'intéressent à vous.
08:56 Plus les médias s'intéressent à vous, plus vous montez dans les sondages,
08:59 moins les médias s'intéressent à vous, plus les sondages ne vous sont pas favorables,
09:02 plus ils jugent que vous êtes une petite liste, et donc, ce faisant, ils vous "blacklistent",
09:06 sans mauvais jeu de mots.
09:07 Donc, cette situation-là, elle est, a priori, relativement délétère.
09:11 Dans un régime politique idéal, on aurait une stricte égalité des temps de parole des listes,
09:16 parce qu'a priori, la petite liste, qui est aujourd'hui à 0,0001% dans les sondages,
09:20 voire même qui n'est même pas testée, elle a des choses à dire.
09:23 Elle pourrait être intéressante à écouter, tout autant que des grandes listes,
09:26 qui parfois n'ont à peine un programme.
09:28 Donc, fondamentalement, ce serait intéressant.
09:30 Le problème, c'est que, si jamais vous présentez à égalité les 38 listes,
09:34 est-ce que c'est gérable, d'un point de vue médiatique ?
09:36 Là, je renvoie la question aux journalistes.
09:37 - Ah, ça va être compliqué. - Et c'est tout le problème.
09:38 - Évidemment, c'est bien le problème. - Voilà.
09:39 - Mais, il y a quand même des partis qui n'ont pas de re-chapitre.
09:43 Les partis qui portent le Frexit, par exemple, ne sont jamais invités,
09:46 à des temps de campagne électorale.
09:48 Les partis dits d'extrême-gauche, NPA, lutte ouvrière, etc.,
09:52 on voit bien qu'il y a aussi un peu, et pourtant, ce sont des partis
09:56 qui représentent une certaine partie de l'opinion publique
09:59 et qui essayent de faire vivre les idées.
10:01 La question, c'est le dynamisme des idées politiques.
10:05 Est-ce qu'il n'y a pas là un problème de "biodiversité" sur les idées politiques ?
10:09 - Alors, on a un problème, encore une fois, de capacité à juger les temps de parole.
10:14 Ce que dit le Conseil constitutionnel, si je refais mon juriste,
10:17 c'est qu'il peut y avoir des écarts dans le traitement,
10:20 que ces écarts se justifient eu égard à la lisibilité du débat public.
10:24 En fait, il faut que les Français, dans le cadre d'une campagne électorale,
10:26 soient en capacité de comprendre à peu près quels sont les enjeux.
10:30 Si vous leur posez 38 listes, c'est pas lisible.
10:32 Si vous leur en posez moins, ça peut être beaucoup plus lisible.
10:35 La question, ensuite, c'est quelles éventuelles barrières
10:38 on pourrait mettre pour qu'il y ait moins de listes, pour que ça reste lisible.
10:41 Mais, à ce moment-là, qu'est-ce qui est filtrant ?
10:43 C'est les idées ? Pas vraiment.
10:45 C'est forcément d'autres biais, d'autres voies.
10:47 Signature d'élus, ou donner une prime aux grands partis installés.
10:50 Parrainage citoyen, c'est pas idiot.
10:52 Mais ça implique que vos formations politiques, quand même,
10:54 aient les moyens sur le terrain de mobiliser 10 000, 20 000 signatures.
10:58 Dans tous les cas, d'un point de vue pratique et pragmatique,
11:01 on aura toutes les peines du monde à organiser un débat sain
11:03 si on ne réduit pas le nombre de listes.
11:05 Il y a un effet d'opportunité et d'aubaine pour les élections européennes.
11:08 Vous avez des élections qui coûtent relativement peu cher,
11:10 parce que, élection nationale, circonscription nationale,
11:13 il n'y a pas non plus la barrière des 500 signatures,
11:15 comme pour la présidentielle.
11:17 C'est très visible, c'est très audible,
11:19 parce que proportionnel, intégral, etc.
11:21 Donc, pourquoi pas tenter ? Pourquoi pas exister ?
11:23 Le problème, c'est que le trop est souvent l'ennemi du bien.
11:27 Et donc, en l'occurrence, il y a un effort de rationalisation d'un côté,
11:30 et ensuite de rééquilibrage vers l'égalité,
11:33 qui devrait être mené, mais doivent être menés de pair.
11:35 On est loin du compte, avec l'omniprésence médiatique,
11:38 quand même, du président de la République,
11:40 qui a utilisé aussi le temps mémoriel
11:43 pour mettre en scène cette élection européenne, d'une certaine façon.
11:46 On peut voir son interview d'hier
11:48 comme une sorte de discours de campagne.
11:50 C'est une sorte de discours de campagne, et à la rigueur,
11:52 je vous dirais même qu'il est presque maladroit en la matière.
11:54 Pourquoi ? Parce qu'en fait,
11:56 on a la jurisprudence récente de l'ARCOM,
12:00 qui fait que tout ce qui...
12:02 ARCOM, qui était tout à l'heure au micro-dessus de radio.
12:04 Qui devrait, normalement, considérer qu'il y a des trucs
12:06 qui ont quand même un peu à voir avec la campagne,
12:08 et donc décompter. En fait, fondamentalement,
12:10 il n'a pas forcément besoin de parler d'élection européenne
12:13 pour amener ses électeurs. Encore une fois, l'électeur de 2022,
12:15 il a voté en pleine guerre en Ukraine
12:17 pour Emmanuel Macron, chef de guerre.
12:19 Il n'a pas vraiment besoin qu'on lui parle de campagne européenne.
12:21 Il a besoin de voir Emmanuel Macron,
12:23 et qu'on lui donne le sentiment que s'il ne va pas voter dimanche matin,
12:26 eh bien, la scène va se changer en sang,
12:28 il y aura des puits de grenouilles,
12:30 et que, in fine, très rapidement, les chars russes seront à Paris.
12:32 Et donc, il a besoin de cet effet drapeau.
12:34 Parce que, quel est le problème de la majorité aujourd'hui ?
12:37 Le RN ne fait plus peur.
12:39 À l'électorat de centre-droit, le RN ne fait plus peur,
12:41 ou en tout cas, plus assez pour se déplacer.
12:43 Et donc, il faut que cet électorat ait le sentiment
12:45 que, quand même, dimanche matin, il va devoir aller voter.
12:48 On parle beaucoup d'un électorat âgé.
12:50 Normalement, il vote à ses élections.
12:52 Et l'angoisse de "je n'ai pas eu mon petit tampon
12:54 sur ma carte d'électeur cette fois-ci,
12:56 et donc, j'ai fait mal, et donc, j'ai fauté",
12:59 parce qu'en fait, il y a un sentiment de devoir du vote,
13:01 c'est ça qui doit être activé par la majorité.
13:03 Pour ça, si vous avez un chef de l'État qui explique que l'heure est grave,
13:06 même s'il ne parle pas d'élection européenne,
13:08 ça peut être suffisant.
13:09 Encore faut-il que ce soit bien fait,
13:11 et que l'électorat de centre-droit ne soit pas assez dégoûté.
13:14 Pour l'instant, il semble tout de même relativement l'être.
13:16 - Oui, et il y a eu beaucoup de...
13:19 Est-ce qu'il y a eu des passerelles, en fait,
13:21 entre un électeur macroniste,
13:23 qui pourrait maintenant voter pour Marine Le Pen,
13:25 ou est-ce que ça n'existe pas ?
13:26 - Ça reste marginal, mais ça existe.
13:28 C'est-à-dire qu'on voit des électeurs, Macron de 2022,
13:30 qui peuvent voter Bardella.
13:32 Et beaucoup plus qu'un vote direct,
13:34 il y a un effet de démobilisation,
13:36 et il y a un effet de dissonance pour cet électorat.
13:40 Une partie de cet électorat, finalement,
13:42 considère qu'il n'y a plus tant d'opposition avec Jordan Bardella.
13:45 Je rappelle que la préférence nationale a été votée
13:48 par une majorité Renaissance,
13:50 dominée par Renaissance, avec LR et les partis alliés.
13:53 Donc, aujourd'hui, le fossé...
13:55 - Les lois sociales, on se retrouve avec beaucoup d'idées
13:58 qui sont les idées, d'ailleurs, de ce que dit Marine Le Pen.
14:00 - On a gagné, puisque nos idées sont maintenant
14:02 celles qui sont portées par la majorité.
14:04 - Et donc, si vous êtes un électeur de centre droit,
14:06 est-ce que vous pouvez encore considérer
14:08 qu'il y a une nécessité à se mobiliser contre le RN,
14:10 sachant qu'encore une fois, préférence nationale,
14:12 votée par l'Assemblée au mois de décembre.
14:14 C'est compliqué, c'est complexe, c'est pas forcément évident.
14:16 Donc, vous avez un électorat qui ne croit plus vraiment
14:18 en Emmanuel Macron.
14:19 Ça y est, il y a quand même une baisse
14:21 de la croyance dans le chef de l'État dans cet électorat-là,
14:23 et qui, en même temps, n'a plus vraiment peur de Jordan Bardella
14:25 et considère qu'au fond, il y a quand même des valeurs communes.
14:27 Arriver à mobiliser cet électorat,
14:29 à lui faire dire qu'il devrait voter contre,
14:32 si ce n'est voter pour Jordan Bardella,
14:34 et bien, c'est plus tout à fait évident pour la Macronie,
14:36 d'où le gros problème et les ficelles de 2019
14:39 qui marchaient bien.
14:40 Souvenez-vous du discours de Kemper,
14:41 la lèpre nationaliste monte.
14:42 À l'époque, l'électorat de centre droit se dit
14:44 "Mon Dieu, s'il y a un vrai, vrai problème,
14:46 il faut aller voter pour Nathalie Loiseau."
14:48 Aujourd'hui, ça ne marche plus.
14:49 La réalité, c'est que Jordan Bardella ne leur fait plus peur,
14:51 et donc, se déplacer un dimanche matin n'est plus une évidence.
14:54 L'autre thème qui a été au centre de la campagne des européennes,
14:58 c'est Gaza, choisi par la France insoumise en particulier.
15:02 Là aussi, c'est pour trouver un électorat,
15:05 trouver un clivage important et mobiliser,
15:08 ou comment vous voyez cette ultra-mobilisation
15:12 de la France insoumise pour la cause palestinienne ?
15:14 Vous allez me trouver, encore une fois, un peu monomaniaque
15:16 sur mes questions de mobilisation électorale,
15:18 mais c'est vraiment la clé.
15:19 Dans une élection où il y a beaucoup d'abstention,
15:21 vous gagnez si vous mobilisez vos électeurs.
15:23 Qu'est-ce qui se passe ?
15:24 Il y a un électeur, Macron, sur deux de 2022, qui ne va pas voter.
15:27 Il y a 60% des électeurs de Marine Le Pen
15:30 qui vont voter à ces élections.
15:31 Ça explique la différence.
15:32 Du côté de la France insoumise,
15:34 il y a un éparpillement d'une partie de l'électorat,
15:36 mais il y a surtout une très forte démobilisation de cet électorat.
15:39 Le problème de la France insoumise n'est pas tant
15:40 qu'elle perd des électeurs pour ailleurs,
15:42 c'est que ces électeurs viennent uniquement pour les présidentielles.
15:45 C'était la même chose en 2019.
15:47 Comment est-ce que vous arrivez à parler à ces électeurs ?
15:49 Pour leur parler, en effet, le thème Gaza peut être un outil de mobilisation.
15:54 D'ailleurs, on le ressent un peu dans les enquêtes.
15:56 Surtout, par ailleurs, c'est un thème important pour la suite.
15:58 Parce qu'une fois que vous avez bétonné sur ce sujet,
16:00 que vous avez parlé à cet électorat de ce sujet,
16:03 qui apparaît relativement secondaire,
16:05 voire même tabou pour les autres holistes et pour les autres partis politiques,
16:08 ça veut dire que pour les prochaines échéances,
16:10 notamment celle de 2027,
16:11 vous avez là éclairci le terrain,
16:13 vous avez montré des gages,
16:15 donc ça veut dire que c'est un électorat
16:17 qui peut-être ne sera pas là massivement maintenant,
16:19 mais qui peut l'être pour la suite.
16:21 Ce qui vous permet, une fois que vous tenez votre base,
16:23 potentiellement d'élargir,
16:25 de tenir d'autres discours vis-à-vis d'électorats
16:27 qui seraient plus charnières dans une présidentielle.
16:29 Donc même si, stratégiquement,
16:31 aujourd'hui, ça ne porte pas,
16:33 ça ne veut pas dire que c'est absurde à moyen terme.
16:35 Mais est-ce que ça va payer ?
16:37 Puisque à chaque élection européenne,
16:39 on voit quand même que le parti du moins,
16:41 c'est celui de l'abstention, systématiquement,
16:43 c'est un pari aussi sur les abstentionnistes,
16:45 qui risque d'être dangereux.
16:47 C'est un pari sur les abstentionnistes
16:49 qui ne sera probablement pas gagné par la France insoumise,
16:51 encore une fois, à court terme.
16:53 Ça peut être très intelligent pour la prochaine présidentielle,
16:55 pour les prochaines échéances,
16:57 là, ça permet de mobiliser à la marge.
16:59 Qu'est-ce qui se passe et qu'est-ce qui fait que Raphaël Glucksmann domine le match à gauche ?
17:01 En fait, vous avez un électorat, CSP+ à gauche,
17:03 qui est un électorat qui vote pour les européennes.
17:05 D'habitude, cet électorat,
17:07 il vote beaucoup pour les verts.
17:09 Là, la liste verte est un peu dans les choux.
17:11 - Je vais inviter Priscilla Ludovsky qui va d'un côté.
17:13 - Et de l'autre côté, vous avez Emmanuel Macron,
17:15 qui a dégarni son flanc gauche
17:17 avec la loi immigration, etc.
17:19 Donc, il y a un espace électoral
17:21 qui, là, est en jachère.
17:23 Raphaël Glucksmann exige cet espace électoral.
17:25 Il ne votera pas la France insoumise,
17:27 plutôt CSP+, Grandeville, etc.
17:29 Donc, ça permet de dominer et de déclencher
17:31 un petit effet vote utile.
17:33 C'est bien pour les européennes,
17:35 comme à chaque fois, les verts font de très bons scores,
17:37 ça ne suffit pas pour une présidentielle.
17:39 Vous avez besoin de mobiliser l'électorat populaire.
17:41 Vous avez besoin d'adresser d'autres messages.
17:43 Le RN le fait, l'AFI le fait.
17:45 Et là-dessus, c'est un pari pour l'avenir
17:47 qui n'est jamais gagné pour les européennes,
17:49 mais qui permet de poser des petits cailloux
17:51 pour espérer atteindre de nouveaux horizons.
17:53 - Et dernière question sur
17:55 le choix stratégique d'Emmanuel Macron
17:57 en fonction du résultat.
17:59 Alors, lui dit qu'il ne veut pas parler de politique-fiction,
18:01 hier, mais si son parti
18:03 se retrouve défait dans les urnes,
18:05 est-ce qu'il sera obligé de faire
18:07 des aménagements au sein du gouvernement ?
18:09 Certains parlent d'une dissolution, ou rien,
18:11 et passer aux Jeux Olympiques ?
18:13 - Je crois qu'on va passer aux Jeux Olympiques.
18:15 Et qu'il se passera peut-être quelque chose
18:17 à la marge au mois de septembre,
18:19 parce qu'il faudra bien faire quelques réajustements,
18:21 parce qu'il y a quelques ministres qui veulent partir, etc.
18:23 Les options sont lesquelles ?
18:25 La première option, c'est la dissolution.
18:27 Aujourd'hui, il y aurait probablement une majorité encore plus
18:29 resserrée pour Emmanuel Macron,
18:31 pas de majorité du tout, voire même
18:33 des majorités contre lui.
18:35 De l'autre côté, il y a le changement
18:37 de Premier ministre. Peut-être, mais pour qui ?
18:39 Quelqu'un de droite, certes, mais regardez ce qui s'est passé
18:41 lors de la réforme des retraites. Au mois de janvier,
18:43 LR et la majorité, top.
18:45 Siouti, top, en disant "on va vous soutenir".
18:47 Ça finit comment ? Ça finit par un 49 alligné
18:49 à 3, avec une motion de censure qui
18:51 échoue, ricrac. Pourquoi ? Parce que le groupe
18:53 LR est trop divisé. Si vous nommez,
18:55 admettons, il a dit "non, mais Gérard Larcher à Matignon".
18:57 Ça fait quoi ? Ça fait que vous avez peut-être 20 députés
18:59 LR qui vous retiennent, qui vous reviennent.
19:01 De l'autre côté, vous avez des députés de centre-gauche
19:03 de la majorité qui vont se carapater.
19:05 Vous ne gagnez rien, vous n'avez pas le pays du plus gouvernable.
19:07 Et donc, ce faisant, aujourd'hui,
19:09 pour Emmanuel Macron, les difficultés
19:11 sont telles que, à part
19:13 tenter de gérer les canards boiteux et
19:15 de faire de l'activisme, c'est-à-dire bouger, bouger, bouger
19:17 pour donner le sentiment que quand même, on est encore
19:19 en capacité d'agir sur le réel et que
19:21 donc, on n'entre pas totalement dans une période
19:23 de chirurgisation du quinquennat.
19:25 C'est à peu près la seule option. La dernière option
19:27 qui reste, je crains pour lui que ce ne soit que de la
19:29 décommunication. - Merci beaucoup, Benjamin Morel
19:31 d'avoir avec nous décrypté
19:33 cette campagne et puis l'allocution
19:35 d'Emmanuel Macron. On se retrouve dans un instant avec
19:37 Priscilla Ludovsky pour parler
19:39 de la liste EELV,
19:41 bien sûr, les européennes, mais aussi d'autres sujets.
19:43 A tout de suite sur Sudrani.