• il y a 7 mois
Une journée sans pharmacie demain jeudi. La Fédération des pharmaciens d'officines (FSPF) a déposé un préavis de grève pour le 30 mai afin d'"obtenir plus" dans le cadre des négociations conventionnelles en cours avec l'Assurance maladie. Elle dénonce notamment des ruptures de médicaments et la possibilité de vendre des médicaments en ligne. Le mouvement s'annonce très suivi. Le syndicat parle de 90 % des 250.000 officines en France. Certaines seront réquisitionnées par les préfectures pour assurer les urgences.

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Transcription
00:00 Il est 7h45, si vous devez aller récupérer des médicaments en pharmacie, faites-le aujourd'hui
00:06 parce que demain elles seront quasiment toutes en grève, fatiguées notamment par les pénuries
00:10 de médicaments.
00:11 Et on vous écoute ce matin sur ce sujet.
00:12 Est-ce que vous faites face à ces pénuries ? Comment vous vous adaptez si vous avez un
00:16 traitement sur le long cours ? Appelez-nous au 04 77 10 0010.
00:21 Et vous pouvez réagir également sur nos réseaux sociaux à ce que va nous dire Olivier
00:25 Roser.
00:26 Bonjour à vous.
00:27 Bonjour.
00:28 Olivier Roser, c'est professionnel de santé pharmacien en Auvergne-Rhône-Alpes, pharmacien
00:31 chez nous à Saint-Bonnet-le-Château.
00:33 Une grève, c'est rare chez les pharmaciens.
00:35 La dernière, c'était il y a 10 ans.
00:36 Qu'est-ce qui provoque ce ras-le-bol ?
00:38 Alors, ce ras-le-bol est provoqué par l'ensemble de l'œuvre de nos institutions sur le réseau
00:45 des pharmacies, enfin, qui est laissé à l'abandon, comme l'ont été avant le réseau des médecins,
00:49 comme l'est en ce moment les services des urgences hospitalières et globalement tout
00:52 le système de santé qui aujourd'hui va droit dans le mur si on ne met pas les moyens sur
00:57 les différents acteurs de ce système.
00:59 Il y a 2000 pharmacies qui ont fermé ces 10 dernières années.
01:02 C'est une hémorragie sans précédent.
01:05 Oui, alors déjà ce chiffre parle de lui-même puisque un réseau qui s'effondre, on peut
01:12 parler des causes, mais en tout cas le constat est là.
01:14 Aujourd'hui, en 2024, c'est une pharmacie par jour qui ferme et dans le département
01:18 de la Loire, en 15 ans, on a perdu 30% des pharmacies.
01:21 On a vraiment un record aujourd'hui dans la région, dans le département de la Loire
01:24 avec le nombre de fermetures.
01:25 Les causes justement, on en parle, ces ruptures de stocks, ces pénuries de médicaments au
01:30 jour le jour, qu'est-ce que ça représente et à quel point ça altère votre profession,
01:36 à quel point ça décourage ?
01:37 Alors effectivement, c'est une des nombreuses raisons qui nous font aller dans la rue demain
01:41 matin.
01:42 Ces ruptures de médicaments, ça fait des années, ça fait plusieurs années, j'ai
01:46 déjà été interviewé il y a cinq ans, j'ai reçu un article sur ces ruptures.
01:49 Il y a régulièrement au niveau du gouvernement des choses qui sont mises en place, mais
01:53 qui sont de l'ordre de la communication.
01:55 Elles n'ont fait que s'intensifier et aujourd'hui, je dirais qu'à la fois pour les patients
01:59 bien évidemment qui sont anxieux de ne pas pouvoir trouver leur traitement à la pharmacie
02:03 et pour le réseau des pharmacies qui passe un temps incroyable à essayer de trouver
02:06 des solutions, la situation est devenue aujourd'hui intenable.
02:09 Qu'est-ce qu'on pourrait faire pour améliorer ça ?
02:11 Alors qu'est-ce qu'on pourrait faire ?
02:13 J'ouvre de grands yeux.
02:14 J'ouvre de grands yeux parce qu'on m'a déjà posé dix fois la question en cinq
02:16 ans et qu'il y a beaucoup de choses à faire et c'est vrai qu'on a quand même l'impression
02:19 que ce qui se passe, c'est qu'on fait exactement l'inverse de ce qu'il faut faire.
02:23 Je trouve qu'une des principales raisons, c'est que le prix du médicament en France
02:26 est l'un des plus bas au monde et encore en avril 2024, on décide encore de baisser
02:32 le prix des médicaments en France.
02:34 Je ne crois pas que ce soit cette solution-là qui soit favorable à améliorer la situation.
02:39 Vos collègues passent parfois une heure chaque jour à essayer de trouver des médicaments,
02:43 c'est ça la réalité ?
02:44 Je pense qu'on est au moins sur une heure par jour dans les officines.
02:47 Maintenant, c'est devenu tellement chronique, on le fait tellement tous les jours que je
02:50 pense qu'on ne comptabilise même plus le temps, mais très clairement, dans une pharmacie,
02:55 il y a à peu près entre cinq et dix ordonnances par jour dans toutes les pharmacies pour lesquelles
03:00 il y a un produit en rupture.
03:01 Parmi les raisons des inquiétudes également, le fait de pouvoir acheter des médicaments
03:05 dans les supermarchés et en ligne aussi ?
03:07 Oui, alors ça, c'est je dirais une idée ancienne de libéralisation des secteurs réglementés,
03:15 de pouvoir faire en sorte qu'on puisse accéder partout, à tout aujourd'hui, dans une société
03:19 qui est très consumériste.
03:20 Je ne suis pas sûr que les produits de santé aient besoin de ce type de réseau.
03:25 Je ne vois pas d'ailleurs quel est l'intérêt que peut avoir l'État à libéraliser la
03:28 vente de médicaments, si c'est pour les mettre sur des plateformes qui sont tenues par des
03:31 entreprises étrangères.
03:33 Je ne suis pas sûr qu'il y ait un bénéfice attendu en termes économiques, puisque le
03:37 principal sujet, c'est l'économie et l'appauvrissement du réseau.
03:41 C'est parce que généralement, le système de santé est plutôt régulé par Bercy que
03:44 par le ministère de la Santé.
03:45 Ça, c'est le contexte au jour le jour.
03:47 Est-ce que vous arrivez aujourd'hui à trouver des nouvelles mains, à recruter dans vos pharmacies ?
03:52 Là aussi, c'est une difficulté.
03:54 J'ai envie de dire, comme tous les secteurs d'activité, il n'y a pas que le secteur de
03:58 la santé, mais oui, en pharmacie, on a besoin aujourd'hui de plus en plus de personnes pour
04:03 nous accompagner dans les équipes, parce que depuis des années, il y a eu une stratégie
04:06 qui dit, pour essayer de résoudre les problématiques de déserts médicaux, on va confier aux pharmacies
04:11 un certain nombre de missions supplémentaires.
04:13 Ces missions demandent des moyens, des moyens financiers, mais surtout des moyens humains
04:17 pour les mettre en place.
04:18 Olivier Roser, on a parfois l'image des pharmaciens qui gagnent bien leur vie, qui ne sont pas
04:22 à plaindre.
04:23 Cette image, elle est fausse ?
04:25 Alors, c'est ce qu'on appelle les images d'épinal, évidemment.
04:28 Et puis, si je suis là aujourd'hui, ce n'est pas pour parler des pharmaciens, mais du réseau
04:31 des pharmacies, parce que c'est ça qui est l'enjeu.
04:34 La difficulté quand les pharmacies ferment, c'est que le pharmacien a fait toute sa carrière
04:39 sur un outil de travail sur lequel il a beaucoup investi et qu'à la fin, cet outil ne vaut
04:43 plus rien puisqu'il est complètement fermé.
04:45 Donc, je crois qu'il faut bien dissocier les deux.
04:48 Aujourd'hui, le message d'Alerts, c'est pour défendre le réseau des pharmacies qui sont
04:51 des établissements de santé.
04:52 Pour toute personne qui est déjà allée dans une pharmacie, on voit bien qu'on ne
04:55 fait pas non plus que délivrer des médicaments.
04:57 Il y a du conseil, il y a de l'orthopédie, il y a du maintien à domicile, il y a de la
05:00 vaccination.
05:01 Et aujourd'hui, on nous confie des missions de prévention.
05:04 Demain, on nous demande de faire des tests et éventuellement prescrire des antibiotiques.
05:08 Donc, on voit bien que c'est un établissement de santé.
05:10 Demain matin, vous allez dans la rue à Saint-Etienne, au départ de Châteaucreuil, direction la
05:14 préfecture.
05:15 Absolument.
05:16 Comment on fait si on a vraiment besoin, demain, dans la Loire et en Haute-Loire, d'aller
05:22 trouver un médicament ?
05:23 Alors, je dirais que comme tout le temps dans le système de santé, on est corvéable à
05:27 souhait et donc on est réquisitionné quand il y a des difficultés.
05:31 Donc, demain, je dirais que c'est comme un nouveau jour férié au mois de mai, qu'on
05:34 a déjà connu beaucoup.
05:35 Donc, il y a un certain nombre de pharmacies qui ont été réquisitionnées, une quinzaine
05:40 je crois, dans le département pour assurer les urgences.
05:42 Et évidemment, comme vous l'avez dit tout à l'heure, j'invite les gens à ne pas aller
05:46 dans les pharmacies demain parce que les quelques rares qui seront ouvertes risqueraient d'être
05:50 débordées et pas en capacité d'assumer un flux important.
05:53 Et la liste des pharmacies ouvertes demain est à retrouver sur le site de l'Agence
05:57 régionale de santé.
05:58 Et on a donc compris votre mouvement et votre mobilisation, votre manifestation également
06:02 dans les rues de Saint-Etienne, demain matin.
06:04 Merci Olivier Roser, pharmacien à Saint-Bonnet-le-Château et président de l'Union régionale des professionnels
06:09 de santé pharmaciens en Auvergne-Nord-Alpes.
06:10 Merci.
06:11 Il est 7h51.

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