Dans ce monde où règne l'abondance visuelle, le terme "porn" s'est détaché de ses origines sulfureuses pour épouser des formes plus insidieuses de notre quotidien. Derrière ce glissement sémantique, une question se pose : que révèle cette fascination pour l'excitation visuelle non sexuelle sur notre société contemporaine ? Décryptons ensemble ce phénomène dans cette chronique. [...]
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00:00 Dans ce monde où règne l'abondance visuelle, le terme « porn » s'est détaché de
00:14 ses origines sulfureuses pour épouser des formes plus insidieuses de notre quotidien.
00:18 Derrière ce glissement sémantique, une question se pose.
00:21 Que révèle cette fascination pour l'excitation visuelle, non sexuelle, sur notre société
00:27 contemporaine ?
00:28 Décryptons ensemble ce phénomène dans cette chronique.
00:31 Vous ne le saviez peut-être pas, mais nous vivons désormais dans un monde du porn.
00:36 Pas du porno au sens de pornographie, mais les racines sont les mêmes, le mot grec
00:41 « porné » qui signifie « prostitué ».
00:43 En effet, le mot porno a connu dans les années 80 un glissement de sens.
00:48 Exactement en 1984, quand la journaliste anglaise Rosalind Coward mobilise le mot « food porn
00:56 » pour dénoncer des publicités alimentaires qui poussent à consommer.
01:00 Le terme « porn » s'est ensuite autonomisé.
01:04 Il décrit maintenant une « exhibition assumée ».
01:08 Pour Stéphane Deshaulenois, expert de la culture pornographique, avec son blog Le Tag
01:14 Parfait, « porn » désigne avant tout l'excitation autour d'un sujet, à travers une image
01:20 qui n'a pas de rapport avec le sexe, mais qui se substitue à lui.
01:25 Comme pour la pornographie, on est dans le plaisir coupable, dans un étrange mélange
01:30 d'excitation et d'exhibition.
01:32 « Porn » est maintenant entré dans le vocabulaire anglo-saxon et émis à toutes
01:37 les sauces.
01:38 #carneporn, #designporn, #spaceporn, #nightporn, #runeporn, #bookshelvesporn, #interiorporn,
01:47 #vintageporn, etc.
01:49 Concrètement, ces hashtags désignent le phénomène qui consiste à passer des heures
01:56 à regarder des images de voitures, d'appartements, de chaussures, d'étagères, alors qu'on
02:02 n'a aucun projet d'achat, juste pour le plaisir de regarder, de montrer et de partager.
02:08 Dans un autre registre, le porn renvoie à l'extimité, c'est-à-dire l'exposition
02:13 au plus grand nombre de son intimité.
02:15 Un chagrin amoureux, des déboires professionnels, des relations familiales difficiles.
02:21 Une autre grande tendance est l'inspiration porn pour les récits d'expériences de
02:27 vie difficiles de la part de personnes ayant survécu à des épreuves impressionnantes,
02:32 affronté la mort ou la maladie grave, surmonté un handicap.
02:36 Que nous dit le porn de notre époque ? Les explications sont nombreuses et certainement
02:41 très différentes d'une personne à l'autre, mais quatre raisons semblent émerger.
02:45 Le besoin de laisser une trace à travers les réseaux sociaux.
02:50 L'envie d'être célèbre quelques minutes ou quelques semaines dans sa vie, célébrité
02:55 qui se mesure bien sûr au nombre de likes.
02:57 Une fuite dans ce qui peut être un refuge face à la complexité et la dureté du monde
03:03 qui nous entoure.
03:04 Une addiction à l'excitation que procure cette confrontation à des images, la sienne
03:10 au premier chef.
03:11 Bref, le besoin de combler un vide existentiel qui nous menace tous.
03:16 Le problème est que ce vide est sans fond et que les tactiques mises en place pour le
03:22 combler nous éloignent de la vraie vie et distendent les liens que nous pouvons établir
03:27 avec nos proches, accentuant encore le besoin de se raccrocher à ces univers factices ou
03:34 des artefacts vite obsolètes par définition.
03:37 Le remède, comme toujours, ne pas se limiter aux symptômes mais bien en identifier là
03:45 où les causes pour reprendre le cours de sa vie, loin du porn et de ses pratiques.
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