Marie-France Garaud: Une femme d'influence dans la politique française

  • il y a 4 mois
Marie-France Garaud (1919-2024) était une femme politique française qui a occupé des postes importants au sein du gouvernement pendant plus de trois décennies. Elle est connue pour son esprit vif, son franc-parler et son engagement pour la défense des droits des femmes.

Sa carrière politique

Haute fonctionnaire: Garaud a débuté sa carrière dans la haute fonction publique, travaillant au ministère des finances et au cabinet du Premier ministre.
Ministre: Elle a été nommée ministre de la fonction publique en 1974 sous la présidence de Valéry Giscard d'Estaing. Elle a également été ministre de l'industrie, de l'aménagement du territoire et du tourisme de 1977 à 1979.
Députée: Garaud a été députée de Paris de 1978 à 1981 et de Seine-et-Marne de 1986 à 2002.
Conseillère municipale: Elle a également été conseillère municipale de Paris de 1977 à 1995.

Engagement féministe

Garaud était une fervente défenseure des droits des femmes. Elle a été l'une des premières femmes à occuper un poste ministériel en France et a plaidé en faveur de l'égalité des sexes dans tous les domaines de la vie.

Héritage

Marie-France Garaud est décédée le 23 mai 2024 à l'âge de 104 ans. Elle laisse derrière elle un héritage de femme d'influence qui a marqué la vie politique française pendant de nombreuses années.
Transcript
00:00 Voilà, notre invitée ce soir est Marie-France Garraud. Merci beaucoup d'être sur notre
00:08 plateau. Ancienne conseillère de Georges Pompidou, de Jacques Chirac également. Vous
00:13 avez été classée comme la femme la plus puissante de France il y a quelques années.
00:17 J'entends dire ça à toutes les émissions. Et oui, voilà, ça fait partie des choses
00:21 qu'on dit. Mais écoutez, pour un certain nombre de jeunes téléspectateurs, c'est
00:24 intéressant de resituer à quel point vous étiez une femme influente, présente dans
00:28 la vie politique française pendant des décennies. Depuis quelques années, vous êtes plutôt
00:33 quelqu'un qui réfléchit, qui regarde le monde.
00:36 Parce qu'avant je réfléchissais pas.
00:37 Non, non, mais seulement, qui réfléchit je veux dire. Qui réfléchit seulement et
00:41 qui écrit. Vous avez été quand même candidate à l'élection présidentielle en 80. Mais
00:47 depuis, vous présidez l'Institut international de géopolitique et vous écrivez un certain
00:52 nombre de livres. Et le dernier, qui nous intéresse ce soir, s'intitule "Les impostures
00:56 politiques", donc chez Plon. Et là dedans, vous dénoncez la manière dont les dirigeants
01:03 français, précisément, ont permis l'effacement, ce que vous jugez être l'effacement de la
01:09 France face aux grandes puissances, notamment la Chine, la Russie, des puissances asiatiques,
01:13 mais aussi en Europe, l'Allemagne, qui vous nous dites, dans le fond, est extrêmement
01:20 puissante et a reconstitué la puissance de son État alors que la France a perdu son
01:24 éclat. On va en parler, mais je voulais d'abord vous interroger un peu sur le climat politique
01:29 parce que vous connaissez parfaitement bien cette scène politique.
01:32 Je ne connais pas du tout la scène politique actuelle.
01:33 Vous la connaissez un petit peu.
01:35 Non, pas du tout.
01:36 Vous l'observez.
01:37 A peine.
01:38 Alors, je voudrais vous montrer la une du monde de cet après-midi. Et la une du monde,
01:42 c'est le retour de l'État RPR pour 2012.
01:45 Nous n'avons vraiment rien à dire au monde, franchement.
01:48 Mais vous êtes d'accord ou pas ?
01:50 Mais j'en sais rien.
01:51 Vous êtes d'accord ou pas, lorsque vous voyez un centre des ministres à Sartre ?
01:54 C'est pas simple.
01:55 Il y a apparemment des gens qui ont partenu au RPR.
01:58 Le RPR et l'UMP, c'est tout de même un peu la même chose.
02:03 Il y a les centristes quand même, les centristes que vous connaissez bien et qui ont un petit
02:08 peu boudé ces derniers temps.
02:09 Oui, écoutez, franchement, ça n'a aucune espèce d'importance.
02:12 C'est même assez dérisoire, si vous voulez mon avis.
02:15 Un point.
02:16 Pendant les journées de ce remaniement, est-ce que vous avez entendu une seule fois parler
02:22 des mouvements qui se passent dans le monde, des mouvements qui se passent en Europe, de
02:27 ceux qui nous concernent et nous concernons tous, et de la place que la France devait
02:32 occuper, les cartes qu'elle avait à jouer dans cette perspective ?
02:36 Moi, je n'ai pas entendu une seule fois cette question posée.
02:39 J'ai entendu parler des partis, de savoir si les centristes allaient se diviser ou se
02:43 raccommoder.
02:44 Ça, c'est alternatif depuis des siècles, etc.
02:46 C'est dérisoire et ça n'a aucune importance.
02:49 Un mot quand même, juste sur Dominique de Villepin et Nicolas Sarkozy qui en ce moment
02:53 se livrent à une guerre assez avif.
02:55 J'ai l'impression que ce n'est pas très récent.
02:57 Exactement.
02:58 C'est la poursuite d'une bataille.
03:00 Oui, oui.
03:01 Est-ce que…
03:02 La tension s'use.
03:03 En tout cas, la mienne est usée.
03:05 Vous avez l'impression que ces personnages ont beaucoup moins de panache que dans le
03:08 passé ?
03:09 Moi, je n'ai jamais vu de choses comme ça dans le passé.
03:11 Enfin, je veux dire, c'était inimaginable.
03:13 Chirac-Chaban-Delmas ou Chirac-Giscard…
03:16 Non, non, non.
03:17 Chirac-Chaban-Delmas, c'est pas du tout…
03:19 Ou même Chirac-Baladur.
03:20 Chirac n'était pas du tout dans l'affaire Chaban-Delmas.
03:21 L'affaire Chaban-Delmas, c'est une affaire pompidou, Chaban-Delmas.
03:25 Et si vous voulez, on revient là aux institutions de la Ve République.
03:29 C'est intéressant avec ce qui s'est passé d'ailleurs avant-hier.
03:31 Dans la Ve République, il faut que les choses soient claires, le président est élu au suffrage
03:36 universel sur la ligne qu'il dessine pour le pays dans les années de son présidence.
03:42 Du quinquennat maintenant.
03:43 Du septembre ou du quinquennat.
03:45 Voilà ce qui se passe dans le monde, voilà ce qui se passe en Europe, voilà où la France
03:50 doit être pour garder sa souveraineté.
03:54 Parce que la souveraineté, c'est simplement la liberté d'un État, c'est-à-dire la
03:57 capacité de décider ce qui le concerne, y compris de ses dépendances.
04:01 Bon, le Premier ministre est là pour mettre en œuvre cette politique.
04:05 Il ne dépend en rien du Parlement.
04:08 Il n'est pas responsable devant le Parlement, sauf si le Parlement pose une question de
04:13 confiance.
04:14 Là, François Fillon a engagé sa confiance, a demandé la confiance du Parlement.
04:18 Ça vous a choqué ?
04:19 Ça n'a rien à voir avec la Ve République.
04:21 Le Premier ministre est nommé par le président de la République qui détient le mandat du
04:26 peuple pour appliquer la politique qui a été approuvée par le peuple au moment de son
04:30 élection.
04:31 Ça compte pas les députés ?
04:32 Les députés sont élus au suffrage universel pour voter les lois.
04:34 Ça s'appelle le législatif.
04:36 La fonction du législatif, c'est de voter les lois.
04:39 Mais comme ils sont élus au suffrage universel, ils ont aussi un pouvoir politique, plus spécifiquement
04:44 politique.
04:45 Il est très clair, c'est de censurer le gouvernement.
04:48 Mais que les députés votent ou ne votent pas le CEP, la loi sur les retraites hautes,
04:52 ça ne met pas en cause la ligne politique de la France dans le monde.
04:56 Bon, par conséquent, si dans le cas de refus des députés de voter un texte, le président
05:02 a le choix de la stratégie ou de la tactique adoptée.
05:05 Il peut considérer, bon bah tant pis, qu'on votera la chose une autre fois.
05:08 Il peut considérer que c'est...
05:09 Mais il n'a pas à discuter trop avec les députés, dans le fond.
05:12 Non, mais il n'a pas à discuter avec les députés.
05:15 Bon, ça c'est le Premier ministre qui discute avec les députés.
05:18 Mais si les députés ne veulent pas voter, bon bah très bien.
05:21 Cité cet essentiel, on pose la question de confiance.
05:24 Les députés votent ou ne votent pas la censure.
05:27 S'ils votent la censure, le président a encore le choix, soit de dissoutre, soit de
05:31 nover un autre Premier ministre d'un gouvernement.
05:33 Mais le Premier ministre ne dépend pas des deux.
05:36 C'est le retour, permettez-moi de vous le dire, au régime des partis.
05:39 Et quand il avait présenté la 5e République, place de la République, le général avait
05:44 dit "si les partis reviennent, tout ce que j'ai fait sera détruit".
05:48 Donc Nicolas Sarkozy est le faux soyeur du gaullisme.
05:51 Oh non, il n'est pas le premier.
05:52 Il n'est pas le premier, ça a commencé avec la cohabitation.
05:55 Edouard Balladur ?
05:56 Non, Mitterrand.
05:57 Edouard Balladur a donné l'idée, mais c'est François Mitterrand qui l'a exploité
06:03 à son grand profit.
06:04 Bon, ça a été la cohabitation, ça a été certainement la réforme constitutionnelle,
06:09 le quinquennat.
06:10 Il y a longtemps, si vous voulez, que la 5e République a changé de nature.
06:13 Alors, juste, on va parler de la situation en Europe, puisque c'est un des objectifs
06:19 et un des thèmes de votre livre.
06:22 Et notamment, on va aller en Irlande ensemble, puisque vous suivez de près cette crise économique
06:27 européenne.
06:28 Benoît Petit est à…
06:30 Je ne suis pas certain d'avoir assez d'agilité intellectuelle pour la suivre de près, comme
06:34 vous le dites.
06:35 Mais enfin, j'essaie.
06:36 Oui, j'en suis sûre.
06:37 Je suis sûre que vous y arrivez très bien.
06:38 Benoît, c'est demain qu'une grande manifestation est organisée par les syndicats irlandais
06:43 pour protester contre le plan d'austérité du gouvernement.
06:46 Oui, un plan annoncé ce mercredi.
06:54 15 milliards d'euros d'économies doivent être réalisés en Irlande.
06:57 Et il faut vous dire que toutes les couches de la population, quels que soient les Irlandais,
07:02 quel que soit leur âge, quelle que soit leur situation professionnelle, ils vont tous être
07:05 touchés.
07:06 Depuis les étudiants, dont les aides au logement vont être vues à la baisse, jusqu'aux retraités,
07:10 dont les pensions également doivent être fortement pensionnées.
07:14 Il faut savoir que parmi les mesures qui ont été d'ores et déjà annoncées, il y a
07:17 la suppression de 25 000 emplois publics, la baisse bien sûr des dépenses sociales,
07:21 mais aussi la baisse du salaire minimum.
07:23 Elle va diminuer de 12%, alors que dans le même temps, la TVA, elle, va passer de 21
07:29 à 22%.
07:30 D'ici 2013, elle va même passer à 23% en 2014.
07:34 En vérité, le gouvernement l'a annoncé, une seule chose ne changera pas, c'est l'imposition,
07:38 le taux d'imposition des sociétés.
07:40 Il restera à 12,5%.
07:42 C'est l'un des taux les plus bas d'Europe.
07:45 Il faut imaginer bien sûr ici que cette mesure, ces économies ont du mal à passer auprès
07:49 des Irlandais qui, pour beaucoup, en veulent à ce gouvernement de Brian Cowen, l'un des
07:53 hommes les plus impopulaires aujourd'hui en Irlande, ce Premier ministre, et demain
07:56 donc la colère des Irlandais devrait s'exprimer dans la rue avec, vous le disiez, cette manifestation
08:01 géante attendue à Dublin à l'appel des syndicats.
08:03 Merci beaucoup, Benoît Petit, donc en direct de Dublin, Marie-France Garroche, vous voyez
08:07 secouer la tête, c'est pas la bonne solution ce plan d'austérité ?
08:10 Tout le monde le sait, tout le monde sait que ces plans ne sont pas réalisables et que
08:14 s'ils étaient réalisés, il y aurait une dépression économique majeure.
08:19 Tout à l'heure quand vous avez présenté le petit livre que je viens d'écrire, je
08:24 suis partie d'une autre idée, je suis partie d'une approche qui est l'événement majeur
08:28 qui s'est passé dans un passé relativement récent, c'est la chute du mur, c'est-à-dire
08:32 la chute du système soviétique.
08:33 Le jour où le mur est tombé, nous avons tous pensé que le libéralisme, la démocratie
08:42 allaient s'étendre sur l'ensemble de la planète.
08:43 Quand je dis tous, c'est pas tout à fait vrai.
08:45 Les États-Unis ont pensé ça essentiellement parce qu'ils avaient gagné cette guerre
08:49 froide et par conséquent etc.
08:50 Et ce basculement qui s'est produit n'a pas du tout eu cette conséquence, on le voit
08:54 bien pour une évidence d'ailleurs.
08:56 Les États-Unis ont 250 ans d'histoire, la Chine en a 5000, la Russie doit en avoir 2000
09:01 ou 3000, nous on en a déjà 1000, on comprend déjà mieux.
09:04 Mais bien entendu, ces pays retrouvent leur histoire.
09:09 Et c'est ce qui m'a amenée à écrire ce livre, on vit un basculement qui est de même
09:13 nature que la chute de l'Empire romain, en plus vaste, parce qu'il touche l'ensemble
09:18 de la planète.
09:19 La résurgence de l'Empire chinois, de l'Empire russe, en tout cas la volonté de…
09:23 Un déplacement du pouvoir.
09:24 Un déplacement du pouvoir, le pouvoir change d'endroit et il change d'endroit dans
09:28 le monde avec la montée en puissance des pays asiatiques et il change d'ailleurs
09:33 en conséquence et corrélativement de place dans l'Europe.
09:38 Alors qu'est-ce qu'on doit faire ?
09:39 D'où l'analyse de la situation européenne.
09:41 Qu'est-ce qu'on fait selon Marie-France Garot qui donc était contre le traité de
09:44 Maastricht, contre la constitution européenne, qui est une souverainiste pour la souveraineté
09:49 nationale française, pour un nouveau panache pour la France.
09:51 Qu'est-ce qu'on fait face à cette crise ? Vous dites l'austérité c'est la dépression.
09:54 Qu'est-ce qu'on fait ? On sort de l'euro ?
09:56 De toute manière, ce n'est pas quand on est chèque et mathe, il faut dire qu'en
10:00 fait il vaudrait mieux le voir avant, c'est préférable.
10:02 Je crois qu'on a manqué de clairvoyance, tous y compris les uns et les autres.
10:08 Parce que c'est vrai qu'on a été hostile à la ratification du traité de Maastricht
10:13 parce qu'en effet elle privait la France.
10:16 Qu'est-ce que c'est la souveraineté ? C'est la capacité de décider pour une
10:20 collectivité organisée politiquement, c'est-à-dire pour un État, c'est la liberté.
10:26 C'est la liberté de décider de son sort.
10:28 Est-ce que le pouvoir actuel nous permet cette liberté ?
10:32 Non, manifestement non.
10:33 Pour revenir à des principes simples, ça a été théorisé autrefois et on n'a jamais
10:38 changé depuis, pour qu'un État soit souverain, il faut qu'il ait au moins quatre pouvoirs.
10:41 Battre monnaie, faire les lois, rendre la justice, décider de la paix et de la guerre
10:46 en ce qui le concerne.
10:47 On constate aisément qu'on ne bat plus monnaie, qu'on ne fait plus les lois, elles sont européennes,
10:52 qu'on ne rend plus la justice, la Cour de la Constitution elle-même se retourne vers
10:56 la Cour européenne de justice et qu'on vient de rentrer dans le commandement intégré
11:00 de l'OTAN.
11:01 Donc nous sommes une société qu'on gère mais nous ne sommes pas un État qu'on gouverne.
11:04 Mais est-ce que ce n'est pas la seule solution ?
11:06 Non, la preuve c'est qu'on en est là où on en est.
11:10 Et alors on a vraiment manqué d'astuces.
11:12 Parce que les Allemands, pendant ce temps-là, ils ont agi complètement différemment.
11:16 Vous avez dit tout à l'heure que les Allemands voulaient retrouver leur État.
11:19 Non, les Allemands voulaient trouver un État.
11:21 Car ils n'en ont jamais eu.
11:24 Entre le temps de Charlemagne et Bismarck, ils n'ont jamais eu un État.
11:28 Mais aujourd'hui, on doit se séparer de l'Allemagne ou on doit rester très très
11:31 proche ?
11:32 Non, parce qu'un couple est composé d'un homme et d'une femme, ça arrive tout de
11:35 même dans un certain nombre de cas, et qui a donc des différences de sensibilité, de
11:40 chemin de vie, etc.
11:41 Est-ce que les couples doivent se séparer ?
11:43 Non.
11:44 L'Allemagne a son histoire, elle a sa place en Europe, qui n'est pas la nôtre, qui
11:48 est plus continentale, et nous avons la nôtre.
11:51 Eh bien, on peut très bien construire ensemble, gérer ensemble, participer ensemble à une
11:57 construction européenne qui respecte tout cela.
11:59 Simplement, il faut récupérer, nous, ce qui constitue notre souveraineté.
12:03 Comme l'Allemagne le fait, car elle ne l'a jamais abandonné.
12:06 Par exemple, nous avons mis les traités européens dans la constitution française, parce que
12:13 c'était plus commode, ça se voyait moins.
12:14 Bon, ben c'était stupide.
12:16 Qu'est-ce qui nous empêche de les sortir de la constitution et de dire "on n'avait
12:20 pas bien compris, on n'est pas des très bons constitutionnalistes".
12:23 On continuera à parler de tout ça, parce qu'il y a beaucoup de choses dans votre livre,
12:26 mais là, c'est vrai que cette prise de tâche, vous avez vu, on était en direct,
12:30 on a un peu moins de temps que prévu.
12:31 Donc, je vais vous remercier maintenant et on continuera évidemment à en parler à
12:38 d'autres occasions.
12:39 Merci beaucoup d'être venu sur notre plateau.

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