La présidente de la communauté juive de Rouen, Natacha Ben Haïm, était l'invitée de Morandini Live, ce lundi 20 mai, sur CNEWS. Elle s'est exprimée sur la tentative d'incendie à la synagogue de Rouen : «Il était là pour tuer des juifs».
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00:00 -Alors là, on réalise un peu plus, si vous voulez,
00:03 parce que c'est vrai que vendredi, c'était sur le fait,
00:07 donc évidemment, on était choqués, on l'est toujours,
00:10 mais c'était sur le moment.
00:12 Maintenant, on réalise réellement
00:14 qu'il y aurait pu y avoir bien pire, finalement.
00:18 Bien pire, parce que...
00:20 on s'est rendu compte
00:23 que cet homme avait un couteau dans la poche arrière,
00:27 qu'il est monté sur le dessus de la synagogue
00:32 et il est rentré dans la synagogue,
00:36 puisqu'il avait apparemment dessoudé un vitrail,
00:38 et donc il pensait trouver du monde dans la synagogue.
00:43 Donc il a commencé à mettre le feu et il est rentré dans la synagogue.
00:47 Je veux dire, c'était vraiment pour tuer les Juifs.
00:50 Et c'est pas un départ d'incendie ou une tentative,
00:53 c'est un incendie.
00:55 La synagogue est dévastée, vraiment.
00:57 Elle est dévastée.
00:59 -C'est très grave, ce que vous dites,
01:01 car c'est une information qu'on n'avait pas jusque-là.
01:04 Vous avez le sentiment qu'il voulait rentrer pour tuer des Juifs
01:08 et pas simplement mettre le feu ? -Bien sûr.
01:10 -Il était avec un couteau avec lui,
01:12 donc c'est évident que c'était pour tuer des Juifs.
01:15 Ce qu'on pense, c'est qu'il a dû rechercher sur Google
01:18 l'heure de la prière du matin chez les Juifs,
01:21 et c'est à partir de 6h du matin,
01:23 donc il a dû croire qu'il a dû avoir un fils,
01:26 et comme ça, il pourrait attaquer des personnes
01:28 en sortant de la synagogue. -Oui.
01:30 -Vous êtes dans quel état d'esprit ?
01:32 C'est la peur, c'est la colère ?
01:34 C'est... Qu'est-ce que vous avez en tête ?
01:37 -Alors, la peur, je veux dire,
01:41 on l'a de toute façon au quotidien,
01:44 et je pense que vous le savez,
01:45 tous les Juifs de France sont comme nous.
01:48 Maintenant, là, on est plutôt dans la colère,
01:50 et on se reconstruit.
01:53 Vous savez, on est un peuple solidaire,
01:56 et il est clair que j'ai voulu faire la prière
01:59 du vendredi soir du shabbat dans notre synagogue,
02:03 dans la cour, puisqu'il y avait,
02:06 et il y avait encore des vapeurs toxiques,
02:08 j'ai voulu rester dans la synagogue pour la prière du shabbat.
02:12 Voilà, pour montrer qu'on va rester.
02:14 On est là, on est des citoyens français
02:17 de confession juive,
02:19 par conséquent, on va rester dans nos synagogues,
02:22 on va continuer à prier, et personne ne nous l'enlèvera.
02:25 Alors, ils peuvent monter, descendre,
02:28 ça ne fonctionne pas, vraiment.
02:30 L'état d'esprit, il est à rester debout.
02:32 -Vous nous disiez, ce fameux Youssef,
02:34 qui est la personne qui est intervenue,
02:37 voulait tuer des Juifs.
02:38 Est-ce qu'il y a des gens de la communauté juive
02:41 qui se disent "c'est plus possible de rester en France,
02:44 "on veut partir" ? -Bien sûr.
02:46 Bien sûr, beaucoup, beaucoup.
02:48 J'ai fait un aller-retour à Paris hier,
02:50 à l'agence juive, pour, justement, le salon de l'Alia,
02:54 et ils me disaient qu'il y avait énormément de dossiers.
02:58 Ils n'ont jamais vu ça, c'est énorme, énorme.
03:01 Maintenant, mon fils, le premier,
03:04 puisqu'il est passé dans votre émission,
03:06 et c'est vrai qu'il n'a pas pu ce matin,
03:09 mais Nathan part, a priori, début septembre,
03:13 et il s'en va.
03:14 Il ne se sent plus en sécurité en France,
03:17 il n'y trouve plus d'intérêt.
03:20 Vraiment. C'est vraiment dommageable,
03:22 parce qu'il a 19 ans et demi.
03:24 -M. Alrabin, qu'est-ce que vous avez envie de dire
03:27 aux gens de la communauté juive
03:29 qui ont envie de partir de France ?
03:31 Est-ce que vous les comprenez ?
03:33 -Je comprends, mais c'est un pas qu'il faut le faire,
03:36 réfléchir, pas le faire avec la peur.
03:38 Il faut le faire par conviction, si on veut partir en Israël.
03:42 Il faut savoir qu'on est en France,
03:44 on est dans un pays républicain
03:46 qui doit défendre la liberté d'expression,
03:48 la liberté de pouvoir pratiquer notre judaïsme.
03:51 On doit tout faire pour pratiquer notre judaïsme en France,
03:54 et les autorités le font,
03:56 font le maximum pour pratiquer notre judaïsme.
03:59 Il faut être confiant.
04:00 Il y a des épreuves partout,
04:02 et il faut pouvoir surmonter ces épreuves.
04:04 Dieu nous donne la force,
04:06 on va pouvoir les surmonter,
04:08 on va pouvoir reconstruire notre synagogue
04:10 et la communauté sera plus grande.
04:13 -Exactement.
04:14 Je voudrais aussi dire quelque chose, Jean-Luc,
04:17 si vous me permettez.
04:19 On a parlé, donc on décore ce policier,
04:22 c'est vraiment... Voilà.
04:24 Je pense sincèrement que M. Darmanin a fait ce qu'il fallait.
04:27 Maintenant, il faut savoir une autre information,
04:30 c'est que quand ça s'est passé,
04:35 la police n'était pas sur les lieux, les pompiers n'étaient pas.
04:38 Les services de la ville, c'est un éboueur.
04:41 J'aimerais le remercier, j'ai vu M. le maire ce matin,
04:45 je lui ai demandé une rencontre,
04:47 parce qu'il faut parler de lui.
04:48 Vraiment, s'il n'avait pas été là,
04:51 la synagogue, je pense que ça aurait été...
04:53 Mais d'une catastrophe,
04:56 vraiment, ça aurait été vraiment pire.
04:59 Voyez ce que je veux dire ?
05:00 Et cet éboueur, il a pris le téléphone,
05:02 il a poussé son camion et il a téléphoné aux pompiers.
05:06 Il a fait ce qu'il fallait.
05:07 Et vraiment, je le remercie de tout cœur.
05:09 -Exactement. On m'a vu dans les vidéos,
05:12 des personnes sont passées pendant l'acte,
05:14 ça a duré un long moment,
05:15 des personnes sont passées et n'ont rien fait.
05:18 Cet éboueur a fait un acte de civilité,
05:20 il a téléphoné à la police, il a sauvé notre synagogue,
05:23 il a sauvé peut-être de pire,
05:25 et on a toute notre gratitude envers lui.
05:27 -Exactement.
05:29 ...
05:33 [SILENCE]