• il y a 7 mois
Le documentaire "Affaires Sensibles : Les Révoltés des Jeux Olympiques" (2024), réalisé par Adrian Jaouen, Arnaud Morel, Patrice Caillonneau et Michel Pignard, retrace les histoires de trois athlètes qui ont utilisé les Jeux Olympiques comme plateforme pour protester contre les injustices sociales et politiques.

Les trois athlètes:

Tommie Smith et John Carlos (1968): Ces sprinters américains ont levé le poing noir sur le podium du 200 mètres lors des Jeux Olympiques de Mexico en 1968 pour protester contre le racisme aux États-Unis.
Władysław Kozakiewicz (1980): Ce perchiste polonais a effectué un salut de l'aigle lors de la cérémonie de remise des médailles des Jeux Olympiques de Moscou en 1980 pour défier le régime communiste de son pays.
Feyisa Lilesa (2016): Ce marathonien éthiopien a croisé les bras lors de la course du marathon des Jeux Olympiques de Rio en 2016 pour dénoncer la répression du peuple Oromo par le gouvernement éthiopien.

Le documentaire explore les motivations de ces athlètes, les risques qu'ils ont pris en protestant et l'impact de leurs actions sur le monde.

Il met également en lumière les défis auxquels les athlètes militants sont confrontés aujourd'hui, à une époque où le Comité international olympique (CIO) a des règles strictes sur les manifestations politiques.

Points forts du documentaire:

Témoignages poignants: Le film comprend des interviews des trois athlètes, ainsi que d'historiens, de journalistes et d'autres experts. Ces témoignages permettent de comprendre les motivations des athlètes et l'impact de leurs actions.
Archives rares: Le documentaire utilise des archives rares, des photos et des vidéos pour raconter les histoires des trois athlètes.
Contexte historique: Le film replace les protestations des athlètes dans leur contexte historique, permettant de mieux comprendre les injustices qu'ils dénonçaient.

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Sport
Transcription
00:00Bonjour et bienvenue dans ce nouveau numéro d'Affaires Sensibles et dans ce site olympique
00:21de Paris 2024.
00:22Aujourd'hui, nous allons vous raconter comment des athlètes ont marqué l'histoire mondiale
00:27aux JO, non pas par leur exploit sportif, mais par un simple geste, un point levé,
00:33un bras d'honneur ou encore des poignées croisées, avec courage.
00:37Ils profitent de l'événement pour prendre l'humanité entière à témoin de la situation
00:41qu'ils subissent dans leur pays.
00:42Et vous allez voir que leur prise de position sur les terrains sportifs embarrasse le comité
00:47international olympique.
00:57C'est un géant polonais, l'un des meilleurs sauteurs à la perche de tous les temps.
01:05Aujourd'hui retraité, Ladislav Kozakiewicz a conservé son allure de champion et sa médaille
01:14d'or décrochée aux JO de Moscou en 1980.
01:27Pourtant, ce ne sont pas ses exploits sportifs qui l'ont fait entrer dans la légende, mais
01:37ceci.
01:38Un bras d'honneur retransmis en direct dans le monde entier.
01:43Une image qui a propulsé Ladislav Kozakiewicz au rang de héros dans son pays.
01:58Si c'était à refaire, je le referais sans hésiter.
02:05Ce geste a changé toute ma vie.
02:09Comme lui, de nombreux athlètes ont fait un coup d'éclat pendant les jeux olympiques.
02:16Une tribune médiatique exceptionnelle, regardée par des milliards de personnes.
02:20C'est l'exposition maximale, s'il y a un geste à faire, c'est là.
02:25Comme ce geste de protestation de l'éthiopien Faisal Ilessa à Rio en 2016 pour mettre la
02:31lumière sur son peuple opprimé.
02:32Je suis très fier de moi, j'ai montré la souffrance de mon peuple au monde entier.
02:43A Tokyo en 2021, les footballeuses posent le genou à terre et lèvent le poing, un
02:51geste symbolique pour dénoncer le racisme.
02:53La référence ultime de ces protestations, la première qui a marqué l'histoire, ce
03:03sont les poings levés des sprinters américains Tommy Smith et John Carlos à Mexico en 1968.
03:11C'était totalement époustouflant.
03:15Pourquoi ces athlètes sont-ils devenus les porte-voix d'une cause ?
03:21Dans un monde sportif qui n'appréciait guère l'intrusion de la politique, certains
03:28payaient très cher le prix de leur engagement.
03:30Oui, j'ai trouvé que c'était de l'injustice, mais ça a été terrible pour eux, terrible
03:35pour eux.
03:36Ladislav Kozakiewicz vit aujourd'hui en Allemagne, près de Hanover.
03:56Il a gardé précieusement tous les souvenirs de sa jeunesse dans la Pologne communiste.
04:01Son destin a basculé en un instant, il y a un peu plus de 40 ans.
04:09Ça, c'est en 1980, avant les Jeux Olympiques.
04:15J'habite à Varsovie avec ma femme et notre bébé dans un petit appartement de 18 mètres
04:23carrés.
04:24C'était tout petit, mais on s'en fichait, on était heureux.
04:33Vous étiez en forme ?
04:35Évidemment, c'était quelques semaines avant les Jeux.
04:47Ces Jeux Olympiques à Moscou se présentent très bien pour le Polonais.
04:55A 27 ans, il fait partie des favoris de l'épreuve du saut à la perche.
04:58L'un de ses rivaux est le Français Philippe Ouvillon.
05:08Il a alors 23 ans et Kozakiewicz est son idole.
05:12Quand je suis arrivé à Moscou, je rencontre Kozakiewicz, je rencontre des mecs que j'avais
05:27vus en film.
05:28Et quand tu te retrouves dans la même compétition qu'eux, tu te dis « hé, j'y suis, quoi ! »
05:35Quand le concours commence, le Polonais lui en met une nouvelle fois plein la vue.
05:41Il était beau à voir, parce que tout se passait bien.
05:45Puis il sortait de là avec un grand sourire, avec ses cheveux longs bouclés, c'était
05:50génial de le voir.
05:51Ça passait à chaque fois, dès le premier saut.
05:58C'était tellement parfait que je me suis dit « tranquille, je me sens bien, le soleil
06:03brille.
06:04Aucun stress ! »
06:05Mais dans le stade Levin, les spectateurs russes sont loin de partager l'euphorie du
06:12Polonais.
06:13Ils le sifflent copieusement à chacun de ses sauts.
06:18L'ambiance dans le stade, c'était terrible.
06:44Il y avait 95 000 personnes dans ce grand stade-là.
06:47C'était comme le colisée.
06:49Kozakiewicz est alors au coude à coude avec le perchiste soviétique Volkov, qui sont
06:54à domicile.
06:55Or, il existe une rivalité historique entre Russes et Polonais, et il est inconcevable
07:03pour les spectateurs moscovites que leur champion perde face à Kozakiewicz.
07:09Les Russes me sifflent du premier au dernier essai.
07:12Vous voulez savoir pourquoi ?
07:14Ils étaient contre la Pologne, contre tous les Polonais, et contre moi, c'était le
07:20pire.
07:21Mais loin de troubler Kozakiewicz, l'hostilité du public russe le galvanise.
07:28Avec ce saut à 5 mètres 75, le Polonais remporte la médaille d'or.
07:36C'est là qu'il surprend le public soviétique avec ce bras d'honneur.
07:43Quand je me suis relevé, mes bras étaient comme ça.
07:49Pourquoi ? Pour quelle raison ? Je ne le sais toujours pas.
07:55Mais c'était un moment où je n'ai pas pensé à moi.
08:01Je n'ai pas pensé au fait que j'avais gagné.
08:04J'ai juste pensé au Polonais.
08:09Et j'ai dit, allez vous faire foutre.
08:22Et ça, c'était pour les Russes.
08:33Parfois, le souvenir est plus dur que la vie elle-même.
08:36Aujourd'hui, j'y réfléchis, peut-être beaucoup trop.
08:39Même si je dois le dire, ce n'était pas un geste prémédité que j'aurais planifié
08:44avant la compétition.
08:53Le Français Philippe Ouvillon, qui termine quatrième, félicite le champion polonais
08:58juste après son bras d'honneur.
09:00Quand Koza fait ça, il est au centre de Moscou, il prend les soviétiques, il leur fait un
09:06Je veux dire, c'est quand même assez couillu.
09:08C'était le geste qu'il fallait faire au moment où il l'a fait.
09:12Dans les conditions, c'était absolument fabuleux.
09:15Et puis pour toute la Pologne, c'était extraordinaire qu'il fasse ça.
09:22Un autre sportif français, aujourd'hui membre du comité international olympique,
09:27a assisté à la scène devant son téléviseur.
09:30Guy Druth, médaillé d'or au 110ème étreuil en 1976,
09:34se souvient encore de la réaction du Polonais.
09:45Quand vous avez 80 000 personnes contre vous, ça fait du bruit quand même.
09:49Donc que le type, qui reste quand même un peu sanguin, réagisse, ça peut se comprendre.
09:57Donc ce geste, ce bras d'honneur, quand vous le voyez...
10:00Moi ça m'a plutôt amusé qu'autre chose.
10:02Ça vous a amusé ?
10:03Oui, parce que je connais l'individu.
10:08Et puis ça a été comme ça, c'était spontané.
10:10D'ailleurs, ça a duré deux secondes, trois secondes.
10:16Le lendemain, les Polonais présents à Moscou portent au nu Vladislav Kozakevic sur la place rouge.
10:23Les supporters polonais m'ont pris, ils m'ont jeté en l'air.
10:30Au même moment, on peut voir la police russe arriver.
10:34Je pensais qu'ils allaient me mettre en prison.
10:38Ils nous ont dit, non, non, silence, vous n'avez pas le droit de chanter votre hymne national.
10:44C'est une histoire rigolote.
10:50Dans les jours qui suivent, il est inondé de télégrammes de félicitations venus de toute la Pologne.
10:59Il y a le maire de ma ville, un chauffeur de taxi qui s'appelle Tadeusz, de Krylińska,
11:06c'est une ville en Pologne et je ne sais même pas qui c'est.
11:10Le ministre des sports, félicitations pour votre médaille d'or, nous sommes fiers de vous.
11:23De retour dans son pays, il est même béni par un compatriote, le pape Jean-Paul II.
11:29Son bras d'honneur va prendre ensuite une dimension politique qui va vite le dépasser.
11:34Deux semaines après ses Jeux olympiques, des manifestations éclatent en Pologne.
11:39Le pays alors dirigé par le parti communiste est encore sous le joug de l'URSS
11:44et la population souffre de pénuries alimentaires.
11:47Le pape Jean-Paul II s'occupe de l'économie et de l'environnement.
11:50Le pays alors dirigé par le parti communiste est encore sous le joug de l'URSS
11:55et la population souffre de pénuries alimentaires.
12:00Malgré son statut d'athlète, Vladislav Kozakiewicz subit lui aussi des restrictions.
12:11En Pologne, c'était très dur d'acheter de la nourriture.
12:15Dans les magasins, il n'y avait que des pommes de terre et du vinaigre.
12:17On mangeait parfois des os.
12:20Vraiment, les Polonais vivaient comme au 18e siècle.
12:30Son bras d'honneur devient alors le symbole du soulèvement du peuple polonais
12:35contre la domination soviétique.
12:42Ils ont vu ce geste comme une victoire contre la Russie.
12:45Les Polonais étaient euphoriques.
12:48Ce geste a fait de moi un héros en Pologne.
12:58Mais pour Vladislav Kozakiewicz, les événements ont pris une drôle de tournure.
13:03Il n'était pas préparé à endosser ce costume de héros politique.
13:09Ok, ce n'était pas un beau geste.
13:11Mais comme le monde entier l'a vu, l'histoire a été réécrite
13:15et personne ne m'a demandé ce que j'en pensais à l'époque.
13:19Je ne veux pas me défaire de ce geste.
13:22Non, je l'ai fait.
13:24Mais à l'époque, ça n'avait rien à voir avec la politique.
13:31Pour le pouvoir communiste, le statut d'icône de Kozakiewicz
13:35va faire de lui un champion encombrant.
13:37Après l'égio, la fédération polonaise d'athlétisme contrôlée par le parti
13:42l'empêche de participer à certaines compétitions internationales.
13:46Et il perd sa bourse de sportif.
13:49Alors, en 1985, il décide de quitter son pays pour l'Allemagne.
13:55Un passage à l'ouest,
13:57ultime geste de défiance au système soviétique
14:01mais qui cette fois va lui coûter cher.
14:04Le 8 juillet 1985,
14:07un mois après être passé de l'autre côté du rideau de fer,
14:10Vladislav Kozakiewicz gagne une compétition à Dortmund.
14:14Sa femme et sa fille de 5 ans sont à ses côtés.
14:20La fédération polonaise d'athlétisme
14:23décide d'envoyer son fils à l'étranger
14:26pour qu'il puisse s'entraîner à l'étranger.
14:29Lors de la compétition,
14:30la compétition s'arrête.
14:34De retour dans leur chambre d'hôtel,
14:37Kozakiewicz reçoit un appel paniqué de son frère aîné,
14:40resté en Pologne.
14:46Et là il me dit,
14:48ils sont allés chez toi et ils ont tout pris.
14:51Tout. Tout ce que j'ai gagné là.
14:54Toutes mes possessions.
14:57Le régime polonais l'accuse de trahison
15:00ses comptes en banque sont fermés.
15:04Son appartement est saisi.
15:08Vladislav Kozakiewicz
15:10prend alors la décision de s'installer en Allemagne de l'Ouest.
15:15Ce qu'aucune sanction ne peut lui enlever,
15:18c'est son talent de perchiste.
15:20Pour le club d'athlétisme d'Hannover,
15:23c'est la chance de pouvoir recruter un grand champion.
15:27Kozakiewicz est contacté par son dirigeant,
15:30un Polonais lui aussi,
15:36Edvard Kovacsuk.
15:40Salut.
15:42Ça va ?
15:44Ça va.
15:46Salut, comment ça va ?
15:49Bien et toi, tout va bien ?
15:52Les deux amis se retrouvent pour la première fois depuis 15 ans.
15:58Il a commencé sa deuxième carrière ici,
16:02avec beaucoup de réussite.
16:06Il a été champion d'Allemagne de saut à la perche.
16:09C'est dans ce gymnase
16:11que Vladislav a continué sa carrière jusqu'en 1990.
16:18Ah, c'est super !
16:20Malgré les années, toujours le même réflexe.
16:24Alors, vous vous rappelez comment on fait ?
16:28C'est comme ça.
16:30C'est comme ça.
16:33C'est comme ça.
16:35C'est comme ça.
16:36C'est comme ça.
16:41Oui, bien sûr que je me rappelle.
16:44Il faut attraper la perche comme ça,
16:46la soulever,
16:48puis courir.
16:50Et à la fin, la perche se tord et on monte.
16:53Mais il faut vraiment être rapide.
16:56Aujourd'hui, à mon âge, plus personne ne saute à la perche.
16:59J'ai mal partout, je ne le fais plus.
17:02C'est pour les jeunes
17:04ou les gens un peu fous.
17:07Quand je suis arrivé ici et que je sautais,
17:10le balcon était plein de monde.
17:12Et je sautais encore plus haut
17:14que là où se trouvaient les gens.
17:16J'étais comme une star ici.
17:19Quoi que je fasse,
17:21les gens se demandaient
17:23« C'est quoi ce type ? »
17:28Et il est toujours aussi connu ?
17:30Bien sûr, tout à fait.
17:32C'est comme ça.
17:33Étrangement, je ne sais pas pourquoi.
17:35Peut-être parce que je suis beau gosse ?
17:37Oui, certainement.
17:43Sa notoriété est même devenue une source de revenus.
17:47En 2008,
17:49il joue dans un spot de pub polonais
17:51pour un décontractant musculaire.
18:04Son bras donneur spontané,
18:06détourné en argument publicitaire,
18:08ça non plus,
18:10le Polonais ne l'avait pas prévu.
18:13Si Vladislav Kozakiewicz est devenu
18:15un icône malgré lui,
18:17d'autres avaient entièrement calculé
18:19les conséquences de leurs gestes.
18:34Le 29 septembre 2016,
18:36le président des États-Unis,
18:38Barack Obama,
18:40reçoit les athlètes de l'équipe olympique américaine
18:42qui viennent de briller au jeu de Rio.
18:49À cette occasion,
18:51il tient à rendre hommage à deux figures mythiques.
18:55Nous sommes honorés
18:57de recevoir aujourd'hui
18:59les légendes Tommy Smith et John Carlos.
19:04Tommy Smith et John Carlos
19:06ont marqué l'histoire
19:08par une image.
19:11Leurs points levés gantés de noir
19:13sur le podium des JO de Mexico
19:1550 ans plus tôt
19:17pour dénoncer le racisme
19:19dont était victime la communauté noire américaine.
19:25Cette puissante protestation silencieuse
19:27lors des Jeux de 1968
19:29a été controversée,
19:31mais elle a éveillé les consciences
19:33et créé de grandes opportunités
19:35pour les générations suivantes.
19:41Mais avant d'être honoré par l'Amérique d'Obama,
19:43le rôle de pionnier de John Carlos
19:45et de Tommy Smith
19:47a mis des années avant d'être reconnu.
19:55Il fallait faire quelque chose de choquant
19:57pour que les gens se demandent
19:59pourquoi des athlètes comme nous
20:01ont mis en jeu leur carrière,
20:04en faisant un geste comme celui-ci,
20:06on s'attendait à des tempêtes
20:08et il y en a eu beaucoup.
20:14L'histoire de la révolte de Tommy Smith
20:16et de John Carlos
20:18commence en Californie
20:20à l'université de San José.
20:25Ken Noel, 86 ans,
20:27est l'un de leurs meilleurs amis.
20:30Cet ancien coureur de 400 mètres
20:31a étudié ici avec eux.
20:42Et surtout, Ken Noel
20:44a partagé leur combat politique
20:46pour l'égalité dans l'Amérique ségrégationniste
20:48des années 60.
20:59A l'époque,
21:01San José est une usine à champions.
21:03Son surnom, Speed City.
21:09Les meilleurs athlètes du pays,
21:11majoritairement noirs, s'entraînent ici.
21:14Ken Noel se souvient
21:16de l'arrivée de Tommy Smith,
21:18originaire d'un état du sud
21:20qui pratiquait la ségrégation raciale.
21:25Il a grandi dans une ferme.
21:28Son père travaillait
21:29pour tous les éleveurs
21:31autour de leur maison.
21:34Il avait sept frères et soeurs.
21:37Et vous savez,
21:39nous avons tous été exposés au racisme.
21:42Mais lui,
21:44il venait des champs de coton du Texas.
21:51John Carlos, lui,
21:53vient des faubourgs de New York.
22:00Il vient d'Harlem.
22:02Vous savez, c'est le ghetto
22:04le plus dur de New York.
22:06Quand vous sortez de là,
22:08ça forge votre caractère.
22:10Il est très franc,
22:12combatif
22:14et super confiant,
22:16en particulier à propos de lui-même
22:18et de ses capacités.
22:20Et vous savez,
22:22c'est le genre de personnalité qu'on aime.
22:24Smith et Carlos vont se joindre
22:26naturellement au combat
22:28pour l'égalité des droits
22:30qui déchirent alors l'Amérique.
22:32Une lutte sanglante
22:34incarnée par les grandes figures
22:36de Martin Luther King
22:38ou de Malcolm X.
22:41Les deux spinkers
22:43voient dans les JO de Mexico
22:45l'occasion parfaite
22:47pour faire avancer leur combat.
22:49Avec Ken Noel
22:51et d'autres étudiants
22:53ils décident de fonder
22:55leur propre mouvement.
22:57Le Limping Project for Human Rights
22:59symbolisé par ce badge.
23:05On en a produit 5000 en tout
23:07et on les distribuait
23:09à chacun de nos déplacements
23:11aux athlètes qu'on rencontrait.
23:14Un an avant les JO,
23:16ils réalisent un premier coup d'éclat.
23:24Le 23 novembre 1967,
23:26ils réunissent dans cette petite église
23:28de Los Angeles
23:30près de 200 athlètes noirs
23:32l'élite du sport américain.
23:38L'église était bondée.
23:40Tout le monde se parlait
23:42et Tommy Smith passait
23:44d'un groupe à l'autre.
23:46Il y avait aussi des basketteurs
23:48et c'est exactement
23:50ce qu'on recherchait.
23:52Tommy Smith et Ken Noel
23:54font une proposition choc à l'Assemblée.
23:57Boycotter les JO olympiques.
24:01L'Assemblée approuve à l'unanimité.
24:06Pour lever ce boycott,
24:08ils fixent plusieurs conditions.
24:10Plus de noirs dans les instances
24:12dirigeantes sportives,
24:14bannir des JO l'Afrique du Sud
24:16alors en pleine apartheid
24:17et la démission du président
24:19du comité international olympique
24:21Avery Brundage.
24:25Cet Américain
24:27incarne tout ce qu'il dénonce
24:29au travers de leur lutte.
24:31Est-ce que vous pouvez me parler
24:33d'Avery Brundage ?
24:36Avery Brundage.
24:38J'aime pas trop parler de lui.
24:41Mais entre nous,
24:43on l'appelait l'héritier du slavery.
24:45Et entre nous,
24:47on l'appelait Avery l'esclavagiste.
24:49Il a passé sous silence
24:51tout ce que le monde entier
24:53savait à propos d'Hitler.
24:55Il a dit que l'Allemagne
24:57n'était ni raciste ni antisémite.
25:04Il a aussi défendu
25:06l'Afrique du Sud et la Rhodesie,
25:08deux pays pratiquant l'apartheid.
25:10Deux pays pratiquant l'apartheid.
25:29Avery Brundage,
25:31c'est un personnage qui est proche
25:33des fraternités blanches,
25:35qui sont en proximité du Ku Klux Klan,
25:37qui s'oppose à l'intervention américaine
25:39et à la Seconde Guerre mondiale
25:41contre le Troisième Reich.
25:43Et il se retrouve très bien
25:45dans la figure d'Hitler
25:47comme un rempart contre le bolchevisme
25:49et contre les démocrates,
25:51de manière générale.
25:53En 1952, il est élu président
25:55du comité international olympique
25:57et il va occuper cette position
25:59pendant 20 ans.
26:01Il est une sorte d'aberration
26:03dans l'histoire du second XXe siècle.
26:06Mais Avery Brundage
26:08n'est pas seul.
26:10Des dissensions apparaissent
26:12parmi les athlètes noirs.
26:14Beaucoup choisissent finalement
26:16de privilégier leur carrière sportive.
26:18Il y a quelques mois des Jeux,
26:20le projet de boycott est abandonné.
26:23Tommy Smith et John Carlos, eux,
26:25ne renoncent pas à l'idée
26:27de faire des JO,
26:29le théâtre de leur lutte.
26:31Et ils élaborent en secret
26:33un plan d'action.
26:34Finalement, ils se sont dit
26:36au lieu de boycotter,
26:38on va organiser des manifestations
26:40sur place.
26:42Nous n'avions aucune idée
26:44de ce qu'ils avaient en tête.
26:46Ils ne l'avaient dit à personne.
26:53Le 16 octobre 1968,
26:55les 72 000 spectateurs
26:57du stade universitaire de Mexico
26:59s'apprêtent à vivre
27:01l'un des moments les plus attendus
27:02des Jeux Olympiques.
27:04La finale du 200 m,
27:06le rendez-vous des meilleurs sprinteurs mondiaux.
27:09Pour John Carlos et Tommy Smith,
27:11c'est le jour J.
27:27Sur 200 m,
27:29Tommy Smith domine l'épreuve
27:30et remporte la médaille d'or
27:32devant l'Australien Peter Norman
27:34et un autre Américain, John Carlos.
27:37Smith premier.
27:39Carlos troisième.
27:43Et juste derrière eux,
27:45sur la photo,
27:47le Français Roger Bambuc
27:49termine cinquième.
27:53Aujourd'hui, affaibli par la maladie,
27:55il a tenu à témoigner.
27:57Cet ancien secrétaire d'État
27:58à la jeunesse et au sport
28:00n'a rien oublié de cette journée historique.
28:21Sa femme, Gislaine Barnet,
28:23est également en compétition à Mexico.
28:25Engagée dans le concours de son hauteur.
28:51Pendant ses Jeux,
28:52le couple sympathise avec
28:54Tommy Smith et John Carlos.
29:23Gislaine Barnet a été marquée
29:25par les premiers mots
29:27de John Carlos.
29:53Pourquoi vous pensez qu'il était content
29:55que vous disiez ça ?
29:57Je pense que ça faisait déjà longtemps
29:59qu'il réfléchissait à tout,
30:01qu'il avait certainement déjà connu
30:03pas mal de désagréments aux États-Unis
30:05et qu'il cherchait à se rapprocher
30:07de leurs racines.
30:09Les Bambucs ne savent rien
30:11du coup d'éclat que préparent
30:13Tommy Smith et John Carlos.
30:15Mais ils ont entendu des rumeurs.
30:17Un journaliste nous a dit
30:19qu'il allait se passer des choses,
30:20que les Américains allaient manifester
30:22leur mécontentement.
30:24Et donc on attendait
30:26pour voir ce qui allait se passer
30:28et on a vu.
30:30Quelques heures après l'arrivée
30:32des 200 mètres,
30:34Tommy Smith et John Carlos
30:36se présentent sur le podium
30:38où ils ont rendez-vous avec histoire.
30:40Et c'est ici que se place
30:42l'incident des Jeux.
30:44Lorsque montés sur le podium,
30:46les deux Américains lèvent leurs mains
30:48gantées de noir et baissent la tête
30:50pour voir tous les détails
30:52de leur mise en scène.
30:54Ils tournent d'abord le dos
30:56à leur drapeau,
30:58puis brandissent leurs points gantés
31:00de noir pour signifier l'unité
31:02et la puissance des Afro-Américains.
31:06Ils ont tous les deux enlevé
31:08leurs chaussures et portent
31:10des chaussettes noires,
31:12symbole de la pauvreté
31:14de leur communauté.
31:16Enfin, John Carlos arbore
31:18un collier qui symbolise
31:20la puissance des Américains.
31:24Ils ont été hués sur le stade
31:26quand ils ont levé le point
31:28et baissé la tête.
31:30Moi, j'ai dit bravo.
31:32Ils ont eu le courage de le faire.
31:34C'était totalement époustouflant.
31:39C'était si glorieux,
31:41tellement spectaculaire.
31:44C'était un acte si courageux.
31:48Je n'ai pas pu rester chez moi.
31:51J'étais trop bouleversé.
31:53Je suis sorti et j'ai marché.
31:56C'était fantastique.
31:58Encore mieux que tout
32:00ce dont j'aurais pu rêver.
32:06Mais cette victoire
32:08pour les activistes noirs-américains
32:10marque le début
32:12d'une descente aux enfers.
32:14Avery Brandage,
32:15le patron des CIO,
32:17fait pression sur la délégation américaine
32:19pour qu'elle expulse
32:21Thomas Smith et John Carlos de Mexico.
32:25Les deux athlètes
32:27se retrouvent alors au cœur
32:29d'une tempête médiatique mondiale.
32:31Leur geste est loin de faire l'unanimité.
32:35C'est une gestuelle
32:37qui a une force télévisuelle considérable
32:40et qui va venir percuter
32:42les consciences du monde entier,
32:43suscitant plutôt la réprobation
32:45dans les opinions publiques
32:47dans le mouvement sportif international
32:49parce qu'on n'accepte pas
32:51que la politique entre dans l'arène olympique.
32:5348 heures plus tard,
32:55quand Smith et Carlos
32:57s'atterrissent en Californie,
32:59ils apprennent que le comité olympique américain
33:01les a radiés à vie
33:03de toute compétition.
33:05Laissez-moi me reposer
33:07ainsi que ma femme
33:09et je suis sûr que Tommy et sa femme
33:11sont aussi fatigués.
33:13Non, pas du tout.
33:15On vient de traverser l'enfer
33:17toute la semaine, tous les quatre.
33:19Je ne veux pas prendre la parole
33:21avant un bon moment
33:23et je pense qu'eux non plus.
33:27Ils vont perdre plus encore
33:29que leur carrière d'athlète.
33:31Dans les années qui suivent
33:33ces Jeux olympiques,
33:35ils sont mis au banc de la société américaine
33:37considérée comme trop sulfureuse.
33:39Smith et Carlos
33:41sont contraints d'enchaîner
33:43une guerre familiale qui s'écroule.
33:48Mais leur sacrifice n'aura pas été vain.
33:51Leur geste devient signe de ralliement
33:53pour d'autres athlètes noirs
33:55comme ici l'américain Bob Beamon
33:57en 1972 au J.O. de Munich.
34:00Mais pour le CIO,
34:02pas question de laisser ses revendications
34:04envahir l'arène olympique.
34:06Alors, en 1976,
34:09le comité ajoute un article
34:11à sa charte olympique.
34:13Toute démonstration
34:15ou propagande politique,
34:17religieuse ou raciale
34:19dans les enceintes olympiques
34:21est interdite.
34:23Aujourd'hui encore,
34:25Guy Druth, membre du CIO,
34:27désapprouve le geste de
34:29Tommy Smith et de John Carlos.
34:31C'était un scénario,
34:33c'était monté,
34:35c'était une opération montée
34:37et donc on va profiter
34:39de la scène olympique
34:41pour cette revendication.
34:43C'est un podium dans un stade,
34:45on est là pour faire du sport,
34:47pour glorifier la performance,
34:50le partage,
34:52toutes les valeurs
34:54qui font justement l'olympisme,
34:56mais pas pour avoir
34:58une revendication politique
35:00à ce moment-là.
35:02Ce n'est pas l'endroit.
35:04C'est une position officielle du CIO ?
35:06Oui.
35:09Smith et Carlos
35:11devront attendre les années 2000
35:13avant d'accueillir la possibilité
35:15dans leur pays
35:17et profiter enfin
35:19de leur statut d'icône.
35:21En 2019,
35:23le comité olympique américain
35:25leur présente même
35:27des excuses officielles,
35:2951 ans après leur point levé.
35:38Il y a 8 ans,
35:40un autre athlète
35:41s'est inspiré de leur exemple,
35:43l'éthiopien Feissa Lilessa.
35:46Il vit aujourd'hui aux Etats-Unis,
35:48en plein cœur des montagnes de l'Arizona.
35:57En 2016,
35:59il est l'un des meilleurs marathoniens de la planète.
36:02Il décide alors de mettre en jeu sa carrière
36:04pour révéler au monde entier
36:06le massacre de son peuple.
36:08Feissa Lilessa est originaire
36:10du centre de l'Ethiopie.
36:12Il appartient à l'ethnie des Oromo,
36:14qui représente un tiers
36:16de la population du pays.
36:20Principalement des agriculteurs.
36:26Mon père est fermier.
36:28On a une petite exploitation.
36:30On n'est pas très riches,
36:32pas très pauvres.
36:34En 2015,
36:36son peuple manifeste
36:38contre le pouvoir en place
36:40tenu par une ethnie rivale.
36:45Jean-Christophe Collin
36:47est l'un des rares journalistes français
36:49à s'être intéressé à cette question.
36:51Il est un journaliste
36:53qui a été élu
36:55à l'Assemblée nationale
36:57et à l'Assemblée nationale
36:59en 2015.
37:00Jean-Christophe Collin
37:02est l'un des rares journalistes français
37:04à s'être intéressé à cette contestation.
37:11À ce moment-là,
37:13il y a un problème structurel
37:15qui est cet accaparement du pouvoir
37:17par une petite minorité
37:19d'une ethnie minoritaire,
37:21les Tigréens,
37:23avec un régime autoritaire,
37:25un régime très autoritaire
37:27depuis des années.
37:28Donc, plus de pouvoir
37:30veut être plus reconnu.
37:32Mais ces révoltes pacifiques
37:34sont réprimées dans le sang
37:36par le gouvernement.
37:38Cette année-là,
37:40400 romaux sont tués.
37:42On se fait tuer,
37:44torturés en prison.
37:46Nous n'avons aucun droit
37:48en Ethiopie.
37:50C'est vraiment une période
37:52dure pour nous.
37:54Feissa Lidesa a été touché
37:56de plein fouet
37:58par cette répression.
38:00Il a perdu l'un de ses meilleurs amis.
38:10Mon ami a été brûlé vif
38:12dans une prison.
38:15Ils ont enfermé des prisonniers,
38:17leurs propres frères
38:19et ont brûlé les détenus.
38:23J'ai beaucoup pleuré en la prenant.
38:25On était très proches.
38:27J'étais triste.
38:34Pour dénoncer ces violences,
38:36les manifestants inventent
38:38un geste de ralliement,
38:40les deux poignées croisées
38:42au-dessus de la tête.
38:48Ça veut dire
38:50arrêter de nous tuer.
38:51Nous avons besoin de démocratie,
38:53de justice,
38:55d'égalité.
38:57Il faut arrêter cette guerre.
39:01Malgré ces protestations,
39:03la répression que subissent les Oromo
39:05reste méconnue du monde entier.
39:07Le jeune athlète
39:09cherche alors un moyen d'attirer
39:11l'attention des médias internationaux.
39:13Et c'est en février 2016,
39:15après une course qui lui permet
39:17de se qualifier au marathon
39:19des Jeux Olympiques de Rio,
39:21qu'il arrive à Paris.
39:25Après avoir su que j'étais qualifié,
39:27j'ai commencé à me questionner.
39:31Qu'est-ce que je peux faire
39:33aux Jeux Olympiques de Rio pour mon peuple ?
39:35Je dois montrer au monde
39:37que le gouvernement nous tue.
39:42Six mois plus tard,
39:44le 7 août 2016,
39:46il est sur le point de remarquer
39:48dans son avion pour rejoindre Rio.
39:50Au portique de sécurité,
39:52il embrasse sa femme et ses deux enfants.
39:55Sa décision est prise,
39:57il va protester.
40:00Mais il garde le secret.
40:08Je ne leur en parle pas quand je pars.
40:11Je ne veux pas qu'ils s'imaginent
40:13que je ne les reverrai plus.
40:15Mais j'ai conscience que je ne vais plus les voir,
40:17que je ne vais plus courir.
40:19C'est le but de mon sacrifice.
40:21Pour moi, c'est dur,
40:23mais c'est ce qu'il faut pour mon peuple.
40:33Au dernier jour des Jeux Olympiques de Rio,
40:36le marathon s'apprête à commencer.
40:40Sur la ligne de départ,
40:42Feisali laisse sa trépigne d'impatience.
40:45Il n'a qu'un objectif en tête,
40:47terminer sur le podium,
40:49ultime condition pour arriver à ses fins.
40:53Au bout de deux heures et neuf minutes,
40:55Feisali est deuxième du marathon de Rio.
40:57Sur la dernière ligne droite,
40:59il croise alors ses poignets au-dessus de sa tête,
41:02comme son peuple.
41:07100 mètres avant la ligne d'arrivée,
41:10j'ai l'impression d'être dans un autre monde.
41:12100 mètres avant la ligne d'arrivée,
41:14je ressens quelque chose de merveilleux.
41:18J'ai rempli mon devoir,
41:20j'y suis arrivé.
41:22Je suis très heureux à ce moment-là.
41:28Ce cliché fait alors le tour du monde,
41:30Feisa a atteint son but.
41:35Après ce que j'ai fait à Rio,
41:37les médias du monde entier
41:39ont parlé de ces massacres en Ethiopie.
41:43De comment le gouvernement nous tuait.
41:46C'est parce que je l'ai expliqué à toute la planète.
41:50Ça devient un résistant,
41:52ça devient une figure tutélaire
41:54de la résistance horomo.
41:56C'est lui qui a fait connaître aux yeux du monde
41:59la problématique des horomos
42:02et des opposants au régime d'Addis Abeba.
42:05Et je pense que les gens en Ethiopie
42:07lui seront éternellement reconnaissants.
42:09De peur de représailles s'il rentre dans son pays,
42:12Feisa décide de rester à Rio
42:14le temps de trouver un point de chute.
42:17Mais le marathonien n'est pas seul.
42:19Un formidable élan de solidarité
42:21va venir des Etats-Unis
42:23où sont installés près de 40 000 horomos.
42:25Ils vont se mobiliser pour leurs héros.
42:32Les horomos et même tous les Ethiopiens
42:35ont participé à une campagne
42:36en ligne.
42:41Ils ont récolté 160 000 euros.
42:44Ils m'ont acheté le billet d'avion
42:46et après ils m'ont donné le reste.
42:54Il s'installe alors à Flagstaff,
42:56en Arizona.
43:00Sa famille, restée en Ethiopie
43:02depuis les Jeux de Rio,
43:03le rejoint après ses mois de séparation.
43:11Les Etats-Unis, c'est la liberté,
43:13le respect des droits de l'homme.
43:16Et aussi Flagstaff,
43:18c'est la bonne altitude pour s'entraîner.
43:25Mais si les poignées croisées
43:27de Feisa Lilessa lui ont valu l'exil,
43:29ils l'ont en revanche pas fâché
43:31des instances de l'Olympique du Monde.
43:33Un Olympisme qu'ils ne l'ont pas sanctionné.
43:37Contrairement à Tommy Smith et John Carlos,
43:3948 ans plus tôt.
43:42Y-a-t-il eu un assoupissement des mentalités
43:44du comité olympique ?
43:46Guy Druth était à Rio
43:48en tant que représentant français du CIO.
43:50Qu'est-ce que vous en pensez d'avoir fait ce geste ?
43:53Connaissant sa situation,
43:55ça peut se comprendre.
43:57C'est toujours pareil.
43:59C'est difficile aussi de ne pas comprendre
44:01ces athlètes qui subissent ce genre de choses
44:03et qui profitent un peu.
44:05Mais ça a été rapide
44:07et ça a eu nettement moins
44:09de conséquences médiatiques
44:11que celui de 68
44:13ou le bras d'honneur de Kozakiewicz.
44:16Pourquoi vous pensez qu'il y a eu
44:18moins d'impact médiatique sur vous ?
44:20Je n'en sais rien.
44:22D'abord parce qu'il était deuxième.
44:24Il a eu l'intelligence de ne pas le faire
44:26sur le podium,
44:28et donc à l'arrivée de la course,
44:30c'est lui qui en a subi les conséquences.
44:32Après, lui,
44:34ça n'a pas dû être facile.
44:36Sa vie n'a pas dû être facile.
44:39Paysa a dû attendre deux longues années
44:41pour pouvoir revenir en Éthiopie.
44:43Le peuple romo a pris le pouvoir au Parlement
44:45et pour la première fois,
44:47un premier ministre de cette ethnie
44:49dirige le pays.
44:51Et c'est en héros national
44:53que le Marathonien est accueilli.
44:56C'était super.
44:58Tout le monde était heureux.
44:59Tout avait changé chez moi.
45:01C'était vraiment génial.
45:06Le premier ministre m'a invité dans son palais
45:08et il m'a félicité
45:10pour ce que j'ai fait à Rio.
45:12Il était heureux que je revienne en Éthiopie.
45:21Jeune retraité de l'athlétisme,
45:23Paysa Lilessa partage sa vie
45:25entre son pays natal et les États-Unis,
45:26où vivent désormais ses enfants.
45:30Depuis 2021,
45:32le CIO a soupli ses règles
45:34pour les athlètes qui veulent exprimer
45:36leurs opinions politiques.
45:38Ils peuvent désormais protester
45:40avant le départ des compétitions
45:42ou en conférences de presse.
45:44Mais cela reste toujours interdit
45:46durant les épreuves,
45:48les hymnes ou sur les podiums.
45:53Ainsi se termine ce numéro d'Affaires Sensibles
45:55Enquête signée Adrien Jaouen
45:57avec Arnaud Morel et Michel Pillard.
45:59Une émission que vous pouvez revoir
46:01en replay sur France.tv
46:03Et bien sûr nous,
46:05on se retrouve à la radio du lundi
46:07au samedi à 15h sur France Inter.
46:09Au revoir.

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