Matthieu Croissandeau, éditorialiste politique à BFMTV, décrypte la situation de très grande tension que connaît la Nouvelle-Calédonie. Une personne est décédée par balle dans la nuit de mardi à mercredi à Nouméa lors des émeutes qui secouent l'archipel depuis trois jours.
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00:00 On parle de la Nouvelle-Calédonie aussi ce matin.
00:02 Les violences se poursuivent, nouvelle nuit d'émeutes.
00:05 On a appris il y a quelques instants qu'une personne avait été tuée par balle lors de ces émeutes.
00:10 Dans le même temps, à Paris cette nuit, les députés ont adopté le fameux projet de réforme constitutionnelle sur le corps électoral.
00:17 Qu'est-ce qui peut se passer maintenant, Mathieu ?
00:19 Alors du point de vue de l'ordre public, la situation est au bord de la rupture.
00:23 L'heure n'est pas grave, elle est très grave, a dit ce matin le haut commissaire de la République sur place,
00:28 redoutant même qu'il y ait beaucoup de morts si les acappelles au calme n'étaient pas entendues.
00:33 D'un point de vue politique, tout commence, ou plutôt tout recommence, j'ai envie de dire,
00:38 puisque juste après le vote de l'Assemblée cette nuit, le président de la République a appelé les forces politiques de Lille,
00:43 indépendantistes et loyalistes, à trouver un accord sur la citoyenneté en Nouvelle-Calédonie.
00:48 Sinon, le Congrès sera convoqué pour adopter définitivement le texte.
00:53 C'est une drôle de façon quand même de faire avancer le dialogue, mais c'est un classique de la part de l'exécutif.
00:57 On l'a vu sur tout d'autres sujets, je pense au dialogue social par exemple,
01:01 et à un côté, voilà notre décision, dialoguer maintenant, ça n'a pas toujours les effets escomptés,
01:05 d'autant que le dossier calédonien mérite beaucoup de doigté, depuis Michel Rocart qui avait mis un terme en 88
01:13 à de très violents affrontements qui régnaient dans Lille.
01:15 Mais il est généralement géré en direct par Matignon ce dossier,
01:18 mais ce n'est plus le cas depuis Edouard Philippe qui a été le dernier Premier ministre à s'en être occupé.
01:23 Aujourd'hui c'est Gérald Darmanin, en tout cas jusqu'à aujourd'hui, qui avait la main.
01:26 Et ce qui coince donc c'est ce fameux dégel du corps électoral.
01:30 Oui, on le rappelle, dans le cadre du dernier accord trouvé et ratifié en 1998,
01:33 il avait été décidé en gros que tous les résidents arrivés dans Lille après cette date,
01:37 ainsi que leurs enfants, ne pourraient pas voter aux élections provinciales ou au référendum sur l'autodétermination.
01:43 En fait, deux logiques s'affrontent, il y a une logique démocratique qui juge à normal,
01:47 25 ans après, qu'un cinquième des électeurs soit écarté.
01:51 Alors ils ont quelques arguments à faire valoir,
01:53 notamment que les habitants de Lille se sont prononcés par trois fois contre l'indépendance,
01:56 dans trois référendums en 2018, 2020 et 2021.
01:59 Ce dernier référendum a été contesté par, enfin l'organisation a été contestée par les indépendants dentistes.
02:04 Et puis de l'autre côté, il y a une logique historique,
02:06 car il faut comprendre que pour beaucoup de canards, ce qui est à l'œuvre,
02:08 c'est un processus de décolonisation, disent-ils.
02:11 Et ils redoutent qu'en accordant le droit de vote local à tous les résidents,
02:15 eh bien leur représentation soit diluée, soit minorée.
02:18 On remarquera juste au passage que tous ceux qui s'insurgent depuis Paris
02:21 contre le fait que les résidents soient écartés des scrutins locaux
02:24 et dénoncent une insupportable discrimination,
02:27 sont souvent les mêmes qui s'opposent en métropole avec des arguments strictement inverses
02:32 au droit de vote des étrangers aux élections locales, par exemple.
02:34 C'est pas faux. Comment la situation peut se dénouer ?
02:37 Il faut nommer un médiateur, peut-être ?
02:38 Il faut d'abord que les violences s'arrêtent, et vite, et que les appels au calme soient entendus.
02:41 Alors il y en a qui ont été lancés hier,
02:43 notamment par le président indépendantiste du gouvernement du territoire,
02:46 et puis par, évidemment, beaucoup d'autres élus.
02:48 Il faut ensuite que le dossier soit repris en main au sommet de l'État,
02:50 ce qui devrait être le cas par Matignon, a précisé le président de la République
02:53 dans sa lettre qu'il a envoyée aux indépendantistes et aux loyalistes cette nuit.
02:57 Et puis, peut-être, vous le disiez Adeline, un médiateur.
02:59 Il y a des fins connaisseurs du dossier, d'anciens premiers ministres,
03:02 Édouard Philippe, Lionel Jospin, par exemple,
03:04 et puis il y a quelqu'un comme Gérard Larcher au Sénat qui connaît très très bien le dossier aussi.
03:07 Merci Mathieu.