Selon Freud, l'armoire est un symbole maternel et rêver d'y être enfermé signifierait la "nostalgie" de l'utérus. Julie en a plein le dos du complexe œdipien.
Retrouvez « La Drôle D'Humeur De Julie Conti » dans la Bande Originale sur France Inter et sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/la-drole-d-humeur-de-julie-conti
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00:00Voici Julie ! Julie, vous n'auriez pas écrit ce livre comme ça, vous ?
00:07Voilà, voilà. Donc, Anne, dans l'armoire des vies, vous vous embarquez dans vos souvenirs
00:10en rouvrant les portes des armoires de salle de bain qui ont jalonné votre vie. Et moi,
00:14si j'avais écrit ce livre, j'aurais peut-être pas choisi l'armoire de la salle de bain.
00:16Parce que le meuble qui raconte le mieux qui je suis, c'est clairement ma table de nuit,
00:19parce que c'est là que je range mes anxiolytiques et mes sextoys. Et selon Freud, l'armoire,
00:24c'est le symbole maternel. Rêver d'y être enfermé, ça signifierait la nostalgie de
00:28l'enfance. Oh là là, mais je change de disque, Sigmund, on en a plein de dos du
00:31complexe d'hypien. Je suis sûre que petit Freud, ça devait être un gosse hyper malaisant.
00:35« Maman, maman, pour la fête des mères, je t'ai écrit un poème. En ce jour spécial,
00:39je t'offre une couronne parce que maman, c'est vraiment toi la plus bonne. »
00:42Mais quand on lit votre livre, forcément, on se rejette. Et vraiment, vous avez raison,
00:49l'armoire de la salle de bain, c'est un meuble qui raconte l'évolution de notre
00:51vie. Moi, aujourd'hui, la mienne, elle est blindée de pansements, pas de patrouille,
00:53de produits en sitôt et de maquillage. Alors, qu'est-ce que ça dit de moi ? Eh bien que
00:57je suis une maman, certes, mais qui n'a pas oublié qu'elle était une femme.
01:00Quelle horreur, j'arrive pas à croire que j'ai dit une niaiserie pareille à Audouard.
01:04Mais non, mais dans ma vingtaine, je ne trouvais rien de tout ça dans mon armoire de salle
01:08de bain. Il n'y avait que de l'Alka-Selzer pour les lendemains difficiles et surtout
01:10la tondeuse à barbe de mon colloque que j'utilisais secrètement pour m'épiler le maillot.
01:14Et ça, qu'est-ce que ça dit de moi ? Eh bien que je suis une grosse dégueulasse.
01:19Et vous parlez des produits qui ont occupé les armoires des salles de bain et de leurs
01:23odeurs qui vous renvoient aux souvenirs des personnes qui les portaient. Moi, l'odeur
01:26qui me rappelle ma grand-mère, c'est le jasmin. Et moi, très simplement, j'ai arrêté
01:29de mettre du déo au sel d'aluminium pour des raisons de santé. Et le déo naturel,
01:32pour être honnête, ça marche pas tellement sur moi. En fin de journée, je sens vraiment
01:35l'humanité. Du coup, j'ai un peu peur que plus tard, mes enfants se rappellent de moi
01:39en reniflant l'odeur d'un vestiaire de club de rugby à 15 après un match perdu.
01:49Les objets qui habitent nos vies, ils se patinent à mesure qu'on les utilise. Et chaque défaut
01:54qui apparaît sur l'objet, ça nous renvoie à un souvenir. Et moi, je m'imagine déjà
01:57grand-mère en train de raconter des anecdotes à mes petits-enfants.
02:00« Mamie, tu peux nous raconter encore une fois comment vous avez abîmé l'aile droite
02:04de la Fiat Panda quand tu avais 20 ans avec papy ? »
02:06Mais bien sûr, les enfants ! Eh bien, papy était au volant et il est sorti de la route
02:10parce qu'il a été déconcentré par mamie qui était en train de le pépon pendant
02:12qu'il conduisait.
02:13Mais j'aime beaucoup l'idée que les objets soient témoins des vies et des époques qu'ils ont croisés.
02:23C'est pour ça que j'aime autant les vies de Grenier, mais moi je suis vraiment le genre
02:26de relou qui peut sortir des phrases comme « ça se sent que ce lit, il a une histoire ».
02:30Ah non, l'odeur-là, c'est du formol, c'est parce que ma grand-mère, elle est morte dans ce lieu.
02:34Et c'est vrai, j'adore les brocants.
02:36Pour vous dire, dimanche matin, dernier, je me suis levée à 7h du matin pour être
02:39certaine d'arriver la première au marché aux puces.
02:42C'est vraiment un truc de trentenaire, parce que s'il y a 20 ans, j'avais été debout
02:44à 7h du matin un dimanche, c'était pour aller chercher une pharmacie de garde la plus
02:47proche pour m'acheter la pilule du lendemain, on allait me coucher.
02:49Je crois que c'est mon côté nostalgique.
02:52J'adore retomber sur des objets qui me rappellent qui j'ai été et les gens que j'ai aimés.
02:56Alors comme ça, ça sonne romantique et touchant, mais concrètement, ça se traduit par des
03:00achats compulsifs inutiles.
03:02Parce que finalement, je me retrouve à dépenser une blinde pour des daubes que ma grand-mère
03:05s'est débarrassée il y a 30 ans.
03:07Des exemples d'achats à la con que j'ai fait en brocante.
03:09Un téléphone public à pièces qui dort depuis des années dans un placard en attendant
03:13que je l'installe dans la maison de campagne que j'aurais jamais les moyens de m'acheter.
03:16Des vieilles cars routières que j'ai encadrées et affichées au salon, et bien sûr, des
03:21vinyles.
03:22Non, parce que le son d'un 33 tours, c'est quand même vachement plus organique que streaming.
03:26Oh, on ne se frappe que de coups de balle, ça aussi, on est d'accord, on est d'accord.
03:30Vous savez quoi ? Je crois que je rachète tout ce qu'Apple a réussi à démétérialiser
03:37pour fourrer dans un iPhone.
03:38Anne, j'espère vraiment qu'Apple ne s'attaquera jamais aux armoires de nos vies.