"On peut juger à la fois cette prise de position de l'époque scandaleuse et être légitimement choqué par ce qui arrive à Mathilde Panot", estime Matthieu Croissandeau qui parle d'une "atteinte caractérisée" à la liberté d'expression".
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00:00Mathieu Courson pour La Politique et Mathilde Pannot, la présidente du groupe LFI à l'Assemblée,
00:03convoquée par la police dans le cadre d'une enquête ouverte pour « apologie du terrorisme ».
00:08De quoi parle-t-on ?
00:09Oui, on l'a appris hier de la part de la députée du Val-de-Marne elle-même par un poste sur ses réseaux sociaux.
00:14Cette audition fait suite au dépôt d'une plainte et se fonde sur un communiqué officiel du groupe parlementaire LFI
00:21qui datait du 7 octobre.
00:22En cause, on en avait beaucoup parlé, ce communiqué publié par le groupe après les attaques terroristes du Hamas
00:27et qui donnait à la fois le sentiment de banaliser les massacres en parlant d'une offensive armée des forces palestiniennes
00:33et de renvoyer l'agressé et l'agresseur dos à dos.
00:36Ce communiqué avait choqué beaucoup de monde, y compris certains insoumis.
00:39Moi, j'en avais dit tout le mal que j'en pensais sur ce plateau à plusieurs reprises.
00:42Je le jugeais historiquement inepte, politiquement fallacieux et surtout moralement indigne.
00:47Mais on peut juger à la fois cette prise de position de l'époque scandaleuse
00:50et être légitimement choqué par ce qui arrive à Mathilde Pannot.
00:53Pourquoi ?
00:53D'abord parce qu'il y a un principe constitutionnel qui protège les parlementaires.
00:56L'article 26 de notre constitution prévoit qu'aucun membre du parlement ne peut être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé
01:02à l'occasion des opinions ou votes émis par lui dans l'exercice de ses fonctions.
01:06C'est ce qu'on appelle l'immunité.
01:08On ne peut pas la lever cette immunité ?
01:09Si, par exemple, un parlementaire pique un sac à main, alors on va lever l'immunité
01:14parce que l'immunité protège le mandat, pas la personne.
01:17Mais il faut à ce moment-là qu'il y ait une décision du bureau de l'Assemblée nationale.
01:20On verra ce qu'en disent les constitutionnalistes.
01:22Et dans le cas d'espèce, moi, je trouve que franchement, tout indique que Mathilde Pannot s'est exprimée
01:26dans le cadre de ses fonctions.
01:28Mais il y a encore plus choquant, c'est qu'il s'agit d'une enquête pour apologie du terrorisme.
01:32Or, selon les textes, l'apologie du terrorisme, ça consiste à présenter ou commenter favorablement des actes terroristes.
01:37Par exemple, une personne justifiant ou glorifiant la commission d'un attentat.
01:42Et autant le dire tout de suite, on peut reprocher beaucoup de choses aux positions de Mathilde Pannot, mais ce n'est pas le cas.
01:47On peut reprocher aux communiqués du 7 octobre ses ambiguïtés, on peut lui reprocher d'avoir minimisé la portée des attaques.
01:52On peut reprocher aux Insoumis d'avoir refusé de qualifier le Hamas de mouvement terroriste, mais pas d'avoir glorifié le 7 octobre.
01:59Et si on commence à poursuivre des parlementaires pour ce qu'ils ont dit, et même pour ce qu'ils n'ont pas dit,
02:04alors on rentre dans une dérive très inquiétante.
02:05Alors quoi ? C'est une atteinte grave à la liberté d'expression ?
02:08Oui, c'est une atteinte caractérisée.
02:09Nous devrions tous y prendre garde, que l'on soit proche des Insoumis ou non.
02:12La semaine dernière, je vous en parlais sur ce plateau, ce sont des réunions politiques d'Éric Zemmour, de Jean-Luc Mélenchon qui étaient interdites.
02:17Aujourd'hui, voilà la présidente d'un groupe parlementaire inquiété pour une prise de position.
02:21Le combat politique, le débat politique, il ne se met ni dans les bureaux des préfectures, ni dans les prétoires des tribunaux,
02:26mais dans le cadre de nos institutions.
02:27C'est ce qu'on attend d'une démocratie digne de ce nom.