• il y a 7 mois
Le Premier ministre a choisi le thème de l'autorité pour marquer, ce jeudi, ses 100 jours à Matignon. Au programme: un discours à Viry-Châtillon où un adolescent est mort récemment après avoir été passé à tabac près de son collège. Ce déplacement sera l'occasion pour Gabriel Attal de prononcer un discours lors duquel il devrait détailler le "Grenelle" sur la violence des mineurs.

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Transcription
00:00 - Gabriel Attal qui sera l'invité de Face ABFM ce soir à 20h50.
00:04 Le Premier ministre qui ce matin va prononcer un grand discours sur l'autorité.
00:07 On nous promet du concret dans son entourage, notamment sur la justice des mineurs ou encore le respect des règles à l'école.
00:13 - Avec nos deux invités, donc Jean-Pierre Bellon ce matin, professeur de philosophie,
00:16 auteur de 10 mesures immédiates pour renouer avec l'autorité à l'école.
00:20 Votre ouvrage est publié aux éditions sociales françaises.
00:22 Et puis Lisa Kamen Hirsig, professeure des écoles, auteur de la Grande Garderie aux éditions Albain Michel.
00:30 D'abord Lisa, est-ce que vous avez peur de vos élèves ?
00:33 - Non, si j'avais peur de mes élèves, je cesserais de travailler, je changerais de métier disons.
00:37 - Est-ce que vous les avez vus, alors je vais poser différemment la question, est-ce que vous les avez vus changer ?
00:41 Vous vous enseignez dans le privé ?
00:43 - Oui, j'enseigne dans une école privée à Paris.
00:45 Je les ai vus changer, pas devenir plus violents, je les ai vus changer notamment dans leur rapport avec les écrans,
00:52 la concentration, plutôt le manque de concentration qui en découle.
00:56 - Oui, on en parlait il y a une heure.
00:57 - La relation avec les parents a changé aussi à cause de ça.
01:00 - Est-ce que... - Eux aussi sont sur leurs écrans.
01:01 - Est-ce que de plus en plus de collègues ont la boule au ventre face aux élèves, face à la réaction des parents aussi ?
01:06 - Oui, alors c'est vrai que moi je travaille dans un milieu on va dire encore assez protégé de la violence,
01:12 mais j'ai beaucoup d'amis, de collègues qui sont dans des endroits moins, on va dire, moins favorisés peut-être,
01:20 et qui ont effectivement peur parfois le matin, et voilà, non, c'est un fait.
01:25 - Rétablir l'autorité, alors j'ai l'impression qu'on attend ça à Mathieu Croissando depuis toujours.
01:30 Ce qui est certain, c'est que le rapport de nos enfants à l'égard des enseignants continue de se dégrader.
01:36 - Oui, ça continue de se dégrader, et surtout ça frappe, c'est la jeunesse à laquelle ça se déclare.
01:41 À l'école primaire désormais, vous avez beaucoup de remontées, dès le CM1, dès le CM2,
01:45 des manifestations d'irrespect vis-à-vis du professeur, d'agressivité, voire de violence,
01:50 avec des questions que ça pose. Qu'est-ce qu'on fait de ces gamins-là ?
01:52 Alors, est-ce qu'on rétablit les conseils de discipline à l'école primaire, comme le propose le Premier ministre ?
01:58 Et avec capacité d'exclusion, s'il le faut, pour ces enfants.
02:02 - Parce que ça n'existe plus, ça ?
02:03 - Non, ça n'existait pas dans l'école primaire, les conseils de discipline.
02:05 Ça existait dans l'enseignement secondaire, mais ça n'existait pas à l'école primaire.
02:10 Donc il y a une vraie réflexion à avoir.
02:11 Après, l'école, c'est là où se révèle le premier rapport à la société des enfants,
02:15 mais on ne peut pas tout faire porter à l'école non plus.
02:17 Les enseignants, ils sont là pour enseigner des matières, ils ne sont pas là, on dit, pour faire des citoyens,
02:21 mais ils ne sont pas là non plus pour faire des hommes et des femmes qui savent se comporter en société.
02:23 C'est aussi aux parents, c'est aussi à tout l'entourage, à la vie associative, aux voisins,
02:28 voilà, à chacun de prendre ses responsabilités.
02:30 - Jean-Pierre Bellon, pourquoi la situation s'est-elle dégradée à aussi grande vitesse ?
02:34 - Elle s'est dégradée progressivement par toute une série d'échecs ou de démissions.
02:44 Mais ce qui est clair, c'est qu'aujourd'hui, effectivement, il est tout à fait nécessaire de renouer avec l'autorité à l'école,
02:51 qu'il ne faut pas confondre avec l'autoritarisme.
02:53 La question n'est pas de rétablir des mesures drastiques, terribles, non, non.
02:58 L'autorité peut parfaitement être très courtoise, simplement, il faut qu'elle soit sans appel, il faut qu'elle soit sans discussion.
03:04 Or, on a un peu l'impression qu'à l'école, tout semble être devenu négociable.
03:09 Non, il y a des choses à l'école qui ne doivent pas, qui ne peuvent pas être négociées par les élèves.
03:14 Ça ne fait pas l'ombre d'un doute.
03:15 - Mais vous faites allusion à quoi ?
03:17 - Ah ben, il y a... Je pense qu'il y a deux choses d'abord à bien caler.
03:21 D'abord, comment a-t-on pu s'accommoder dans certains établissements scolaires d'un quotidien d'insultes, d'injures, de propos grossiers ?
03:30 Non, à l'école, on ne s'exprime pas comme on s'exprime chez soi ou sur les réseaux sociaux.
03:34 Ça, c'est l'une des premières choses.
03:35 Deuxièmement, on s'est accommodé dans un certain nombre de classes.
03:38 Une classe sur deux, sans doute, dit l'enquête PISA 2022,
03:42 une classe sur deux, le bruit est tel que les élèves n'entendent pas ce que dit le professeur.
03:48 Comment voulez-vous comprendre une démonstration mathématique, une règle de grammaire, un contexte historique,
03:55 lorsqu'on n'entend même pas ce que dit le professeur ?
03:58 - Mais ça veut dire quoi, monsieur Bellon ?
03:59 Ça veut dire qu'il faut sanctionner et très sévèrement sanctionner ?
04:03 - Non, il faut d'abord que les enseignants signalent systématiquement tout ce qui se passe dans leur classe.
04:09 Actuellement, les enseignants ont peur d'être désavoués par leur hiérarchie.
04:14 Ils n'osent pas dire la réalité de ce qui se passe en classe.
04:17 Le chahut semble être devenu un terme tabou.
04:20 Or, il y a bien un chahut systémique qui s'installe dans un certain nombre de classes.
04:25 Donc, il faut que les professeurs aient la possibilité de signaler tout ce qui se passe dans leur classe.
04:29 Il faut qu'ils soient suivis par leur hiérarchie.
04:32 Et il faut, en parallèle, qu'un système de sanction infiniment plus juste, plus efficace, soit mis en place.
04:39 Actuellement, en matière de sanctions, c'est un désordre absolu.
04:42 Vous avez deux systèmes qui coexistent.
04:45 Les enseignants qui peuvent distribuer des heures d'école et les chefs d'établissement qui peuvent sanctionner.
04:51 Ce qui fait qu'une même faute sera, ici, punie de telle manière et ailleurs, sanctionnée d'une autre manière.
04:57 Comment voulez-vous que les jeunes gens s'y retrouvent ?
04:59 J'ai revu, il y a quelques jours, "Les choristes".
05:03 C'est un film, c'est daté des années 50.
05:07 Mais quand même, on ne bannit pas avec le respect.
05:10 Et c'est action-réaction. Est-ce que c'est ce qui nous manque ?
05:13 Juste pour revenir sur ce que dit monsieur, qui parle de désordre,
05:17 je pense qu'il sous-entend qu'il faudrait un système unifié, national,
05:22 de système de col, de punition, de sanction, etc.
05:25 Moi, je suis pour le désordre.
05:27 Je vais vous expliquer. Je suis pour le désordre.
05:29 Je suis pour que chaque établissement puisse établir ses propres règles de sanctions progressives,
05:35 puis d'exclusion, y compris les établissements publics.
05:38 Le problème, c'est que le public, en France, ne peut pas exclure.
05:41 En fait, on s'échange les harceleurs, on s'échange les fauteurs de troubles.
05:45 C'est dans la loi, ou dans un règlement, je crois que c'est la loi,
05:48 qui dit que si une école veut exclure un élève, il faut que le chef d'établissement s'assure
05:53 que l'élève aura une autre école et qu'il mette en place un suivi scolaire pour cet enfant.
05:58 Donc, moi, je suis pour que chaque établissement puisse édicter ses propres règles
06:02 et exclure quand il veut exclure, sans se préoccuper de savoir si l'enfant a une autre école.
06:07 Et vraiment, les établissements ne peuvent pas le faire, ça ?
06:09 Les établissements privés peuvent le faire. C'est bien ce qu'on leur reproche.
06:12 Dans le public, ça a changé pour les harceleurs ?
06:15 Non, ça n'a pas changé. C'est-à-dire que le règlement précise
06:18 qu'il faut que le chef d'établissement trouve une autre école.
06:21 Et s'il n'y a pas d'autre école sur la commune, alors déjà, il faut qu'il demande au maire.
06:25 Et si le maire n'a pas d'autre école à proposer à l'enfant,
06:28 il faut qu'il se mette d'accord avec une autre commune. C'est toute une histoire.
06:32 Les propositions en général sont les suivantes.
06:35 Obligeons le privé à faire comme le public. En gros, obligeons le privé à garder les mauvais élèves.
06:40 Dans le rapport "Elle est fille" sur les écoles privées,
06:45 M. Vannier propose qu'on mette une sanction de 10 000 euros aux établissements privés qui évincent un élève.
06:51 Donc on veut aligner le privé sur le public.
06:53 Et moi, je pense qu'il faut faire exactement le contraire,
06:55 c'est-à-dire permettre aux établissements publics de sanctionner un élève, de l'exclure.
07:00 Pourquoi pas définitivement ? Et puis après, action réaction, bien sûr.
07:04 Et que si l'enfant ne trouve pas d'école, on l'instruit à la maison.
07:08 Ce qui est obligatoire en France, c'est l'instruction, ce n'est pas l'école.
07:12 C'est sûr qu'il y a un problème de soutien de la hiérarchie.
07:17 Il y a un autre film en ce moment de la Décoriste, il y a le film "Pas de vagues".
07:20 Et on voit très bien également les profs qui ne disent rien parce qu'au-dessus, la hiérarchie, on leur dit "Pas de vagues, silence".
07:27 Est-ce qu'il n'y a pas un vrai sujet autour de ça aussi, M. Bélon ?
07:30 Absolument. Pour revenir à ce que dit madame, si l'objectif est de mettre les élèves à la rue, je pense qu'on n'aura rien gagné.
07:37 Non, il s'agit bien de maintenir les élèves au sein des établissements scolaires, mais il s'agit de les faire changer de toute façon.
07:44 Mais de toute évidence, on n'y arrive pas, M. Bélon. On n'y arrive pas.
07:48 On peut parfaitement y arriver. Je fais dans mon livre un certain nombre de propositions.
07:52 Je pense que punir, sanctionner, c'est ce que l'école sait le moins bien faire.
07:55 Donc il y a effectivement une révision déchirante à entreprendre au sein de l'école.
08:00 Et il faut oser punir et savoir punir.
08:02 Donc là, il faut vraiment qu'on réfléchisse à cette question-là.
08:05 C'est un sujet qu'on a oublié. Les ministères d'ailleurs de l'éducation se soucient très peu de la question de la sanction.
08:10 Mais c'est quoi la bonne punition, M. Bélon ?
08:12 Pour qu'une sanction soit efficace, il faut qu'elle ait quelque chose de frustrant.
08:17 Je connais un établissement dans lequel on met des élèves absentéistes.
08:22 On exclut de façon temporaire des élèves absentéistes.
08:26 Vous voyez le degré de sérieux de ce genre de choses.
08:30 L'exclusion internée, le fait par exemple qu'un élève soit contraint de venir à l'école,
08:36 mais il n'ira pas en récréation en même temps que ses camarades,
08:39 il n'ira pas au réflecteur en même temps que ses camarades, etc.
08:42 On peut trouver des systèmes de sanctions.
08:45 On peut réfléchir à condition de se mettre un peu au travail.
08:49 On peut réfléchir. Mais pour revenir sur l'autre point...
08:51 On n'a pas trop le temps de juste finir par parler.
08:53 La bonne sanction, c'est quoi, Mme ?
08:56 L'obligation scolaire de 3 à 16 ans oblige l'État à scolariser les enfants.
09:01 C'est lui-même qui s'est mis cette obligation.
09:03 La bonne sanction pour des élèves qui n'ont pas envie d'être à l'école, je ne la connais pas.
09:07 Il ne peut pas les exclure.
09:09 Ces enfants-là ne veulent plus être à l'école.
09:11 Visiblement, il y a des enfants qui seraient sans doute mieux ailleurs.
09:14 Je ne parle pas forcément de les laisser à la maison,
09:16 mais peut-être à 14, 15, 16 ans, peut-être qu'on serait mieux à apprendre un métier.
09:20 Peut-être qu'on serait mieux, je ne sais pas, pourquoi pas à réfléchir à son avenir.
09:24 Et pourquoi pas à la maison, travailler l'anglais, j'en sais rien moi.
09:28 Visiblement, il y a des élèves qui n'ont plus envie d'être là.
09:31 On est l'un des pays où l'obligation scolaire est la plus longue.
09:34 Gabrielle Attal, ce soir, notamment sur ces questions liées à l'éducation,
09:39 ce qu'il connaît bien, le Premier ministre,
09:41 mais évidemment sur la façon de lutter contre la violence
09:44 et de restaurer l'autorité, discours Aviri Châtillon,
09:47 et ce soir face à BFM 20h50.
09:48 Merci à tous les deux.

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