Cinq ans après l'incendie qui a ravagé Notre-Dame de Paris, le 15 avril 2019, les principaux défis de sa restauration ont été relevés et sa réouverture reste prévue le 8 décembre 2024, selon Philippe Jost, président de l'établissement public supervisant sa reconstruction.
Mathieu Lours, historien de l'architecture est sur le plateau de Première édition pour nous en parler.
Mathieu Lours, historien de l'architecture est sur le plateau de Première édition pour nous en parler.
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00:00 Mathieu Lours, bonjour. Historien de l'architecture et auteur des cathédrales dans le monde chez Gallimard, Roselyne l'évoquait, c'est un chantier titanais
00:08 ce qui est aussi la maquette de Notre-Dame version originale qui nous accompagne ce matin.
00:12 Il reste quoi finalement à rénover dans cette cathédrale, en chantier ?
00:17 Alors on a retrouvé l'ensemble de la structure, l'ensemble de la toiture, la flèche, ce qui reste c'est vraiment l'enveloppe extérieure ici,
00:24 c'est à dire la couverture en plomb, les 2000 lames de plomb qui doivent venir assurer le clos et le couvert de la cathédrale.
00:30 Et puis il reste à l'intérieur tous les aménagements, les assises, évidemment l'hôtel et puis la fin de la rénovation de l'orgue, voilà.
00:37 Donc aujourd'hui on a quasiment l'intégralité de Notre-Dame.
00:41 À l'intérieur on se souvient c'était tout noir, c'était tout détruit, c'est quand même incroyable ce qui a été fait.
00:45 Aujourd'hui on retrouve de la lumière, on retrouve de la couleur.
00:48 Alors c'est une véritable métamorphose parce qu'on va retrouver non pas la Notre-Dame qu'on connaissait avant l'incendie qui était un édifice.
00:53 Elle était encrassée depuis 160 ans, si on ne nettoie pas à l'intérieur d'un édifice en 160 ans, vous imaginez.
00:59 Et ce qu'on va retrouver c'est Notre-Dame telle qu'on l'avait, lumineuse.
01:03 L'image que vous voyez sur l'écran.
01:05 Voilà exactement, et encore parce qu'on n'a pas enlevé l'échafaudage dans les parties hautes, donc il y aura encore davantage de lumière.
01:10 Vous dites lumineuse, vous l'avez vu d'abord ?
01:14 Oui.
01:15 C'est une émotion j'imagine particulière lorsqu'on redécouvre Notre-Dame neuve, rénovée.
01:22 Exactement, parce qu'on l'a connue à l'état d'un édifice encrassé, puis à l'état de ruine, puis à l'état de chantier, et maintenant on la voit dévoilée.
01:31 Et donc c'est vraiment une émotion, et puis on attend le moment où les vitraux seront libérés des échafaudages, où on aura encore davantage de lumière.
01:39 C'est-à-dire qu'on dit dans le gothique que Dieu est lumière.
01:43 Alors ce qu'on voyait à Notre-Dame c'était un peu la lumière dans une caverne.
01:46 Il y avait ces grandes rosaces, ces vitraux qui donnaient la lumière, maintenant les murs réfléchiront la lumière.
01:51 Ce sera vraiment quelque chose de complètement différent.
01:53 Qu'est-ce qu'il reste à rénover à l'intérieur ?
01:55 A l'intérieur, tous les parements sont réalisés.
01:58 Ce qui va rester c'est d'une part tout l'aménagement ici avec l'hôtel, le nouvel hôtel, donc tout ce mobilier contemporain qui va être placé.
02:06 Contemporain, c'est-à-dire ?
02:07 Contemporain.
02:08 Il peut y avoir un choc pour les fidèles ?
02:09 Alors ce ne sera pas un choc parce que c'est un grand plasticien qui a été convoqué, c'est Guillaume Bardet qui va réaliser ce mobilier.
02:15 Il a déjà travaillé dans des architectures historiques mais on verra que cet hôtel est clairement un hôtel de 2024 qui s'insère spécifiquement dans cette cathédrale rénovée.
02:25 Ce sera un hôtel en bronze et le bronze dans un environnement comme ça, couleur letcho, très lumineux, ça accrochera la lumière, ça sera sans doute surprenant et très beau.
02:34 Ce qui pourrait surprendre aussi, ce sont les fameux vitraux contemporains qui vont être rajoutés.
02:38 Oui, les vitraux contemporains arriveront du côté sud, ici dans les parties basses de la cathédrale.
02:43 La thématique retenue c'est la Pentecôte, c'est-à-dire la flamme de l'Esprit-Saint qui descend sur la terre.
02:49 Donc il y a aussi une consonance avec le drame, la renaissance, la spiritualité, etc.
02:53 Et ils viendront transformer l'éclairage de la partie sud.
02:57 Mais ce sera un style très différent quand même par rapport au rosace médiéval.
03:00 Alors ce seront des vitraux d'aujourd'hui, figuratifs.
03:03 Il y a un comité artistique qui est en train de se réunir pour choisir le projet.
03:06 On sera dans la rupture, évidemment stylistique, mais il y aura une continuité, la lumière, puis le fait de figurer des éléments qui relèvent de la foi chrétienne.
03:14 On va regarder une image de la charpente. C'est un sujet la charpente, n'est-ce pas ?
03:18 Caractéristique. Là elle est terminée également.
03:21 La charpente est terminée. On a retrouvé les parties médiévales ici et là, et la partie XIXe siècle avec la flèche.
03:29 Parce qu'on avait deux étapes de cette charpente.
03:31 Et elle a été faite à l'ancienne.
03:32 A l'identique, voilà.
03:33 C'est ça qui est prodigieux, non seulement à l'identique, mais à l'authentique.
03:36 Les parties médiévales ont été travaillées à la hache, comme au Moyen-Âge, avec un assemblage en tenon-mortaise.
03:42 Et toutes les parties XIXe travaillées à la scie, comme au XIXe, avec un boulonnage.
03:46 Quand on voit d'où on vient, on a des frissons quand on revoit effectivement cet incendie il y a cinq ans.
03:52 Avec du bois français d'ailleurs.
03:53 Du bois français. Il y a un consortium d'entreprises spécifiquement constitué qui a réalisé les coupes, le travail.
04:00 On a même créé une hache spéciale, semblable à une hache du XIIe siècle, pour que le geste soit exactement celui-là.
04:08 C'est complètement nouveau, on n'avait jamais fait ça.
04:10 La cathédrale qui doit rouvrir le 8 décembre, au public, on sera prêt ?
04:14 Normalement, tout va bien.
04:16 C'est quand même gros ce qui reste, tout le plomb sur les toitures.
04:19 Le plomb, ce sont des gestes que les compagnons connaissent très bien.
04:23 On l'a déjà fait dans plusieurs édifices, notamment après la Première Guerre mondiale.
04:27 Donc à Reims, ce ne sont pas des choses qu'on a oubliées.
04:31 En France, depuis le XIIe siècle, on n'a jamais arrêté de construire ou de rénover des cathédrales gothiques.
04:35 C'est ça qu'il faut bien voir.
04:37 Donc on est quand même le pays de l'excellence en la matière.
04:40 Fascinant. Donc le 8 décembre, une toute dernière.
04:43 Comment vous allez gérer la flûte touristique ?
04:45 Il ne va rien gérer, il est ici.
04:47 Il va observer.
04:49 Ça va être une vraie question.
04:51 Est-ce que vous en entendez parler autour de vous ?
04:53 Est-ce qu'il y a des dispositifs ?
04:54 Il y aura des restrictions, même, on peut le dire.
04:56 Ce ne sera pas des restrictions.
04:57 Ce sera un travail sur la fluidité des parcours.
04:59 Et notamment la possibilité pour les fidèles d'accéder à l'édifice pour assister à une messe,
05:05 sans avoir besoin de faire la queue pendant des heures.
05:07 Bien sûr. Mais pour les touristes, il y aura l'idée de gérer les flux, c'est sûr.
05:10 Oui, il y aura forcément un système de gestion des flux.
05:12 Mais à l'intérieur, ce sera beaucoup moins cloisonné entre fidèle et visiteur.
05:17 Il y aura davantage de fluidité.
05:18 C'est-à-dire que quand quelqu'un rentre dans Notre-Dame, est-il fidèle, est-il visiteur ?
05:22 C'est difficile. Et puis on peut passer de l'un à l'autre.
05:24 Voilà. Et les aménagements intérieurs prennent ça en compte aussi.
05:26 Fascinant. On vous écouterait pendant des heures pour vous galavérer.
05:28 Je vous en prie.
05:29 Merci d'être venue ce matin sur le plateau de Première Édition.