Olivier Delacroix explore un nouvel univers ce soir, celui du web, ou plutôt de ses victimes. Zoom sur des calvaires 2.0.
Ça y est, vous êtes là. Visible aux yeux de tous. Exposé au moindre des commentaires. Si cela se trouve, quand vous sortirez dans la rue, on se retournera peut-être sur votre passage. On vous abordera même. Aaah, le quart d'heure de gloire… Le rêve? Pas certain!
Mais si tout le monde parle de vous, c'est parce qu'un petit malin a détourné un cliché de vous. Un photomontage avec votre tête parfaitement collée sur le corps de quelqu'un d'autre, en position scabreuse. Le tout balancé sur la Toile avec tous les tweets, retweets, likes, partages, commentaires que cela comporte.
Nous allons nous en rendre compte avec #OlivierDelacroix, parti à la rencontre de plusieurs personnes piégées dans une gigantesque Toile. Parfois sans avoir rien demandé, comme Clarisse qui s'est retrouvée à son insu dans des montages pornographiques. ️
Toutefois, Olivier Delacroix n'est pas là pour nous dispenser une énième mise en garde sur les périls d'#Internet. Comme à son habitude, il prête une oreille attentive, pleine d'empathie, à des histoires dramatiques. Des bouts de vie écorchés, parfois encore à vif. Des flashs qui finalement nous interpellent davantage que n'importe quelle leçon formatée sur le web et ses dangers. ❤️
Ça y est, vous êtes là. Visible aux yeux de tous. Exposé au moindre des commentaires. Si cela se trouve, quand vous sortirez dans la rue, on se retournera peut-être sur votre passage. On vous abordera même. Aaah, le quart d'heure de gloire… Le rêve? Pas certain!
Mais si tout le monde parle de vous, c'est parce qu'un petit malin a détourné un cliché de vous. Un photomontage avec votre tête parfaitement collée sur le corps de quelqu'un d'autre, en position scabreuse. Le tout balancé sur la Toile avec tous les tweets, retweets, likes, partages, commentaires que cela comporte.
Nous allons nous en rendre compte avec #OlivierDelacroix, parti à la rencontre de plusieurs personnes piégées dans une gigantesque Toile. Parfois sans avoir rien demandé, comme Clarisse qui s'est retrouvée à son insu dans des montages pornographiques. ️
Toutefois, Olivier Delacroix n'est pas là pour nous dispenser une énième mise en garde sur les périls d'#Internet. Comme à son habitude, il prête une oreille attentive, pleine d'empathie, à des histoires dramatiques. Des bouts de vie écorchés, parfois encore à vif. Des flashs qui finalement nous interpellent davantage que n'importe quelle leçon formatée sur le web et ses dangers. ❤️
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00:00:15 -Les 3/4 des utilisateurs d'Internet sont inscrits sur des réseaux sociaux
00:00:19 comme Twitter ou Skype.
00:00:21 Le plus connu et le plus fréquenté d'entre eux, c'est Facebook.
00:00:25 Ce site rassemble plus d'un milliard d'abonnés à travers le monde entier.
00:00:29 Un outil qui permet de partager et d'échanger tout un tas d'informations,
00:00:33 de photos avec ses amis,
00:00:34 et de créer un lien inexistant jusqu'à son apparition.
00:00:38 Outil innovant, mais loin d'être fiable à 100 %,
00:00:41 car d'un simple clic, des amis d'amis peuvent s'inviter
00:00:44 à se retrouver parmi votre cercle de connaissances.
00:00:47 Des pirates animés par de mauvaises intentions
00:00:49 peuvent aussi avoir accès à vos données personnelles
00:00:52 rassemblées sur votre compte.
00:00:54 Régulièrement, la presse fait l'écho de félivers violents
00:00:57 dont le point de départ est une mauvaise rencontre sur Internet,
00:01:01 un univers virtuel et incontrôlable.
00:01:03 Ces nouvelles formes d'agressions modernes ont fini par m'interpeller
00:01:07 et j'ai voulu en savoir plus.
00:01:09 Comment peut-on voir sa vie tourner au cauchemar à cause d'un simple clic
00:01:13 et frôler la mort après des échanges cordiaux sur un ordinateur ?
00:01:17 Comment la communication virtuelle peut mener à une menace réelle et physique ?
00:01:22 Des histoires qui peuvent paraître invraisemblables,
00:01:25 mais qui peuvent pourtant arriver à n'importe lequel d'entre nous.
00:01:29 Et qui démarrent simplement par le biais d'un simple clic sur son ordinateur,
00:01:34 par ses réseaux sociaux.
00:01:40 -Clarisse est engagée dans l'armée comme pilote d'avion.
00:01:44 Un de ses amis Facebook l'a trahi en lui volant sur son compte
00:01:47 des images privées pour confectionner des photos-montages pornographiques
00:01:52 visibles partout sur Internet.
00:01:54 -Ca a été tellement dur et tellement choquant
00:01:57 que j'ai eu l'impression qu'on est rentrés dans ma vie, dans moi,
00:02:02 sans me demander.
00:02:05 -Oui, bien sûr. -Donc c'est un viol, oui.
00:02:08 -On peut mettre une photo d'un jeune homme charmant,
00:02:12 on peut le faire passer pour le héros du monde,
00:02:15 on peut le faire passer pour un homme qui est un peu plus chaud,
00:02:18 on peut le faire passer pour un homme qui est un peu plus léger,
00:02:22 on peut le faire passer pour un homme qui est un peu plus léger,
00:02:25 on peut le faire passer pour un homme qui est un peu plus léger,
00:02:29 on peut le faire passer pour un homme qui est un peu plus léger,
00:02:32 on peut le faire passer pour un homme qui est un peu plus léger,
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00:02:46 on peut le faire passer pour un homme qui est un peu plus léger,
00:02:49 on peut le faire passer pour un homme qui est un peu plus léger,
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00:03:02 on peut le faire passer pour un homme qui est un peu plus léger,
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00:03:28 on peut le faire passer pour un homme qui est un peu plus léger,
00:03:32 on peut le faire passer pour un homme qui est un peu plus léger,
00:03:35 on peut rien faire.
00:03:36 On était pris par surprise, on n'était pas là pour se battre.
00:03:39 -Pour commencer mon voyage, je me rends dans l'est de la France,
00:03:45 à Quassange, un petit village de Moselle sans histoire.
00:03:49 Laurie, 17 ans, vit ici avec ses parents et ses 2 frères.
00:03:54 -La Triskel-Boby.
00:03:56 -C'est beau.
00:03:58 -Votre essence,
00:03:59 vous êtes mauvaise.
00:04:01 -Je suis naturellement fou de la sécurité.
00:04:03 -Ah ouais ?
00:04:05 -Elle est ouverte, là.
00:04:07 -Attends, vas-y, prends ça.
00:04:09 -On va passer un temps, peut-être.
00:04:12 -Ouais.
00:04:14 -Il y a 2 ans, un pirate s'est approprié le compte Facebook de Laurie
00:04:20 dans le seul but de détruire son honneur et sa réputation,
00:04:23 dans cette petite ville où tout le monde se connaît.
00:04:27 Bonjour, Laurie. -Bonjour.
00:04:29 -Comment allez-vous ? -Ca va.
00:04:31 -On va passer quelques jours ensemble
00:04:34 pour que vous me racontiez votre histoire,
00:04:38 celle d'un réseau social
00:04:41 que vous utilisiez avec plaisir, je suppose,
00:04:44 et qui est devenu un vrai cauchemar pour vous.
00:04:47 -Cela remonte à 2011.
00:04:49 Laurie utilise Facebook depuis 3 ans.
00:04:52 Elle s'en sert pour partager ses devoirs de lycée
00:04:55 et pour rester en contact avec ses amis,
00:04:57 notamment lors de vacances en Égypte.
00:05:00 Un jour, le 8 mars, elle est intriguée.
00:05:02 Impossible de se connecter. Son mot de passe ne marche plus.
00:05:06 Elle se rend compte qu'un pirate a pris sa place.
00:05:09 -Dans un premier temps, il a commencé à ajouter
00:05:12 160 ou 200 personnes sur Facebook.
00:05:16 Petit à petit, il est rentré en contact avec mes amis
00:05:19 et les gens qu'il avait invités pour leur demander
00:05:22 leur numéro de téléphone.
00:05:24 A partir de ce numéro de téléphone,
00:05:26 il pouvait changer les mots de passe
00:05:29 des comptes que les gens avaient sur Internet.
00:05:32 -Donc, du coup, qu'est-ce que vous faites ?
00:05:36 -On peut signaler un compte qui a un contenu indésirable.
00:05:40 Donc, j'ai signalé mon compte
00:05:43 et j'ai demandé à mes amis qu'ils le signalent.
00:05:46 -D'accord. Vous le signalez
00:05:48 aux responsables de Facebook ? -Oui.
00:05:51 -D'accord.
00:05:52 Est-ce que les gens de Facebook vous ont répondu ?
00:05:56 -Non. -Non ?
00:05:57 -Non.
00:05:59 -A partir de ce moment-là,
00:06:01 on peut dire qu'il va mettre les bouchées doubles, ce pirate.
00:06:05 Qu'est-ce qu'il fait en premier ?
00:06:08 -Donc, il entre en contact avec mes amis
00:06:11 en voyant des messages d'insultes
00:06:14 ou en allant vers des hommes qui étaient en couple
00:06:17 et leur faire des propositions à caractère sexuel.
00:06:21 -Tout en continuant à se faire passer pour vous ?
00:06:24 Et ces gens-là ne savent pas percuter que ce n'est pas vous ?
00:06:29 -Certains ont percuté, mais d'autres, non.
00:06:32 -Y compris des amis égyptiens, je crois ?
00:06:36 -Oui. Donc, il entre en contact avec un de nos amis
00:06:41 en lui disant que la prochaine fois,
00:06:43 il peut faire ce qu'il veut,
00:06:46 qu'il serait totalement à soi,
00:06:48 ou au directeur de l'hôtel où on va depuis que je suis petite.
00:06:52 "La prochaine fois que je viens, je te sucerai jusqu'à la moelle."
00:06:57 -C'était super violent.
00:06:59 -Oui. Tout le respect que j'ai réussi à avoir de mes amis,
00:07:03 d'Egypte, de ma famille,
00:07:05 toute leur confiance, en l'espace de quelques messages,
00:07:09 il l'a détruite.
00:07:10 -Vous vous éloignez de vos amis,
00:07:12 y compris avec des gens que vous ne connaissez pas,
00:07:17 puisque vous recevez des menaces de personnes que vous n'avez pas rencontrées.
00:07:21 -Oui. Des gens me prévenaient qu'à partir du moment où ils me verraient,
00:07:25 ils allaient me casser la gueule pour être haussiers.
00:07:29 Mais d'autres ne me prévenaient pas.
00:07:31 Le jour où ils me croiseraient, ils me prendraient dans un coin
00:07:35 et régleraient mon compte.
00:07:37 -Est-ce qu'il va faire autre chose ?
00:07:40 -Oui. Suite à des messages que j'ai reçus,
00:07:43 j'ai déduit que j'étais sur un site de rencontres.
00:07:46 Une photo figurait sur ce site.
00:07:49 Je recevais des messages et des appels de gens
00:07:53 qui avaient mon numéro de téléphone.
00:07:55 "Ca fait plus d'une heure que je t'attends. Tu viens ou pas ?
00:07:59 "Tu m'as donné rendez-vous et maintenant, tu n'es pas là."
00:08:03 -Comment on fait pour se protéger quand il arrive ce genre de choses ?
00:08:09 -On ne peut pas se protéger parce qu'on leur dit
00:08:12 "je ne t'ai pas donné rendez-vous."
00:08:14 Pour eux, c'est logique.
00:08:17 Ils ne réfléchissent pas à la personne derrière le compte Facebook,
00:08:21 qui est derrière cette photo, qui me montre moi,
00:08:24 mais qui n'est pas moi.
00:08:26 Il y a eu ça.
00:08:27 Quelques jours plus tard, il a commencé à envoyer
00:08:31 des vidéos pornographiques en discussion instantanée à mes amis.
00:08:35 Dès qu'on a appris ça, le lendemain, on est allés porter plainte.
00:08:39 -Vous êtes allés porter plainte à la gendarmerie ?
00:08:42 -Une surpassion d'identité.
00:08:44 A partir du moment où on a déposé plainte,
00:08:47 on n'avait plus le droit de dire aux gens que je m'étais fait pirater.
00:08:51 Pour ne pas brouiller l'enquête
00:08:54 et qu'elle puisse suivre son cours sans que le hacker supprime le compte
00:09:01 ou supprime toutes les données qu'il pouvait avoir sur son ordinateur.
00:09:06 -C'est tous les jours que vous recevez des informations
00:09:09 concernant les agissements de ce pirate ?
00:09:12 -Au bout de plus de 2 000 messages,
00:09:16 on se fait une idée des attentions de cette personne.
00:09:20 -Plus de 2 000 messages, c'est énorme.
00:09:23 Quelle image avait-il réussi à construire de vous ?
00:09:26 -D'une fille facile, qui cherche ses embouts,
00:09:29 là où il n'y a pas à en chercher, qui s'en prend à des gens
00:09:32 qui ne sont pas très bien faits et qui détruit des couples.
00:09:37 Les gens venaient me voir devant le lycée en me disant
00:09:41 "T'en as pas marre de nous faire chier ?"
00:09:43 "Arrête de draguer mon mec."
00:09:46 Les gens me parlaient que de ça.
00:09:49 C'était que Facebook.
00:09:51 -On voit pratiquement tous les jours des vannes.
00:09:54 -On l'a déjà vu. -Tout le monde l'a vu ?
00:09:57 -C'est pas lui. -Captez pas Internet.
00:10:00 -C'est pas lui.
00:10:03 -C'est pas lui.
00:10:05 -C'est pas lui.
00:10:07 -C'est pas lui.
00:10:10 -C'est pas lui.
00:10:12 -C'est pas lui.
00:10:14 -C'est pas lui.
00:10:16 -C'est pas lui.
00:10:19 -Captez pas Internet.
00:10:21 -Il pédale à côté de l'ordinateur.
00:10:24 -Bonjour, tout le monde.
00:10:27 -Bonjour. -Ca va ?
00:10:29 -Oui. -Ca fait longtemps
00:10:31 que je me suis pas retrouvé devant un lycée comme ça.
00:10:35 -Aussi long.
00:10:37 -Juste une question pour voir.
00:10:39 Combien de temps vous passez sur Facebook par jour ?
00:10:43 -Je le laisse connecté toute la journée, des fois.
00:10:47 -Ca veut pas dire que je suis tout le temps dessus.
00:10:50 -Vous y êtes. Vous ? -Une heure.
00:10:52 -Une heure ou deux. -Je sais pas.
00:10:55 -Ca m'a calmé. J'étais souvent dessus.
00:10:57 -Vous êtes le frère jumeau de Laurie.
00:11:00 Il est certain que ça a dû vous calmer beaucoup plus.
00:11:04 -C'est sûr.
00:11:05 -On pensait pas qu'en piratant un compte,
00:11:08 on pouvait anéantir une personne comme ça.
00:11:11 On s'imaginait le pire.
00:11:13 -Vous empruntez le terme "anéantir".
00:11:16 C'est un terme assez puissant.
00:11:18 Vous avez eu l'impression que ça l'anéantissait ?
00:11:21 -Surtout quand elle est revenue. Elle était différente.
00:11:25 Elle avait du mal à venir vers nous.
00:11:27 Elle était froide. Elle rigolait plus pareil.
00:11:31 Elle nous demandait de rester avec elle pour qu'il y ait des reprises.
00:11:35 -Parce qu'en fait, à l'époque,
00:11:38 Laurie, à qui vous pouviez parler de tout ça,
00:11:42 de tout ce qui vous arrivait ?
00:11:45 -A mes parents, à mes frères.
00:11:47 Et à ma famille, les gens qui étaient très proches de moi.
00:11:51 Mais sinon, à mes amis du lycée, je pouvais rien leur dire.
00:11:54 Ca pouvait être une personne au fond de la classe
00:11:58 qui me jalousait et j'en avais pas connaissance.
00:12:01 -A partir de quel moment,
00:12:03 vous n'avez plus pu franchir les barrières de ce lycée ?
00:12:08 -A partir du moment où il a commencé à salir mon image,
00:12:12 j'avais peur. C'était la phobie d'aller en cours
00:12:15 d'affronter les autres.
00:12:17 -Justement, est-ce qu'à ce moment-là,
00:12:20 vos soupçons se sont portés sur quelqu'un ?
00:12:23 Est-ce que quelqu'un pouvait vous en vouloir à ce point ?
00:12:27 -Non, personne ne pouvait m'en vouloir.
00:12:29 J'avais pas de problème avec une personne.
00:12:32 -Et vous, dans tout ça, vous êtes un bon groupe de potes.
00:12:36 Est-ce que vous pensez que le hacker,
00:12:40 il fait partie de la région,
00:12:43 et vous le connaissez ?
00:12:45 -Je ne le pense pas.
00:12:47 Je ne vois pas l'intérêt qu'il y ait à faire de hacker un con.
00:12:52 Laurie, c'est une fille bien.
00:12:55 Je ne vois pas qu'il pourrait lui en vouloir à ce moment-là.
00:13:00 -Quand on a une réputation, c'est difficile
00:13:03 de la voir changer du jour au lendemain
00:13:06 pour une chose dont on n'est pas l'auteur.
00:13:11 Ca court vite, on va dire.
00:13:14 On est vraiment dans le lieu où c'est comérage et compagnie.
00:13:19 -Tristan, qu'est-ce qui peut animer
00:13:37 une personne pour faire ce type de choses ?
00:13:41 -La folie.
00:13:43 Une personne normale ne peut pas faire ça.
00:13:46 Elle ne peut pas détruire une personne comme ça.
00:13:49 On ne sait rien.
00:13:51 -Comment avez-vous vécu tout cela ?
00:13:55 -C'était assez difficile.
00:13:57 On voit sa soeur partir en live du jour au lendemain, presque.
00:14:02 On se sent un peu impuissant.
00:14:04 -Ca a provoqué une rumeur ?
00:14:07 -C'était assez rapide.
00:14:09 Dès que le hacker a commencé à chauffer les mecs,
00:14:13 au lycée, dans les couloirs, on entend plein de bruit.
00:14:17 "Ta soeur, c'est un peu une salope."
00:14:20 Même j'ai changé de lycée, et dans mon nouveau lycée,
00:14:24 ça circulait aussi.
00:14:25 -C'est relativement petit, ici.
00:14:29 Tout le monde se connaît.
00:14:31 -Les affaires comme ça circulent assez vite.
00:14:35 C'est quelque chose qu'on ne peut pas rattraper.
00:14:38 -Vous vivez encore dans la peur que ça puisse recommencer ?
00:14:44 -On a quand même forcément peur.
00:14:48 Chaque fois, on se pose plein de questions.
00:14:51 On est obligés d'avoir un compte Facebook.
00:14:55 -On est obligés d'avoir un compte Facebook ?
00:14:58 -On a des applications pour une soirée,
00:15:01 on a des groupes pour les cours, pour les devoirs.
00:15:05 Tout se passe sur Facebook.
00:15:08 Si on n'a pas de Facebook, on est coupé du monde.
00:15:14 -On est carrément coupé du monde.
00:15:17 -Une personne qui n'a pas Facebook,
00:15:20 c'est une personne qui n'a pas d'amis.
00:15:25 -Pendant toute la durée de l'enquête menée par la gendarmerie,
00:15:29 le compte de Laurie est resté ouvert pour tenter de démasquer ce pirate.
00:15:34 Sophie et Philippe, les parents de Laurie,
00:15:37 ont consigné le calvaire de leur fille dans un journal.
00:15:41 -On s'est paré au certificat
00:15:44 comme quoi Laurie était absente durant 109 de mes journées.
00:15:49 Là aussi, c'est un préjudice,
00:15:52 parce qu'elle a loupé pas mal de cours.
00:15:56 Elle a aussi le bac qui arrive gentiment à la fin de l'année.
00:16:00 -Il y a tout dedans ? -C'est 2 ans de bataille.
00:16:05 De petites batailles, mais pas de victoire au bout.
00:16:09 -Est-ce que vous estimez qu'il manque,
00:16:14 au bout de ce dossier, le "non" ?
00:16:17 -Pour nous, il manque le point final.
00:16:21 Pour pouvoir fermer le chapitre et passer à autre chose.
00:16:26 -Que la personne qui a fait ça à notre fille
00:16:29 réponde à ses actes et qu'elle soit punie, c'est inacceptable.
00:16:33 -Vous avez porté plainte.
00:16:35 Comment ça avance du côté des gendarmes
00:16:38 qui ont fait appel à Microsoft pour essayer de remonter la piste
00:16:44 et trouver une adresse IP ?
00:16:47 -Une adresse IP, c'est l'adresse de l'ordinateur.
00:16:52 Est-ce que Microsoft trouve quelque chose ?
00:16:56 -Microsoft en trouve une adresse IP.
00:16:59 La gendarmerie fait les recherches.
00:17:02 Cette adresse IP correspond à une personne dont on nous donne identité.
00:17:07 On tient le bonhomme.
00:17:09 -Il ne peut pas vous échapper.
00:17:12 La justice le tient aussi.
00:17:15 -La justice va faire ce qu'il y a à faire.
00:17:18 On se rend compte, 2 ans après, que non.
00:17:22 Le procureur nous envoie un courrier
00:17:28 daté du 12 février.
00:17:31 Il nous dit que l'affaire est classée.
00:17:36 -Atteinte à la protection des données à caractère personnel,
00:17:40 avis de classement, l'examen de cette procédure
00:17:43 ne justifie pas de poursuite pénale.
00:17:46 La personne qui a commis l'infraction n'a pas été identifiée.
00:17:50 Dans votre plainte, vous avez peut-être visé quelqu'un
00:17:54 que vous soupçonniez.
00:17:56 L'enquête n'a pas permis de trouver des preuves suffisantes.
00:18:00 -Une personne que vous avez soupçonnée.
00:18:04 -C'est Microsoft qui trouve cette adresse IP.
00:18:07 -Je n'ai pas les moyens de trouver l'adresse IP.
00:18:11 Si j'avais les moyens, j'aurais aussi eu les moyens
00:18:15 d'arrêter le calvaire qu'il aurait vécu.
00:18:17 -Vous auriez un message à adresser à ce hacker ce soir,
00:18:23 s'il vous regarde ?
00:18:25 -Ce serait quelqu'un qui a voulu nous faire du mal.
00:18:29 Si ça a été fait pour détruire la famille,
00:18:33 ça ne fait que la renforcer.
00:19:00 -Je pense que tout ira mieux à partir du moment
00:19:03 où je pourrai mettre un visage sur cette personne
00:19:07 et que je saurai pourquoi il m'a fait ça.
00:19:10 J'aurais préféré que la personne qui s'en est prise à moi
00:19:14 vienne parce que je l'ai trahi,
00:19:17 que je lui ai fait quelque chose qu'elle ne lui a pas plu.
00:19:21 Mais que je sache pourquoi elle faisait ça
00:19:24 plutôt que d'être descendue et rabaissée
00:19:28 pour ne pas savoir pourquoi.
00:19:30 -Vous retournez avec plaisir sur Facebook ?
00:19:34 -J'ai toujours une appréhension, mais je n'y pense pas
00:19:38 à chaque fois que je me connecte.
00:19:41 -Vous l'utilisez toujours ?
00:19:43 -C'est inconcevable de ne plus avoir de page Facebook.
00:19:47 Mon très-hacker l'a gagnée.
00:19:49 -Si vous faisiez l'objet de ce type d'attaque,
00:19:54 vous seriez peut-être un peu plus sparrée ?
00:19:57 -Oui, parce que psychologiquement, je sais ce qu'on peut ressentir.
00:20:01 Quand on ne s'est jamais fait pirater son compte,
00:20:04 on se dit que ce n'est pas grand-chose.
00:20:07 Mais quand on le vit, c'est vraiment différent.
00:20:10 -Bon courage pour la suite des événements.
00:20:14 Et si vous avez des nouvelles, vous me tenez au courant.
00:20:19 -Ca marche.
00:20:21 ...
00:20:31 -Je laisse derrière moi la Moselle, direction le Grand Ouest,
00:20:35 pour rejoindre la Bretagne et le petit village de Crozon,
00:20:38 dans le Finistère, où j'ai donné rendez-vous à Clarisse.
00:20:42 ...
00:20:56 -Bonjour, Clarisse. -Bonjour, Olivier.
00:20:58 -Merci de me recevoir chez vous.
00:21:01 C'est bien joli, ici, dans le coin de Bretagne.
00:21:05 Je ne connaissais pas du tout, mais c'est très joli.
00:21:09 -Vous êtes ici depuis combien de temps ? -1 an et demi.
00:21:13 -Bon. Ce qui m'amène aujourd'hui, c'est qu'en 2010,
00:21:17 vous étiez dans le sud de la France. -Oui.
00:21:21 -Votre vie a pris une drôle de tournure, à ce moment-là.
00:21:25 C'est tout ce qu'on va se raconter ensemble.
00:21:29 -Avec plaisir.
00:21:32 -Il ne faut pas se fier aux apparences.
00:21:34 A 28 ans, Clarisse est pilote d'avion dans la marine.
00:21:38 Militaire, elle a le goût du risque, mais ce n'est pas une casse-coups.
00:21:42 Elle est de nature prudente et jamais elle n'aurait imaginé
00:21:46 ce qui allait lui arriver en s'inscrivant sur Facebook.
00:21:50 -Bekia. -Bekia.
00:21:52 Allez, on suit Bekia.
00:21:54 -En 2010, Clarisse utilise ce site depuis environ 2 ans,
00:21:59 de manière très occasionnelle, pour y publier quelques clichés,
00:22:02 comme des photos de vacances.
00:22:05 -A l'époque, c'était des photos de quand j'étais plus jeune,
00:22:09 que j'avais ressorties des placards.
00:22:11 Et puis, quelques photos avec tous mes camarades de promotion,
00:22:16 mais pas dans le cadre militaire.
00:22:18 -Vous les protégez, ces photos ? -Au début, non.
00:22:22 Puisque je n'avais pas du tout conscience
00:22:25 du fait que rien n'était protégé.
00:22:28 On pouvait taper mon nom sur Facebook,
00:22:31 on avait accès à tout mon profil, avec toutes mes informations,
00:22:35 mes photos, mes commentaires.
00:22:37 -Moi aussi, je suis en train de m'apercevoir
00:22:40 que j'ai fait la même chose que vous.
00:22:43 Le 6 janvier 2010, autour de 18h30,
00:22:47 votre petit frère, Thibaut,
00:22:51 qui a 2 ans de différence avec vous, vous appelle.
00:22:55 -Il m'a parlé de photos. Il m'a demandé si...
00:22:58 Si un jour, je n'avais pas fait des photos avec quelqu'un.
00:23:03 Je ne voyais pas où il voulait en venir.
00:23:06 Je lui ai demandé de développer.
00:23:08 Je le sentais gêné.
00:23:10 Il m'a demandé de taper sur Internet, d'aller voir sur un site Internet.
00:23:15 Il m'a demandé de regarder les photos, de me demander si c'était vraiment moi.
00:23:20 -Vous êtes arrivée sur ce site. -Sur ce site pornographique.
00:23:24 -C'était un site pornographique. -Oui.
00:23:26 Sur lequel, il y avait des photos de moi.
00:23:30 Il y avait beaucoup de photomontages.
00:23:33 J'étais extrêmement choquée.
00:23:35 Parce qu'en cliquant, en 30 secondes de temps,
00:23:40 j'avais pu voir plusieurs photos. J'avais pu voir à quoi ça ressemblait.
00:23:44 Il y avait quelques photomontages qui étaient mal faits.
00:23:48 On voyait qu'on avait découpé mon visage et qu'on l'avait mis
00:23:52 sur un site porno. Et d'autres photos montées qui étaient mieux faites.
00:23:56 On pouvait se poser la question.
00:23:59 -Vous êtes toujours au téléphone avec votre frère ?
00:24:02 -Je ne suis pas restée longtemps avec lui.
00:24:05 J'avais besoin de regarder ce que c'était, d'essayer de comprendre.
00:24:10 Je lui ai dit que je le rappellerais plus tard.
00:24:13 J'avais plus de voix, plus de jambes.
00:24:16 J'ai l'impression que tout s'était arrêté. Je ne comprenais pas.
00:24:20 Je ne comprenais pas ce qui se passait.
00:24:23 -Qu'est-ce qu'il y a sur ces photos ? -Il y a de tout.
00:24:27 Il y a des photos où je suis seule,
00:24:30 "dénudée", même si ce n'est pas moi, c'est juste mon visage.
00:24:34 Il y a des photos à plusieurs,
00:24:36 toujours à caractère pornographique.
00:24:40 Donc, voilà, c'est jamais dans des positions très évidentes.
00:24:44 Et en fouillant un peu plus, il y avait des photos que j'appelle "salies".
00:24:50 Il y avait juste mon visage,
00:24:52 en civil et en militaire,
00:24:55 avec du sperme sur le visage, avec des sexes à côté.
00:25:00 Des photos plus dérangeantes que les photos-montages.
00:25:04 -Ce qui veut dire que l'auteur de ces photos...
00:25:07 -Il avait imprimé mon portrait, il s'était masturbé dessus,
00:25:11 et il avait repris une photo de l'ensemble avec son sexe à côté.
00:25:15 -Si je comprends bien, c'est que les membres de ce site
00:25:19 pouvaient aller se servir partout, sur la toile,
00:25:23 prendre des photos et en faire ce qu'ils voulaient ?
00:25:26 -C'est ça.
00:25:27 On m'a utilisée, on s'est servie de moi,
00:25:31 et ça a été tellement dur et choquant
00:25:34 que j'ai eu l'impression qu'on est rentré dans ma vie, dans moi,
00:25:39 sans me demander.
00:25:42 Pour moi, je l'ai vécu comme un viol.
00:25:45 Je me suis sentie salie.
00:25:48 Il y a eu de l'humiliation, de la haine,
00:25:51 un besoin de vengeance, de compréhension,
00:25:56 des questionnements.
00:25:57 "Où, quand, comment, pourquoi ?"
00:26:00 "Pourquoi ça ? Qui ?"
00:26:02 "Qui avait fait ça ?"
00:26:03 Il y a des pseudonymes sur ces sites-là.
00:26:07 Et j'ai tout de suite voulu...
00:26:11 Après avoir regardé toutes les photos,
00:26:13 je suis allée chercher sur le moteur de recherche
00:26:16 et je me voyais pas aller me mettre dans mon lit, dormir,
00:26:20 et dire "je verrai demain".
00:26:22 C'était pas possible.
00:26:24 Et ça a été assez rapide,
00:26:26 parce qu'en tapant son pseudonyme sur Google,
00:26:30 je suis tombée sur différentes pages.
00:26:32 Il était inscrit sur d'autres sites, des sites de moto, de jeux vidéo,
00:26:36 avec toujours ce même pseudonyme.
00:26:39 Et il était également sur un site qui n'a rien d'officiel,
00:26:42 mais qui est dédié aux marins.
00:26:45 Donc il avait son pseudonyme avec son nom et son prénom.
00:26:48 -Ce nom et ce prénom vous disent quelque chose ?
00:26:52 -Oui. C'est quelqu'un avec qui je travaillais.
00:26:55 -Donc c'était un militaire ?
00:26:57 -Un militaire aussi, avec qui j'avais travaillé pendant plusieurs mois,
00:27:01 pendant presque un an et demi.
00:27:03 Et tout de suite, quand j'ai vu les photos civiles,
00:27:07 j'ai rapidement fait un rapprochement.
00:27:10 Puisqu'à l'époque, il était ami avec moi sur Facebook.
00:27:15 Je me suis rendue compte que ça faisait déjà un an
00:27:18 qu'il s'amusait avec mes photos.
00:27:21 Et donc, à l'époque, il me voyait tous les matins,
00:27:24 il me disait bonjour tous les matins,
00:27:27 et il s'amusait en même temps avec mes photos.
00:27:30 Et là, je me suis sentie encore plus trahie.
00:27:33 ...
00:27:50 -On était à peu près un peu plus d'une trentaine,
00:27:54 37 ou 39, je ne sais plus, à être concernées,
00:27:57 ou en tout cas avoir une photo d'identité militaire
00:28:01 vierge sur le site, mise à disposition d'autres membres.
00:28:05 -C'était une introduction, de montrer aux autres membres...
00:28:09 -Il nous avait mises sur un plateau en disant
00:28:12 "J'ai toutes ces collègues de travail, allez-y."
00:28:16 -Oui.
00:28:17 -Le premier à en parler à Clarisse, c'est son propre frère Thibault.
00:28:21 ...
00:28:23 Lui-même a été alerté par un de ses amis,
00:28:26 qui est tombé par hasard sur ses curieux photomontages.
00:28:30 -J'ai été extrêmement choqué de voir ça.
00:28:33 Extrêmement choqué.
00:28:35 Je me suis dit, de toute façon, c'est pas possible.
00:28:38 Je connais ma soeur, je sais ce qu'il en est.
00:28:41 Du coup, j'ai regardé toutes les photos,
00:28:44 et je voyais bien qu'il y avait des photos en montage,
00:28:48 où avec des filles, les jambes écartées,
00:28:50 et c'est la tête de ma soeur.
00:28:52 C'est insupportable.
00:28:54 Surtout quand on connaît sa soeur et qu'on sait que c'est pas elle.
00:28:58 C'est insupportable à voir. C'est dur.
00:29:01 Je comprends pas qu'on puisse faire ça avec des gens
00:29:05 avec qui on travaille, qu'on voit tous les jours.
00:29:08 Peut-être même qu'il aimait bien ma soeur,
00:29:10 mais comment on peut faire ça ?
00:29:13 On se dit que c'est un gros pervers.
00:29:15 Ce n'est qu'un gros pervers. C'est tout.
00:29:40 -Voilà. On est toutes répertoriées à chaque fois
00:29:44 en tenue militaire, en photo d'identité,
00:29:47 avec le prénom en dessous.
00:29:49 Voir pour certaines, il y avait même des noms de famille.
00:29:52 -Elles étaient toutes en uniforme.
00:29:55 -C'est uniquement des photos d'identité militaire,
00:29:58 qui servent pour nos cartes d'identité.
00:30:01 -Il a été trouvé où ?
00:30:03 -Sur le réseau informatique de la base.
00:30:05 -Est-ce que les gendarmes vous ont cru ?
00:30:08 -Oui. Je leur ai tout apporté directement.
00:30:12 Je leur ai dit que c'était ce qui s'est passé.
00:30:15 Ils m'ont demandé de me taire,
00:30:17 de tout garder pour moi, de prévenir personne.
00:30:20 Ils souhaitaient le prendre en flagrant délit,
00:30:24 voir s'ils continuaient.
00:30:25 On est à un stade de contradiction
00:30:28 où on veut qu'ils continuent pour que ça s'arrête.
00:30:31 On est tiraillées d'un autre côté
00:30:33 car on veut que ça s'arrête.
00:30:35 On ne peut pas souhaiter que ça continue.
00:30:38 Pourtant, il y a des moments où je me suis dit
00:30:41 de refaire des photos-montages, de reposter,
00:30:44 de remettre des commentaires,
00:30:47 pour qu'on puisse vraiment l'arrêter tout de suite.
00:30:50 Et pas attendre, attendre.
00:30:52 C'était des semaines...
00:30:54 -Cette attente a duré combien de temps ?
00:30:57 -Pas loin de 3 mois.
00:30:59 Ca m'a paru interminable.
00:31:01 Les jours, les nuits, tout le temps.
00:31:04 J'ai une grosse carapace qui m'a permis de tenir.
00:31:08 Ca a été un enfer.
00:31:09 -Quel regard les autres portaient sur vous
00:31:12 suite à la révélation de cette affaire ?
00:31:15 -Il y a eu de tout.
00:31:17 Pas mal de compassion, notamment de la part
00:31:20 de mes autres collègues féminines,
00:31:23 personnel féminin,
00:31:25 qui se sont rendus compte de ce que ça pouvait être.
00:31:29 De la part des hommes, beaucoup de curiosité.
00:31:34 "C'est quoi, le site ?"
00:31:36 -Oui.
00:31:37 -Mais là, je...
00:31:39 Je me suis retenue.
00:31:42 Je me suis retenue, parce que c'est humiliant,
00:31:45 c'est irrespectueux, et c'est pas drôle.
00:31:49 Ce qui traînait, c'était
00:31:51 "Clarisse sur un site pornographique."
00:31:53 Je vous laisse imaginer ce qui peut passer.
00:31:56 Je suis officier, donc j'ai des responsabilités.
00:32:00 Je peux aussi avoir du monde sous mes ordres.
00:32:04 Et forcément, la crédibilité en prend un coup.
00:32:07 -Oui, bien sûr.
00:32:08 Aujourd'hui, le procès va arriver dans quelques mois.
00:32:13 L'enquête des gendarmes est arrivée au bout.
00:32:18 -Oui.
00:32:20 -Avez-vous eu les conclusions ?
00:32:22 -J'ai juste été avertie qu'il avait interpellé
00:32:27 et qu'ensuite, il a été viré de la Marine,
00:32:30 au bout d'un an.
00:32:32 Un an après la découverte et la plainte.
00:32:34 -Aujourd'hui, 3 ans après,
00:32:37 vous vous détachez petit à petit de ça ?
00:32:41 -Oui, je ne pense pas tous les jours.
00:32:44 Maintenant, j'ai toujours des visions,
00:32:48 j'ai toujours cette image, cette photo salie.
00:32:53 Elle n'est pas omniprésente, mais je la vois tout le temps.
00:32:59 J'ai eu un gros blocage à cause de ça.
00:33:05 Et même encore maintenant.
00:33:07 Alors maintenant, je vis avec.
00:33:10 Mais c'est pas oublié.
00:33:12 C'est pas oublié.
00:33:13 Et cette image, elle est toujours là.
00:33:18 C'est ça, le plus dur.
00:33:24 Et tant que le procès ne sera pas passé,
00:33:28 tant que je l'aurais pas vue,
00:33:30 je n'aurais pas eu une explication,
00:33:33 je n'aurais pas compris pourquoi,
00:33:36 je n'arriverais pas à avancer.
00:33:38 Même si...
00:33:40 Même si j'essaie de vivre avec.
00:33:45 ...
00:33:54 -Les photos disparaissent, puis reviennent sur la toile.
00:33:58 Il est difficile, voire impossible, de les supprimer définitivement.
00:34:03 Le procès est la confrontation avec celui qui a maquillé ces photos.
00:34:07 Clarisse attend cela avec impatience.
00:34:09 Elle veut des explications, des réponses précises.
00:34:14 Cet homme risque jusqu'à 5 ans de prison et 300 000 euros d'amende.
00:34:18 Je suis allé rendre visite à Maître Asse,
00:34:23 l'avocat de Clarisse et de toutes ses jeunes femmes.
00:34:25 Pour lui, il s'agit d'une nouvelle forme de criminalité.
00:34:29 -J'estime qu'on est en face d'un viol numérique.
00:34:33 Parce que dans le cas de Clarisse,
00:34:36 c'était un de ses collègues qui a voulu porter atteinte
00:34:40 à l'honneur et la considération, l'image des femmes militaires.
00:34:44 Il a voulu se venger car il n'acceptait pas l'autorité de ces femmes.
00:34:49 On voit aussi l'impact que peuvent avoir les réseaux sociaux
00:34:53 parce que ça démolit des personnes.
00:34:55 -Comment vivent ces femmes ?
00:34:57 Il y a une quarantaine de victimes.
00:35:00 Globalement, avez-vous l'impression qu'elles vivent de la même manière ?
00:35:05 -Elles ont été très perturbées. Ca a généré des dépressions.
00:35:10 Leurs relations sexuelles avec leurs compagnons ont été perturbées.
00:35:15 Mais elles sont extrêmement courageuses.
00:35:21 -Clarisse a eu cette volonté d'agir,
00:35:23 cette force de se battre contre cet homme.
00:35:26 Si je la sens encore affectée par cette histoire,
00:35:30 raconter son expérience a pour elle une signification très forte.
00:35:34 -Vous êtes toujours dans l'armée. -Oui.
00:35:38 -Toujours officier. -Oui.
00:35:40 -L'armée, qui est si discrète,
00:35:44 vous a donné l'autorisation de témoigner.
00:35:48 -Oui.
00:35:49 -Vous pensez qu'il y avait une volonté de montrer quelque chose ?
00:35:53 -Je pense qu'ils ont été aussi choqués.
00:35:56 A travers ce témoignage, la Marine s'est dit
00:36:00 que ça peut arriver à d'autres personnes, civiles ou militaires.
00:36:04 -Et puis le fait aussi, sans doute,
00:36:07 que vous soyez victime d'un autre militaire.
00:36:11 Comment regardez-vous cet homme, 3 ans après ?
00:36:15 -Aujourd'hui, comme un pervers, c'est sûr.
00:36:19 Je pense qu'il y a de ça.
00:36:21 Quelqu'un de malade, peut-être. Je sais pas.
00:36:24 Quelqu'un de bête, déjà, dans le sens propre du terme.
00:36:29 -Vous avez continué à garder votre page Facebook ?
00:36:35 -Oui, parce que je stime que ce n'est pas ça
00:36:38 qui va m'empêcher de garder contact avec certaines personnes,
00:36:42 de partager des photos ou des événements
00:36:45 avec d'autres personnes.
00:36:47 Par contre, j'ai lu les paramètres de confidentialité
00:36:51 et comment protéger mes photos. Tout est répertorié, classé.
00:36:55 Même dans mes amis, c'est catégorisé.
00:36:58 J'ai les connaissances, et tout le monde n'a pas accès à tout.
00:37:02 -Merci, Clarisse. -Merci, Olivier.
00:37:05 -Et profitez de votre belle région.
00:37:07 -Oui. -Et puis bon courage.
00:37:09 -Merci. Au revoir.
00:37:11 ...
00:37:21 -La mésaventure de Clarisse est la preuve que les réseaux sociaux
00:37:24 sont devenus le nouveau terrain de jeu idéal des prédateurs sexuels.
00:37:29 Dans son histoire, il n'y a eu que des photomontages.
00:37:32 Mais parfois, cela ne s'arrête pas qu'à la toile.
00:37:36 Il arrive que des victimes soient agressées.
00:37:39 Sur les bords du lac d'Annecy, en Haute-Savoie, je retrouve Alicia.
00:37:44 Agée de 18 ans seulement, elle est accompagnée de son père Christophe.
00:37:49 ...
00:37:51 -Alicia. -Bonjour.
00:37:53 -Christophe, bonjour. -Bonjour.
00:37:55 -Comment allez-vous ? -Bien.
00:37:58 -Vous nous recevez du lac ? -Oui.
00:38:00 -Votre maison est en travaux.
00:38:02 Bon.
00:38:04 Il y a un an, il vous est arrivée une drôle d'aventure
00:38:09 due à vos voyages sur les réseaux sociaux.
00:38:12 On peut dire que grâce à vous, Christophe,
00:38:15 on est en passe que cette histoire arrive à son terme.
00:38:20 Avec l'avènement d'un petit garçon.
00:38:23 Je vous suis. On va discuter de tout ça à l'intérieur.
00:38:27 Allez.
00:38:28 ...
00:38:30 -En 2011, Alicia vit seule avec son père
00:38:33 et utilise Facebook depuis déjà 3 ans.
00:38:36 Sur son compte, elle recense plus de 700 amis plus ou moins proches.
00:38:41 Ce qui m'étonne pour une jeune fille de son âge, mais pourquoi pas ?
00:38:45 Un jour, elle reçoit la requête d'une nouvelle personne
00:38:49 pour devenir son amie.
00:38:51 Sans trop se poser de questions, elle croit connaître son adresse.
00:38:55 Résultat, cet inconnu commence à discuter avec elle.
00:38:59 -Je m'appelle Jean-Marc, j'ai 28 ans.
00:39:02 J'ai vu une photo de ton profil.
00:39:05 Pour me remettre dans la photographie,
00:39:08 j'aimerais t'offrir un shooting photo.
00:39:11 -Vous avez une photo sur votre profil.
00:39:13 Il vous a mis quoi comme photo ?
00:39:16 -Une photo d'un jeune qui paraissait avoir 25-28 ans.
00:39:20 Avec un gros appareil de photographe.
00:39:23 -Quel type d'indication il vous a donné sur lui ?
00:39:26 Sur sa vie, de qui il était ?
00:39:29 -Il paraissait vraiment pas...
00:39:31 méchant.
00:39:33 On avait l'impression de pouvoir tout lui dire.
00:39:36 Je lui ai demandé s'il avait un site de book photo
00:39:41 pour voir ce que ça pouvait donner.
00:39:44 -Bien évidemment.
00:39:46 -Je suis tombée sur un site d'une personne de Lyon
00:39:49 qui avait des photos, qui s'appelait Jean-Marc.
00:39:52 Ca donnait envie de faire des photos, elles étaient magnifiques.
00:39:57 Vous aviez une idée de ce que vous vouliez faire ?
00:40:00 Ou lui vous a fait des propositions ?
00:40:03 -Il m'a pas forcément fait de propositions.
00:40:06 J'étais décidée sur le fait que, comme ce soit l'hiver,
00:40:09 je voulais faire des photos avec le paysage du lac
00:40:13 et des montagnes avec la neige.
00:40:15 -Combien de temps avez-vous conversé avec ce garçon
00:40:20 avant d'accepter ce rendez-vous ?
00:40:22 Ca a duré quelques semaines ?
00:40:25 -Il m'a ajoutée dans sa liste d'amis début décembre.
00:40:28 Ca s'est passé début février.
00:40:30 -Donc, vous acceptez un rendez-vous.
00:40:33 -Tout à fait.
00:40:34 -Il a votre numéro de téléphone. -Mon adresse.
00:40:38 -Ce jour-là, personne n'est au courant que vous avez rendez-vous.
00:40:42 -Personne. -D'accord.
00:40:44 -Donc, il devait m'attendre en bas de chez moi.
00:40:47 Et en fin de compte, je me suis retrouvée avec quelqu'un
00:40:51 qui a sonné à la porte de chez moi sans avoir sonné à mon interphone.
00:40:57 Ca a été le choc pour moi quand j'ai ouvert la porte.
00:41:00 Je suis tombée face à un homme que je ne m'attendais pas à voir.
00:41:04 Quand je lui ai demandé qui il était, il m'a répondu que c'était moi,
00:41:08 Jean-Marc, le photographe. Et là, ça a été...
00:41:12 -Surprise. -Grosse surprise.
00:41:15 Je m'attendais à un homme de 28 ans alors que lui, il en faisait la cinquantaine.
00:41:21 -Qu'est-ce qui vous passe par la tête ?
00:41:23 -Je me suis dit qu'il y avait un gros problème.
00:41:26 J'ai voulu refermer. J'ai dit que ce n'était pas la peine.
00:41:30 Et il a repoussé et il est rentré chez moi.
00:41:34 -Donc, il rentre de force chez vous.
00:41:37 -Il a fermé la porte et a mis les clés je ne sais où
00:41:40 que j'ai retrouvées après qu'il est parti, puisqu'il a rouvert.
00:41:44 -Comment il justifie qu'il ait menti ?
00:41:48 -Il m'a dit que s'il avouait son vrai âge,
00:41:51 il avait peur que je lui dise que je ne veux pas faire de photos.
00:41:56 -Vous acceptez de faire ces photos ? -Oui, parce que c'était des photos...
00:42:01 Il n'y avait rien en jean, en T-shirt.
00:42:04 -En gros, vous vous dites que vous faites ces photos et il va vite partir.
00:42:09 -Il part. -Ca ne s'est pas passé comme ça.
00:42:13 -Non, ça a dégénéré. Il m'a dit qu'on arrête la plaisanterie
00:42:18 et qu'on allait plus loin.
00:42:21 Forcément, c'était le fait qu'il voulait des photos dénudées.
00:42:26 Quand je lui ai dit que je ne voulais pas faire ces photos,
00:42:30 il m'a bien fait comprendre que je n'avais pas le choix.
00:42:34 C'était plutôt une affirmation.
00:42:36 "Tu vas te déshabiller, un point, c'est tout."
00:42:40 -Il vous menace ?
00:42:42 -Il m'a montré une photo très hard d'une jeune fille.
00:42:46 Il m'a dit que si je ne fais pas ce que je lui demande,
00:42:49 ça va être pire.
00:42:51 Si je résiste, ce sera pire. J'emploierai la manière forte.
00:42:55 Et là, face à cet homme qui fait le double de mon gabarit,
00:42:59 qui m'a parlé vraiment méchamment,
00:43:06 "Tu es ma soumise, je suis ton maître, tu dois m'écouter."
00:43:11 J'avais l'impression d'être un chien.
00:43:14 Un chien qui doit obéir à son maître quand on lui dit "tu t'assoies".
00:43:19 J'avais qu'une envie, que ça se termine.
00:43:22 J'ai crié, mais ça n'a rien changé.
00:43:25 -A partir de ce moment-là, vous vous exécutez.
00:43:29 -Oui. J'avais tellement peur qu'il y alle par la force
00:43:33 que je me suis exécutée.
00:43:35 Je me suis dit qu'il n'y avait pas d'issue de secours.
00:43:39 Il a commencé à prendre des photos à caractère pornographique.
00:43:44 Il m'a forcé à lui faire une fellation.
00:43:47 Il a eu d'autres photos où il a pu présenter son sexe devant le mien.
00:43:53 Ensuite, il a essayé d'abuser de moi.
00:43:56 Je le repoussais, je lui disais "non, non, non",
00:44:00 jusqu'au moment où j'ai vraiment pété les plombs
00:44:03 et je me suis vraiment lâchée.
00:44:06 J'étais comme une madeleine.
00:44:08 J'étais trompée, mouillée de pleurs, de larmes.
00:44:12 Apparemment, ça l'aurait dégoûtée et coupée dans son envie.
00:44:18 -Combien de temps tout ça a duré ?
00:44:20 A partir du moment où il rentre chez vous, il en ressort combien ?
00:44:25 -1h30, 2h après. -C'était long.
00:44:27 -Ca a été très long. On a l'impression que ça ne se terminera jamais.
00:44:32 -Avant de partir, quel était Tugui là ?
00:44:36 -Il m'a remenacée à nouveau. Il m'a dit de ne parler à personne.
00:44:40 Il s'est passé. Il m'a dit que si j'apprends quoi que ce soit,
00:44:44 que j'en parle à qui que ce soit, il m'a dit qu'il reviendrait.
00:44:49 Ce sera encore pire.
00:44:51 -Il vous menace d'utiliser ses photos sur le Net ?
00:44:54 -Non. Il me dit qu'il les gardait pour lui, personnellement.
00:44:59 -Vous fermez cette porte, cet homme s'en va.
00:45:02 Il a essayé de rentrer en contact avec vous, cet homme, après ça ?
00:45:08 -Je n'allais plus sur Facebook. J'avais peur qu'il soit connecté.
00:45:13 -Connecté. D'accord.
00:45:14 D'un seul coup, vous êtes de retour.
00:45:17 Vous ne connaissez rien de cet homme.
00:45:22 -Non. -Vous n'avez qu'une adresse Internet ?
00:45:24 -Une adresse e-mail et un numéro de téléphone.
00:45:28 -Qu'est-ce qui vous passe par la tête ?
00:45:30 -J'ai eu des idées très noires. J'en ai gardé certaines marques.
00:45:35 "T'as été une pauvre conne. Pourquoi t'as foncé ?
00:45:38 "T'as été tellement naïve.
00:45:41 "T'accordes pas ta confiance. Pourquoi l'as-tu accordée ?"
00:45:45 Je m'en voulais. Je m'en voulais énormément.
00:45:48 ...
00:46:10 -J'ai une personne qui m'a invité sur MSN.
00:46:13 Elle connaissait ma fille, car elle travaillait dans un club sur Annecy.
00:46:17 Elle me dit qu'elle avait des photos à me montrer de ma fille.
00:46:21 Je lui dis que j'avais fait une soirée ensemble,
00:46:24 avec des photos de soirée.
00:46:26 Comme ça circule sur le Net.
00:46:28 Elle me les a envoyées. J'ai eu la surprise de ma vie.
00:46:31 Je m'attendais à des photos simples, de jeunes qui s'amusent.
00:46:35 Là, c'était des photos plus causées.
00:46:37 Ca a atteint le cadre de la pornographie.
00:46:40 Ce qui m'a fait mal, c'est de voir ces photos
00:46:43 et de savoir qu'elles tournaient sur des sites Libertas.
00:46:47 Tout le monde peut se collecter dessus et y aller.
00:46:51 -Cette personne, d'ailleurs, pourquoi...
00:46:54 Elle est tombée, elle, comment, dessus ?
00:46:57 C'était elle-même une femme qui travaillait dans le milieu Libertas ?
00:47:01 -La fille qui m'a envoyé les photos, oui.
00:47:04 Je pense. C'est une amie virtuelle, à la base.
00:47:07 Là, je suis tombé des nues. Je restais bloqué sur les photos.
00:47:11 Je voyais ma fille différemment.
00:47:13 C'était pas ma fille que j'avais vue.
00:47:16 C'était ma gamine qui était partie un jour ou deux avant chez son copain.
00:47:20 -Tout s'écroulait. -Loin de me douter.
00:47:22 -De ce qu'il pouvait y avoir derrière.
00:47:25 -Le lendemain, Alicia arrive à la maison.
00:47:28 -Je voulais une explication.
00:47:30 Ma fille a commencé à se mettre en larmes.
00:47:32 Elle m'a expliqué qu'elle avait fait la connaissance d'un monsieur.
00:47:36 Il a profité de la situation, il a menti sur son âge,
00:47:40 sur sa profession.
00:47:41 Ma fille a été tellement naïve qu'elle s'est fait avoir.
00:47:45 Voilà.
00:47:46 -Vous avez annoncé à sa maman et à son frère aussi.
00:47:51 -Oui. -Elle ne pouvait pas ?
00:47:55 -Ca a été dur de me le dire à moi.
00:47:57 Je pense qu'elle a voulu le garder pour elle,
00:48:00 pour me protéger, moi aussi,
00:48:02 pour éviter d'avoir... de faire des histoires.
00:48:06 Ca a dû être dur pour elle. -Bien sûr.
00:48:08 -A partir du moment où elle me l'a dit,
00:48:11 comme j'ai dit à ma fille, tu vas avoir bientôt 18 ans,
00:48:15 c'est pas à moi de te dire ce que tu dois faire.
00:48:17 Si tu veux déposer plainte, je serai toujours avec toi.
00:48:21 Si tu veux pas déposer plainte, je vais pas t'y forcer.
00:48:24 -La plainte a été déposée, vous l'avez aidée à prendre sa décision.
00:48:28 Vous l'avez même accompagnée, je crois.
00:48:31 Ca a changé, Alicia ?
00:48:34 -Je pense qu'elle va être marquée encore longtemps.
00:48:37 Par contre, depuis que le monsieur a été interpellé,
00:48:41 qu'il est passé au tribunal, je retrouve ma fille.
00:48:45 Là, il y a eu un soulagement qui a été fait.
00:48:48 On voit qu'une libération s'est faite.
00:48:50 -Il y a un point en moins. -Oui.
00:48:53 -J'ai vu bien plus tard,
00:49:09 au moment où j'ai déposé plainte,
00:49:12 que j'avais reçu des mails de menaces.
00:49:15 -Des mails de menaces de cet homme.
00:49:18 Alors, du type ?
00:49:20 -J'ai reçu...
00:49:22 "Je vois que tu te fous de moi.
00:49:25 "Si tu ne reprends pas contact,
00:49:29 "photo sur le net.
00:49:31 "Ton maître."
00:49:33 C'était écrit "Ton maître".
00:49:36 -Suite à ce dépôt de plainte,
00:49:39 vous avez été confrontée
00:49:42 à votre agresseur.
00:49:44 Comment s'est-il comporté lors de cette confrontation ?
00:49:49 -Je me suis fait insulter de tous les noms.
00:49:52 Tout était de ma faute.
00:49:54 Je ne savais pas que je n'avais pas le droit de diffuser des photos.
00:49:58 Sachant qu'au départ, elle était d'accord pour que je lui fasse
00:50:02 un shooting. Je me suis dit qu'elle serait d'accord
00:50:05 pour que je les diffuse sur le net.
00:50:08 En gros, je suis la coupable et il est la victime.
00:50:12 -La plainte a été suivie par le procureur.
00:50:14 -Oui. -Il y a eu un procès.
00:50:17 -Oui, qui a passé le 2 octobre au tribunal.
00:50:20 -Votre agresseur a été condamné à...
00:50:23 -6 mois de prison avec sursis,
00:50:25 puisqu'il n'avait pas de casier judiciaire.
00:50:28 500 euros aversés à mon avocate.
00:50:32 1500 euros de dommages à intérêts
00:50:35 et une inscription au fichier JAPD.
00:50:39 -Qui concerne les agressions sexuelles.
00:50:42 Comment cette condamnation a-t-elle été justifiée ?
00:50:47 -Disons qu'ils ont reconnu que la diffusion de photos.
00:50:51 Sur les photos, on ne voyait pas réellement l'agression.
00:50:56 C'est-à-dire que sur le viol,
00:50:59 il a fait une photo quand il m'a forcé à faire la fellation,
00:51:03 mais il a été assez intelligent.
00:51:05 Il a pris la photo, mais je suis à ça de son sexe.
00:51:10 Pour eux, ça peut être...
00:51:13 -La preuve n'a pas été établie qu'il y a eu pénétration.
00:51:17 -Tout à fait.
00:51:18 Je me suis dit que la justice était mal faite.
00:51:21 Pour ce qu'il m'a fait subir,
00:51:24 quelqu'un qui agresse sexuellement, qui diffuse des photos,
00:51:28 il a que 6 mois de prison avec sursis.
00:51:31 C'est très mal fait.
00:51:33 J'espère qu'en cours d'appel, ça va être mieux jugé.
00:51:37 Mais...
00:51:39 -Il a fait appel. -Oui.
00:51:40 Il a osé faire appel.
00:51:42 Du coup, c'est vrai que je ne voulais pas, justement,
00:51:47 requalifier les faits.
00:51:49 Avec la grossesse, le bébé qui va bientôt arriver,
00:51:52 c'était des procédures trop longues.
00:51:54 J'avais envie que ça se termine.
00:51:57 -Quel impact cela a eu sur vous,
00:52:00 Alicia ? Aujourd'hui, psychologiquement,
00:52:03 vous vous sentez différente ?
00:52:07 -Oui. Je me suis renfermée sur moi-même.
00:52:10 Je me méfie de tout le monde.
00:52:12 Je pensais que ça passerait avec le temps.
00:52:15 Mais non.
00:52:16 Je pense que c'est des choses qu'on n'oublie pas.
00:52:20 Je n'oublierai jamais de ma vie.
00:52:22 Avec le temps, on apprend à vivre avec.
00:52:25 Mais non, on n'oublie pas.
00:52:27 ...
00:52:31 -L'histoire d'Alicia montre que ses réseaux sociaux
00:52:34 entretiennent la confusion entre le virtuel et le réel,
00:52:38 entre l'ami d'enfance et l'ami de circonstance.
00:52:41 Sans vigilance, le piège peut se refermer,
00:52:44 avec des conséquences terribles.
00:52:46 Les jeunes filles ne sont pas forcément les seules cibles.
00:52:49 Car n'importe qui peut tomber demain dans le piège.
00:52:53 ...
00:53:00 -C'est le cas de Marianne que je rencontre à Paris.
00:53:02 Cette femme, célibataire de 55 ans,
00:53:05 a récemment été victime d'une arnaque à la romance.
00:53:08 Marianne est tombée dans les griffes des redoutables brouteurs,
00:53:12 surnoms donnés à ces escrocs d'Afrique de l'Ouest.
00:53:15 Ils se font d'abord passer pour des hommes sous tout rapport,
00:53:19 avant de se transformer en abominables maîtres chanteurs.
00:53:23 Un scénario implacable et sophistiqué
00:53:25 au service d'une manipulation sentimentale.
00:53:29 Comment ces escrocs arrivent-ils avec une telle facilité
00:53:32 à accrocher leur proie qui ne voit rien venir ?
00:53:35 C'est ce qui m'étonne le plus.
00:53:38 Quitte à passer parfois pour une personne naïve,
00:53:41 Marianne a décidé de me raconter son histoire dans les moindres détails.
00:53:45 Elle a soigneusement gardé chaque trace écrite de tout cela.
00:53:49 En juillet 2012, elle se familiarise avec Facebook.
00:53:52 Elle est alors approchée par un inconnu qui se réclame d'un ami commun.
00:53:56 -J'ai reçu un message de sa part en chat.
00:53:59 Il me disait "Bonjour, moi, c'est Richard."
00:54:02 Donc là, j'étais voir. On a commencé à discuter comme ça.
00:54:05 Donc, c'était vraiment anodin et convivial.
00:54:09 "Moi, je fais quoi ? Toi, tu fais quoi ?"
00:54:12 Il habitait à Nantes. Il m'a dit qu'il travaillait dans le bâtiment.
00:54:16 J'ai donné quelques renseignements sur moi.
00:54:19 On a commencé à discuter de notre situation personnelle.
00:54:23 C'est là qu'il m'a dit qu'il était divorcé depuis 2 ans,
00:54:27 qu'il avait une petite fille qu'il ne voyait pas beaucoup.
00:54:30 Et donc, bon, moi, étant seule aussi...
00:54:34 -Divorcée aussi. -Oui, avec un enfant.
00:54:37 C'est vrai que ça crée des liens. On a parlé du vécu de ça, etc.
00:54:42 Tout en étant sur le mode d'empathie.
00:54:45 -D'accord.
00:54:46 Là, il s'agit quand même d'échanges
00:54:50 par ordinateur interposé. -Oui.
00:54:54 -Vous n'avez qu'une photo de cet homme. -Plusieurs.
00:54:57 -Comment il était ? Les photos qu'il vous envoyait, comment ?
00:55:01 -Il était bien. Il était brun, bien fait,
00:55:05 belle bouche, beaux yeux. Vraiment pas mal.
00:55:09 -Il vous plaisait ? -J'aurais pas craché dessus.
00:55:12 -D'accord.
00:55:13 Donc, comment a-t-elle évolué, cette histoire ?
00:55:16 Elle a évolué ensuite. -Elle a évolué
00:55:20 en me proposant de se voir. -D'accord.
00:55:22 -On convient d'un rendez-vous, un vendredi soir.
00:55:26 Il m'invite à dîner, qu'on se retrouve à un certain endroit.
00:55:30 Le vendredi soir, j'étais assez contente.
00:55:33 Je me mets à mon avantage.
00:55:35 Et puis, j'attends, j'attends.
00:55:38 A 7h, rien. Il m'avait dit à peu près 2-3h pour venir.
00:55:42 7h30, personne. 8h, toujours pas. -Aucune nouvelle ?
00:55:46 -Aucune nouvelle. Rien.
00:55:49 J'appelle et je tombe sur un répondeur pas du tout personnalisé.
00:55:53 -Oui. -Donc, j'étais furax.
00:55:55 J'envoie un message en disant que si je voulais pas venir,
00:55:59 il fallait le dire tout de suite.
00:56:02 "Maintenant, terminé, je veux plus entendre parler de toi."
00:56:06 Le lendemain, ou le surlendemain, je sais plus,
00:56:09 il me reparle en message.
00:56:11 Il me dit qu'il est parti à Abidjan, en Côte d'Ivoire.
00:56:15 J'étais stupéfaite.
00:56:17 Il a dû partir pour un chantier précipitamment,
00:56:20 que c'était une grosse affaire.
00:56:23 Il avait eu le temps de prévenir personne.
00:56:26 Il avait pas pu m'envoyer un truc.
00:56:28 Il avait même laissé son téléphone.
00:56:31 J'ai trouvé bizarre.
00:56:33 Au bout d'un moment, j'écoute.
00:56:35 Je finis par accepter ses excuses et à reprendre la conversation.
00:56:40 -Ca commence à devenir plus modératique.
00:56:43 Il voudrait avoir des photos de moi.
00:56:45 En me disant qu'il m'en envoyait aussi, qu'il pensait à moi.
00:56:49 Ca commençait à devenir assez hot.
00:56:52 J'envoyais une photo, une tenue un peu légère.
00:56:56 Il y a eu une fois,
00:56:58 j'ai eu un message qui m'a dit que j'avais un petit problème.
00:57:02 J'avais un problème.
00:57:04 J'avais un problème avec mon père.
00:57:07 Il m'a dit que j'avais un problème avec mon père.
00:57:10 J'ai eu 4-5 photos qui ont été échangées.
00:57:13 Après, j'ai arrêté parce que j'étais pas très à l'aise.
00:57:17 -Dans quel état d'esprit vous vous trouvez ?
00:57:21 Vous avez l'impression de vivre...
00:57:24 Vous vivez une histoire d'amour.
00:57:26 -Oui, j'étais très bien.
00:57:28 -Tout ça est virtuel.
00:57:31 Vous ne l'avez jamais vu.
00:57:33 -Ca m'embêtait.
00:57:35 Je me disais qu'il est parti, qu'il reviendrait.
00:57:38 Je m'étais faite à l'idée qu'il travaillait loin
00:57:42 et qu'on ne pouvait pas se voir avant un moment.
00:57:45 C'était virtuel, mais il existait.
00:57:48 -Les vacances sont finies en septembre.
00:57:51 Vous êtes moins sur Facebook.
00:57:53 Le soir, vous y êtes ?
00:57:55 -On se bip et on discute.
00:57:58 -En discussion instantanée ? -Voilà.
00:58:02 Un samedi, on était en train de discuter en messagerie instantanée.
00:58:08 Il m'écrit "attends, j'ai un coup de téléphone".
00:58:11 J'attends un peu.
00:58:13 Quand il reprend la ligne écrite, le message,
00:58:17 il me dit qu'il y avait un drame sur son chantier.
00:58:20 "Deux ouvriers sont morts en Seville."
00:58:23 Il me raconte une histoire de béton qui s'est écroulée.
00:58:27 Il était en panique.
00:58:29 Il me dit qu'il allait à sa place, ce que je ferais,
00:58:32 mais qu'il allait sur les lieux du drame.
00:58:35 Il finit par y aller en me disant que c'est vrai,
00:58:39 qu'il n'avait pas de nouvelles pendant un jour et demi.
00:58:43 Un jour et demi après, il me dit qu'il a fallu voir les familles
00:58:47 des deux ouvriers, que c'était un drame épouvantable,
00:58:51 qu'il a donné de l'argent aux familles, qu'il a fait ce qu'il a pu.
00:58:56 -C'est un homme formidable. -Je lui ai dit
00:58:59 "Bravo, c'est très généreux de ta part, c'est bien d'avoir fait ça."
00:59:04 "Tu es quelqu'un de bien."
00:59:07 A partir de là, il était déprimé.
00:59:10 Il a assez d'Afrique, il a hâte de rentrer en France.
00:59:14 C'est là qu'un beau jour, il m'a demandé de l'argent.
00:59:18 Il me dit qu'il a donné de l'argent aux familles,
00:59:21 qu'il ne pouvait pas retirer de l'argent,
00:59:25 qu'il ne pouvait pas retirer de l'argent,
00:59:28 qu'il ne pouvait pas retirer de l'argent.
00:59:31 Il me dit qu'il ne pouvait pas retirer de l'argent.
00:59:34 Il me dit qu'il ne pouvait pas retirer de l'argent.
00:59:38 Il me dit qu'il ne pouvait pas retirer de l'argent.
00:59:42 Il me dit qu'il ne pouvait pas retirer de l'argent.
00:59:45 Il me dit qu'il ne pouvait pas retirer de l'argent.
00:59:49 Il me dit qu'il ne pouvait pas retirer de l'argent.
00:59:53 Il me dit qu'il ne pouvait pas retirer de l'argent.
00:59:57 Il me dit qu'il ne pouvait pas retirer de l'argent.
01:00:01 Il me dit qu'il ne pouvait pas retirer de l'argent.
01:00:04 Il me dit qu'il ne pouvait pas retirer de l'argent.
01:00:08 Il me dit qu'il ne pouvait pas retirer de l'argent.
01:00:12 Il me dit qu'il ne pouvait pas retirer de l'argent.
01:00:16 Il me dit qu'il ne pouvait pas retirer de l'argent.
01:00:20 Il me dit qu'il ne pouvait pas retirer de l'argent.
01:00:23 Il m'a touchée.
01:00:26 Il a dû bien travailler mon côté maternel.
01:00:29 Je finissais par prendre en charge ce pauvre garçon.
01:00:33 Il lui arrivait trop de choses.
01:00:36 Je ne vais pas le laisser tomber comme une vieille chaussette.
01:00:40 J'ai envoyé 1 000 euros.
01:00:43 Il m'a promis que 15 jours après, il me rembourse.
01:00:48 -La suite est rocambolesque.
01:00:50 Mais Marianne tombe dans le panneau.
01:00:53 Richard prévient qu'elle va recevoir un chèque de près de 10 000 euros
01:00:58 à son nom, émis par une société d'assurance.
01:01:01 Il lui demande de l'encaisser, puis de lui expédier le reste par virement.
01:01:06 Elle s'exécute et pense que tout va rentrer dans l'ordre
01:01:11 jusqu'à ce nouveau rebondissement.
01:01:14 -Il va rentrer en France pour la voir.
01:01:17 Je trouve fou qu'elle continue d'y croire.
01:01:20 -Il va chercher son billet d'avion.
01:01:23 Il m'a acheté des cadeaux, des oeuvres d'art.
01:01:27 Le lendemain, il va prendre l'avion.
01:01:29 Silence radio. Plus rien.
01:01:32 -Pendant combien de temps ?
01:01:34 -Ca dure 2 jours.
01:01:36 J'étais au travail.
01:01:39 Je reçois un SMS.
01:01:41 "Nous avons intercepté votre mari à l'aéroport d'Abidjan.
01:01:45 "Veuillez nous contacter immédiatement."
01:01:49 Je me dis "Qu'est-ce qui se passe ?"
01:01:52 Je renvoie un SMS en disant "C'est pas mon mari,
01:01:55 "je le connais que par Internet."
01:01:58 Je reçois un autre SMS en me disant "On vous appelle dans une demi-heure."
01:02:03 Le commissaire m'explique qu'il a fait passer des oeuvres d'art volées
01:02:08 en Ivoire à la douane.
01:02:11 -Il est tout à fait illégal.
01:02:13 -Il a donné mon nom en disant que c'était pour moi.
01:02:17 Je me suis dit que c'était des cadeaux pour moi.
01:02:21 Maintenant, qu'est-ce qu'on fait ?
01:02:24 Il me dit "On le met en prison ou il y a une amende."
01:02:28 Je reçois, en plus, sur ma boîte mail perso,
01:02:32 un super PDF avec des avions et des drapeaux de Côte d'Ivoire partout.
01:02:38 Avec mon nom en gros, "Madame machin",
01:02:41 "Monsieur machin a été arrêté", etc.
01:02:44 "Il va aller en prison."
01:02:48 Ou bien "Vous choisissez de payer une amende de 1 500 euros
01:02:52 "pour lui éviter la prison."
01:02:54 "Signé, commissaire truc." Super tampon de la police douane.
01:02:58 -On vous réclame 1 500 euros. -Pour le sortir de prison.
01:03:03 2 jours après, j'étais en ville, je faisais mes courses.
01:03:07 Je reçois un autre SMS.
01:03:09 "Veuillez vous connecter pour un interrogatoire dans 1 heure."
01:03:13 Ca devient du délire avec le commissaire.
01:03:16 Il commence à me dire que le prévenu lui fait beaucoup de peine
01:03:20 parce qu'il a l'air sincère, etc.
01:03:23 Je me dis "Qu'est-ce que c'est que cette histoire ?"
01:03:26 Je coupe. J'arrête.
01:03:28 Je reçois des SMS du commissaire "Police douane, veuillez vous contacter."
01:03:33 Je montre le PDF à une amie au boulot qui me dit
01:03:36 que c'est bidon.
01:03:38 Je l'envoie à l'ambassade d'Abidjan en expliquant l'histoire
01:03:42 et en demandant si c'est un papier officiel.
01:03:45 J'ai une réponse 6 heures après qui me dit que c'est une arnaque.
01:03:49 Sauf que là, je reçois sur ma boîte mail toutes mes photos.
01:03:54 -Les photos coquines ? -Oui.
01:03:56 Avec des menaces à chaque fois et des demandes de rançon.
01:04:00 Les menaces, c'était d'envoyer les photos sur la boîte mail de mon patron,
01:04:06 sur le site web de ma ville,
01:04:08 sur les affiches sur mon lieu de travail,
01:04:11 sur le collège de ma fille, etc.
01:04:14 Il fallait payer 2500 euros.
01:04:17 Et là, panique à bord.
01:04:19 Je pense au chantage, aux chèques, aux photos qui se baladent.
01:04:24 Quand j'ai ouvert mes mails de chantage, j'ai voulu me foutre en l'air.
01:04:28 On se sent humilié, violé au fond de soi.
01:04:32 On est victime et on ne peut pas en parler
01:04:35 et les gens en rigolent.
01:04:37 "Elle a été crédule, trop conne, c'est bien fait pour sa gueule."
01:04:41 On a ce sentiment de honte de s'être fait piéger de façon aussi grosse.
01:04:46 Mais j'ai aussi remonté le fil des discussions que j'ai retrouvées.
01:04:52 Avec le regard de maintenant, je me dis que j'aurais dû...
01:04:58 C'est très bien monté.
01:05:01 Il y a tout ce qu'il faut pour que...
01:05:05 Un peu plus, un peu moins, c'est très dosé.
01:05:09 Et après, j'étais dans une colère, une colère noire.
01:05:13 Non seulement je suis victime, mais je suis complice.
01:05:16 Et je vais devoir rembourser.
01:05:20 -Le retour à la réalité est rude pour Marianne.
01:05:23 Elle réalise trop tard qu'elle a été victime d'une arnaque à la romance.
01:05:27 Un coup monté depuis la Côte d'Ivoire par un réseau d'escrocs.
01:05:31 Le fameux chèque de près de 10 000 euros était en fait un chèque volé.
01:05:35 Marianne porte plainte, mais malgré sa bonne foi,
01:05:38 elle doit rembourser cette somme à la compagnie d'assurance.
01:05:42 Seule face à cette arnaque, Marianne a trouvé de l'aide
01:05:45 auprès de l'association AVEN.
01:05:48 Elle a voulu témoigner à condition d'être cachée,
01:05:51 car ses actions ne sont pas reconnues par la justice française.
01:05:55 Camilla connaît les stratagèmes mis au point par ces fameux brouteurs.
01:05:59 -Est-ce que ça veut dire
01:06:01 que ces scénarios sont vraiment travaillés et établis ?
01:06:07 -Complètement. C'est tout prêt.
01:06:10 Les questions sont toujours les mêmes.
01:06:12 Moi, qui vais aborder plusieurs brouteurs différents...
01:06:17 -Qu'est-ce qu'un brouteur ?
01:06:19 -Ce sont les escrocs d'Afrique de l'Ouest.
01:06:21 On les surnomme comme ça. -Pourquoi ?
01:06:24 -Parce que là-bas, les brouteurs, c'est ceux qui mangeaient la laine
01:06:28 sur le dos des autres. C'est le terme.
01:06:31 C'est pour ça qu'on a repris ce terme-là.
01:06:34 -D'accord. Ces brouteurs, comment ils font ?
01:06:37 Ils envoient, par exemple, en une journée...
01:06:40 -Ils peuvent envoyer, créer, par exemple,
01:06:42 30 ou 40 profils dans une journée. Faux profils.
01:06:46 Sur différents sites ou réseaux sociaux.
01:06:49 Il faut savoir qu'on les évalue entre 7 et 8 000.
01:06:53 -7 et 8 000. -Ils font ça tous les jours.
01:06:56 -Sur le site d'Amane Europe... -C'est vrai et faux.
01:06:59 Ca, par exemple, c'est celui qui était derrière cette photo-là.
01:07:04 -Qui sont, en fait, ces gens qui sont de type européen ?
01:07:09 -C'est Amane, qui est connue. On a son nom.
01:07:14 Il a porté plainte, ce monsieur-là.
01:07:16 -Ces jeunes Africains vont prendre des photos n'importe où ?
01:07:20 -Quand ils sont maquins, acteurs, comédiens,
01:07:23 ils ont des books. Ils sont sur Internet.
01:07:26 Il est facile à évoluer à leurs photos.
01:07:29 Mais après, vous avez des gens qui sont usurpés de leurs photos,
01:07:33 comme ce monsieur-là, qui, lui, est comme vous et moi.
01:07:37 Donc, voilà.
01:07:39 ...
01:07:44 -Quand Marianne est venue vous trouver,
01:07:47 qu'avez-vous fait ?
01:07:49 -Déjà, un montage du dossier, la rassurer.
01:07:52 Lui dire aussi s'occuper de sa banque,
01:07:55 parce que là, c'était quand même une somme importante.
01:08:00 -Il y a toujours, dans ces scénarios, un moment ou un autre,
01:08:03 un chacun. -Oui, voilà.
01:08:06 -A un moment donné, la victime envoie de l'argent pour dépanner.
01:08:10 "Je suis à l'hôpital, il me faut 1 800 euros,
01:08:14 "il me faut 2 000 euros." On envoie 2 000 euros comme ça.
01:08:18 Et puis, après, ça commence à monter en somme.
01:08:21 Et là, la victime dit "je peux pas".
01:08:24 "Ne t'inquiète pas, l'assurance devait me faire un remboursement,
01:08:27 "je vais les appeler et ils vont le mettre à ton nom."
01:08:31 Ce chèque est une somme importante.
01:08:34 "Tu gardes ce que tu m'as déjà envoyé, tu m'envoies le reste."
01:08:37 Et là, commence le scénario en France.
01:08:41 L'escroc se met en contact avec quelqu'un ici,
01:08:44 avec un complice, forcément, qui lui va falsifier un chèque,
01:08:49 un chèque volé, et poster aux victimes de Paris.
01:08:53 -Généralement, ces chèques sont à l'ordre de la victime.
01:08:56 -Toujours. -Donc, cela veut dire quand même
01:08:59 qu'aujourd'hui, Marianne se retrouve...
01:09:03 A avoir été obligée d'emprunter 10 000 euros
01:09:06 pour couvrir le découvert que vous avez vu à la banque.
01:09:10 -Le prêt qu'elle a refusé de m'accorder, en plus,
01:09:14 parce que j'avais déposé un chèque falsifié et volé,
01:09:18 donc j'étais complice, on ne voulait plus me faire confiance.
01:09:22 -Revenons-en à Havène.
01:09:24 Quelle est votre action ?
01:09:26 À partir du moment où Marianne vous contacte,
01:09:29 vous allez vous substituer à Marianne ?
01:09:32 -Ce qu'on essaie de faire, c'est de trouver l'identité de l'escroc.
01:09:36 De façon à ce qu'ensuite, notre association envoie
01:09:40 les dossiers à la police de cybercriminalité d'Abidjan.
01:09:44 -Il y a une police de cybercriminalité à Abidjan ?
01:09:48 -En Côte d'Ivoire.
01:09:49 Pour les victimes, il y a une justice.
01:09:52 Au moins, son escroc est arrêté, même si elle n'est pas remboursée.
01:09:57 -Du coup, vous avez réussi, je crois, à rentrer, pénétrer
01:10:01 dans la boîte Facebook de cet homme
01:10:04 et à détruire tout ce qui pouvait faire l'objet de chantage
01:10:09 là concernant.
01:10:10 -Quand elle m'a dit que tout était détruit, tout était supprimé,
01:10:14 c'est... Ouah !
01:10:16 -Qu'est-ce qui a fait cet escroc ? Est-ce qu'il a été...
01:10:20 -Pour l'instant, on attend que la France bouge sur ce dossier
01:10:24 pour pouvoir envoyer tout là-bas.
01:10:26 Pour l'instant, on ne peut rien faire.
01:10:29 On ne peut pas commencer encore en France.
01:10:33 -Grâce à AVEN, l'escroc de Marianne a été neutralisé,
01:10:36 mais elle ne retrouvera sans doute jamais son argent,
01:10:39 car aucune loi à ce jour ne permet de poursuivre ces escrocs.
01:10:43 Pour combattre ces brouteurs, j'ai trouvé encore plus fort
01:10:47 que cette association AVEN Europe.
01:10:50 Je suis tombé sur des petits génies de l'informatique
01:10:53 qui jouent aux justiciers du web.
01:10:55 Ils ont décidé de neutraliser ces escrocs d'Afrique de l'Ouest
01:10:59 et d'envoyer plus de 40 millions d'euros à des citoyens français.
01:11:03 En moyenne, un escroc envoie 1500 mails par jour
01:11:06 pour ferrer de nouvelles victimes.
01:11:08 Vincent, chef de file des Moogle Hunters,
01:11:11 a accepté, après d'âpres négociations,
01:11:13 de bien vouloir me rencontrer.
01:11:16 Un peu à la manière des Anonymous, c'est dans la plus grande illégalité,
01:11:20 mais par plaisir, qu'il tente de démasquer des bandits sans morale.
01:11:24 Car si la plupart des pays peuvent enquêter et faire arrêter ces escrocs,
01:11:28 rien ne se passe et chaque plainte aboutit à un classement de l'affaire.
01:11:33 -Vous en connaissez ? -J'en ai rencontré pas mal.
01:11:36 -Et des victimes qui ont perdu beaucoup d'argent ?
01:11:40 -Il y en a qui ont perdu la vie. -Carrément ?
01:11:43 -Oui.
01:11:44 Quand on fouille là-dedans, on s'aperçoit que c'est des gens...
01:11:48 Les victimes ont une vie détruite.
01:11:51 Ils n'ont plus aucun recours, ils ne savent plus vers qui se tourner.
01:11:56 J'ai rassemblé une bande de personnes
01:11:58 qui avaient les mêmes pensées que moi sur cette activité.
01:12:02 J'ai monté un groupe, on est 12 aujourd'hui.
01:12:05 On les traque, on les piège, on les démasque.
01:12:08 Voire on les fait arrêter.
01:12:11 -A partir du moment où vous...
01:12:13 Vous...
01:12:14 Vous en faites rien, vous, qu'est-ce que vous faites ?
01:12:18 -En général, on lui dit qu'on sait ce qu'il veut faire.
01:12:21 On le démasque tout de suite.
01:12:24 On lui dit que si on veut, on va proposer un business
01:12:27 et faire de l'argent.
01:12:28 Il répond tout le temps.
01:12:30 Le modeur, c'est l'argent.
01:12:32 -Vous inversez les rôles. -On inverse les rôles.
01:12:35 -A but non lucratif. -Jamais.
01:12:38 Sauf qu'à un certain niveau, on arrête et on passe à l'attaque.
01:12:43 -C'est-à-dire, pour que je comprenne bien,
01:12:45 parce que c'est assez technique,
01:12:48 vous pouvez vous approprier leur compte Facebook.
01:12:51 -Juste s'ils ont une boîte mail. -S'ils ont une boîte mail,
01:12:55 vous pouvez vous l'approprier. -On l'apprend.
01:12:58 -Vous l'apprenez.
01:12:59 -On va chercher ce qui nous intéresse.
01:13:02 Photos persos, documents d'identité, diplômes scolaires,
01:13:05 des choses comme ça.
01:13:07 On a profondé les recherches.
01:13:09 On sait à qui on a affaire, où il habite.
01:13:12 On montre des dossiers, des preuves.
01:13:15 Et une fois qu'on sait à qui on a affaire,
01:13:17 on le transmet à d'autres personnes.
01:13:20 -Vous remettez ces dossiers à une autorité compétente,
01:13:24 mais dans le pays de l'escroc ?
01:13:27 -Non.
01:13:28 Dans un pays anglophone.
01:13:30 -D'accord. -Qui s'occupera
01:13:32 d'aller dans le pays de l'escroc.
01:13:35 -Vous avez réussi à faire condamner plusieurs personnes ?
01:13:39 -Oui. -Depuis votre existence ?
01:13:41 -On a déjà 3 condamnations en notre actif.
01:13:44 Elles sont assez lourdes. Une fois 6 ans, une fois 11 ans
01:13:48 et une fois 15 ans.
01:13:50 -Et pour des arnaques concernant des victimes
01:13:53 de quelles nationalités ?
01:13:55 -C'était des Américains pour les 2 premiers
01:13:58 et un Belge pour le 2e.
01:13:59 -Vous vous exposez, quand même, à des poursuites
01:14:03 de la part de la justice française ?
01:14:05 -C'est arrivé déjà. -Pourquoi ?
01:14:07 -Pratiques illégales d'Internet,
01:14:10 détournement de moyens technologiques.
01:14:12 -Vous connaissez bien tout ça.
01:14:15 Quel conseil vous pourriez donner face à ces...
01:14:19 ces mails qu'on reçoit régulièrement ?
01:14:21 -Ce que je dis aux gens, c'est simple.
01:14:24 Internet, c'est un monde virtuel.
01:14:26 Il est très simple,
01:14:28 pour quelqu'un sans connaissance informatique,
01:14:31 de se faire passer pour quelqu'un d'autre.
01:14:34 Sur un réseau social comme Facebook,
01:14:36 les amis qu'on a déjà nous connaissent.
01:14:39 C'est pas la peine de raconter sa vie sur ce réseau.
01:14:42 Les gens connaissent nos coordonnées.
01:14:44 Il faut pas hésiter à passer son compte en privé.
01:14:48 Il y a que les gens qui vous connaissent déjà
01:14:50 qui vont pouvoir vous contacter.
01:14:53 -Cette règle de base, les utilisateurs sont encore trop peu nombreux
01:14:57 à la respecter, ce qui éviterait bon nombre de dégâts.
01:15:01 ...
01:15:08 -J'ai rendez-vous sur un banal parking,
01:15:11 à Irigny, dans la banlieue de Lyon.
01:15:13 Alan et Salim voulaient me rencontrer
01:15:16 à l'endroit précis où ils se sont fait agresser.
01:15:19 Un règlement de compte d'un genre nouveau,
01:15:22 au point que la presse en ait fait l'écho.
01:15:25 A l'époque, ils sont au lycée technique pour passer un CAP d'électricien.
01:15:29 Ils sont inséparables.
01:15:31 A l'heure d'Internet, ils passent autant de temps en discothèque
01:15:35 que devant leur ordinateur pour draguer.
01:15:37 Pour la 1re fois, ils décrochent un rendez-vous
01:15:40 avec une jeune fille de 17 ans, abordée sur le Net,
01:15:43 qui se présente sous le pseudonyme de Stella Bambino.
01:15:47 Alan. -Bonjour.
01:15:49 -Bonjour. Olivier. Salim. -Salut.
01:15:52 -Bonjour. -Ca va ?
01:15:54 -Et vous ? -Ca va.
01:15:55 On est sur le parking où, le 17 avril 2011,
01:15:59 vous aviez rendez-vous avec une jeune femme
01:16:02 que vous aviez rencontrée, vous, Alan, sur le réseau Facebook.
01:16:07 -Voilà.
01:16:08 -Comment s'était faite cette rencontre ?
01:16:10 -Bah... En fait, j'avais un certain cercle d'amis.
01:16:15 Dans ce cercle d'amis, ils avaient eux-mêmes des amis
01:16:18 qu'on me suggérait quand je me connectais.
01:16:21 Et donc, j'ai ajouté Stella Bambino.
01:16:25 On a commencé à discuter, à se présenter.
01:16:27 On était dans un contexte de rencontre, de drague.
01:16:31 Et donc, voilà.
01:16:33 De fil en aiguille, on est venus organiser une rencontre, ici.
01:16:38 -Donc là, vous étiez là.
01:16:40 -Voilà. Stella est venue accompagnée d'une amie que je ne connaissais pas.
01:16:44 Son nom ou son pseudonyme était Sabrina.
01:16:47 On a fait les présentations, elle s'est assise dans la voiture.
01:16:51 Et de là, tout commence.
01:16:53 -De Facebook à ici, il y avait pourtant du temps et de la distance.
01:16:58 Et pourtant, ça a failli vous coûter la vie.
01:17:01 -Ca a failli, oui.
01:17:03 -C'est la 1re fois que vous revenez ici ?
01:17:06 -Oui. C'est ici que tout s'est passé.
01:17:08 Ca fait un petit choc, mais bon.
01:17:11 -Je vous vois regarder à chaque fois qu'une voiture passe.
01:17:14 Je ne vous sens pas tranquille. -Je me sens mal à l'aise.
01:17:17 -On ne va pas s'attarder.
01:17:20 On va aller chez vous, Alan.
01:17:22 On va pouvoir discuter de tout ça en détail.
01:17:25 On y va ? -C'est parti.
01:17:27 ...
01:17:35 -Qui est vraiment cette Stella Bambino ?
01:17:38 Pourquoi a-t-elle accepté ce rendez-vous sur ce parking ?
01:17:42 Alan et Salim avaient-ils des raisons de se méfier ?
01:17:45 Je demande à Alan de me raconter ses 1ers contacts
01:17:49 avec cette fameuse Stella Bambino.
01:17:51 -Quand je me connectais sur le réseau social,
01:17:53 je la voyais discuter, en échanger une conversation.
01:17:57 -De quoi elle vous parlait ?
01:18:00 -Qu'est-ce que tu fais dans la vie ? Tu fais du sport ?
01:18:04 Elle voyait mes photos, mes liens que j'aimais.
01:18:07 Il y a des pages, par exemple, des styles de musique.
01:18:10 Qu'est-ce que tu aimes comme style de musique ?
01:18:13 Apprendre à connaître quelqu'un.
01:18:15 Ca se passe comme ça, les présentations sur les réseaux sociaux.
01:18:18 -Vous avez senti qu'à un moment, ça commençait à se rapprocher ?
01:18:22 -Je lui ai dit que je la trouvais mignonne, charmante.
01:18:26 Et que ma photo, elle me trouvait mignon.
01:18:29 -Et charmante.
01:18:30 -A partir de là, on essaie de créer une rencontre.
01:18:33 -C'est ce qui s'est passé.
01:18:35 -Oui.
01:18:36 ...
01:18:38 -Le 16 avril 2011,
01:18:40 Alain et son copain Salim perçoivent Stella Bambino de sortir.
01:18:44 Elle leur donne rendez-vous sur ce fameux parking,
01:18:46 accompagnée par sa copine Sabrina.
01:18:49 Une fois arrivée, elle rejoint les 2 garçons dans la voiture.
01:18:52 Curieusement, Stella passe son temps sur son téléphone portable.
01:18:55 Alain va vite comprendre qu'elle est en contact permanent
01:18:58 avec son petit ami dont il ignorait l'existence.
01:19:01 -Elle leur a précisé l'endroit où on était, à son copain.
01:19:05 -Oui.
01:19:06 -Eux sont passés en voiture, ils ont dû voir qu'on était 2.
01:19:10 Eux aussi étaient 2 dans le véhicule.
01:19:13 Donc, ils sont partis dans le camp de gens du voyage où ils vivent.
01:19:18 Ils ont récupéré des amis.
01:19:20 Et en fait, ils sont arrivés sur le parking,
01:19:23 ils se sont garés en face de nous.
01:19:25 Donc, moi, à ce moment-là, je me dirige vers la voiture
01:19:28 et je vois qu'ils sont nombreux dans la voiture.
01:19:30 Je m'adresse au conducteur, car apparemment, c'était lui le copain.
01:19:34 Je lui dis qu'il y a un souci, en fait.
01:19:37 Je lui demande ce qui se passe.
01:19:40 Et tout de suite, il est menaçant, il me dit "Bouge pas, tu vas voir."
01:19:44 A ce moment-là, le passager sort et vient pour m'agresser.
01:19:48 -Vous commencez à prendre des coups d'emblée ?
01:19:50 -D'emblée. Donc, moi, je commence à me débattre,
01:19:53 à échanger quelques coups avec celui qui m'agresse.
01:19:57 A partir de là, le conducteur sort de la voiture.
01:20:01 Il commence à... Je suis avec 2 mecs sur moi, quoi.
01:20:05 Je me débrouille comme je peux.
01:20:07 -Salim, vous, pendant ce temps-là, qu'est-ce que vous faites ?
01:20:10 -Je suis sorti de la voiture, à ce moment-là.
01:20:12 -Vous venez à la rescousse de votre pote ? -Oui.
01:20:16 -Donc, là, moi, je me retrouve avec plusieurs personnes sur moi.
01:20:19 Salim, lui, il lui sort des couteaux directement.
01:20:24 -Quelle a été votre réaction quand vous avez vu ça ?
01:20:27 -Il y avait des couteaux, des lames de rasoir.
01:20:30 Ma première réaction, c'est la fuite.
01:20:32 -C'était la bambino ? -Elle faisait que crier.
01:20:34 -Elle faisait que crier quoi ? -Arrêter, arrêter.
01:20:37 Elle voyait qu'il y avait une bagarre qui dégénérait.
01:20:41 -Et vous ? -Donc, moi, ma réaction,
01:20:44 je vois qu'il y en a un qui sort des lames, le deuxième, il sort des lames.
01:20:47 Direct, je vais dans la voiture, je mets le contact,
01:20:50 et en fait, sur les diesel, il y a un temps de chauffe.
01:20:54 Et ça démarre pas.
01:20:55 Je retrouve un mec à ma fenêtre,
01:20:58 j'en vois un autre de l'autre côté, la voiture encerclée,
01:21:01 et j'ai pris des premiers coups au visage.
01:21:04 J'ai tourné la tête, donc j'en ai pris aussi derrière la tête.
01:21:07 Après, j'ai protégé mon visage avec mes bras,
01:21:09 donc j'ai pris aussi dans les bras.
01:21:12 Après, j'ai pris dans le dos.
01:21:14 Donc j'ai levé la jambe pour qu'ils arrêtent de me mettre des coups dans le dos.
01:21:18 Et là, j'ai pris dans toute la jambe.
01:21:20 Et à certains endroits, ils sont vraiment acharnés,
01:21:22 au niveau du bas de ma jambe, là où il y a les tendons,
01:21:26 ça a creusé très profond.
01:21:28 Ils ont commencé à s'en prendre au rétroviseur,
01:21:30 monter sur le capot, casser le capot.
01:21:32 Il y avait un mec devant moi qui sautait sur le pare-brise
01:21:35 pour qu'il explose.
01:21:36 Moi, j'ai mis un coup de contact.
01:21:39 La voiture a avancé.
01:21:40 Lui qui était sur le pare-brise est tombé de la voiture.
01:21:44 Ils ont pris les filles, ils sont montés dans leur voiture,
01:21:46 ils ont pris la fuite.
01:21:48 Et moi, j'étais au volant de la voiture, sonné, assommé,
01:21:52 adrénaline au maximum, j'étais plein de sang, j'étais choqué, quoi.
01:21:56 -Donc, ça veut dire que Stella et Sabrina...
01:21:59 -Voilà, étaient dans leur voiture. -Sont montées dans leur voiture.
01:22:03 Ca veut dire qu'elles ont quand même accompagné vos agresseurs.
01:22:09 -Ouais.
01:22:10 -A votre avis, quel but ces filles avaient-elles en vous accueillant ?
01:22:16 -C'est ça que j'arrive pas à comprendre.
01:22:19 Peut-être qu'elle a voulu rencontrer quelqu'un,
01:22:21 qu'elle avait déjà un copain, que ça a mal tourné.
01:22:25 Peut-être qu'elle a fait un guet-apens.
01:22:27 -Elle voulait vous utiliser ? -Ou peut-être qu'elle a voulu
01:22:29 qu'il y ait un affrontement. Je sais pas ce qu'elle a voulu.
01:22:32 -Et Salim, pendant ce temps-là, vous, vous avez appelé les secours.
01:22:35 -C'est ça. J'avais pris la fuite et j'ai trouvé la 1re maison
01:22:39 que je me suis arrêté. J'ai appelé les pompiers et les gendarmes.
01:22:43 -Vous avez eu de la chance qu'on vous ouvre encore.
01:22:46 -J'avais envie d'aller le rejoindre,
01:22:48 mais le propriétaire de la maison voulait pas me laisser sortir.
01:22:52 J'ai attendu, ils sont venus au bout de 5 minutes.
01:22:55 Après, on est partis rejoindre, sur la place.
01:23:21 -J'ai pas pu le voir tout de suite,
01:23:23 parce qu'ils étaient en train de pratiquer les 1ers soins.
01:23:26 Ils savaient pas encore s'ils allaient l'opérer dans la nuit
01:23:30 ou le lendemain matin. Ils attendaient un chirurgien.
01:23:33 En insistant, les infirmiers internes m'ont fait rentrer.
01:23:38 La 1re question qu'il m'a demandé, en me regardant,
01:23:41 "Dis-moi la vérité, est-ce que je suis défiguré ?"
01:23:44 C'est ce qui l'inquiétait,
01:23:46 parce qu'il savait qu'il avait pris des coups de l'amour au visage.
01:23:50 Les plaies les plus importantes au visage étaient sur la tête,
01:23:54 parce que c'était pas recousu encore.
01:23:56 C'était quand même profond et large.
01:23:59 Mais bon, j'essaye de le rassurer.
01:24:02 -Comment votre fils a-t-il vécu les 1ers jours,
01:24:06 pour vous, à sa sortie de l'hôpital ?
01:24:08 -Bah, sa vie a d'un coup basculé,
01:24:11 puisqu'à l'époque, il était en apprentissage,
01:24:14 il faisait du sport.
01:24:16 Et là, d'un jour à l'autre, tout s'arrête.
01:24:19 Je me disais aussi qu'il était un gamin dur,
01:24:23 et je savais que, psychologiquement,
01:24:26 ça allait le travail.
01:24:28 -Il n'a pas voulu sortir pendant 6 mois de chez vous ?
01:24:32 -Il a coupé un petit peu tous les copains,
01:24:34 car il sortait beaucoup, il voyait beaucoup de copains,
01:24:38 entre le foot, les activités, il voyait beaucoup de monde.
01:24:41 Là, il sortait plus beaucoup,
01:24:44 donc ses amis, quelques amis proches, ont commencé à venir le voir.
01:24:48 -Que pensez-vous de ce qui s'est passé,
01:24:52 ce fameux 17 avril ?
01:24:54 Quelles étaient les intentions de ces agresseurs ?
01:24:58 -On sait pas encore vraiment...
01:25:01 C'est ça qui est triste, on n'a aucune motivation.
01:25:05 Cette relation avec cette fille sur Internet,
01:25:08 ça faisait quand même quelques temps qu'ils communiquaient,
01:25:11 ils se connaissaient, ils voulaient se rencontrer.
01:25:14 Donc, si cette fille avait un copain,
01:25:17 elle aurait pas besoin d'insister à ramener un garçon près de chez elle,
01:25:20 près de chez son copain, un soir, un soir de week-end,
01:25:24 où elle savait automatiquement que ça risquait.
01:25:28 Là où ils se sont retrouvés, c'est pas loin de chez son copain,
01:25:31 donc elle savait qu'il y avait un risque.
01:25:34 Si la fille voulait se cacher, elle aurait pas dit à son fils
01:25:37 de venir dans sa ville où habiter son copain,
01:25:40 il se serait donné rendez-vous ailleurs,
01:25:43 ou tout de suite, elle serait vite partie.
01:25:46 Donc, on se dit...
01:25:47 Moi, je pense honnêtement qu'il y a eu une préparation à ça.
01:25:51 -C'est un long travail, ça m'a pris beaucoup de temps.
01:26:09 Je reste marié, parce que je suis marié à vie.
01:26:13 J'ai 24 balafres sur tout le corps.
01:26:15 De la tête aux pieds.
01:26:17 Donc, c'est des choses qui s'effacent pas.
01:26:19 Je garde un souvenir à vie.
01:26:21 Je suis pas fragile, mais j'ai des souvenirs.
01:26:24 Des fois, quand je dors, j'ai beaucoup de...
01:26:27 Ca me remonte, ça revient. Mais j'avance.
01:26:30 J'essaie d'avancer. Ca fait 2 ans, je vais pas rester 20 ans sur ça.
01:26:35 -Salim, comment est-ce que vous vous sentiez, vous, de cette histoire ?
01:26:39 -Dans un premier temps, je me sentais psychologiquement atteint.
01:26:44 Pendant un bon bout de temps. J'étais tout le temps sur mes gardes.
01:26:48 Quand je sortais en ville, je faisais attention.
01:26:51 Ouais, j'étais fragile.
01:26:54 Je m'en souviens longtemps et je m'en dois toujours.
01:26:57 -Vous vous en voulez pourquoi ? Parce que vous êtes parti ?
01:27:00 -Voilà. -Ouais.
01:27:02 Mais si vous n'étiez pas parti, peut-être...
01:27:05 Vous n'auriez pas pu appeler les gendarmes.
01:27:08 Et... Enfin...
01:27:10 -Ca aurait peut-être fini pire.
01:27:13 -Il vous arrive de penser encore à ce moment-là ?
01:27:15 -Bien sûr.
01:27:17 Je repenserai toute ma vie, je pense.
01:27:20 Ca me marque à vie.
01:27:22 -Quel usage vous faites de ces réseaux sociaux ?
01:27:25 Vous vous servez de Facebook, encore ?
01:27:28 -Bien moins. Je m'en sers pour mes contacts utiles.
01:27:32 Les contacts que je vois pas souvent,
01:27:35 les amis que je peux avoir à l'étranger ou dans la France.
01:27:39 Je...
01:27:41 Je n'ajoute pas des gens comme ça gratuitement.
01:27:45 -Ami, d'ami, vous faites attention.
01:27:48 Merci beaucoup. -A vous, merci.
01:27:50 -Merci de ce témoignage. Bonne route.
01:27:54 -A vous aussi. On vous remercie.
01:27:57 -Entre-temps, la presse s'est intéressée de près à ce guet-apens
01:28:01 et à cette Stella Bambino. Les propres parents de la jeune fille
01:28:05 l'ont conduite à la gendarmerie. Placée en garde à vue, elle a fini
01:28:09 par donner le nom des 6 agresseurs, des mineurs pour la plupart.
01:28:13 En dépit de leur dénégation, ils ont été confondus par des traces d'ADN
01:28:18 sur les couteaux et les cuteurs. Leur procès doit bientôt avoir lieu.
01:28:23 Même si le but premier de ces réseaux sociaux est de s'ouvrir aux autres
01:28:27 et d'élargir son cercle d'amis et de connaissances,
01:28:31 je constate que ces histoires ont conduit ces gens à vivre
01:28:35 dans la méfiance, la peur, voire l'isolement.
01:28:39 Ces outils virtuels restent formidables,
01:28:42 mais s'il y a une leçon à retenir, c'est qu'il faut les utiliser
01:28:46 comme dans la vie réelle et faire preuve de la même vigilance
01:28:50 dans la vie de tous les jours. Ce qui reste la meilleure des protections
01:28:54 face à toute personne se cachant derrière un pseudonyme.
01:28:59 Sous-titrage ST' 501
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01:29:31 [Musique]