Rwanda : comment la France aurait pu arrêter le génocide ?

  • il y a 5 mois

Visitez notre site :
http://www.france24.com

Rejoignez nous sur Facebook
https://www.facebook.com/FRANCE24

Suivez nous sur Twitter
https://twitter.com/France24_fr#

Category

🗞
News
Transcript
00:00 En trois jours, le Rwanda commémorera les 30 ans du génocide des Hutus contre les Tutsis.
00:05 Un million de morts, des milliers de questions qui restent en suspens, notamment sur le rôle de la France.
00:10 Emmanuel Macron avait déjà reconnu les responsabilités de Paris.
00:13 Il affirme ce jeudi que la France aurait pu arrêter le génocide, mais n'en a pas eu la volonté.
00:19 On s'arrête sur les mots choisis par l'Élysée avec Christophe Boisbouvier.
00:22 Bonjour Christophe, grand spécialiste de la fric sur RFI.
00:25 La première partie de la phrase "la France aurait pu arrêter le génocide" en 1994, comment concrètement l'aurait pu faire ?
00:32 Alors je pense qu'il faut écouter, regarder la vidéo du président français dimanche prochain, on en saura peut-être plus.
00:40 Mais je pense qu'il fait allusion notamment à deux occasions historiques,
00:45 à partir du moment où a lieu l'attentat contre l'avion du président Abiyarimana, c'est-à-dire à partir du 6 avril.
00:51 Puisque avant, il y a le rapport Duclert qui raconte comment la France n'a pas du tout vu la montée des périls,
00:59 et a donc des responsabilités accablantes, comme dit le rapport Duclert, sur la façon dont les conditions du génocide ont été préparées,
01:06 et pour lesquelles la France n'a rien pu empêcher.
01:09 A partir du 6 avril, vous avez cet attentat.
01:12 Le 7 avril, vous avez un fait très important, historiquement, c'est l'assassinat de dix casques bleus belges,
01:19 d'Antigali, par les extrémistes Hutus.
01:23 Et ça va tout précipiter. Pourquoi ?
01:26 Parce qu'à ce moment-là, vous avez une force de casques bleus qu'on appelle la "minoire".
01:33 Ils sont 2300 environ, c'est pas grand-chose pour un pays comme le Rwanda, sous le commandement d'un officier canadien.
01:41 Ils sont complètement paniqués.
01:44 Mais vraiment, ils sont morts de peur.
01:46 J'en ai croisé plusieurs, les jours qu'on suivit dans Kigali, j'en ai vu qu'ils pleuraient devant moi.
01:52 C'était vraiment... Voilà.
01:54 Et alors, qu'est-ce qui va se passer ?
01:57 Il y a 500 soldats français et 500 soldats belges qui arrivent à Kigali entre le 9 et le 10 avril.
02:07 Le week-end, c'est un samedi-dimanche.
02:10 Pour faire quoi ? Pas pour renforcer ces casques bleus de la minoire,
02:15 qui sont essentiellement des Canadiens, des Bangladais et des Ghanéens,
02:21 mais pour évacuer tous les expatriés.
02:25 Alors que, si on avait voulu, à ce moment-là, arrêter le début des massacres,
02:29 il y avait déjà un début de massacre dans ces moments-là,
02:33 il aurait fallu évidemment que les 2300 casques bleus de la minoire
02:41 et les 1000 soldats franco-belges s'unissent tous ensemble pour arrêter le début de la dynamique des massacres.
02:47 Donc je pense que c'est la première occasion historique manquée.
02:51 On est entre le 10 et le 15 avril. L'évacuation prend cinq jours.
02:54 Et puis la deuxième occasion manquée, c'est juste après, et c'est le vote de la honte, c'est le 21 avril.
03:01 Là, on est à New York.
03:03 C'est les cinq pays membres permanents du Conseil de sécurité plus les dix autres
03:08 qui votent quoi par la résolution 912 ?
03:11 La réduction des effectifs des casques bleus de 2300 à 270.
03:18 C'est-à-dire qu'il ne reste plus, à partir de cette date-là, fatidique,
03:22 que 270 casques bleus qui vont rester pour essayer de faire quoi d'ailleurs ?
03:30 Que peuvent faire 270 hommes ?
03:32 Il y a un officier courageux que tous les Sénégalais connaissent,
03:36 le capitaine Baedian, que j'ai l'honneur de rencontrer à Kigali quelques semaines avant sa mort,
03:41 qui est fait parti des 270 qui vont rester et qui vont sauver des centaines et des centaines de vies de Tutsi.
03:47 Mais les autres s'en vont.
03:50 Et ça, c'est vraiment le vote de la honte pour toute l'ONU.
03:54 Pas simplement pour la France, mais pour les 15 pays membres du Conseil de sécurité
03:59 qui ce jour-là ont voté l'évacuation, le départ des casques bleus.
04:03 - Et c'est donc ces personnes que l'Elysée évoque quand on parle de ses alliés occidentaux et africains ?
04:11 - Écoutez, moi ce que je sais, je les ai notés avant de venir vous voir,
04:15 les cinq décideurs du monde à cette époque-là, le 21 avril 1994,
04:21 c'est le chinois Yang Zemin, le russe Boris Yeltsin, l'américain Bill Clinton,
04:28 le britannique John Major et le français François Mitterrand.
04:33 Et il ne faut pas oublier aussi le premier ministre belge Jean-Luc Dehaene,
04:38 qui, comme je vous l'ai dit, a eu une importance dans les jours qui ont précédé
04:44 à cause de ses dix compatriotes soldats belges qui ont été massacrés le 7 avril dans Kigali
04:49 et qui lui aussi faisait partie des gens qui disaient "il faut évacuer".
04:52 Mais il y a les dix autres...
04:54 Alors oui, si j'ai encore 30 secondes, il y a aussi les dix autres pays du Conseil de sécurité de ce jour-là.
05:01 Et puis il y a les africains, il le dit d'ailleurs je crois le président français.
05:06 - Oui, les alliés occidentaux et africains.
05:08 - Ces alliés occidentaux et africains.
05:10 Vous avez trois pays africains qui sont dans le Conseil de sécurité cette année-là, comme toujours.
05:15 Et puis vous avez tous les voisins du Rwanda qui sont évidemment aux premières loges
05:19 et qui savent ce qui se passe, c'est-à-dire l'Ouganda, la Tanzanie, le Burundi, le Zahir, le futur Congo Kinshasa.
05:27 Voilà, et c'est le silence également de l'Organisation de l'unité africaine et de l'ONU.
05:34 - Voilà, pour ces nouvelles déclarations d'Emmanuel Macron qui s'inscrivent dans une volonté de rapprochement
05:39 avec Kigali, enclenchée depuis quelques années. Merci infiniment Christophe.

Recommandée