• il y a 9 mois
Large leader du Tour de Catalogne après 4 étapes, Tadej Pogacar semble avoir franchi un cap, en ce début d'année 2024. C'est surprenant… mais pas tant que cela, d'après Nicolas Fritsch, qui a toujours vu en "Pogi" un coureur à "maturité tardive". Paradoxal, pour quelqu'un qui a, si jeune (25 ans), déjà tant gagné. Voici la chronique de notre consultant, qui effectue un parallèle avec l'athlétisme. Les chaines Eurosport sont disponibles au sein des offres Canal+, Prime Video et Bouygues Telecom

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Transcription
00:00 Après son exploit sur l'Estrade Bianche, j'attendais le Tour de Catalogne pour me
00:07 faire une idée plus juste du réel niveau physique de Tadej Pogacar parce que l'Estrade
00:12 Bianche c'est évidemment une course particulière qui va être rasée.
00:14 Le Tour de Catalogne c'est assez simple, les arrivées au sommet c'est le plus fort
00:18 qui gagne.
00:19 Le constat est sans appel, il est largement plus fort que les autres.
00:23 Est-ce que c'est surprenant ? Oui et non.
00:25 Pourquoi non ?
00:26 Depuis le début de la carrière de Pogacar, on l'avait vu débouler dans le cyclisme
00:31 professionnel sur la Vuelta, il avait remporté trois étapes, terminé troisième du classement
00:34 général, a doublé par son aîné Roglic.
00:37 Mais, et évidemment je peux vous refaire tout son palmarès, c'est le Tour de France
00:41 en 2021, j'ai toujours trouvé que Pogacar a été à maturité tardive.
00:47 Il n'était pas vraiment affûté, on voyait ses jambes, il n'avait pas des jambes de
00:50 cycliste.
00:51 On l'a vu sur l'Estrade Bianche, c'était quand même assez frappant.
00:53 Il a enfin le mollet dessiné, ça quand on est cycliste c'est vraiment un truc qu'on
00:56 regarde tout de suite.
00:57 Dès le début de saison, quand on enlève le collant ou les jambières, on jette un
01:00 coup de coude à tous les mollets.
01:01 Et là il avait le mollet beaucoup plus ayant qu'avant, c'est pas encore tip top, mais
01:05 il commence vraiment à ressembler à un coureur et du coup c'est vrai que c'est un peu inquiétant
01:09 pour ses adversaires.
01:10 On voit aussi que d'un point de vue, pas physique, mais tous les à côté, il n'était
01:15 pas ultra professionnel, comme certains au même âge, les nouveaux jeunes qui arrivent
01:18 là, qui déboulent tous les ans.
01:20 Évidemment il était professionnel, mais pas jusqu'au boutiste comme certains.
01:23 Un Yuzo par exemple dans son équipe, je m'imagine mal progresse autant.
01:28 Alors oui ça reste surprenant parce qu'un coureur qui a déjà pratiquement tout gagné,
01:31 notamment deux fois le Tour de France, on ne l'imagine pas passer encore un cap.
01:35 Parce que c'est vraiment ce qui s'est passé entre l'hiver 2023-2024, il a franchi un
01:40 palier.
01:41 Alors on a lu qu'il a changé d'entraîneur, qu'il a progressé en termes de watts, de
01:45 poids aussi, il est plus athléte donc plus de watts par kilo.
01:47 Tout ça dans le but évidemment de remporter le Giro déjà et surtout le Tour de France
01:52 parce que c'est ça son but maintenant.
01:53 Alors il l'a dit, il veut regagner un Tour de France, il veut battre Vingegaard.
01:56 Le fait est qu'il va peut-être le faire.
01:58 Dans mes pronos d'avant-saison, j'avais imaginé Vingegaard vainqueur du Tour comme
02:00 d'habitude.
02:01 Maintenant, je suis moins sûr de moi, on verra.
02:04 En attendant, je vais faire une petite analogie pour aider à mieux comprendre la façon dont
02:09 je vois les choses.
02:10 Pogacar était jusqu'à présent, avait une marge d'avance par rapport à des grimpeurs
02:15 qu'on va dire entre top 6 et top 10 mondiales, les Vlasov ou Landa, c'est l'adversaire
02:19 du Tour de Catalogne.
02:20 Pour moi, il était capable sur un 10 000 m de tenir le rythme des autres sur le record
02:26 sur 5 000.
02:27 Il passe la ligne du 5 000, il peut encore faire 5 000, il peut faire ses 10 000 m.
02:31 Idem entre le 10 000 et le semi-marathon, son temps de passage sur semi-marathon, c'est
02:35 l'allure 10 000 des autres.
02:36 Donc évidemment, il a une petite marge sur les autres, mais pas énorme non plus.
02:41 Il n'était pas dans le confort en suivant le rythme des autres.
02:45 Il n'était pas marathonien d'ailleurs, parce que je l'ai souvent vu plafonner lors des
02:48 efforts très longs, plafonner entre guillemets quand on est tellement fort sur une demi-heure
02:52 ou une heure, sur deux heures, on reste pas mauvais.
02:54 En revanche, cette année, il est devenu marathonien.
02:56 On l'a vu sur l'Estrade et Bianquet.
02:57 C'est la première fois que je le vois presque, il était même presque crescendo au fil des
03:01 deux heures d'effort à 80 bornes.
03:03 Il a passé la ligne, je suis sûr que si on lui avait dit il faut que tu refasses 10
03:05 bornes, il aurait fait 10 bornes de plus, là où tous ses adversaires étaient exténués,
03:08 à commencer par quand même un champion comme Pitcock.
03:11 Et là, cette année, je trouve que le rythme des mecs sur 5000 mètres, ce serait son rythme
03:16 sur semi-marathon.
03:17 Le rythme des gars sur 10 000 mètres serait son rythme sur marathon.
03:19 C'est-à-dire que là, il y a vraiment deux zones d'écart et il est dans le confort,
03:23 vraiment.
03:24 Et je ne sais pas si l'allure d'un coureur sur un marathon quand il passe aux 10 000
03:29 ou 10 km, ça va, heureusement, parce qu'il en reste 32.
03:33 Donc ça va.
03:34 Et c'est ce qu'on voit faire en course.
03:35 Je pense que même aujourd'hui, un Pogacar dans le peloton, quand il y a un tempo dans
03:38 les ascensions par ses coéquipiers ou par les adversaires, je pense qu'il se trimballe
03:43 littéralement.
03:44 C'est vraiment facile pour lui.
03:45 Il est à peine plus dans l'ur que moi, en train de faire ma chronique.
03:47 Donc forcément, après, il est beaucoup plus tranchant, il met des écarts importants en
03:51 très peu de temps, finalement, à ses adversaires.
03:53 Et même, il y a le fameux, en athlée, l'aérobie libère la vitesse.
03:57 C'est-à-dire que plus on est facile, plus on peut aller vite et finir fort ses courses.
04:00 On l'a vu à Milan Sanremo, il vient titiller Philipsen et Michael Matthews, il bat Pedersen,
04:06 c'est impossible sur une pancarte à l'entraînement.
04:08 Il est systématiquement battu.
04:09 Sanremo, 300 bornes, ça devient du domaine du possible.
04:12 Quand à l'arrivée, il dit que c'était une course extrêmement facile, que Kostneufroy
04:15 dit qu'il y avait un rythme endiablé de fou au moment des capis.
04:18 On se dit, OK, ils n'ont pas fait la même course.
04:20 C'est parce qu'il y a ce gros cap.
04:22 C'est deux caps maintenant d'écart.
04:23 Quand il fait deux à la première étape du Tour de Catalogne, il vient coller deux
04:27 secondes en 22 secondes d'effort, en 300 m.
04:30 Ça, à l'entraînement, encore une fois, il ne l'aurait pas fait.
04:32 Mais il était tellement facile au moment d'aborder ce sprint qu'il est capable de sortir
04:36 une accélération incroyable.
04:37 Si j'avais un conseil humblement à donner à Pogacar, ce serait d'accepter qu'il soit
04:43 aussi fort, beaucoup plus fort que les autres.
04:45 Encore une fois, j'en mets deux, trois de côté, à commencer par Winn-Wennigab.
04:48 On verra comment ça se passera à ce moment-là, mois de juillet, un peu avant.
04:51 Accepter ça et se dire, bon, OK, je suis plus fort.
04:54 Je ne vais pas en rajouter.
04:55 Ce n'est pas la peine.
04:56 Je sais que quand je veux attaquer et partir, je vais le faire.
04:59 Donc, n'exagère pas, Tadej, parce que là, et si moi, je le ressens, c'est puissance
05:04 10 dans un peloton.
05:05 Quand déjà ses propos à l'arrivée de Milan Sanremo, il ne fait pas gaffe.
05:10 Il ne fait pas preuve d'arrogance.
05:11 Il ne fait pas exprès.
05:12 On le voit bien.
05:13 C'est un gentil gars, mais à force, ça peut passer pour ça.
05:17 Quand il raconte, c'est une anecdote, mais ça veut dire quand même beaucoup.
05:20 Il a fait sa petite pause pipi avec son coéquipier.
05:23 On s'est caché dans la forêt en attendant.
05:25 Les autres ne savaient pas où on était.
05:26 Ça, c'est une blague des années 60-70 qui pouvait se faire quand ça ne roulait pas
05:30 vite en début d'étape sur un grand tour.
05:32 En 2024, ça ne passe plus.
05:34 Tout le monde est au millimètre, tout le monde est à fond, tout le monde est super
05:36 concentré dès le kilomètre zéro.
05:37 C'est une mépreuve World Tour.
05:39 Ce n'est pas une petite course chez lui en Slovénie.
05:41 Donc, ça, il ne peut pas se le permettre, même si ça partait d'un bon sentiment.
05:44 Ça, il faut arrêter parce que comme ça, deux classes au-dessus, il faut le montrer
05:49 avec parcimonie de temps en temps, juste ce qu'il faut pour gagner, mais pas plus.
05:52 [Bruit de pas]
05:54 [Tambours]

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