Pourquoi la nouvelle prison de Rivesaltes "ne suffira pas", selon les syndicats

  • il y a 6 mois
Après une nouvelle série d'incidents à la prison de Perpignan, parmi les plus surpeuplées de France, les syndicats de surveillants pénitentiaires alertent une nouvelle fois sur la sécurité au sein de l'établissement. Et la nouvelle prison prévue d'ici trois ans à Rivesaltes risque de ne rien régler.
Transcript
00:00 France Bleu Roussillon, l'invité du 6/9
00:03 Et avec notre invité, on va parler de la situation à la prison de Perpignan.
00:06 Une nouvelle fois, les surveillants pénitentiaires sonnent l'alerte.
00:09 La prison toujours surpeuplée.
00:11 Et il y a eu ces derniers jours des incidents séries.
00:14 Suzanne Chaudjahi, nous sommes avec le secrétaire du syndicat UFAP,
00:17 une salle justice ici dans les Pyrénées-Orientales.
00:20 Bonjour Pierre Grosset.
00:21 Bonjour.
00:22 Dernier incident en date, c'était dimanche matin dans le quartier disciplinaire.
00:25 Un détenu a jeté un bol rempli d'urine en plein visage d'un surveillant.
00:30 Des incidents comme celui-ci, vous en avez combien par semaine ?
00:33 À ce moment, c'est récurrent.
00:34 Cette semaine, on a passé la semaine dernière, presque tous les jours,
00:37 on a eu des incidents avec notamment un détenu qui a fait des menaces de mort
00:42 et l'apologie du terrorisme sur un collègue.
00:45 Et puis qui, le lendemain, a essayé de lamer à travers le passe-menottes
00:50 l'officier du secteur et le surveillant.
00:52 Donc un par jour, quasiment ?
00:53 À ce moment.
00:54 Et toujours au quartier disciplinaire ?
00:56 Oui, au quartier d'isolement et au quartier disciplinaire.
00:59 C'est deux structures qui sont côte à côte,
01:01 où on a des détenus de plus en plus durs à gérer
01:04 et que l'administration ne nous donne pas les moyens de contenir.
01:08 On se souvient l'été dernier de ce rapport remis par la contrôleuse générale
01:12 des lieux de privation de liberté.
01:14 Dominique Simono, qui avait visité la prison de Perpignan,
01:16 elle avait dit que c'était la pire qu'elle avait jamais vue.
01:19 La saleté, la moisissure, les punaises de lit,
01:22 les fils électriques à l'air libre, des sanitaires insalubres.
01:25 Est-ce que la violence que vous subissez,
01:27 ce n'est pas aussi le résultat de ces conditions de détention ?
01:30 Évidemment, la surpopulation pénale,
01:32 puisque Perpignan, je le rappelle, est la numéro un au niveau des établissements français,
01:36 puisqu'on a une surpopulation à l'heure actuelle de 246% de taux d'occupation.
01:40 On a 76 détenus qui dorment à même le sol.
01:43 Donc la contrôleuse générale des lieux de privation de liberté a fait un rapport.
01:46 Sur certains points, elle a raison, sur d'autres moins.
01:49 Mais après, à un moment donné, quand vous vous attachez,
01:52 par exemple, à la maison d'arrêt, vous avez 132 places.
01:54 Vous avez 330 détenus, 3 par cellule, sans douche, dans 9 mètres carrés.
01:59 C'est compliqué que les structures soient en bon état,
02:03 puisque les détenus cassent.
02:05 On n'a que 5 personnels techniques pour faire fonctionner toute la prison.
02:08 Il y a une cellule, pratiquement par jour, qui est détériorée.
02:11 Donc on n'a pas les moyens humains de pouvoir réparer.
02:16 Donc vous reconnaissez que ça participe aussi à un climat délétère ?
02:20 Oui, oui, tout à fait, bien sûr.
02:21 C'est une condition sanitaire, de toute façon, la surpopulation...
02:23 Vous ouvrez une porte de cellule, vous avez 3 détenus derrière,
02:26 dans 9 mètres carrés, je peux vous dire qu'il y en a un qui dort par terre.
02:29 Quand vous ouvrez, c'est tendu, l'ouverture d'une cellule.
02:32 Votre syndicat dénonce également les colis qui parviennent à pénétrer dans l'établissement.
02:37 La drogue, les téléphones, souvent balancés par-dessus le mur de l'enceinte.
02:42 Malgré la protection anti-drone qui a été installée il y a quelques mois,
02:45 en fait, ça ne sert à rien ce système ?
02:47 Si, quand même.
02:49 Parce que les drones, on n'arrive pas à récupérer de colis,
02:52 parce qu'on n'arrive pas à récupérer les objets illicites.
02:55 Puisqu'ils arrivent dans la nuit, on n'a aucun contrôle.
02:57 Tandis que les projections, il y en a qui se perdent,
02:59 il y en a que l'on récupère.
03:01 Mais bon, après, c'est une volonté politique,
03:03 parce qu'il suffit de faire comme à la maison d'arrêt 2 fois,
03:05 de mettre des grillages au-dessus des cours de promenade,
03:07 et c'est réglé, il n'y aura plus de projections.
03:09 Pourquoi ce n'est pas installé ?
03:10 Eh bien, c'est une question de moyens.
03:12 De budget, de moyens, tout le monde ferme les yeux.
03:16 Mais voilà, à foie, ils l'ont fait, il n'y a plus de projections.
03:18 Voilà, s'il n'y en a plus de projections, le trafic va prendre un sacré coup.
03:22 Alors, on entendait tout à l'heure sur notre antenne vos collègues de FO Justice,
03:26 qui visiblement disent que la prison de Perpignan,
03:29 la sécurité dans cette prison n'est pas pire qu'ailleurs.
03:32 En tout cas, les colis balancés par-dessus les murs,
03:35 c'est un petit peu les mêmes problèmes, par exemple, à Béziers ou à Seyss.
03:38 Vous êtes d'accord ?
03:40 Oui, après, Perpignan, évidemment, n'est pas le seul à avoir ce genre de problèmes.
03:44 C'est un problème récurrent, mais comme je vous ai dit tout à l'heure,
03:46 c'est un problème même national.
03:48 Mais évidemment, toutes les prisons sont logées à la même institution.
03:51 Mais Perpignan, comme je vous l'ai dit,
03:53 c'est la prison la plus surpopée.
03:55 Donc, automatiquement, ça se multiplie, les incidents.
03:58 Il est 8h au mois d'ici, sur France Bleu Roussillon.
04:00 Notre invité, Suzanne Chaudjahi.
04:02 Pierre Grousset, secrétaire du syndicat de surveillants pénitentiaires UFA-PUNSA,
04:05 justice dans les Pyrénées-Orientales.
04:07 Concernant les détenus violents, la semaine dernière, par exemple,
04:10 un détenu qui souffre de troubles psy a sorti un couteau,
04:13 une lame de 27 cm, dans la cour de promenade.
04:16 Il a menacé les surveillants.
04:18 Résultat, à la demande des syndicats, il a été transféré à la prison de Seyss,
04:21 près de Toulouse, si je ne me trompe pas.
04:24 Vous réclamez la création de nouvelles unités pour ces détenus violents
04:28 ou radicalisés, comme vous le disiez tout à l'heure ?
04:31 Avec le couteau, il a sorti dans la cour de promenade.
04:33 C'était une lame de 15 cm, le couteau faisait 25 cm, pour rétablir exactement.
04:37 Et il a été maîtrisé par les autres détenus.
04:40 En fait, il a annoncé qu'il allait au quartier d'isolement
04:43 pour se venger des personnels qui y étaient.
04:47 C'est pour ça qu'après, on vous a rappelé les incidents qui se sont déroulés,
04:52 en essayant notamment de couper les détenus à travers la place Menottes.
04:55 Et effectivement, il faut des unités pour détenus violents.
04:58 Mais à l'heure actuelle, il faut l'accord du détenu
05:01 pour qu'ils aillent à l'unité de détenus violents.
05:03 On marche sur la tête en France.
05:04 On leur pose la question ?
05:05 Un débat contradictoire.
05:07 Et s'il est trop violent, on leur envoie une détention classique.
05:10 Non, il faut des unités pour détenus violents,
05:12 pour tous les détenus qui présentent des troubles psy,
05:14 qui sont dangereux pour les personnels, et sans limite de temps.
05:17 Parce que là, à Perpignan, il n'y en a pas, des unités spéciales.
05:19 Non, il n'y en a pas. Il y a 8 places pour toute l'Occitanie, à la prison de Seyss.
05:23 Et il y en a de plus en plus, selon vous, des détenus violents, comme ça ?
05:27 Oui, parce qu'il y a de plus en plus de troubles psy.
05:29 Ça coûte moins cher une place de prison qu'une place à l'hôpital psy.
05:34 Donc, on a de plus en plus de détenus qui sont perturbés psychologiquement.
05:38 Et donc, on peut leur mettre au quartier disciplinaire.
05:42 Alors, on les met au quartier disciplinaire.
05:43 Quand le psy ne les sort pas, et après, qu'est-ce qu'on en fait ?
05:45 On les met au quartier d'isolement.
05:47 Et là, ça devient infernal pour les personnels qui y travaillent.
05:50 On dit aussi qu'on manque de surveillants à la prison de Perpignan. Combien ?
05:54 À l'heure actuelle, il en manque 14.
05:57 Donc, sur un effectif de 203, il nous manque...
06:01 On a 189 surveillants.
06:04 Et en août, on sera en moins de 30.
06:07 Et c'est quoi le problème, en fait ? Plus personne ne veut devenir surveillant ?
06:10 Non, on voit à l'image de toutes les professions,
06:14 à l'image de tous les fonctionnaires d'État,
06:17 on le voit bien dans l'éducation nationale, dans la police,
06:20 et dans la santé, ils ont du mal à le recruter.
06:21 Mais nous, les personnels pénitentiaires, on ne fait rêver personne.
06:24 C'est un métier difficile, et on n'arrive pas à le recruter.
06:27 Est-ce que la nouvelle prison pourrait arranger les choses ?
06:30 La nouvelle prison qui est prévue à Rivezalte d'ici 3 ans.
06:33 Est-ce que vous voyez ça un peu comme la lumière au bout du tunnel ?
06:35 Alors, effectivement, bien sûr, d'avoir une nouvelle prison,
06:38 ça nous fera des places supplémentaires.
06:40 Donc, on espère que ça va résorber.
06:42 Mais le problème, c'est que, vous le voyez tout le temps,
06:45 les chiffres qui sont annoncés par le ministère,
06:47 on est en constante augmentation au niveau des détenus.
06:50 Donc, j'ai peur que, quand elle va ouvrir,
06:52 on soit rapidement de nouveau en difficulté.
06:55 Parce qu'elle ne pourra pas contenir tous les détenus
06:57 qui sont déjà à la prison de Perpignan ?
06:59 Je pense qu'on aura une récalculée peut-être d'un an ou un an et demi,
07:02 mais après, ça va repartir.
07:04 La maison d'arrêt de Perpignan, qui passera à l'heure actuelle de 130 places,
07:09 qui passera à 500 places, je pense qu'à un moment donné,
07:12 de nouveau, on sera obligé de doubler les détenus.
07:14 Je rappelle que depuis 1875,
07:16 c'est un cellulaire individuel en France, normalement.
07:18 Merci Pierre Grosset, vous êtes le secrétaire du syndicat de surveillants pénitentiaires
07:22 UFAP, UNSA, Justice dans les Pyrénées-Orientales.
07:25 A bientôt.

Recommandée