• il y a 8 mois
A quelques semaines des élections européennes, le processus législatif de l'Union peut paraître long et complexe. Presque un peu opaque. Pourtant les 705 eurodéputés des 27 pays jouent un rôle capital.
Quel est leur quotidien dans un parlement où tout est question de coalition ? Comment travaillent-t-ils ? Et si l'extrême droite l'emportait en juin prochain ? Durant des semaines, nous avons suivi trois eurodéputés français qui comptent à Bruxelles, et qui ont trois visions de l'Europe : Fabienne Keller, membre de Renew, le camp présidentiel, Karima Delli, député écologiste et Jean-Paul Garraud membre du RN, et souverainiste.
Plongée au coeur du parlement européen. La fabrique de la loi pour 450 millions de citoyens. Un reportage de Céline Crespy, Hélène Bonduelle et Clément Perrouault.

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Transcription
00:00 ...
00:03 -Le Parlement européen,
00:05 qui va être renouvelé en juin prochain,
00:08 est le coeur bâton de la démocratie en Europe.
00:11 ...
00:14 Tantôt à Bruxelles, tantôt à Strasbourg,
00:17 il rassemble 705 députés de 27 pays membres.
00:22 ...
00:26 -Parce que là, il faut que ça passe.
00:28 -Si on veut que les Allemands votent comme nous.
00:32 -Karima Dehli est députée européenne depuis 15 ans.
00:36 -Allez, faut y aller. -On y va ?
00:38 -On y va.
00:39 Musique douce
00:41 -Elle est élue écologiste...
00:43 ...
00:44 Et elle connaît par coeur les rouages du système
00:47 et les écueils à éviter.
00:49 ...
00:57 -Le lieu qu'est le Parlement européen, ici, à Bruxelles,
01:00 c'est vraiment le temple de la fabrication minutieuse de la loi.
01:05 Tout se joue à coups de virgules, de mots.
01:09 Faites juste attention aux traductions.
01:11 Très important, les traductions.
01:13 Un mot en anglais, ça veut pas forcément avoir le même mot en français.
01:18 -Ca va ?
01:19 -Elle sait aussi que le Parlement n'est qu'un maillon
01:22 d'une chaîne de décision compliquée.
01:24 Car ce n'est pas le Parlement qui décide des thèmes étudiés.
01:29 ...
01:31 C'est le Conseil européen,
01:33 c'est-à-dire les 27 chefs d'Etat et de gouvernement
01:36 comme Emmanuel Macron, qui lancent les thèmes de réflexion.
01:39 Ensuite, la Commission européenne,
01:42 avec ses 27 commissaires et sa présidente,
01:44 Ursula von der Leyen,
01:46 écrit une première ébauche de texte.
01:48 C'est à ce moment-là que le Parlement intervient.
01:52 Mais pas tous les députés.
01:54 D'abord en commission,
01:55 c'est-à-dire en petits groupes spécialisés par thème.
01:59 Nous sommes ici,
02:01 dans la Commission des transports, que préside Karima Dehli.
02:05 ...
02:07 -Ca va, Niels ?
02:08 -Ca va très bien.
02:10 -Nous avons un problème de fond.
02:12 Comment souhaite-t-il qu'un billet d'avion soit moins cher
02:15 qu'un billet de train ou un abonnement dans le transport public ?
02:19 Ce n'est pas normal !
02:20 -Mais après ce travail,
02:22 le processus n'est pas terminé.
02:25 ...
02:27 -Une fois que c'est la Commission des transports qui a tranché,
02:31 qui a fait le travail de fourmi,
02:33 le texte législatif,
02:34 c'est renvoyé en plénière,
02:36 et là, la plénière va voter la position du Parlement.
02:40 -Pour que le texte soit définitivement adopté,
02:43 il doit être voté en même temps
02:45 par le Conseil de l'Union européenne,
02:48 c'est-à-dire les 27 ministres chargés du thème étudié.
02:53 -Alors, dans ce long processus,
02:55 quel est le quotidien des députés européens ?
02:58 Comment travaillent-ils ?
02:59 Le Parlement pourrait-il changer de visage en juin prochain ?
03:03 Pendant plusieurs semaines, nous avons suivi
03:06 trois eurodéputés.
03:07 Cari Madeli, du groupe écologiste.
03:10 Fabienne Keller, de Renew,
03:13 l'équivalent de Renaissance au Parlement européen.
03:16 Et Jean-Paul Garraud, du groupe Identité et démocratie,
03:20 au siège le Rassemblement national.
03:22 Plongée au coeur du Parlement européen,
03:28 la fabrique de la loi pour 450 millions de citoyens.
03:32 Le quotidien d'un eurodéputé,
03:42 c'est d'abord de faire des visites de terrain
03:45 pour voir ce qui marche bien et l'étendre à toute l'Union.
03:50 -Fabienne Keller travaille sur le pacte Asile et Migration,
03:54 un texte pour ne pas revivre la crise migratoire de 2015.
03:58 Elle visite un centre d'accueil de migrants
04:01 ouvert près de Bruxelles.
04:03 -Ah oui, chacun à sa porte.
04:07 Un, deux, trois, quatre, cinq, six, ouais.
04:09 C'est pas mal.
04:12 -Un centre adapté aux familles de demandeurs d'asile
04:15 avec des enfants.
04:16 Un centre modèle.
04:19 -Vous parlez français ?
04:21 -Non. -Bonjour, madame.
04:22 -Une famille dans la...
04:24 -Vous parlez quelle langue, madame ? Persan ou arabe ?
04:27 -C'est l'arabien.
04:29 -Ah, c'est de l'arabien !
04:30 Et d'où est-ce que vous venez, madame, avec vos enfants ?
04:34 De quel pays ?
04:35 -Je viens d'Azouz.
04:36 -Je viens d'Azouz, je suis de Syrie.
04:39 -De Syrie.
04:40 -De Syrie.
04:41 Et alors, vous avez fait la demande d'asile ?
04:44 -Oui. Et moi, avec les deux enfants, j'ai demandé l'asile.
04:47 -Ils sont à l'école, ici ?
04:49 -Oui, vous allez m'adresser.
04:51 -Oui, ils vont à l'école.
04:52 -Mais la plupart des résidents ont été déboutés.
04:55 Ils vont devoir quitter la Belgique.
04:57 On leur garantit des conditions de vie dignes
05:00 avec un but très précis,
05:02 les préparer au retour.
05:04 -Il fait le cuisinier lui-même.
05:06 Il reçut une carte de vie de retraite.
05:09 -D'accord.
05:10 -Une carte bancaire.
05:11 -Une femme avec un enfant,
05:13 je pense que c'est 80 euros par semaine.
05:15 -Oui, oui.
05:17 -C'est l'objectif, ici, de leur faire accepter
05:20 la décision qui a été prise et qu'ils considèrent...
05:23 -C'est votre travail.
05:24 -C'est votre travail.
05:26 -Quand ce sont des réfugiés qui demandent l'asile,
05:29 c'est plus clair, c'est plus facile,
05:31 mais quand ce sont des familles qui sont déjà pour des années,
05:34 c'est plus difficile pour expliquer
05:36 que vous devez retourner à votre pays.
05:40 -Parce qu'ils n'imaginent plus leur rentrée.
05:43 C'est important d'avoir des procédures rapides.
05:46 -Ca sert à ne pas attendre trop longtemps.
05:48 -Visiter, ce qui marche, car en matière d'asile,
05:53 les idées préconçues s'avèrent souvent totalement fausses.
05:57 -Allez, go.
05:58 -Dans certains pays, on les badmène en se disant
06:01 qu'ils vont repartir, qu'ils ne reviendront pas.
06:04 Mais ça ne fonctionne pas.
06:06 -Tout à fait. C'est essentiel, c'est exactement ce que vous dites.
06:09 Il faut les respecter, ils n'ont rien fait de mal,
06:12 juste chercher une meilleure vie pour eux-mêmes, pour leur famille.
06:16 Mais nous ne pouvons pas accueillir tous les ressortissants
06:19 de toutes ces zones qui sont en difficulté.
06:22 Donc on leur explique.
06:23 C'est important pour qu'ils n'aient pas l'idée de revenir.
06:27 Si on les retourne dans leur pays d'origine
06:29 pour qu'ils reviennent rapidement, ça n'a aucun sens.
06:32 Et puis, si nous gérons nos procédures plus rapidement,
06:36 on évitera qu'ils se projettent dans une vie en Europe.
06:39 -Merci, au revoir.
06:42 -L'idée est aussi de mieux enregistrer les réfugiés
06:45 dès leur entrée en Europe pour un meilleur suivi.
06:48 Le pacte devrait être voté avant les élections de juin prochain,
06:52 après cinq ans de travail.
06:55 Les visites de terrain servent aussi à montrer que l'Europe est là
07:00 quand les Etats n'en font pas assez.
07:02 Douhaie, dans les Hauts-de-France,
07:07 une région inondée trois fois en deux mois
07:10 et des laissés-pour-compte,
07:12 les transporteurs de marchandises sur les fleuves et les canaux
07:15 qui ont dû stopper toute activité.
07:18 Un problème que Karim Adeli veut essayer de régler.
07:22 -Qu'est-ce qui s'est passé durant ces deux mois ?
07:26 -On a été bloqués pendant une fois quatre semaines
07:30 et une fois deux semaines.
07:31 -D'accord. -Pour ces causes d'inondation.
07:35 -D'inondation.
07:36 -Parce qu'en fait, leur seul moyen d'évacuer les eaux
07:40 à terre, ils ont trouvé le moyen de mettre des pompes
07:44 pour évacuer en mer, dans les écluses,
07:48 donc de couper la navigation.
07:50 -Donc, vous vous souvenez,
07:52 c'est grâce aussi un peu à l'Europe,
07:54 avec les pompes notamment venant des Pays-Bas, des Tchèques,
07:58 on a aidé justement à faire que le pompage soit là,
08:01 heureusement, parce qu'on n'avait pas ni le matériel humain
08:04 ni le matériel technique.
08:05 Maintenant, vous, vous êtes resté là.
08:08 La véritable question, c'est que vous êtes resté à quai,
08:11 mais qui vous a indemnisé ?
08:12 -Personne. -Ah.
08:14 -Vu la situation, si on n'a pas des aides,
08:17 le métier de maraînier,
08:19 il y a beaucoup d'entreprises qui fermeront.
08:21 -C'est pour ça que je suis là.
08:23 On va voir ensemble comment on va faire pour vous aider.
08:26 -Mais la députée ne veut pas se contenter
08:30 de gérer ce problème d'indemnisation.
08:33 -C'est des vies, derrière.
08:36 -Monsieur le maire, bonjour.
08:39 -Ca va ? -Oui.
08:40 -Ca va ? -Ca va ?
08:41 -Bienvenue.
08:42 -Merci de ton temps et de nous accorder...
08:45 -On va t'accueillir.
08:47 -Ouais, merci. On y va ?
08:49 Allez. Hop.
08:50 -Le quartier de la Bâtelerie, le premier port bâtelier
08:53 au nord de la France.
08:55 -Bonjour. -Bonjour, madame.
08:56 -Elle estime que la France n'en fait pas assez
08:59 pour développer le transport fluvial.
09:02 Pourtant, une solution d'avenir.
09:05 -Bonjour. -Bonjour.
09:06 -Le bagnole, c'est vu tout à l'heure.
09:08 -Nous sommes très écologiques, on ne pollue très peu.
09:12 À l'attente de transporter, on fait 5 fois moins que la route.
09:16 À l'attente de transporter, on va...
09:18 Les délais de parcours, ils sont égaux.
09:21 On est très rapides.
09:23 Il ne faut pas dire que la vado, c'est long.
09:25 -Cette affaire, elle me brise le coeur.
09:28 Parce que moi, je suis présidente de la commission de transport
09:31 et de tourisme au sein du Parlement européen.
09:34 -Elle va leur rappeler que l'Europe a pour ambition
09:37 de développer le transport par bateau
09:40 et taxer celui par la route.
09:42 Sauf que l'Etat français traîne les pieds
09:44 à appliquer les décisions européennes.
09:47 -Très simplement, moi, j'ai mis en place,
09:51 j'ai fait adopter une revendevance poids-lourd,
09:54 le principe pollueur-payeur. Plus ça roule, plus vous payez.
09:57 Les camions devraient payer.
09:59 En Allemagne, on a une taxe poids-lourd.
10:01 En Suisse, on a une taxe poids-lourd.
10:03 Là, les Belges, ils ont deux fer, vous voyez.
10:07 Et nous, on n'a pas de taxe poids-lourd.
10:09 En France, il n'y a pas de taxe poids-lourd.
10:12 C'est un manque à gagner de 1,3 milliard d'euros.
10:14 Tous les camions passent par chez nous.
10:17 Nous, on passe ailleurs et on n'a pas de taxe poids-lourd.
10:20 Quand un camion français va en Allemagne,
10:22 il paie une taxe. Il va pas s'arrêter à la frontière.
10:25 C'est ça, l'Europe, ce sont les échanges.
10:27 -Cette décision européenne nécessite en fait d'être transposée
10:31 dans le droit français pour être appliquée,
10:33 car c'est une directive.
10:35 Mais ce n'est pas toujours le cas.
10:38 La plupart du temps, les lois européennes
10:41 sont des règlements et n'ont pas besoin d'une transposition.
10:44 C'est bien ce que conteste l'eurodéputé Jean-Paul Garraud.
10:48 Membre du RN, il siège dans le groupe
10:51 d'extrême droite Identité et démocratie.
10:53 Souverainiste convaincu, il estime que la France
10:57 n'est plus maître de son destin.
10:59 ...
11:02 -Ces règlements s'appliquent directement
11:05 dans les Etats membres sans passer par les parlements nationaux.
11:09 Et là, en matière agricole, en matière de santé,
11:13 dans de nombreux règlements Covid à l'époque, etc.,
11:17 tout ceci s'applique sans que le Parlement national soit consulté.
11:20 -Autant dire que Jean-Paul Garraud s'élève
11:23 contre le texte porté par Fabienne Keller sur la migration.
11:27 -Voilà, le pacte asile-migration.
11:29 Une grande journée de rendez-vous.
11:31 -Jusqu'à présent, l'asile était géré par chaque Etat.
11:35 Si le nouveau pacte est voté, les règles seront communes
11:39 et tous les pays devront accueillir des migrants.
11:42 -C'est plus par objectif.
11:43 Les objectifs, c'est de mieux maîtriser
11:46 les frontières extérieures et la migration irrégulière.
11:50 Donc, le texte prévoit un enregistrement systématique
11:53 des personnes qui arrivent irrégulièrement.
11:56 Une meilleure répartition, une meilleure solidarité
12:00 pour la gestion des demandes.
12:02 -Un des enjeux essentiels, c'est de répartir les demandeurs d'asile
12:06 qui arrivent en Grèce, en Italie, et veulent une meilleure répartition
12:10 des autres Etats qui ne sont pas très prompts à les accueillir.
12:13 C'est pas évident de trouver des accords européens.
12:16 -Ce n'est pas évident, mais ils ont été trouvés.
12:19 -Trouvés ? Pas totalement.
12:21 En fait, aucun parti ne peut voter seul des textes
12:23 au Parlement européen.
12:25 C'est l'une des fonctions des députés et de former des coalitions.
12:29 Le groupe de Fabienne Keller a besoin des députés socialistes
12:33 et de ceux de droite de tous les pays pour faire passer son texte.
12:37 Et ce matin-là, elle veut vérifier que le compte est bon.
12:41 -Bonjour.
12:42 Salut, Pietro.
12:43 Va bien, hein ? -Va bien.
12:45 -Pietro Bartolo connaît bien le problème des réfugiés.
12:49 Il a été en première ligne médecin-sauveteur à Lampedusa.
12:52 Il est socialiste, a priori favorable au texte.
12:56 Malgré l'ambiance détendue,
12:58 il a une mauvaise nouvelle à annoncer à Fabienne Keller.
13:02 -Ah oui ?
13:03 J'ai quelques problèmes avec mon parti.
13:06 -Ah oui ? -Oui.
13:08 Des problèmes...
13:09 Très importants, parce que...
13:12 Il veut que je vote contre.
13:14 C'est surtout la procédure qui a un problème.
13:18 -Alors, tiens. Je veux te dire que moi, j'étais...
13:22 -Les mineurs. -Oui, les petits.
13:23 Donc, le conseil...
13:25 Le conseil...
13:27 Mais moi, je suis prête à les rencontrer, les ONG.
13:31 -Inquiète pour son projet,
13:33 Fabienne Keller va devoir alerter immédiatement
13:36 la députée allemande responsable du dossier
13:40 pour le parti de droite, le PPE.
13:44 -Ils sont... Piétro, ce matin ?
13:46 -Si on échoue là,
14:07 ce sera parce que les extrêmes auront gagné.
14:10 Elles cherchent à empêcher la solution,
14:14 c'est ce que fait le RN, très clairement,
14:16 en déposant des motions de rejet,
14:19 je ne doute pas qu'ils vont recommencer sur le paquet.
14:22 Donc, je pense que c'est de nature à fragiliser fortement
14:25 l'Union européenne.
14:27 -En réalité, les députés RN, comme Jean-Paul Garraud,
14:31 n'ont pas beaucoup de pouvoir à Strasbourg.
14:33 18 au sein d'un groupe d'extrême droite
14:36 de 62 eurodéputés,
14:38 ils siègent aux côtés des Italiens proches de Matteo Salvini
14:41 ou des Allemands de l'AFD,
14:43 ce parti qui prenait récemment la remigration.
14:46 Et les mots utilisés sont souvent excessifs.
14:49 -Ce qui est incroyable, c'est de voir que...
14:52 -L'Union européenne se comporte en dictature.
14:55 -En ne participant jamais aux coalitions,
14:58 leurs 62 voix n'ont pas de poids
15:00 dans un Parlement européen qui compte 705 sièges,
15:03 sans compter que, dans les faits,
15:06 personne ne veut travailler avec eux.
15:08 -Au bout de 15 ans...
15:10 -Ici, quand nous sommes arrivés en 2019,
15:12 ils ont mis en place un cordon sanitaire.
15:15 C'est le terme qui a été employé.
15:17 Nous aurions dû avoir un certain nombre de postes de responsabilité.
15:20 Nous avons été mis à l'écart.
15:23 Nous, nous sommes dans une opposition,
15:26 une vraie opposition.
15:27 A peu près 60 % des textes qui ont été présentés ici,
15:30 nous avons voté contre.
15:32 -Sur beaucoup de textes,
15:34 les députés d'extrême droite s'abstiennent.
15:36 Ce jour-là, en séance plénière,
15:38 on examine un projet sur des mesures protégeant le thon rouge,
15:42 une espèce longtemps menacée.
15:44 Naturellement, l'écologiste Carima Delli vote pour.
15:48 La macroniste Fabienne Keller, également.
15:52 Jean-Paul Garraud, lui, vote contre.
15:55 Un choix, selon lui, patriote.
16:02 -Nous avons voté contre des mesures nouvelles, coercitives,
16:06 qui allaient mettre en danger la pêche elle-même,
16:09 et nos pêcheurs en particulier.
16:10 -Pêcheurs et agriculteurs,
16:13 le député se veut le porte-parole des mécontents de tous bords.
16:17 En ce moment, la colère gronde dans les campagnes,
16:20 l'occasion d'aller prendre la température.
16:23 -Nous allons sur le terrain
16:25 visiter une exploitation agricole familiale,
16:28 assez traditionnelle,
16:31 qui, évidemment, se retrouve de plein fouet
16:34 confrontée à toutes les difficultés que connaissent nos agriculteurs.
16:38 -J'ai même pas eu le temps de me charger avant de partir.
16:44 Je vais s'assurer, monsieur.
16:46 Alors là, c'est... -C'est les mères.
16:50 -C'est les mères, voilà. -Celles qui ont 3 ans et plus.
16:53 Celles qui ont reçu un dossier d'hiver.
16:55 -Ah oui, d'accord.
17:00 -Je suis en déficit, cette année. Je suis à -14 000, en fait.
17:03 Là, j'ai...
17:05 Les engrais, là, j'ai dépensé 29 000 euros, cette année,
17:08 rien qu'en engrais. C'est un quart de mes dépenses, en fait.
17:11 Et alors qu'il y a 4 ans, c'était 9 000 euros.
17:14 Donc ça a vraiment fait x3. J'en rajoute pas, quoi.
17:17 -Selon elle, l'inflation est la grande responsable
17:20 de la situation, mais elle redoute que l'Europe
17:23 soit en train de faire des choix
17:25 qui condamnent les agriculteurs à terme.
17:29 -Avec l'ouverture... Les traités de libre-échange, déjà,
17:32 de une, où on nous met en concurrence
17:34 avec la Terre entière, plus l'entrée de l'Ukraine
17:37 dans l'Union européenne, pour nous, ça serait un désastre.
17:41 Là, ça serait la fin. Si ce jour-là arrive,
17:43 le mieux à faire, ça serait de vendre au plus vite,
17:46 de tout solder, avant de plus rien avoir du tout,
17:49 que mes vaches perdent toutes leurs valeurs.
17:51 -Mais ce modèle-là, c'est pas du tout le modèle
17:54 que veut l'Union européenne.
17:56 Le modèle de l'Union européenne, c'est un modèle mondialisé.
17:59 C'est un modèle qui est fait pour les très grands groupes
18:02 complètement désincarnés, si je puis dire,
18:05 ultra-libéraux. Donc, ce monde-là,
18:07 ils n'en veulent pas. Et nous, par contre,
18:09 politiquement parlant, à tous les sens du terme,
18:12 ça fait partie de l'identité, de ce qu'est la France.
18:15 -Dans les discours, le député prend la défense
18:18 des petits contre les grands.
18:20 -Et surtout, comptez sur nous.
18:22 -Merci. -Vous aurez des passants.
18:24 -C'est pas l'élection du coup. -Je vais revenir.
18:27 -Mais dans les faits, son groupe a voté
18:29 contre le plafonnement des aides PAC à 150 000 euros
18:32 qui pénaliserait les grosses structures
18:35 pour redistribuer de l'argent aux plus petites,
18:37 estimant que ce montant était trop haut.
18:40 Les agriculteurs s'immiscent dans la campagne des européennes
18:45 et manifestent devant le Parlement à Strasbourg.
18:48 Le groupe de Fabienne Keller ne veut pas que la cause
18:51 soit exclusivement récupérée par l'extrême droite,
18:54 alors elle accepte de recevoir une délégation
18:57 de la coordination rurale.
18:59 -Le Mercosur, ça fait 20 ans qu'il est sur la table
19:03 et qu'il n'avance pas. -Ce qui retarde le Mercosur,
19:06 c'est la France ? -C'est la France.
19:08 Pour l'instant, ça n'avance pas grâce à la France
19:11 et que nous, on met des points de blocage
19:13 qui sont visiblement bloquants. -De toute façon,
19:16 ce qui se joue, c'est la souveraineté alimentaire
19:19 avec les exploitations qu'on a,
19:20 contre des modèles qui seront peut-être
19:23 industriels et financiers, par le biais des importations de main.
19:26 Je pense que, où que vous soyez en Europe,
19:28 on a envie de conserver une agriculture
19:31 qui nous nourrira. C'est maintenant que ça se joue.
19:34 Vous avez un brin de pouvoir ou c'est que la Commission ?
19:37 -C'est nous qui avons fait évoluer les choses,
19:39 c'est ce que Jérémy vous explique.
19:41 -Malgré ces arguments, Fabienne Keller appartient
19:44 au seul groupe politique français qui a voté
19:47 le dernier traité de libre-échange avec la Nouvelle-Zélande,
19:50 contrairement aux RN, aux écologistes
19:53 et à toute la gauche française.
19:55 -On leur dit qu'une chose, reprenez le pouvoir.
19:58 Voilà, c'est ça. Ils sont là,
20:00 c'est des élus qui doivent commander,
20:02 pas les commissions. -Gagner du pouvoir
20:04 face à une commission prédominante,
20:06 c'est ce que veut faire Karima Daly.
20:09 -Hi, nice to see you.
20:14 -Nice to see you. -Everything is OK ?
20:16 -Ecologiste, elle est persuadée qu'il manquait au Green Deal
20:19 un volet vélo pour décarboner durablement nos transports.
20:23 Mais au lieu d'attendre que la Commission lance les projets,
20:26 elle a inversé les choses.
20:29 -Monsieur Rutters, bonjour, la Commission européenne, ça va ?
20:33 -Comment allez-vous ? -Ça va, et toi ?
20:35 -Tout va bien ? -Elle n'est pas peu fière
20:37 d'avoir rallié à sa cause le directeur de l'innovation
20:40 des transports de la Commission européenne.
20:42 -Ça va ? -Oui, ça va.
20:44 -Allez, on va y aller, là. On a bien travaillé, hein ?
20:47 On va devoir y aller. -Ce sont des alliés ?
20:49 -Alors, la Commission européenne,
20:51 qui, après le texte du Parlement européen,
20:54 on l'a un peu poussée à considérer...
20:56 Parce que normalement, le Parlement n'a pas l'initiative de la loi.
21:00 Vous voyez ? C'est normalement la Commission européenne
21:03 qui sort les textes. Là, on a un peu inversé les choses
21:06 pour la première fois. Moi, j'ai un peu poussé, il faut le dire.
21:09 Le texte du Parlement européen va pousser la Commission,
21:12 qui a sorti son propre texte, et on voit que les textes,
21:15 je dis pas qu'ils sont équivalents, mais ils se ressemblent.
21:18 Donc, le but, c'est d'avoir un texte commun
21:21 et d'avoir, maintenant, il fallait chercher
21:23 une majorité au conseil.
21:25 -Hi !
21:26 -Elle joue gros ce jour-là, car entre deux sourires,
21:29 elle doit convaincre les 27 ministres des Transports
21:33 de valider sa stratégie vélo.
21:35 -Great ? No surprise ?
21:37 -Yeah, yeah, yeah. -OK, great.
21:40 Bonjour. -Hi.
21:41 -Bonjour.
21:42 -Qui sont les plus difficiles à convaincre ?
21:44 Qui sont un peu réticents sur la stratégie vélo ?
21:47 -C'est très bizarre, parce qu'on a des pays de l'Est
21:50 qui sont des producteurs de vélo, pourtant,
21:53 et qui sont pas du tout dans cette optique-là.
21:56 Donc, on va voir ce qui va se passer.
21:58 La volonté, c'est d'allier les deux,
22:00 de montrer que l'écologie peut s'allier à l'économie.
22:04 -Son plan prévoit de doubler l'usage du vélo
22:07 d'ici 5 à 10 ans, donc de forcer les Etats
22:10 à construire des infrastructures nécessaires,
22:13 mais aussi de relocaliser la production des deux roues
22:16 partout en Europe.
22:18 -Here ? -Yes.
22:19 -OK.
22:20 Ah, the front of the European Commission
22:23 is very serious.
22:24 Ouh là là !
22:25 Ouh là là !
22:26 -Les négociations vont se passer à huit clous.
22:29 Chaque pays doit s'engager à mettre en place
22:32 des législations en faveur du vélo,
22:34 et rien n'est gagné.
22:35 Mais au bout du compte,
22:37 Carima Delli va avoir gain de cause.
22:39 Le plan vélo est adopté.
22:41 Il sera finalisé en avril prochain.
22:44 Et si le Parlement européen
22:51 changeait totalement de visage après les élections ?
22:55 L'extrême droite est donnée largement vainqueure en France
22:59 comme dans neuf pays de l'Union.
23:01 Au total, les membres du parti de Jean-Paul Garraud
23:05 pourraient obtenir 89 sièges,
23:07 154 si on ajoute ceux de l'autre parti d'extrême droite, l'ECR.
23:12 Les souverainistes deviendraient
23:15 la deuxième force politique
23:17 après le PPE de droite.
23:20 -Bonjour. -Très bien.
23:23 -Je suis la présidente. -Enchanté.
23:25 -Bonsoir.
23:26 -Signe que les eurodéputés d'extrême droite
23:29 s'y voient déjà.
23:30 La visite de ces deux candidats
23:32 sur les listes européennes en Roumanie.
23:35 Ils ne sont que candidats.
23:37 Mais ils viennent déjà faire du repérage.
23:39 -Très heureux de vous voir ici.
23:41 Je vous souhaite la bienvenue dans ce groupe.
23:44 -Alors quel va être le projet européen
23:47 de ce groupe de souverainistes
23:49 où chacun ne défend que l'intérêt de son propre pays ?
23:52 D'ores et déjà, sur le pacte asile et migration,
23:56 l'Italien est président du groupe Marcosani,
23:59 n'est pas du tout d'accord avec Jean-Paul Garraud.
24:02 -Ici, c'est un peu particulier
24:04 parce qu'il y a plusieurs nationalités.
24:06 Il peut arriver que sur certains sujets,
24:08 on ne soit pas en accord.
24:10 Voilà, donc on en parle.
24:12 Ca ne met pas en jeu l'existence du groupe,
24:14 mais on fait état des priorités nationales de chacun.
24:18 Sur le pacte migration-asile,
24:20 il y a quelques différences avec les Italiens, je pense,
24:24 puisque le pacte migration-asile
24:26 est plutôt favorable au premier pays d'accueil.
24:28 Comme c'est souvent l'Italie,
24:30 l'Italie a plutôt tendance à être d'accord avec cela
24:33 parce que, justement, les migrants qui arrivent en Italie
24:36 sont plutôt répartis ailleurs.
24:38 Nous, nous sommes très opposés pour de nombreuses raisons.
24:41 -L'Union européenne, selon le RN, changerait totalement de nature.
24:46 Le parti dit vouloir renégocier les traités
24:48 pour faire de l'Union une sorte d'alliance des nations.
24:52 -Nous ne voulons pas que l'Union européenne
24:57 nous impose à nous, Etats,
24:59 un certain nombre d'obligations
25:01 qui sont du ressort de l'Etat et non pas de l'Union européenne.
25:06 Nous voulons rester maîtres de notre politique
25:08 dans tous les domaines,
25:10 mais nous ne sommes pas contre les coopérations entre Etats.
25:13 -Pour Karim Adeli,
25:15 le vote d'extrême droite n'est qu'un leurre.
25:18 L'Europe peut changer autrement.
25:20 Une victoire des souverainistes déboucherait sur rien.
25:24 -Ne vous faites pas berner par tous ceux qui vont venir,
25:28 notamment sur des questions anti-Macron, anti...
25:31 Ca ne marche pas. Y a pas de programme anti-Macron ici.
25:35 Vous voyez, on est soit pour plus d'Europe,
25:37 donc on rectifie sur énormément de sujets
25:40 la question européenne,
25:42 ou soit on est sur une volonté de détricoter le projet européen.
25:46 Les populistes, c'est très facile de parler haut et fort,
25:49 mais quel a été leur bilan ?
25:51 Comment ont-ils fait pour changer la vie des gens ?
25:54 Ils n'ont rien fait.
25:55 -Fabienne Keller, elle, veut rappeler
25:57 qu'on ne doit pas avoir la mémoire courte.
26:00 L'Europe, c'est protégée quand on en a besoin.
26:03 -Je suis convaincue
26:06 parce que je pratique l'Europe depuis 30 ans.
26:10 J'ai pu voir sa puissance face aux crises.
26:13 C'est là qu'elle est forte.
26:15 La crise de 2008, puis la crise Covid,
26:17 puis le risque de ralentissement qu'on a évité
26:20 en construisant une volonté partagée,
26:23 cette dette commune.
26:24 C'est extraordinaire, c'est historique.
26:27 L'Europe n'est jamais aussi bonne que quand ça va très mal.
26:30 C'est très précieux.
26:32 -Les prochaines élections pourraient changer la donne.
26:35 Elles vont, dans tous les cas,
26:37 redéfinir de nouveaux équilibres.
26:41 ...

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